Cour d'appel de Colmar, 23 mai 2018, 2016/03414

Synthèse

  • Juridiction : Cour d'appel de Colmar
  • Numéro de pourvoi :
    2016/03414
  • Domaine de propriété intellectuelle : MARQUE
  • Parties : GEISPOLS SARL ; AUXERRE DISTRIBUTION SARL ; FUTURA FINANCES (venant aux droits de la Sté FUTURA TRADING) ; FUTURA FINANCES SAS / MOOCK SAS ; CODICO SAS ; B10 SASU
  • Décision précédente :Tribunal de grande instance de Strasbourg, 20 mai 2016
  • Président : Mme PANETTA
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Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Colmar
2018-05-23
Tribunal de grande instance de Strasbourg
2016-05-24
Tribunal de grande instance de Strasbourg
2016-05-20

Texte intégral

COUR D'APPEL DE COLMAR ARRET DU 23 mai 2018 PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A 16/03414 Décision déférée à la Cour : 24 mai 2016 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE STRASBOURG APPELANTES : SARL GEISPOLS prise en la personne de son représentant légal 15B rue du Pont du Péage 67118 GEISPOLSHEIM SARL AUXERRE DISTRIBUTION prise en la personne de son représentant légal [...] 89000 AUXERRE Société FUTURA FINANCES venant aux droits de la Société FU TURA TRADING, prise en la personne de son représentant légal Domaine de Lorca avenue Révestel 13260 CASSIS SAS FUTURA FINANCES prise en la personne de son représentant légal Domaine de Lorca avenue Révestel 13260 CASSIS Représentées par Me Katja MAKOWSKI, avocat à la Cour Avocat plaidant : Me L, avocat à NANCY INTIMEES : SAS MOOCK prise en la personne de son représentant légal [...] 67201 ECKBOLSHEIM SAS CODICO prise en la personne de son représentant légal [...] 67118 GEISPOLSHEIM SASU B10 prise en la personne de son représentant légal [...] 67118 GEISPOLSHEIM Représentées par Me Anne CROVISIER, avocat à la Cour Avocat plaidant : Me B, avocat à STRASBOURG COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 26 mars 2018, en audience publique, devant la Cour composée de : Mme PANETTA, Présidente de chambre, entendue en son rapport Mme DECOTTIGNIES, Conseillère M. ROUBLOT, Conseiller qui en ont délibéré. Greffier, lors des débats : Mme MUNCH-SCHEBACHER

ARRET

: - Contradictoire - rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile. - signé par Mme Corinne PANETTA, présidente et Mme Christiane MUNCH-SCHEBACHER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES : Par contrat du 25 juin 2012, la société MOOCK a concédé une licence exclusive partielle de la marque figurative 'Mise au Green' à la société B10. Celle-ci a chargé la société CODICO de créer deux décors afin qu'ils soient utilisés et déclinés sur des boîtes. En février 2014, les sociétés MOOCK et CODICO ont constaté que le magasin 'NOZ', situés [...], siège social de la société GEISPOLS, proposait à la vente deux modèles de boîtes en métal qui, selon elles, reproduisaient à l'identique la « marque aux trois vaches » et les deux décors. Sur requête du 31 mars 2014, les sociétés MOOCK et CODICO ont fait procéder à une saisie-contrefaçon au magasin NOZ constatant l'existence d'un stock de 60 boîtes, objet du litige, dont 57 déjà vendues, et que les sociétés AUXERRE DISTRIBUTION et FUTURA FINANCES, venant aux droits de FUTURA TRADING, seraient les fournisseurs. Par un jugement en date du 24 mai 2016, le Tribunal de Grande Instance de Strasbourg condamne in solidum la SARL GEISPOLS, la SARL AUXERRE DISTRIBUTION et la société FUTURA FINANCES à payer à la société MOOCK la somme de 66 900 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon de marque et de concurrence déloyale, à payer à la société CODICO la somme de 15 403,94 euros à titre de dommages- intérêts en réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon du droit d'auteur et de concurrence déloyale, et 5 000 euros à la société B10, à payer à chacune des sociétés MOOCK, CODICO et B10 la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile. Le jugement est assorti de l'exécution provisoire. Par déclaration faite au greffe en date du 4 juillet 2016, les sociétés GEISPOLS, AUXERRE DISTRIBUTION et FUTURA FINANCES interjettent appel de la décision. Les sociétés MOOCK, CODICO et B10 se constituent intimées le 12 juillet 2016. Par des dernières conclusions en date du 12 juin 2016, les sociétés GEISPOLS, AUXERRE DISTRIBUTION et FUTURA FINANCES demandent à la Cour d'infirmer le jugement entrepris, de débouter les sociétés intimées de l'ensemble de leurs demandes, de ramener la somme sollicitée par la société MOOCK à un montant ne pouvant excéder celui d'une redevance de 10% du chiffre d'affaires réalisé sur les boîtes litigieuses, condamner in solidum les sociétés B10 et CODICO à verser à chacune des appelantes la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et les condamner aux dépens. Au soutien de leurs prétentions, les appelantes affirment que les sociétés B10 et CODICO sont irrecevables à agir en l'absence de preuves de commercialisation des produits en cause sous leurs noms. Elles indiquent que la société CODICO n'apporte pas la preuve de sa qualité d'auteur des deux décors litigieux et qu'elle ne justifie pas d'actes d'exploitation non équivoques. Elles affirment que la société B10 ne dispose pas de sous licence de marque et qu'elle ne justifie pas d'une inscription au registre des marques permettant de dater le contrat de licence exclusive partielle. Elles affirment que la contrefaçon n'est pas caractérisée en l'absence de véritable effort créateur. Elles soutiennent que la concurrence déloyale et le parasitisme ne sont pas constitués en l'absence de faits distincts de ceux de l'action en contrefaçon. Elles indiquent que l'indemnité doit être calculée en fonction d'un préjudice effectivement subi, que la preuve n'est pas apportée, et que la somme de 50 000 euros octroyée à la société MOOCK constitue des dommages-intérêts punitifs prohibés en droit français. Elles soutiennent que les mesures de publicité ne se justifient pas en l'absence d'agissements particulièrement graves et volontaires. Par des dernières conclusions en date du 7 septembre 2017, les sociétés MOOCK, B10 et CODICO demandent à la Cour de confirmer le jugement entrepris, l'infirmer en ce qu'il a débouté la société MOOCK de sa demande d'indemnisation pour préjudice moral. Statuant à nouveau, elles demandent à la Cour de juger que les actes de contrefaçon sont constitutifs de concurrence déloyale et de parasitisme, en conséquence, de condamner les appelantes à payer à chacune des intimées la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts, de les condamner à payer 5 000 euros à la société MOOCK en réparation du préjudice moral, leur faire interdiction de fabriquer, de faire fabriquer, d'importer, de détenir, de reproduire, de présenter, d'offrir en vente et de revendre les boîtes litigieuses sous astreinte de 1 000 euros par infraction constatée, ordonner la publication de l'arrêt à intervenir dans trois journaux, condamner les appelantes aux dépens et à payer à chacune des intimées la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile. À l'appui de leurs allégations, les intimées affirment que la preuve de la qualité d'auteur de la société CODICO est apportée par le CD-ROM mis sous scellé par huissier de justice et que la preuve d'actes d'exploitation non équivoques est apportée par la commercialisation des produits. Elles indiquent que les décors sont susceptibles d'être protégés par le droit d'auteur qui protège les combinaisons nouvelles d'éléments banals. Elles soutiennent que les actes de contrefaçon de la marque de la société MOOCK constituent des actes de concurrence déloyale et de parasitisme à l'égard des sociétés B10 et CODICO car les exploitants de droits de propriété intellectuelle peuvent agir aux côtés des titulaires des droits pour demander réparation de leur propre préjudice. Elles affirment que la somme de 50 000 euros de dommages-intérêts est justifiée au titre du manque à gagner et que le préjudice moral est justifié par la dévalorisation de la marque. La Cour se référera à ces dernières écritures pour plus ample exposés des faits de la procédure et des prétentions de la partie. L'ordonnance de clôture a été rendue le 24 janvier 2018. L'affaire a été appelée à l'audience du 26 mars 2018, à laquelle les parties ont développé leur argumentation et déposé les pièces à l'appui de leurs allégations.

MOTIFS DE LA DECISION

: 1/ Sur la recevabilité des actions des sociétés CODICO et B10 : Les parties appelantes contestent la recevabilité des actions des sociétés CODICO et B10. a/la recevabilité de l'action de la société CODICO : Les sociétés appelantes contestent la capacité à agir de la société CODICO, estimant qu'elle ne démontre pas être l'auteur des dessins décorant les boîtes litigieuses. La société CODICO avance au contraire qu'elle démontre être l'auteur des dessins en cause. Afin d'en démontrer, elle verse plusieurs pièces. Il est rappelé que la qualité d'auteur ne peut être associée qu'à une personne physique. Il est toutefois possible à une personne morale de démontrer qu'elle est titulaire des droits d'auteurs attachés aux dessins litigieux. Il lui appartient, pour ce faire, d'établir son exploitation non équivoque de ces derniers. La société CODICO a fait procéder à un constat d'huissier, dont le procès-verbal de constat est daté du 24 mars 2014 (pièce n°10). Il ressort de la lecture du procès-verbal de constat d'ouverture des scellés que les dessins litigieux avaient effectivement été déposés, sur CD-ROM placé, auprès d'un huissier, par la société CODICO, ce dès 2012. Les contestations des parties appelantes, selon lesquelles le procès-verbal n'établirait pas suffisamment que les dessins litigieux étaient présents sur le CD-ROM, sont sans emport. S'agissant de l'exploitation, afin de prouver l'exploitation non équivoque des dessins en cause, la société CODICO produit des factures et des tableaux, accompagnés de deux attestations de son Commissaire aux comptes. Il résulte de la lecture de ces éléments, comportant notamment l'indication de la vente des boîtes litigieuses, précisément identifiées par leur nom ('mise au green humour' ou 'mise au green color') et leur format, que la société CODICO prouve suffisamment l'existence d'actes d'exploitation non équivoques des décors en cause, ainsi que l'a exactement retenu le premier juge. Au surplus, les appelantes se content de pures allégations pour contester les éléments apportés par la société CODICO, sans produire aucuns moyens pour les discuter. Il convient dès lors de retenir que la société CODICO démontre être titulaire des droits d'auteurs relatifs aux dessins litigieux. Elle a en conséquence intérêt à agir en contrefaçon. Le jugement sera confirmé sur ce point. b/la recevabilité de l'action de la société B10 : La société B10 agit sur le fondement d'actes de concurrence déloyale ou parasitaire. Les sociétés appelantes contestent sa capacité à agir. Il est rappelé que l'action en concurrence déloyale est ouverte à toute personne ayant un intérêt à agir. Les appelantes ne soulèvent aucun moyen susceptible de faire déclarer irrecevable l'action de la société B10. Elles se contentent de pures allégations pour avancer que la date de la conclusion de la licence de marque ne serait pas démontrée, mais n'apportent aucun élément qui permettrait de questionner la date mentionnée par le contrat conclu entre les sociétés MOOCK et B10, à savoir le 28 juin 2012. La société B10 est donc recevable à agir en concurrence déloyale, y ayant un intérêt personnel, légitime, né et actuel au moment de la commission des faits litigieux. 2/ Sur la contrefaçon : a/la contrefaçon de la marque « aux trois vaches » de la société MOOCK : Les sociétés intimées demandent la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu que les boîtes litigieuses constituaient une contrefaçon de la marque 'aux trois vaches' de la société MOOCK. Bien qu'elles demandent l'infirmation de l'intégralité du jugement, les sociétés intimées n'apportent, dans leurs écritures d'appel, aucun moyen pour discuter le jugement sur ce point. Au surplus, elles reconnaissent dans leurs conclusions (p. 11) que le décor des boîtes commercialisées par elles reprend le logo de la marque 'aux trois vaches.' Il y a donc lieu de retenir que c'est par des motifs propres et pertinents, adoptés par la Cour, que le premier juge a considéré que la reproduction du logo de la marque 'aux trois vaches', sur les boîtes litigieuses, était constitutive d'une contrefaçon de marque au préjudice de la société MOOCK. b/la contrefaçon du droit d'auteur de la société CODICO : Les sociétés appelantes critiquent le jugement en ce qu'il a retenu que les boîtes en cause constituaient une contrefaçon du droit d'auteur de la société CODICO, qui en a réalisé les décors. Elles estiment en effet que les décors ne constituent pas des modèles originaux, ne relevant pas d'un véritable effort créateur susceptible de bénéficier de la protection du droit d'auteur. Les sociétés intimées allèguent en revanche, que les décors des deux boîtes sont originaux, et donc à ce titre protégés par le droit d'auteur. Elles considèrent que les intimées se sont livrées à des actes de contrefaçon, au préjudice de la société CODICO. L'examen des objets litigieux permet de constater que la première boîte présente un décor reprenant les motifs caractéristiques de la 'marque aux trois vaches', composé d'une succession de dessins de vaches stylisées, tête tantôt levée, tantôt abaissée, toutes étant colorées de teintes variées selon un schéma précis et régulier. La seconde boîte associe une photographie de vache prise en gros plan et un panneau de signalisation porteur de la mention 'boîte à café', lequel est surmonté d'un cartouche représentant la 'marque aux trois vaches'. Le flanc de la boîte est marqué par un motif tacheté représentant la robe d'une vache. Dans les deux cas, l'originalité et la spécificité de la recherche du décor des boîtes sont incontestable. La circonstance, évoquée par les parties appelantes, selon laquelle les photographies de vaches prises en gros plan, à l'instar de l'un des décors litigieux, sont courantes et précéderaient la commercialisation des boîtes, est inopérante, l'originalité du modèle procédant en l'occurrence de l'association de plusieurs éléments distincts. Il ressort de ces constatations que les dessins en cause représentent des combinaisons graphiques uniques. Leur originalité marquée résulte de l'association de couleurs précises et d'éléments graphiques spécifiques. Ils peuvent donc être protégés par le droit d'auteur, en ce qu'ils révèlent un effort de création et une recherche intellectuelle particulière. S'agissant des actes de contrefaçon allégués par les parties intimées, il résulte du procès-verbal de saisie-contrefaçon, daté du 3 avril 2014, que la société GEISPOLS, exploitant un magasin de l'enseigne 'NOZ' sis à GEISPOLSHEIM (67), commercialisait deux modèles de boîtes aux décors constituant des reproductions rigoureusement identiques à ceux dessinés par la société CODICO, et dont il a été reconnu qu'ils bénéficient de protection au titre du droit d'auteur. Le procès-verbal fait également apparaître que l'étiquette apposée sur les boîtes concernées mentionnait pour origine une société FUTURA sise à ST BERTHEVIN (53). La société GEISPOLS identifiait par la suite la société FUTURA TRADING, sise à Cassis (13), comme étant son fournisseur, les boîtes ayant été livrées par l'intermédiaire de la société AUXERRE DISTRIBUTION ' A.D. 89. Les sociétés appelantes, la société FUTURA DISTRIBUTION étant venue aux droits de la société FUTURA TRADING, ne contestent pas ces constatations. Il ressort de ces éléments que les sociétés appelantes ont commercialisé des produits aux décors reprenant des dessins bénéficiant d'une protection au titre du droit d'auteur, ceci sans le consentement du bénéficiaire de ce droit. Il s'en déduit qu'elles se sont, ce faisant, livrées à des reproductions illicites en vertu de l'article L. 122-4 du Code de la propriété intellectuelle, lesquelles sont constitutives d'actes de contrefaçon au préjudice de la société CODICO. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point. 3/ Sur la concurrence déloyale : Les sociétés intimées demandent également la condamnation des appelantes à leur verser une indemnité pour des faits qu'elles estiment constitutifs de concurrence déloyale et parasitaire, ce relativement à différents faits et fondements, qu'il convient d'envisager distinctement. Il est à relever qu'en défense sur ce point, les sociétés appelantes se content de souligner la nécessité, pour le cumul des actions en contrefaçon et en concurrence déloyale, de démontrer l'existence de faits distincts. Néanmoins, elles ne répondent pas précisément à l'argumentaire des sociétés intimées, qui fondent leurs demandes sur différents moyens selon les situations envisagées. a/ la concurrence déloyale et parasitaire à l'égard des sociétés CODICO et B10 résultant de la contrefaçon de la marque de la société MOOCK : Les sociétés appelantes soutiennent que la contrefaçon, par les sociétés intimées, de la marque 'aux trois vaches' de la société MOOCK, qui a été retenue par le premier juge et confirmée supra par la Cour de céans, est constitutive d'actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice des sociétés CODICO et B10. Il est tout d'abord souligné que les sociétés intimées ne peuvent, pour fonder leur action en concurrence déloyale, se prévaloir de l'article L. 716-5 du Code de Propriété Intellectuelle, ni d'ailleurs de l'article 10 du contrat de licence liant les sociétés B10 et MOOCK, qui reprend ladite disposition, puisqu'il résulte de ces deux textes que seule l'action en contrefaçon y est visée. Si les intimées affirment à raison qu'il est possible, pour un licencié de marque, d'agir conjointement au titulaire de la marque pour obtenir réparation d'un préjudice causé par des actes de contrefaçon, il n'en demeure pas moins qu'il résulte clairement de leurs écritures que les intimées invoquent ici des comportements de concurrence déloyale. Néanmoins, il est effectivement possible pour l'exploitant d'une marque, non titulaire de droits privatifs sur cette dernière, d'agir en concurrence déloyale pour des faits identiques que ceux retenus pour caractériser la contrefaçon. Ainsi qu'il résulte des éléments versés aux débats, la société B10 exploite sous licence la marque 'aux trois vaches' de la société MOOCK, en vertu d'un contrat de licence de marque du 28 juin 2012. Pour sa part, la société CODICO, appartenant au groupe B10, achète les boîtes litigieuses à cette dernière puis les revend à ses clients. Il se déduit des actes de contrefaçon de marque précédemment caractérisés à la charge des sociétés appelantes, que ces dernières ont cherché, par la commercialisation de produits reprenant le logo de la marque 'aux trois vaches' de la société MOOCK, à se placer dans le sillage de cette marque, et ainsi, sans investissement et donc à coût moindre, à bénéficier de sa notoriété et sa popularité au sein des consommateurs. Ces agissements fautifs ont causé un préjudice à la société B10, consistant en le trouble commercial de son exploitation sous licence de la marque 'aux trois vaches' pour la commercialisation de boîtes métalliques. La société B10 a en effet réalisé des investissements afin d'obtenir le droit d'apposer la marque en cause sur les boîtes métalliques qu'elle a conçues et commercialisées. De même, la société CODICO, qui commercialise les boîtes litigieuses, a nécessairement subi un trouble commercial, résultant en un préjudice, du fait de la contrefaçon de la marque apposée sur lesdites boîtes. La contrefaçon de la marque « aux trois vaches » sur les boîtes commercialisées par les sociétés appelantes constitue donc une concurrence déloyale au préjudice des sociétés B10 et CODICO. b/ la concurrence déloyale et parasitaire à l’encontre des sociétés B10 et MOOCK résultant de la contrefaçon des droits d'auteur de la société CODICO : Les sociétés appelantes soutiennent que la contrefaçon, par les sociétés intimées, des droits d'auteur de la société CODICO relatifs aux décors des boîtes litigieuses, qui a été retenue par le premier juge et confirmée supra par la Cour de céans, est constitutive d'actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice des sociétés MOOCK et B10. Il se déduit des actes de contrefaçon des droits d'auteur de la société CODICO, précédemment caractérisés à la charge des sociétés appelantes, que ces dernières ont entendu entretenir la confusion avec les boîtes commercialisées par la même société CODICO. Les appelantes ont ainsi créé un risque de confusion au détriment des produits authentiques et ont pu profiter, sans investissement, des efforts créatifs et financiers consentis pour créer et développer les produits originaux. Ces agissements fautifs ont causé un dommage, en la forme de troubles commerciaux, aux sociétés B10 et MOOCK. La première, pour ce qu'elle achète les boîtes et les revend à la société CODICO, et que donc les produits contrefaits interfèrent dans son activité commerciale. La seconde, en ce qu'elle est conceptrice de l'imagerie de marque qui a permis la conception des décors contrefaits ; et parce qu'elle perçoit une redevance sur le volume de boîtes vendues, volume nécessairement affecté par présence sur le marché de boîtes contrefaites. La contrefaçon, par les sociétés appelantes, des droits d'auteur de la société CODICO relatifs aux décors des boîtes litigieuses, constitue donc une concurrence déloyale au préjudice des sociétés B10 et MOOCK. c/la concurrence déloyale et parasitaire à l'encontre des trois intimées sur le fondement de faits distincts que les actes de contrefaçon : Les sociétés intimées invoquent encore des faits distincts de concurrence déloyale et parasitaire, qui leur porteraient préjudice. Les sociétés appelantes allèguent pour leur part qu'aucun fait distinct n'est démontré. Il n'est pas contesté entre les parties qu'en cas de succès d'une action en contrefaçon, il convient, pour que puisse aboutir en parallèle une action en concurrence déloyale et parasitaire, que celle-ci soit fondée sur des faits distincts. Ceci n'a pas prêté à discussion pour les deux chefs de demande précédemment étudiés, les sociétés alléguant subir une concurrence déloyale n'étant pas, dans ces deux cas, titulaire de droits privatifs reconnus contrefaits. En revanche, il revient ici aux intimées de démontrer l'existence de faits distincts constitutifs de concurrence déloyale. Les sociétés intimées évoquent d'abord un effet de gamme, que les appelantes auraient recherché à créer en reprenant la marque et les décors pour commercialiser deux objets à l'usage. Cependant, la copie, même servile comme en l'espèce, de deux produits ne constitue pas en elle-même un effet de gamme constituant un fait de concurrence déloyale distinct de la contrefaçon. Les sociétés intimées ne démontrent pas que les contrefaçons ont pu entretenir la confusion avec une gamme de produits bien identifiée et connue des consommateurs, dans le sillage de laquelle elles auraient été destinées à s'insérer. En outre, il n'est pas davantage démontré que les sociétés appelantes auraient recherché à reproduire une famille de produits cohérente qui aurait pu constituer un effet de gamme. Au surplus, ainsi qu'il résulte clairement des photographies du procès- verbal de saisie-contrefaçon, les boîtes contrefaites sont de taille différente de celle des originales, de sorte qu'il ne peut être admis que les contrefaçons imitent à l'identique une éventuelle gamme concurrente. Les sociétés intimées évoquent ensuite la pratique d'un prix largement inférieur par les appelantes, qui serait fautive. Néanmoins, le prix auquel étaient vendues les boîtes contrefaites, soit 0,99 euro, bien qu'inférieur au prix original de 1,48/1,49 euro, n'apparaît pas pour autant être un prix vil ou à perte. Les sociétés intimées, qui se content de déduire de la différence de prix son caractère fautif, n'expliquent pas en quoi la pratique d'un tel prix serait un comportement spécifiquement fautif. En effet, la vente à prix bas n'est pas déloyale, et la modestie du prix de l'objet contrefaisant doit être prise en compte au titre du préjudice résultant des actes de contrefaçon eux-mêmes, sans pouvoir à elle seule être considérée comme un fait distinct de concurrence déloyale. Il y a donc lieu de considérer que les faits distincts de concurrence déloyale et parasitaire, allégués par les intimées, ne sont pas suffisamment caractérisés. 4/ Sur les mesures réparatrices : Il convient d'indemniser les préjudices subis par les sociétés MOOCK, B10 et CODICO, du fait des actes de contrefaçon et de concurrence déloyale et parasitaire commis par les sociétés appelantes. a/les préjudices causés par les actes de contrefaçon : - le préjudice de la société MOOCK : Au titre du préjudice matériel, il convient tout d'abord de relever que la redevance de contrat de licence, pour un montant de 50 000 euros, ne peut en aucun cas constituer un préjudice subi par la société MOOCK. Elle ne peut pas davantage s'analyser comme un manque à gagner, en considérant que les contrefacteurs auraient dû s'acquitter de cette somme pour commercialiser licitement les produits litigieux. En effet, le contrat de licence de marque ayant lié les sociétés MOOCK et B10 emporte la concession de droits sur la marque 'aux trois vaches', pour de nombreux produits et sur plusieurs pays, ce pour trois ans. Ces droits sont sans commune mesure avec l'exploitation de deux modèles de boîtes contrefaites, vendues à moins d'un euro la pièce. La société MOOCK ne verse aucun élément au dossier qui permettrait d'estimer la redevance qu'elle est susceptible d'avoir manquée en considération des faits en cause. Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a alloué à la société MOOCK la somme de 50 000 euros au titre de la redevance de licence de marque. S'agissant des conséquences négatives de la contrefaçon, la société MOOCK affirme avoir subi un préjudice pour l'indemnisation duquel elle demande un forfait de 10 000 euros. Elle demande par ailleurs un somme de 1 900 euros correspondant au bénéfice réalisé par les contrefacteurs. Néanmoins, il ressort de l'article L. 716-14 du Code de la Propriété Intellectuelle, que la demande d'indemnisation par forfait est une alternative à l'évaluation précise, en nature et étendue, du préjudice réel. Il s'en déduit que le demandeur à l'action en contrefaçon doit faire un choix entre les deux modes d'indemnisation, sans qu'il lui soit possible d'en demander le cumul. Conformément à l'alternative prévue par les dispositions légales, la Cour écarte l'évaluation du préjudice réel, qui au demeurant apparaît insuffisamment démontré ; et retient le forfait demandé par la société MOOCK. Lui sera donc attribuée la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice matériel. Au titre de son préjudice moral, la société MOOCK invoque l'utilisation de sa marque par les contrefacteurs dans un contexte ne garantissant pas les standards de sérieux et de qualité promus par la marque. Elle ajoute que la vente des contrefaçons s'effectuait en vrac, dans des magasins 'hyper-discount', mode de commercialisation ne correspondant pas à l'image de la marque à forte notoriété qu'elle a travaillé à bâtir. La Cour considère que la société MOOCK démontre, par cet argumentaire, avoir subi un préjudice moral, qu'elle estime être indemnisable à hauteur de 500 euros. Le jugement sera réformé en ce sens. - le préjudice de la société CODICO : S'agissant de son préjudice subi du fait des actes de contrefaçon, la société CODICO invoque deux chefs distincts. Elle produit un calcul, visant à déterminer une perte de marge, et aboutissant à une somme de 2 403,94 euros. Elle demande par ailleurs une somme forfaitaire de 8 000 euros correspondant, selon son estimation, aux diverses pertes subies. Conformément à l'alternative prévue par les dispositions légales, rappelée plus haut, la Cour écarte l'évaluation du préjudice réel, qui au demeurant apparaît insuffisamment démontré, la masse contrefaisante alléguée n'étant attestée par aucun élément ; et retient le forfait demandé par la société CODICO. Lui sera donc attribuée la somme de 8 000 euros en réparation de son préjudice matériel. Le jugement sera réformé en ce sens. b/les préjudices causés par les actes de concurrence déloyale et parasitaire : En réparation des dommages subis du fait des actes de concurrence déloyale et parasitaire, les sociétés MOOCK, B10 et CODICO demandent que leur soient allouées, chacune, une somme de 5 000 euros et une somme 10 000 euros. La Cour considère que la commercialisation des copies serviles, par les sociétés appelantes, a causé troubles commerciaux aux sociétés intimées. Profitant indûment des frais et des efforts créatifs engagés pour la conception et le développement des boîtes originales, les contrefacteurs ont fait manquer des gains aux sociétés commercialisant les boîtes authentiques. La Cour décide que c'est à bon droit que le premier juge a estimé ce préjudice indemnisable à hauteur de 5 000 euros pour chacune des sociétés lésées. Néanmoins, si des actes de concurrence déloyale ont été admis sur différents fondements, les sociétés B10 et CODICO les subissant par la contrefaçon des droits privatifs de la société MOOCK, et les sociétés B10 et MOOCK les subissant du fait de la contrefaçon des droits privatifs de la société CODICO, rien ne justifie l'allocation d'une seconde somme « complémentaire » à hauteur de 10 000 euros, les sociétés intimées ne démontrant aucun préjudice autre que celui déjà indemnisé. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a retenu une indemnisation à hauteur de 5 000 euros pour chacune des sociétés intimées. d/les autres mesures de réparation demandées : Les sociétés intimées sollicitent des mesures de publication de la décision. Compte tenu des faits en cause, l'ampleur limitée des actes fautifs, notamment le nombre de produits contrefaits et le montant des préjudices subis, ne justifie pas, comme l'a retenu à bon droit le premier juge, qu'il y ait lieu à ordonner des mesures de publicité de la décision. Le jugement sera confirmé de ce chef. 5/ Sur les demandes accessoires : Les sociétés appelantes, succombantes, auront la charge des dépens. L'équité commande l'application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile au profit des sociétés MOOCK, B10 et CODICO, pour la somme de 2 000 euros chacune. En revanche, l'équité ne commande pas l'application de ces dispositions au profit des sociétés GEISPOLS, AUXERRE DISTRIBUTION A.D. 89 et FUTURA FINANCE.

PAR CES MOTIFS

LA COUR CONFIRME le jugement rendu le 24 mai 2016, par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de STRASBOURG, sauf en ce qui concerne la détermination des préjudices subis par les sociétés MOOCK et CODICO du fait des actes de contrefaçon, Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant, CONDAMNE les sociétés GEISPOLS, AUXERRE DISTRIBUTION A.D. 89 et FUTURA FINANCE, in solidum, à payer, en réparation des dommages causés par leurs actes de contrefaçon : - à la société MOOCK, les sommes de 10 000 euros au titre du préjudice matériel et de 500 euros au titre du préjudice moral, - à la société CODICO, la somme de 8 000 euros au titre du préjudice matériel, CONDAMNE les sociétés GEISPOLS, AUXERRE DISTRIBUTION A.D. 89 et FUTURA FINANCE, in solidum, aux dépens, CONDAMNE les sociétés GEISPOLS, AUXERRE DISTRIBUTION A.D. 89 et FUTURA FINANCE, in solidum, à payer, en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile, la somme de 2 000 euros à chacune des sociétés MOOCK, B10 et CODICO, DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile au profit des sociétés GEISPOLS, AUXERRE DISTRIBUTION A.D. 89 et FUTURA FINANCE.