Cour de cassation, Chambre commerciale, financière et économique, 9 juin 2015, 14-15.750

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2015-06-09
Cour d'appel de Paris
2014-01-28

Texte intégral

Sur le premier moyen

: Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 28 janvier 2014), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 17 janvier 2012, pourvoi n° 11-10.060), que la société Cavel (la société), dont Mme X... a exercé les fonctions de gérante du 6 mars 1995 à sa liquidation judiciaire intervenue le 25 octobre 2005, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2001, relative à l'ensemble des déclarations fiscales ou opérations susceptibles d'être examinées, et étendue au 28 février 2003, en matière de TVA ; que des redressements lui ont été notifiés au titre des années vérifiées, en raison de la mise en place d'un circuit frauduleux à la TVA avec utilisation de sociétés écrans ou taxis, ainsi que d'une minoration de la TVA nette due sur les déclarations souscrites au titre des mois de décembre 2002 à février 2003, en raison de la déduction abusive de la TVA figurant sur les factures d'achat sans fondement économique réel établies par des officines de facturation dans le cadre d'un circuit type carrousel ; que le comptable des impôts a procédé à la déclaration de sa créance le 9 décembre 2005 puis a émis un avis de mise en recouvrement le 13 janvier 2006 à défaut de contestation d'assiette, avant d'adresser sa créance définitive au mandataire-liquidateur le 9 février 2006, lequel lui a indiqué le 19 janvier 2007 que si la créance fiscale était irrécouvrable, la procédure était vouée à une clôture pour insuffisance d'actif ; que le 14 octobre 2009, l'administration fiscale a assigné Mme X... devant le tribunal de grande instance aux fins d'obtenir sa condamnation solidaire au paiement de la dette fiscale, en application de l'article L. 267 du livre des procédures fiscales ;

Attendu que Mme X... fait grief à

l'arrêt de rejeter ses demandes de renvoi préjudiciel sur la validité des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, de déclarer le comptable des impôts bien fondé en ses demandes et de la condamner à payer une certaine somme solidairement avec la société Cavel alors, selon le moyen : 1°/ que Mme X..., pour justifier du caractère sérieux de la demande de renvoi préjudiciel, a soutenu que les propositions de rectification notifiées à la société Cavel étaient exclusivement fondées sur le 2 de l'article 272 du code général des impôts et le 4 de l'article 283 du même code, lesquels excluent tout droit à déduction de taxe sur la valeur ajoutée en cas de livraisons de biens fictives, mais qu'en substance, l'administration a adopté, sans l'indiquer, une autre base légale en justifiant les rappels par l'existence d'un circuit de fraude de type carrousel résultant de la défaillance des fournisseurs de la société Cavel ou des fournisseurs de ses fournisseurs, ce dont elle a déduit, d'une part, que les propositions de rectifications, qui n'indiquent pas le fondement légal des règles que l'administration a entendu appliquer, devaient être regardées comme non motivées au regard de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales et, d'autre part, que le caractère fictif des opérations de livraisons de bien n'étant ni allégué ni démontré, les redressements étaient non fondés au regard des seuls textes expressément indiqués ; qu'en se bornant à relever l'existence d'un circuit de fraude à la taxe sur la valeur ajoutée pour dénier tout caractère sérieux à la demande de renvoi préjudiciel, sans répondre en amont au moyen opérant tiré de l'insuffisante motivation des propositions de rectifications et de l'absence de justification des rectifications fondées sur les seuls textes qui y étaient mentionnés, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 2°/ que le bénéfice du droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé une prestation de services ou une livraison de biens ne peut être refusé à un assujetti que lorsqu'il est établi, au vu d'éléments objectifs, que celui-ci savait ou aurait dû savoir que par son acquisition, il participait à une opération impliquée dans une fraude à la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'en se bornant à énoncer, pour écarter la demande de renvoi préjudiciel de Mme X..., que les éléments objectifs réunis par l'administration fiscale démentaient le caractère normal des relations entre la société Cavel et ses fournisseurs et suffisaient à établir le défaut de caractère sérieux des objections soulevées par Mme X..., la cour d'appel, qui n'a pas constaté que la société Cavel savait ou aurait dû savoir que ses acquisitions participaient à une circuit de fraude à la taxe sur la valeur ajoutée, a violé les articles 17 de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977 et 271 du code général des impôts, ensemble l'article L. 267 du livre des procédures fiscales ; 3°/ que le droit de déduire la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé une livraison de biens ou une prestation de service opérée au sein d'une chaîne d'opérations frauduleuse ne peut être refusé à l'acquéreur lorsque la fraude est intervenue à un niveau de la chaîne avec lequel il n'est pas en contact direct ; qu'en considérant que les objections de Mme X... sur le bien-fondé des propositions de rectifications de la société Cavel étaient dépourvues de caractère sérieux, après avoir relevé que certaines acquisitions avaient été effectuées par elle auprès de sociétés dont les fournisseurs étaient défaillants en matière de taxe sur la valeur ajoutée, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que tous les achats de la société Cavel ne l'avaient pas mise en contact direct avec les auteurs de la fraude, a violé les articles 17 de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977 et 271 du code général des impôts, ensemble l'article L. 267 du livre des procédures fiscales ; 4°/ que Mme X..., afin de démontrer que le circuit de fraude à la taxe sur la valeur ajoutée avait été organisé par ses fournisseurs à son insu, a fait valoir qu'elle avait accompli toutes les diligences possibles pour se renseigner sur la régularité de l'activité de ses fournisseurs et a produit à cet effet un constat d'huissier duquel il résultait que l'administration fiscale lui avait refusé la communication d'informations couvertes par le secret des affaires et des extraits K bis de fournisseurs dont il ressortait qu'aucune créance au profit du trésor n'avait été inscrite pendant les exercices 2000 à 2003 ; qu'en se bornant à reprendre la position de l'administration pour conclure à l'existence de relations commerciales anormales entre la société Cavel et ses fournisseurs et, par suite, écarter tout caractère sérieux à la demande de renvoi préjudiciel, la cour d'appel, qui s'est abstenue d'examiner, même sommairement, les pièces de nature à démontrer qu'en dépit de ses diligences, la société Cavel n'avait pu identifier l'existence d'un système de fraude de type carrousel, n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ; 5°/ que le dirigeant social, poursuivi en qualité de débiteur solidaire d'une dette fiscale, peut opposer à l'administration, outre les exceptions qui lui sont personnelles, toutes celles qui résultent de la nature de l'obligation, ainsi que celles qui sont communes à tous les codébiteurs et est recevable à faire examiner, fût-ce par renvoi préjudiciel devant la juridiction compétente, si l'irrégularité qu'il invoque, lorsqu'elle est de nature à influer sur la responsabilité solidaire qui lui est imputée, est fondée ; que la cour d'appel qui, pour écarter la demande de renvoi préjudiciel, s'est fondée sur le motif inopérant tiré de l'absence de contestation par Mme X... des redressements et des avis de mise en recouvrement dans les délais prévus devant le juge de l'impôt, a violé l'article L. 267 du livre des procédures fiscales ;

Mais attendu

que l'arrêt retient que la société concentrait ses achats, chaque mois, dans une proportion importante ou très importante sur un seul fournisseur défaillant, parfois sur deux, ou sur un fournisseur lui-même client de sociétés défaillantes, avec un complément auprès de fournisseurs « d'appoint », qu'elle procédait à une rotation anormalement rapide de ces fournisseurs, soit un peu moins d'une centaine pendant la période considérée de trente-six mois, dont seulement sept ont été présents sur l'ensemble de cette période ; qu'il ajoute que ces fournisseurs pratiquaient des prix anormalement bas qui ne pouvaient trouver leur origine que dans un circuit de fraude à la TVA, que leurs marges commerciales étaient négatives ou ne correspondaient qu'à la rétention de TVA facturée au client, qu'une vingtaine d'entre eux n'ont eu aucune activité économique réelle effective et que les sociétés en cause n'ont été constituées que dans le seul but de s'intercaler entre le fournisseur européen et le client français ; qu'il retient encore que la société, qui s'était déjà livrée au titre des exercices 1995 à 1997 à de fausses livraisons intracommunautaires, a effectué en quatre mois seulement des livraisons importantes à une société répertoriée par les services fiscaux luxembourgeois comme société « frauduleuse », qui n'a déclaré aucune acquisition intracommunautaire auprès de la société Cavel, tout en omettant de les déclarer à l'administration des impôts française, pour faire échec aux opérations de recoupement ; qu'il relève encore que durant trente-huit mois consécutifs, la société a eu recours systématiquement et de façon récurrente à des fournisseurs issus d'une filière frauduleuse et cela pour un montant significatif, et en constante augmentation, du volume des achats ; qu'il retient enfin que la société a participé à un circuit de facturation destiné à rompre la chaîne de la TVA par interposition de sociétés éphémères bénéficiant d'un droit à déduction fictif transmis par des sociétés sans cause économique, cependant que compte tenu des multiples et persistantes anomalies concernant les caractéristiques des fournisseurs de la société, sa gérante ne pouvait ignorer que l'existence d'une facture mentionnant de la TVA ne suffit pas en soi à créer un droit à déduction ; que de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui a procédé à la recherche prétendument omise et n'était pas tenue de s'expliquer sur les pièces qu'elle décidait d'écarter, a pu déduire, en application du droit positif en vigueur à la date de la commission des agissements visés dans les propositions de rectification, l'absence de caractère sérieux de l'exception soulevée; que le moyen, inopérant en sa cinquième branche qui vise des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus ; Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le second moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS

: REJETTE le pourvoi ; Condamne Mme X... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juin deux mille quinze

MOYENS ANNEXES

au présent arrêt Moyens produits par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils, pour Mme X... PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme X... de ses demandes de renvoi préjudiciel sur la validité des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et de sursis à statuer dans l'attente de la réponse du juge administratif, d'avoir déclaré le comptable des impôts des entreprises de Paris 8e « La Madeleine » bien fondé en ses demandes et d'avoir condamné l'exposante à payer solidairement avec la société Cavel la somme de 8.550.778 euros ; AUX MOTIFS QU'il n'est contesté ni contestable qu'un dirigeant social, poursuivi en qualité de débiteur solidaire d'une dette fiscale, est recevable à faire examiner, fût-ce par renvoi préjudiciel devant la juridiction compétente, l'irrégularité qu'il invoque, lorsqu'elle est de nature à influer sur la responsabilité solidaire qui lui est imputée ; qu'au cas d'espèce, il est constant que les notifications de redressements précitées faisant suite à la vérification de comptabilité de la société Cavel reposent sur des constatations faites chez les fournisseurs de la société Cavel qui ont été corroborées par des données issues de l'analyse des achats de la société Cavel et, en particulier, du recensement exhaustif des fournisseurs avec qui elle a travaillé en 2000, 2001 et 2002 ; que les investigations de l'administration des impôts lui ont permis de découvrir de multiples anomalies telles que la concentration des achats de la société Cavel, chaque mois, dans une proportion importante ou très importante sur un seul fournisseur défaillant, parfois sur deux, ou sur un fournisseur luimême client de société défaillantes avec un complément auprès de fournisseurs d'appoint, l'existence d'une rotation anormalement rapide de ces fournisseurs, soit un peu moins d'une centaine pendant la période considérée de trente-six mois avec seulement sept d'entre eux présents sur l'ensemble de cette période, la courte durée d'existence des entreprises des fournisseurs qui assuraient d'emblée un volume d'affaires très important sans pour autant disposer d'une infrastructure (pas de locaux adéquats, pas de personnel ni de moyens de transport) permettant l'exercice d'une activité normale, le fait que ces fournisseurs pratiquaient des prix anormalement bas qui ne pouvaient trouver leur origine que dans un circuit de fraude à la TVA, étant précisé que les marges commerciales de ces fournisseurs étaient négatives ou encore que la seule marge dégagée correspond à la rétention de TVA facturée au client, la circonstance qu'environ une vingtaine de fournisseurs n'ont eu aucune activité économique réelle effective et que les sociétés en cause n'ont été constituées que dans le seul but de s'intercaler entre le fournisseur européen et le client français, le fait que le service vérificateur a constaté que la société Cavel qui s'était déjà livrée au titre des exercices 1995 à 1997 à de fausses livraisons intracommunautaires, a effectué en quatre mois seulement des livraisons importantes - 875.240 euros - à une société répertoriée par les services fiscaux luxembourgeois comme société frauduleuse et qui n'a déclaré aucune acquisition intracommunautaire auprès de la société Cavel tout en omettant de les déclarer à l'administration des impôts française pour faire échec aux opérations de recoupement ; qu'il ressort également des constatations opérées dans le cadre de la vérification de comptabilité de la société Cavel que durant 38 mois consécutifs, cette entreprise a eu recours systématiquement et de façon récurrente à des fournisseurs issus d'une filière frauduleuse et cela pour un montant significatif et en constante augmentation du volume des achats soit 74,24 % en 2000, 77 % en 2001, 78,33 % en 2002 et 82,78 % en 2003 ; que l'ensemble de ces éléments objectifs qui, en tant que de besoins, démentent le caractère normal des relations commerciales entretenues avec les fournisseurs en cause qui est allégué par Mme X... suffisent à établir le défaut de caractère sérieux des objections sur l'irrégularité de la procédure qui sont soulevés par Mme X... pour tenter de justifier un renvoi préjudiciel devant la juridiction administrative ; que ce n'est qu'au surplus que la cour relève que le comptable des impôts est également fondé à opposer à l'appelante qu'en sa qualité de gérante de la société Cavel, Mme X... n'a pas cru devoir exercer de recours auprès de l'administration des impôts à l'encontre des propositions de redressement qui, confirmées, ont donné lieu à l'établissement d'un AMR du 12 janvier 2006 adressé au mandataire liquidateur et qui n'a donné lieu à aucune contestation dans les délais prévus ; qu'il résulte de ce qui précède que l'exception d'irrégularité soulevée par Mme X... ne présente pas le caractère sérieux requis pour justifier un renvoi préjudiciel au juge de l'impôt ; que dès lors, la demande de renvoi préjudiciel et la demande subséquente de sursis à statuer de Mme X... sont rejetées ; 1°) ALORS QUE Mme X..., pour justifier du caractère sérieux de la demande de renvoi préjudiciel, a soutenu que les propositions de rectification notifiées à la société Cavel étaient exclusivement fondées sur le 2 de l'article 272 du code général des impôts et le 4 de l'article 283 du même code, lesquels excluent tout droit à déduction de taxe sur la valeur ajoutée en cas de livraisons de biens fictives, mais qu'en substance, l'administration a adopté, sans l'indiquer, une autre base légale en justifiant les rappels par l'existence d'un circuit de fraude de type carrousel résultant de la défaillance des fournisseurs de la société Cavel ou des fournisseurs de ses fournisseurs, ce dont elle a déduit, d'une part, que les propositions de rectifications, qui n'indiquent pas le fondement légal des règles que l'administration a entendu appliquer, devaient être regardées comme non motivées au regard de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales et, d'autre part, que le caractère fictif des opérations de livraisons de bien n'étant ni allégué ni démontré, les redressements étaient non fondés au regard des seuls textes expressément indiqués (conclusions, pp. 6-9); qu'en se bornant à relever l'existence d'un circuit de fraude à la taxe sur la valeur ajoutée pour dénier tout caractère sérieux à la demande de renvoi préjudiciel, sans répondre en amont au moyen opérant tiré de l'insuffisante motivation des propositions de rectifications et de l'absence de justification des rectifications fondées sur les seuls textes qui y étaient mentionnés, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 2°) ALORS QUE le bénéfice du droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé une prestation de services ou une livraison de biens ne peut être refusé à un assujetti que lorsqu'il est établi, au vu d'éléments objectifs, que celui-ci savait ou aurait dû savoir que par son acquisition, il participait à une opération impliquée dans une fraude à la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'en se bornant à énoncer, pour écarter la demande de renvoi préjudiciel de Mme X..., que les éléments objectifs réunis par l'administration fiscale démentaient le caractère normal des relations entre la société Cavel et ses fournisseurs et suffisaient à établir le défaut de caractère sérieux des objections soulevées par Mme X..., la cour d'appel, qui n'a pas constaté que la société Cavel savait ou aurait dû savoir que ses acquisitions participaient à une circuit de fraude à la taxe sur la valeur ajoutée, a violé les articles 17 de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977 et 271 du code général des impôts, ensemble l'article L. 267 du livre des procédures fiscales ; 3°) ALORS QUE, subsidiairement, le droit de déduire la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé une livraison de biens ou une prestation de service opérée au sein d'une chaîne d'opérations frauduleuse ne peut être refusé à l'acquéreur lorsque la fraude est intervenue à un niveau de la chaîne avec lequel il n'est pas en contact direct ; qu'en considérant que les objections de Mme X... sur le bien-fondé des propositions de rectifications de la société Cavel étaient dépourvues de caractère sérieux, après avoir relevé que certaines acquisitions avaient été effectuées par elle auprès de sociétés dont les fournisseurs étaient défaillants en matière de taxe sur la valeur ajoutée, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que tous les achats de la société Cavel ne l'avaient pas mise en contact direct avec les auteurs de la fraude, a violé les articles 17 de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977 et 271 du code général des impôts, ensemble l'article L. 267 du livre des procédures fiscales ; 4°) ALORS QUE, toujours subsidiairement, Mme X..., afin de démontrer que le circuit de fraude à la taxe sur la valeur ajoutée avait été organisé par ses fournisseurs à son insu, a fait valoir qu'elle avait accompli toutes les diligences possibles pour se renseigner sur la régularité de l'activité de ses fournisseurs et a produit à cet effet un constat d'huissier duquel il résultait que l'administration fiscale lui avait refusé la communication d'informations couvertes par le secret des affaires et des extraits K bis de fournisseurs dont il ressortait qu'aucune créance au profit du trésor n'avait été inscrite pendant les exercices 2000 à 2003 (conclusions, pp. 15-16) ; qu'en se bornant à reprendre la position de l'administration pour conclure à l'existence de relations commerciales anormales entre la société Cavel et ses fournisseurs et, par suite, écarter tout caractère sérieux à la demande de renvoi préjudiciel, la cour d'appel, qui s'est abstenue d'examiner, même sommairement, les pièces de nature à démontrer qu'en dépit de ses diligences, la société Cavel n'avait pu identifier l'existence d'un système de fraude de type carrousel, n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ; 5°) ALORS QUE le dirigeant social, poursuivi en qualité de débiteur solidaire d'une dette fiscale, peut opposer à l'administration, outre les exceptions qui lui sont personnelles, toutes celles qui résultent de la nature de l'obligation, ainsi que celles qui sont communes à tous les codébiteurs et est recevable à faire examiner, fût-ce par renvoi préjudiciel devant la juridiction compétente, si l'irrégularité qu'il invoque, lorsqu'elle est de nature à influer sur la responsabilité solidaire qui lui est imputée, est fondée ; que la cour d'appel qui, pour écarter la demande de renvoi préjudiciel, s'est fondée sur le motif inopérant tiré de l'absence de contestation par Mme X... des redressements et des avis de mise en recouvrement dans les délais prévus devant le juge de l'impôt, a violé l'article L. 267 du livre des procédures fiscales. SECOND MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré le comptable des impôts des entreprises de Paris 8e « La Madeleine » bien fondé en ses demandes et d'avoir condamné l'exposante à payer solidairement avec la société Cavel la somme de 8.550.778 euros ; AUX MOTIFS QUE les éléments matériels rappelés dans les développements qui précèdent établissent la participation de la société Cavel à un circuit de facturation destiné à rompre la chaîne de la TVA par interposition de sociétés éphémères bénéficiant d'un droit à déduction fictif transmis par des sociétés sans cause économique, alors que compte tenu des multiples et persistantes anomalies susrelatées concernant notamment les caractéristiques des fournisseurs de la société Cavel, la gérante de cette société ne pouvait ignorer que l'existence d'une facture mentionnant la TVA ne suffit pas en soi à créer un droit à déduction ; que ces faits qui ont permis d'éluder un montant considérable de TVA grâce à l'utilisation de crédits de TVA injustifiés ou fictifs et qui résulte directement de la simple imputation en comptabilité des factures de sociétés fournisseurs éphémères (sociétés taxis) suffisent, en soi, à établir, à tout le moins, une inobservation grave et répétée des obligations fiscales par la société contrôlée ; que ces agissements sont indiscutablement imputables à Mme X... qui exerçait depuis 1995 les fonctions de gérante de la société Cavel et qui, en cette qualité, était chargée de la bonne exécution des obligations fiscales de la société qu'elle dirigeait dont, en matière de TVA, la souscription de déclarations régulières et les paiements corrélatifs ; qu'il est établi, par ailleurs, que le comptable des impôts a, aussitôt après les notifications de redressement précitées, mis en oeuvre toutes les diligences requises pour recouvrer la créance fiscale en cause, qu'il l'a immédiatement authentifiée dans sa totalité par un avis de mise en recouvrement en date du 13 janvier 2006 et qu'il l'a déclarée le 19 janvier 2007 au passif de la liquidation judiciaire de la société Cavel pour un montant à titre définitif de 8.550.778 euros ; qu'il est constant que le comptable des impôts n'a pu engager de procédure de recouvrement forcé en raison de la procédure collective ouverte à l'encontre de la société Cavel et que le mandataire a indiqué au comptable des impôts que la procédure de liquidation judiciaire en cours était vouée à une clôture pour insuffisance d'actifs rendant définitivement irrécouvrable la créance du comptable des impôts sur cette société ; que ces faits suffisent à établir que, comme le soutient le comptable des impôts, l'irrécouvrabilité de la créance fiscale est la conséquence des fautes commises par la gérante de la société Cavel en contravention avec les obligations fiscales de cette société ; que dès lors, les conditions d'application des dispositions de l'article L. 267 du livre des procédures fiscales permettant la mise en oeuvre de la responsabilité de Mme X... et sa condamnation solidairement avec la société qu'elle dirigeait au paiement des impositions et pénalités éludées sont réunies ; 1°) ALORS QUE le dirigeant social ne peut être déclaré tenu au paiement de la dette fiscale de la société que dans la mesure où le recouvrement sur celle-ci est impossible ; qu'en se bornant à énoncer, pour retenir que la créance fiscale était irrécouvrable, que le mandataire a indiqué au comptable des impôts que la procédure de liquidation judiciaire en cours était vouée à une clôture pour insuffisance d'actifs, sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions, p. 23), si l'antériorité de l'assignation de Mme X... à l'établissement de la liste définitive des créances admises en octobre 2010 ne faisait pas obstacle à sa condamnation à rembourser solidairement les dettes fiscales de la société Cavel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 627 du livre des procédures fiscales ; 2°) ALORS QUE Mme X... a expressément soutenu que la dette fiscale de la société Cavel lui était inopposable dès lors que la liste des créances admises au passif de la liquidation a été établie sans que le mandataire judiciaire ne l'ait invitée à présenter ses observations en méconnaissance de l'article L. 624-1 du code de commerce (conclusions, p. 23) ; qu'en prononçant la condamnation de Mme X... à payer la dette fiscale solidairement avec la société Cavel sans répondre à ce moyen opérant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.