Cour de cassation, Deuxième chambre civile, 16 mai 2019, 18-14.368, 18-14.369

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2019-05-16
Cour d'appel de Paris
2018-03-21
Cour d'appel de Paris
2018-01-17
Tribunal de grande instance de Créteil
2017-05-02

Texte intégral

CIV. 2 FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 16 mai 2019 Rejet Mme MAUNAND, conseiller le plus ancien faisant fonction de président Arrêt n° 652 F-D Pourvois n° Q 18-14.368 et R 18-14.369 JONCTION R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ I - Statuant sur le pourvoi n° Q 18-14.368, formé par : 1°/ la société Saint-Gobain glass solutions Paris Centre Normandie, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , 2°/ Mme N... V..., domiciliée [...] , 3°/ M. R... H..., domicilié [...] , contre l'arrêt rendu le 17 janvier 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 1, chambre 3), dans le litige les opposant : 1°/ à la société Groupe Averia, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , 2°/ à M. E... O..., domicilié [...] , 3°/ à la société Nealtis, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , 4°/ à la société Groupe Averia, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société Averia distribution, défendeurs à la cassation ; II - Statuant sur le pourvoi n° R 18-14.369, formé par : 1°/ la société Saint-Gobain glass solutions Paris Centre Normandie, société par actions simplifiée, 2°/ Mme N... V..., 3°/ M. R... H..., contre l'arrêt rendu le 21 mars 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 1, chambre 3), dans le litige les opposant : 1°/ à la société Groupe Averia, société par actions simplifiée, 2°/ à M. E... O..., 3°/ à la société Nealtis, société à responsabilité limitée, 4°/ à la société Groupe Averia, société par actions simplifiée, venant aux droits de la société Averia distribution, défendeurs à la cassation ; Les demandeurs au pourvoi principal n° Q 18-14.368 invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; Les demandeurs au pourvoi incident n° Q 18-14.368 invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; Les demandeurs au pourvoi n° R 18-14.369 invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 3 avril 2019, où étaient présentes : Mme Maunand, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Jollec, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller, Mme Mainardi, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme Jollec, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boullez, avocat de la société Saint-Gobain glass solutions Paris Centre Normandie, de Mme V... et de M. H..., de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Groupe Averia, de M. O..., de la société Nealtis et de la société Groupe Averia, venant aux droits de la société Averia distribution, l'avis de M. Girard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Joint les pourvois n° Q 18-14.368 et R 18-14.369 ; Attendu, selon les arrêts attaqués (Paris, 17 janvier et 21 mars 2018), que se plaignant du débauchage de plusieurs salariés, dont Mme V... et M. H..., d'agissements déloyaux de ces derniers au sein d'un établissement de la société Saint-Gobain glass solutions Paris Centre Normandie (la société SGGS) et d'actes de parasitisme et de concurrence déloyale, la société Nealtis, sa filiale la société Groupe Averia, la filiale de celle-ci la société Averia distribution aux droits de laquelle est venue la société Groupe Averia, et M. O... ont saisi un président d'un tribunal de grande instance à fin de voir désigner un huissier de justice pour effectuer diverses mesures sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile ; que la requête ayant été accueillie le 12 janvier 2017, la société SGGS, Mme V... et M. H... ont saisi un juge des référés pour obtenir la rétractation de l'ordonnance, demande à laquelle il a été fait droit par ordonnance du 2 mai 2017 rectifiée le 10 août 2017 ;

Sur le moyen

unique du pourvoi principal n° Q 18-14.368, pris en ses première, quatrième et cinquième branches :

Attendu que la société SGGS, Mme V... et M. H... font grief à

l'arrêt de rejeter la demande de rétractation de l'ordonnance du 12 janvier 2017 et de modifier celle-ci alors, selon le moyen : 1°/ que si l'ordonnance rendue sur requête, organisant une mesure d'instruction in futurum, peut être motivée par référence à la requête, le juge de la rétractation ne peut suppléer aux carences de celle-ci, en y découvrant lui-même une motivation circonstanciée qui n'y figurait pas ; qu'en ayant fait « parler » la requête présentée le 11 janvier 2017 par le groupe Averia, en y découvrant une motivation circonstanciée, quand elle se contentait de se référer, sans autre justification concrète, concernant la nécessité de déroger au principe de la contradiction, « au risque de destruction de données informatiques, numériques ou électroniques, par essence furtives, et/ou susceptibles d'être aisément détruites ou altérées », la cour d'appel a violé les articles 145, 493 et 495 du code de procédure civile ; 2°/ qu'une mesure d'investigation ordonnée au domicile de salariés doit être strictement proportionnée au but probatoire poursuivi et mesurée à l'aune de l'atteinte au secret de la vie privée des salariés concernés ; qu'en se fondant, pour ordonner une mesure d'investigation au domicile de deux anciens salariés du groupe Averia, sur le simple « caractère itinérant » de leurs fonctions, la cour d'appel a violé les articles 8 de la Convention des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 145 du code de procédure civile ; 3°/ qu'une mesure d'investigation in futurum ordonnée, sur une simple suspicion d'actes de concurrence déloyale, au domicile d'anciens salariés, ne doit pas porter une atteinte excessive au secret de leur vie privée ; qu'en jugeant que la mesure d'investigation ordonnée au domicile d'anciens salariés était proportionnée, au seul motif « qu'il n'était pas question dans l'ordonnance d'étendre la mesure aux ordinateurs de leurs conjoints », la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 8 de la Convention des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 145 du code de procédure civile ;

Mais attendu

, d'une part, qu'ayant constaté que la requête visait des données informatiques, numériques ou électroniques par essence furtives et susceptibles d'être aisément détruites ou altérées et exposait que deux des anciens responsables du groupe Averia avaient été embauchés par la société SGGS dont l'un d'entre eux avait transmis ses nouvelles coordonnées professionnelles, ce qui justifiait que la mesure ne soit pas prise contradictoirement eu égard au risque de destruction des documents si les intéressés étaient avertis de la mesure ordonnée, la cour d'appel en a exactement déduit que les circonstances établissant la nécessité de déroger au principe de la contradiction étaient établies ; Et attendu, d'autre part, qu'après avoir énoncé que le respect de la vie privée ne constitue pas en lui-même un obstacle à l'application de l'article 145 du code de procédure civile et qu'eu égard aux fonctions itinérantes des intéressés, l'exécution de la mesure à leurs domiciles qui ne prévoyait pas d'extension aux ordinateurs des conjoints ne portait pas une atteinte disproportionnée à leur vie privée, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ; Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen unique du pourvoi principal n° Q 18-14.368 pris en ses deuxième, troisième, sixième et septième branches, et sur le moyen unique du pourvoi incident n° Q18-14-368, annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Et sur le moyen

unique du pourvoi n° R 18-14.369, tel que reproduit en annexe :

Attendu que la société SGGS, Mme V... et M. H... font grief à

l'arrêt de dire n'y avoir lieu à rectifier l'ordonnance de référé du 2 mai 2017 ;

Mais attendu

que le rejet du pourvoi n° Q 18-14.368 rend sans portée le moyen qui invoque une cassation par voie de conséquence ;

PAR CES MOTIFS

: REJETTE les pourvois ; Condamne la société Saint-Gobain glass solutions Paris Centre Normandie, Mme V... et M. H... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize mai deux mille dix-neuf

MOYENS ANNEXES

au présent arrêt Moyen produit au pourvoi principal n° Q 18-14.368 par la SCP Boullez, avocat aux Conseils, pour la société Saint-Gobain glass solutions Paris Centre Normandie, Mme V... et M. H.... Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR rejeté la demande de rétractation de l'ordonnance sur requête du 12 janvier 2017 et modifié celle-ci sur le seul point suivant : « « (...) - accéder aux dossiers papier et aux ordinateurs fixes et/ou portables ainsi qu'à tout support informatique (de type unité de stockage), moyen de communication de type smartphone, tablette, agenda, support papier appartenant ou utilisés par M. R... H... , Mme J... K... et Mme N... V... et, si nécessaire, accéder à leur boîte email professionnelle (...) et prendre copie sur quelque support que ce soit (papier, informatique, numérique ou autre) des noms et coordonnées des clients démarchés parmi la liste des relancés par Mme V... dont les adresses email suivent au tiret ci-dessous, ainsi que des propositions commerciales, bons de commande, factures et éléments de chiffre d'affaires réalisés par le site d'Alfortville avec ces clients communs entre le 1er novembre 2016 et la date d'exécution de la mesure ; (...) » ; AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article 145 du code de procédure civile, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé ; qu'il résulte des articles 496 et 561 du code de procédure civile que la cour d'appel, saisie de l'appel d'une ordonnance de référé statuant sur une demande de rétractation d'une ordonnance sur requête prescrivant des mesures d'instruction destinées à conserver ou à établir, avant tout procès, la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, est investie des attributions du juge qui l'a rendue devant lequel la contradiction est rétablie ; qu'elle est tenue d'apprécier elle-même, au jour où elle statue, les mérites de la requête au regard de l'existence d'un motif légitime à ordonner la mesure probatoire et des circonstances justifiant de ne pas y procéder contradictoirement ; que cette voie de contestation n'étant que le prolongement de la procédure antérieure, elle doit statuer en tenant compte de tous les faits s'y rapportant, ceux qui existaient au jour de la requête mais aussi ceux intervenus postérieurement à celle-ci ; qu'elle doit ainsi apprécier l'existence du motif légitime au jour du dépôt de la requête, à la lumière des éléments de preuve produits à l'appui de la requête et de ceux produits ultérieurement devant elle ; que l'ordonnance sur requête étant, aux termes de l'article 493 du code de procédure civile, une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse, elle doit également rechercher si la mesure sollicitée exigeait une dérogation au principe de la contradiction ; que les circonstances justifiant cette dérogation doivent être caractérisées dans la requête ou l'ordonnance qui y fait droit qui peut se contenter de s'y référer ; que, s'agissant des circonstances susceptibles de justifier qu'il soit dérogé au principe de la contradiction, il convient de relever que la requête présentée le 11 janvier 2017 dont l'ordonnance adopte expressément les motifs ne se contente pas d'indiquer spécifiquement sur ce point qu'"il est évident, s'agissant en partie de données informatiques, numériques ou électroniques par essence furtives et/ou susceptibles d'être aisément détruites ou altérées, que cette demande ne peut être présentée de façon contradictoire" ; qu'elle expose également précédemment les conditions dans lesquelles notamment deux de ses anciens responsables de site, Mme V... et M. H..., ont été embauchés par la société SGGS en qualité respectivement de technico-commerciale itinérante et de directeur d'un nouvel établissement créé à proximité d'un de ses sites qui exploite sous l'enseigne Glassolutions, et établit que Mme V... a adressé le 8 décembre 2015 à tous ses anciens clients chez Averia un courriel leur transmettant ses "nouvelles coordonnées professionnelles" ; que l'ensemble de ces éléments justifiaient que soient recherchés sur les ordinateurs des intéressés les documents sur lesquels figuraient notamment "Averia" et sur la boîte e-mail de Mme V... les courriels qu'elle avait pu par la suite adresser à ses anciens contacts, et ce, sans que la mesure soit prise contradictoirement eu égard au risque de destruction desdits documents si les intéressés étaient avertis de la mesure ordonnée, ce qui caractérisait l'existence de circonstances propres à l'espèce susceptibles de justifier qu'il soit dérogé au principe de la contradiction ; que, s'agissant du motif légitime de conserver ou d'établir la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige par la mesure d'instruction litigieuse, il convient de rappeler que le groupe Saint-Gobain, après avoir été en contact via ses sociétés Glas solutions France puis Saint-Gobain Glass France pendant de longs mois avec le groupe Averia dont il envisageait le rachat, au point de signer à deux reprises un "engagement de confidentialité", les 17 octobre 2013 et 11 mars 2016, aux fins de ne pas utiliser les informations confidentielles à son sujet dont il avait connaissance à cette occasion, a, en novembre 2016, créé un site directement concurrent de celui d'Averia à Vitry- sur-Seine situé à trois kms de celui-ci à Alforville, composé de sept salariés dont quatre anciens salariés d'Averia Distribution ; que celle-ci a constaté une baisse significative de son chiffre d'affaires à la suite de ces faits qu'elle qualifie de concurrence déloyale et de parasitisme ; qu'il n'est pas sérieux de soutenir à cet égard que SGGS Paris Centre Normandie n'étant pas directement partie aux pourparlers, elle ne pouvait s'être fait remettre des documents obtenus de manière confidentielle par le groupe Saint-Gobain dont elle fait partie ; qu'indépendamment même de l'originalité du concept du groupe Averia sur laquelle il n'appartient pas à la présente juridiction de se prononcer, il convient de relever que l'identité d'activité et la proximité du site concurrent créé avec l'aide des anciens salariés d'Averia ne peut que créer une confusion dans l'esprit d'une clientèle dont il importe alors de déterminer si elle a été démarchée par SGGS ; qu'il existe donc un motif légitime à la mesure d'instruction ordonnée, sans que la présente juridiction ait, là encore, à se prononcer sur le bien-fondé des prétentions des requérants ; que s'agissant de la licéité de la mesure ordonnée et de son caractère proportionné, il convient de relever d'abord qu'en permettant à l'huissier désigné de prendre copie "des propositions commerciales, bons de commande, factures et éléments de chiffre d'affaires réalisés par le site d'Alfortville", le juge des requêtes a autorisé, comme il est justement soutenu en défense, une enquête portant atteinte au secret des affaires puisqu'elle vise des informations stratégiques portant sur la globalité du portefeuille clients du concurrent direct de la requérante, alors que la mission ne visait qu'à déterminer si la société SGGS utilisait des documents ou fichiers relatifs aux clients d'Averia ; qu'ainsi, même si elle est limitée au seul établissement secondaire d'Alfortville et aux seuls ordinateurs professionnels des anciens salariés d'Averia ainsi qu'à deux mois et demi d'activité, elle n'est pas proportionnée au but poursuivi ; qu'il convient donc, en application de l'article 497 du code de procédure civile, de limiter la mesure aux seuls clients communs, afin d'établir en premier lieu la liste de ceux-ci, à partir des noms visés dans l'ordonnance des 29 clients sollicités par Mme V..., la requérante n'en ayant pas fourni d'autres, en second lieu le chiffre d'affaires réalisé avec eux à partir des prix pratiqués pour rechercher la prétendue politique agressive des prix pratiquée ; que s'agissant ensuite de la partie de la mesure autorisée aux domiciles des salariés concernés, il convient de relever que le respect de la vie privée ne constitue pas en lui-même un obstacle à l'application de l'article 145 du code de procédure civile, dès lors que la mesure procède d'un motif légitime et est nécessaire à la protection des droits du requérant ; que compte tenu du caractère itinérant des fonctions des intéressés dont il était justifié, l'exécution de la mesure à leurs domiciles privés, afin de prendre connaissance de leurs ordinateurs ne portait pas atteinte de façon disproportionnée à leur vie privée, étant précisé qu'il n'était pas question dans l'ordonnance d'étendre la mesure aux ordinateurs de leurs conjoints et que les circonstances de l'exécution des mesures sont étrangères à la validité de la décision les ordonnant ; qu'il convient en conséquence de rejeter la demande de rétractation de l'ordonnance sur requête du 12 janvier 2017 et d'infirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ; qu'en dernier lieu, l'instance en rétractation ayant pour seul objet de soumettre à un débat contradictoire les mesures initialement ordonnées à l'initiative d'une partie en l'absence de son adversaire, la saisine du juge de la rétractation se trouve limitée à cet objet et les demandes incidentes sont donc irrecevables devant lui, se rattacheraient-elles par un lien suffisant à la demande soumise au juge des requêtes ; que tel ne serait pas le cas si le juge des requêtes s'était réservé compétence pour statuer sur la mainlevée du séquestre qu'il a ordonné, dans le cadre d'un débat contradictoire restitué, rendant ainsi recevable la demande reconventionnelle de mainlevée du séquestre formée par la société requérante sur laquelle le premier juge a statué par une ordonnance rectificative dont il a été interjeté un appel distinct, mais qu'en l'espèce, le juge de la requête a, à la fin de l'ordonnance du 12 janvier 2017, précisé : "Disons que les informations et documents recueillis seront séquestrés par l'huissier jusqu'à ce que la juridiction des référés soit saisie afin de débattre contradictoirement de leur devenir", si bien que par cette formulation, il a renvoyé non pas au juge de la rétractation mais au juge des référés l'examen de la question ; que la demande d'ouverture du séquestre est en conséquence doublement irrecevable devant la présente juridiction ; 1°) ALORS QUE si l'ordonnance rendue sur requête, organisant une mesure d'instruction in futurum, peut être motivée par référence à la requête, le juge de la rétractation ne peut suppléer aux carences de celle-ci, en y découvrant lui-même une motivation circonstanciée qui n'y figurait pas ; qu'en ayant fait « parler » la requête présentée le 11 janvier 2017 par le groupe Averia, en y découvrant une motivation circonstanciée, quand elle se contentait de se référer, sans autre justification concrète, concernant la nécessité de déroger au principe de la contradiction, « au risque de destruction de données informatiques, numériques ou électroniques, par essence furtives, et/ou susceptibles d'être aisément détruites ou altérées », la cour d'appel a violé les articles 145, 493 et 495 du code de procédure civile ; 2°) ALORS QU'une mesure d'instruction in futurum ne peut être ordonnée sur requête que dans la stricte mesure du risque de dépérissement des preuves ; qu'en ayant, sur la simple suspicion d'un détournement de clientèle imputé à deux anciens salariés, ordonné sur requête, donc dans le cadre d'une procédure non-contradictoire, une mesure d'investigation générale permettant à l'huissier commis d'accéder, concernant le nouvel employeur de ces deux anciens salariés et une autre salariée, Mme J... K..., à d'autres supports que l'outil informatique et, en particulier, à des dossiers papier de l'entreprise pour lesquels aucun risque de volatilité de la preuve n'existait, la cour d'appel a violé les articles 145 et 493 du code de procédure civile ; 3°) ALORS QUE le juge de la rétractation qui modifie l'étendue d'une mesure d'instruction in futurum précédemment ordonnée et exécutée est nécessairement saisi de la nullité de celle-ci qui ne trouve plus son support dans l'autorisation provisoirement donnée par le juge ; qu'en ayant omis de constater la perte de fondement juridiquement et consécutivement la nullité de la mesure d'investigation ordonnée par le juge des requêtes et dont l'étendue a été modifiée par elle, saisie comme juge de la rétractation, la cour d'appel a violé les articles 145 et 497 du code de procédure civile ; 4°) ALORS QU'une mesure d'investigation ordonnée au domicile de salariés doit être strictement proportionnée au but probatoire poursuivi et mesurée à l'aune de l'atteinte au secret de la vie privée des salariés concernés ; qu'en se fondant, pour ordonner une mesure d'investigation au domicile de deux anciens salariés du groupe Averia, sur le simple « caractère itinérant » de leurs fonctions, la cour d'appel a violé les articles 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme et 145 du code de procédure civile ; 5°) ALORS QU' une mesure d'investigation in futurum ordonnée, sur une simple suspicion d'actes de concurrence déloyale, au domicile d'anciens salariés, ne doit pas porter une atteinte excessive au secret de leur vie privée ; qu'en jugeant que la mesure d'investigation ordonnée au domicile d'anciens salariés était proportionnée, au seul motif « qu'il n'était pas question dans l'ordonnance d'étendre la mesure aux ordinateurs de leurs conjoints », la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 8 de la Convention européenne des droits de l'homme et 145 du code de procédure civile ; 6°) ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en ayant jugé que la mesure d'investigation ordonnée aux domiciles des deux salariés concernés était proportionnée, dès lors qu'il n'était pas question d'étendre la mesure aux ordinateurs de leurs conjoints, sans répondre aux conclusions des exposants, ayant fait valoir (p. 40) que l'ordinateur fixe se trouvant au domicile de M. H... était partagé par les deux conjoints, la cour d'appel a méconnu les prescriptions de l'article 455 du code de procédure civile ; 7°) ALORS QU'une mesure d'instruction in futurum diligentée au domicile privé d'anciens salariés soupçonnés d'actes de concurrence déloyale est disproportionnée, si le consentement et la remise spontanée des éléments de preuve sollicités par l'huissier n'ont pas préalablement été demandés aux requis ; qu'en jugeant la mesure proportionnée, quand l'huissier ayant exécuté la mesure n'avait sollicité, ni le consentement de Mme V... et de M. H..., ni la remise spontanée par eux des documents et fichiers visés dans la mesure, la cour d'appel a violé les articles 8 de la Convention européenne des droits de l'homme et 145 du code de procédure civile. Moyen produit au pourvoi incident n° Q 18-14.368 par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société Groupe Averia, M. O..., la société Nealtis et de la société Groupe Averia, venant aux droits de la société Averia distribution. Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable la demande incidente d'ouverture du séquestre, AUX MOTIFS QUE l'instance en rétractation ayant pour seul objet de soumettre à un débat contradictoire les mesures initialement ordonnées à l'initiative d'une partie en l'absence de son adversaire, la saisine du juge de la rétractation se trouve limitée à cet objet et les demandes incidentes sont donc irrecevables devant lui, se rattacheraient-elles par un lien suffisant à la demande soumise au juge des requêtes ; que tel ne serait pas le cas si le juge des requêtes s'était réservé compétence pour statuer sur la mainlevée du séquestre qu'il a ordonné, dans le cadre d'un débat contradictoire restitué, rendant ainsi recevable la demande reconventionnelle de mainlevée du séquestre formée par la société requérante sur laquelle le premier juge a statué par une ordonnance rectificative dont il a été interjeté un appel distinct, mais qu'en l'espèce, le juge de la requête a, à la fin de l'ordonnance du 12 janvier 2017, précisé : "Disons que les informations et documents recueillis seront séquestrés par l'huissier jusqu'à ce que la juridiction des référés soit saisie afin de débattre contradictoirement de leur devenir", si bien que par cette formulation, il a renvoyé non pas au juge de la rétractation mais au juge des référés l'examen de la question ; que la demande d'ouverture du séquestre est en conséquence doublement irrecevable devant la présente juridiction, 1) ALORS QUE le juge a la faculté de modifier son ordonnance ; qu'en retenant que la demande d'ouverture de séquestre était irrecevable pour n'avoir pas été présentée dès la requête, la cour d'appel a violé les articles 145, 496 et 497 du code de procédure civile ; 2) ALORS QUE l'ordonnance sur requête n'a, à l'égard du juge de la rétractation, aucune autorité de la chose jugée ; qu'en énonçant que la demande de levée du séquestre était irrecevable parce que le juge de la rétractation l'avait réservée au juge des référés, la cour d'appel a fait une fausse application de la chose jugée et a violé l'article 1355 du code civil. Moyen produit au pourvoi n° R 18-14.369 par la SCP Boullez, avocat aux Conseils, pour la société Saint-Gobain glass solutions Paris Centre Normandie, Mme V... et M. H.... Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR dit n'y avoir lieu à rectifier l'ordonnance de référé du 2 mai 2017 ; AUX MOTIFS QUE par arrêt du 17 janvier 2018, la cour a infirmé l'ordonnance rendue le 2 mai 2017 par le juge des requêtes du tribunal de grande instance de Créteil statuant en référé et a rejeté la demande de Mme N... V..., M. R... H... et la SASU Saint-Gobain Glass Solutions Centre Normandie de rétractation de l'ordonnance sure requête rendue le 12 janvier 2017 ; que les dispositions de l'ordonnance rectificative qui fait droit à la requête en omission de statuer n'a d'autre vocation que de s'adjoindre à celles figurant dans la décision rectifiée, pour aboutir, après correction à une décision judiciaire unique ; que dès lors que la décision rectifiée a été infirmée, l'infirmation de l'ordonnance rectificative s'impose ; qu'en effet dès lors que l'arrêt de la cour a infirmé l'ordonnance de référé qui a rétracté l'ordonnance sur requête, le sort des documents, fichiers et informations tel que réglé par le juge de la rectification n'a plus lieu d'être ; que nonobstant le fait que l'arrêt ait modifié la mission de l'huissier, il n'entre pas dans l'effet dévolutif du présent appel de statuer sur les conséquences de cette modification sur la levée du séquestre ; qu'il sera en outre rappelé que la cour a indiqué dans son arrêt que le juge de la requête a confié au juge des référés et non au juge de la rétractation le contentieux de la levée du séquestre qu'il a ordonné de sorte que la demande de ce chef était irrecevable devant elle ; ALORS QU'en application des articles 624 et 625 du code de procédure civile, la cassation à venir de l'arrêt du 17 janvier 2018 sur le pourvoi n° Q 18-14.368 emportera annulation par voie de conséquence de l'arrêt du 21 mars 2018 qui, pour infirmer l'ordonnance rectificative, retient que l'ordonnance rectifiée du 2 mai 2017 a été infirmée par arrêt du 17 janvier 2018.