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Conseil d'État, 28 octobre 2002, 215605

Synthèse

  • Juridiction : Conseil d'État
  • Numéro d'affaire :
    215605
  • Publication : Inédit au recueil Lebon
  • Textes appliqués :
    • Arrêté 1999-11-04
    • Code de justice administrative L911-1, L761-1
    • Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R241-11
    • Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales 1950-11-04 art. 8
    • Ordonnance 45-2658 1945-11-02 art. 22, art. 12 bis
  • Nature : Texte
  • Identifiant Légifrance :CETATEXT000008134776
  • Rapporteur : M. El Nouchi
  • Rapporteur public :
    M. Collin
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Résumé

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Texte intégral

Vu la requête

, enregistrée le 23 décembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Haiyan X..., ; Mme X... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler le jugement du 19 novembre 1999 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 4 novembre 1999 du préfet de l'Hérault ordonnant sa reconduite à la frontière ; 2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ; 3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de huit jours à compter de la présente décision, sous astreinte de 1 000 F par jour de retard ; 4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 15 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance

n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ; Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. El Nouchi, Maître des Requêtes ; - les conclusions de M. Collin, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'

aux termes de l'article R. 241-11 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, en vigueur à la date du jugement attaqué : "Dans le cas où l'étranger, qui ne parle pas suffisamment la langue française, le demande, le président nomme un interprète qui doit prêter serment d'apporter son concours à la justice en son honneur et en sa conscience. Cette demande peut être formulée dès le dépôt de la requête introductive d'instance" ; Considérant qu'une requête écrite non motivée, dirigée contre un arrêté de reconduite à la frontière, peut être régularisée par la présentation orale à l'audience de moyens de droit ou de fait par le requérant ; que dès lors que celui-ci a demandé à être assisté d'un interprète, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif ne peut statuer sur le recours, en l'absence d'un tel interprète, que dans le cas où cette demande apparaît infondée au regard de la capacité du requérant de comprendre et de s'exprimer en français ; qu'il ressort des termes mêmes du jugement attaqué que Mme X..., de nationalité chinoise, qui soutenait ne pas parler français, a expressément demandé l'assistance d'un interprète ; que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier a, en l'absence d'interprète et sans statuer explicitement sur la demande que Mme X... avait formée à cette fin, rejeté la requête présentée par celle-ci comme irrecevable au motif qu'elle était dépourvue de toute motivation ; qu'il a, dès lors, méconnu les dispositions précitées de l'article R. 241-11 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; que, par suite, Mme X... est fondée à soutenir que le jugement attaqué est intervenu à la suite d'une procédure irrégulière ; Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Montpellier ; Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ; Considérant que Mme X..., de nationalité chinoise, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification de la décision du 22 juillet 1999 du préfet de l'Hérault lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quiter le territoire ; qu'elle était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ; Considérant que si Mme X... réside en France auprès de son mari et de son fils, il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu des conditions de séjour de ces derniers en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, que l'arrêté attaqué ait porté à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le moyen tiré de ce que cet arrêté méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être accueilli ; Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis 3° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : ... 3° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans" ; Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date à laquelle a été pris l'arrêté prononçant sa reconduite à la frontière, Mme X... justifiait résider habituellement en France depuis plus de 10 ans et pouvait donc prétendre de plein droit à la délivrance d'une carte de séjour en application des dispositions précitées ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué aurait été pris en violation des dispositions de l'article 12 bis 3° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ne peut être accueilli ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté en date du 4 novembre 1999 par lequel le préfet de l'Hérault a décidé sa reconduite à la frontière ; Sur les conclusions aux fins d'injonction : Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : "Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme privé chargé de la gestion d'un service pubic prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution" ; Considérant que la présente décision, qui rejette la demande de Mme X... tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Hérault, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour ne sont, dès lors, pas recevables ; Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser à Mme X... la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Article 1er

: Le jugement en date du 19 novembre 1999 du magistrat délégué par le tribunal administratif de Montpellier est annulé. Article 2 : La demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Montpellier est rejetée. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X... est rejeté. Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme Haiyan X..., au préfet de l'Hérault et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

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