LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
FB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 14 mai 2020
Rejet
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 285 F-D
Pourvoi n° J 18-22.160
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 14 MAI 2020
La société Allianz IARD, société anonyme, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° J 18-22.160 contre l'arrêt rendu le 2 juillet 2018 par la cour d'appel de Toulouse (1re chambre, section 1), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Y..., société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
2°/ à la société O..., société anonyme, dont le siège est [...] ,
3°/ à la société Moulin [...], société en nom collectif, dont le siège est [...] ,
4°/ à la société Sogecomcler, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
5°/ à la société Victoire, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,
6°/ à la société Axa France IARD, société anonyme, dont le siège est [...] ,
7°/ à la société D..., société en nom collectif, dont le siège est [...] ,
8°/ à la société Netco, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,
défenderesses à la cassation.
Les sociétés Moulin [...], Sogecomcler et Victoire ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Les demanderesses au pourvoi incident invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Pronier, conseiller, les observations de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la société Allianz IARD, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Y..., de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Axa France IARD, de Me Le Prado, avocat des sociétés Moulin [...], Sogecomcler et Victoire, de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société D..., après débats en l'audience publique du 3 mars 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Pronier, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à la société Allianz IARD du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Netco.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 2 juillet 2018), la société Moulin [...], assurée au titre des bris de machine et des pertes d'exploitation auprès de la société Axa France, a entrepris de faire construire une centrale hydroélectrique.
2. La maîtrise d'oeuvre complète a été confiée à la société Y... et la réalisation des lots 3 (turbine) et 4 (multiplicateur) à la société O..., assurée par la société Allianz.
3. La société D... a fabriqué et vendu les courroies de la centrale.
4. Des dysfonctionnements étant apparus, entraînant l'arrêt de la centrale, la société Moulin [...] a, après expertise, assigné les intervenants et leurs assureurs en indemnisation de ses préjudices.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
5. La société Allianz fait grief à l'arrêt de dire qu'elle doit sa garantie à la société O... sur le terrain de la responsabilité civile professionnelle et doit garantir la société O... des condamnations prononcées à son encontre sous déduction des franchises contractuelles, que la responsabilité du sinistre incombait pour moitié chacune aux sociétés Y... et O..., de dire qu'elle doit garantir son assurée la société O... et, de la condamner, in solidum avec les sociétés Y..., O... et Axa France, à payer à la société Moulin [...] la somme de 241 194,88 euros en réparation de son préjudice matériel et la somme de 414 111,66 euros en réparation de son préjudice d'exploitation, et que la société Axa France sera garantie par elle, in solidum avec la société Y..., lesquelles supporteront cette condamnation dans leurs rapports entre elles à hauteur de 50 % chacune, alors :
« 1°/ que le juge est tenu de respecter le contrat, qui constitue la loi des parties ; qu'en l'espèce, la garantie « Responsabilité civile professionnelle » stipulée au contrat d'assurance souscrit par la société O... couvrait uniquement les dommages causés aux tiers « par la prestation intellectuelle fournie par l'assuré et résultant de l'inexécution d'une obligation contractuelle » ; que cette garantie, distincte de celle couvrant la « Responsabilité civile Après livraison », n'avait pas vocation à s'appliquer en cas de dommages causés par l'installation conçue et réalisée par l'assuré, mais seulement en cas de dommages causés par une prestation de nature exclusivement intellectuelle ; que la cour d'appel a décidé que la garantie « Responsabilité civile professionnelle » pouvait s'appliquer en même temps que la garantie « Responsabilité civile Après livraison », après avoir constaté que la garantie « Responsabilité civile professionnelle » ne concernait que les dommages résultant de « la prestation intellectuelle fournie par l'assuré et résultant de l'inexécution d'une obligation contractuelle » et considéré que les dommages résultaient de ce que « le multiplicateur à courroie conçu par O... est inadéquat et impropre à l'usage auquel il était contractuellement destiné pour avoir été réalisé sur des bases de calcul révélant des valeurs limites ainsi qu'un rapport de transmission inhabituel pour ce type de central, générant un risque de rupture permanent des courroies » ; qu'en se prononçant ainsi, tandis qu'il résultait de ses propres constatations que les dommages ne procédaient pas de l'exécution d'une prestation intellectuelle, mais de la conception et de la réalisation d'une installation livrée au maître de l'ouvrage, la cour d'appel a violé l'article
1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, devenu l'article
1103 du même code ;
2°/ que, subsidiairement, les clauses d'exclusion stipulées dans un contrat d'assurance sont valables dès lors qu'elles sont formelles et limitées ; qu'est formelle et limitée la clause qui exclut de la garantie le coût de réfection ou de reprise de la prestation accomplie par l'assuré, dès lors que demeurent couverts les dommages causés par cette prestation ; que la cour d'appel a jugé que la clause excluant, au titre de la garantie « Responsabilité civile professionnelle », « le coût de la prestation de l'assuré, de sa réfection, de son adaptation ou de son amélioration ou les frais destinés à obtenir les résultats requis ou à mener à terme la prestation » n'était pas formelle et limitée, puisqu'elle concernait « l'essentiel des conséquences matérielles du vice de conception intellectuelle » et conduisait « à vider cette garantie de sa substance » ; qu'en se prononçant ainsi, tandis que la clause laissait subsister, dans le champ de la garantie, à la fois les dommages matériels causés par la prestation défectueuse, et les dommages immatériels consécutifs, lesquels ont d'ailleurs été mis à la charge de la société Allianz au titre de la garantie « Responsabilité civile professionnelle » par la cour d'appel, de sorte que la clause d'exclusion était à la fois formelle et limitée, la cour d'appel a violé l'article
L. 113-1 du code des assurances ;
3°/ que les clauses d'exclusion stipulées dans un contrat d'assurance sont valables dès lors qu'elles sont formelles et limitées ; qu'en l'espèce, la société Allianz IARD se prévalait, au titre de la garantie « Responsabilité Après livraison », d'une clause d'exclusion relative aux « dommages immatériels non consécutifs résultant de l'absence ou de l'insuffisance de performance ou de résultat des produits, travaux ou prestations livrés (c'est-à-dire leur inaptitude totale ou partielle à atteindre les critères techniques contractuellement définis », et faisait valoir que les pertes immatérielles alléguées par la société Moulin [...] étaient la conséquence directe de l'impossibilité d'obtenir une production d'électricité pérenne pour la réalisation de laquelle la centrale avait été conçue et réalisée ; que la cour d'appel a décidé au contraire que les pertes d'exploitation ne résultaient « pas d'une inaptitude du produit livré à atteindre des critères techniques contractuellement définis, mais résultant de l'arrêt de la centrale hydroélectrique des suites de la rupture de la courroie C4 par suite d'un défaut de conception du multiplicateur à courroie imputable à l'assurée O... qui n'a pu être mis en évidence qu'après une longue expertise judiciaire » ; qu'en se prononçant ainsi, tandis qu'il résultait de ses propres constatations que les pertes d'exploitation résultaient de l'absence de résultat de l'installation litigieuse, qui était dès lors impropre à satisfaire l'objectif de production pérenne d'électricité poursuivi par la société Moulin [...], la cour d'appel a violé l'article
1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, devenu l'article
1103 du même code. »
Réponse de la Cour
6. D'une part, la cour d'appel a retenu que le multiplicateur à courroie conçu par la société O... était inadéquat et impropre à l'usage auquel il était contractuellement destiné et que les dommages matériels en découlant étaient la conséquence directe de la prestation intellectuelle fournie par la société O... et résultaient de l'inexécution de ses obligations contractuelles puisqu'elle était tenue de concevoir un multiplicateur satisfaisant à son office sur les bases qu'elle avait elle-même définies avec la société Y... et sur lesquelles elle s'était engagée à l'égard du maître de l'ouvrage.
7. La cour d'appel a pu en déduire qu'au regard de la garantie souscrite au titre de la prestation intellectuelle fournie par l'assuré et destinée à garantir les conséquences dommageables des fautes, erreurs, omissions ou négligences commises dans l'exécution de la prestation intellectuelle, la clause litigieuse excluant le coût de la prestation de l'assuré, de sa réfection, de son adaptation ou de son amélioration ou les frais destinés à obtenir les résultats requis ou à mener à terme la prestation, soit l'essentiel des conséquences matérielles du vice de conception intellectuelle, vidait cette garantie de sa substance de sorte qu'elle ne pouvait être considérée comme limitée au sens de l'article
L. 113-1 du code des assurances et ne pouvait recevoir application.
8. D'autre part, la cour d'appel, ayant retenu que la clause excluant les dommages immatériels non consécutifs résultant de l'inaptitude du produit livré à atteindre des critères techniques contractuellement définis n'avait pas vocation à s'appliquer, les pertes d'exploitation résultant de l'arrêt de la centrale hydroélectrique en raison de la rupture de la courroie par suite d'un défaut de conception du multiplicateur imputable à l'assurée O..., a pu en déduire que la société Allianz devait garantir celle-ci au titre des pertes d'exploitations.
9. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur les deuxième et troisième moyens du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident, ci-après annexés
10. En application de l'article
1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le quatrième moyen
Enoncé du moyen
11. La société Allianz fait grief à l'arrêt de la condamner, in solidum avec les sociétés Y..., O... et Axa France, à payer la somme de 414 111,66 euros en réparation du préjudice d'exploitation, alors :
« 1°/ que le juge doit réparer le préjudice sans qu'il en résulte ni perte ni profit pour la victime ; que pour allouer à la société Moulin [...] la somme de 64 578 euros HT au titre des pertes d'exploitation pour la période nécessaire aux travaux de remise en état, la cour d'appel s'est fondée sur une durée de quatre mois estimée par l'expert judiciaire ; qu'en se prononçant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il résultait des ordres de services produits aux débats, relatifs à ces travaux de remise en état, qu'ils devaient débuter le 7 mai 2015 pour s'achever le 26 mois suivant, soit une durée de dix-neuf jours et non de quatre mois, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article
1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 et du principe de la réparation intégrale ;
2°/ que le juge doit réparer le préjudice sans qu'il en résulte ni perte ni profit pour la victime ; que pour allouer à la société Moulin [...] la somme de 64 578 euros HT au titre des pertes d'exploitation pour la période nécessaire aux travaux de remise en état, la cour d'appel a utilisé comme assiette de calcul le chiffre d'affaires annuel moyen de la société Moulin [...], incluant notamment les revenus tirés de l'exploitation de la centrale pendant les mois d'hiver sur la base d'un tarif majoré et d'une demande importante ; qu'en se prononçant ainsi sans rechercher, comme elle y était invitée, si les travaux de remise en état ne devaient pas être nécessairement effectués sur la période des basses eaux, de sorte que la perte d'exploitation devait être calculée en tenant compte du chiffre d'affaires réalisé sur cette période, sur la base du tarif été moins élevé que le tarif hiver, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article
1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 et du principe de la réparation intégrale ;
3°/ que le juge doit réparer le préjudice sans qu'il en résulte ni perte ni profit pour la victime ; que la cour d'appel a considéré que la société Moulin [...] subissait « nécessairement » une perte de la majoration de qualité de 100 % pour la période 2013-2018 « compte tenu de la perte de production subie sur les cinq premières années d'exercice avec obligation de remboursement de la majoration qualité perçue pour la production de novembre 2008 à mars 2013 » ; qu'en se prononçant ainsi, tandis que la perte du bénéfice de la majoration de qualité de 100 % pour la période 2008-2013 n'impliquait pas l'absence totale de majoration de qualité pour la période quinquennale suivante, le taux de majoration étant calculé sur la base de la production des cinq premières années, ainsi qu'il résulte de l'arrêt
attaqué, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article
1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 et du principe de la réparation intégrale. »
Réponse de la Cour
12. D'une part, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a souverainement évalué le préjudice subi au titre des pertes d'exploitation pour la période nécessaire aux travaux de remise en état.
13. D'autre part, elle a retenu que le contrat conclu avec EDF prévoyait que, pour la période quinquennale suivant les cinq premières années d'exploitation, les taux réels de majoration de qualité étaient calculés au vu des productions des cinq premières années d'exploitation de la centrale, une régularisation étant opérée sur les cinq années écoulées, et a constaté la perte de production subie sur les cinq premières années d'exercice avec obligation de remboursement de la majoration qualité perçue pour la production de novembre 2008 à mars 2013.
14. Elle en a souverainement déduit que la majoration de qualité de 100 % avait été perdue pour les cinq années suivantes de production de novembre 2013 à mars 2018.
15. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la société Allianz IARD aux dépens ;
En application de l'article
700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, signé par M. Maunand, conseiller doyen, conformément aux dispositions des articles
456 et
1021 du code de procédure civile, en remplacement du conseiller empêché, et signé et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mai deux mille vingt.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour la société Allianz IARD.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la société Allianz IARD devait sa garantie à la société O... sur le terrain de la responsabilité civile professionnelle et devait relever et garantir la société O... des condamnations prononcées à son encontre sous déduction des éventuelles franchises prévues au contrat, d'avoir dit que la responsabilité du sinistre incombait pour moitié chacune aux sociétés Y... et O..., d'avoir dit que la société Allianz IARD devait garantir son assurée la société O... des condamnations prononcées à son encontre sous réserve des franchises contractuelles et des plafonds de garantie prévus au contrat d'assurance n°[...]9 au titre des garanties responsabilité civile après livraison et responsabilité civile professionnelle, d'avoir, en conséquence, condamné la société Allianz IARD, in solidum avec les sociétés Y..., O... et Axa France IARD à payer à la société Moulin [...] la somme de 241.194,88 € HT en réparation de son préjudice matériel et la somme de 414.111,66 € HT en réparation de son préjudice d'exploitation, et d'avoir dit que la société Axa France IARD serait relevée et garantie de la condamnation prononcée à son encontre par la société Allianz IARD, in solidum avec la société Y..., lesquelles supporteraient cette condamnation dans leurs rapports entre elles à hauteur de 50% chacune ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE, sur la garantie de la société Allianz, assureur de O..., il résulte des pièces produites et des explications des parties que la société O... a souscrit successivement deux contrats d'assurance responsabilité civile auprès de la compagnie Le Gan, aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la société Allianz :
- un premier contrat nº [...]1 à effet du 1er janvier 2005 qui a pris fin le 31 décembre 2010
- un second contrat nº [...]9 à effet du 1er janvier 2011 ; que le second contrat, en vigueur à la date du sinistre du 22 juillet 2011, est en base réclamation ; que la société Gan a déclaré ouvrir un dossier sinistre suite au litige opposant la société O... à la Snc Moulin [...] consécutivement à la fabrication et à l'installation d'une turbine dans la centrale hydroélectrique du Moulin [...] au titre du contrat [...]9 le 20 septembre 2011 ; qu'en l'espèce, tant le fait dommageable que la réclamation sont intervenues alors qu'était en vigueur le contrat responsabilité civile [...]9, contrat ayant pris la suite du précédent nº [...]1 ; que la garantie subséquente invoquée par la Snc Moulin [...] au titre du premier contrat responsabilité civile n'a pas vocation à s'appliquer en l'espèce puisqu'en application des dispositions de l'article
L 124-5 du code des assurances elle ne couvre les sinistres dont le fait dommageable a été connu de l'assuré postérieurement à la date de résiliation ou d'expiration que si, au moment où l'assuré a eu connaissance du fait dommageable, cette garantie n'a pas été resouscrite ; que compte tenu du nouveau contrat responsabilité civile souscrit à effet du 1er janvier 2011, le sinistre survenu le 22 juillet 2011 et ayant fait l'objet d'une réclamation pendant le cours de ce contrat, est soumis aux dispositions du contrat [...]9 et non à celles du contrat [...]1 ayant pris fin au 31 décembre 2010, la date de la déclaration d'ouverture de chantier étant, s'agissant en l'espèce de la couverture d'une responsabilité civile de droit commun et non d'un sinistre objet de la garantie obligatoire décennale du constructeur, sans incidence ; que le contrat nº [...]9 est assorti de conditions spéciales produites au débat ; que dans la mesure où aucune des conditions générales n'est invoquée par l'assureur pour échapper à sa garantie et où les conditions spéciales, invoquées, reçoivent application en sus des conditions générales, la non production de ces dernières n'a pas d'incidence sur l'appréciation du présent litige ; que la société Allianz, venant aux droits du Gan, invoque un certain nombre d'exclusions de garantie pour conclure à sa non prise en charge des conséquences dommageables du sinistre du 22 juillet 2011 ; que la Snc Moulin [...], outre la discussion sur la validité des clauses d'exclusion invoquées, soutient que la société Allianz aurait fait preuve de déloyauté pour contester tardivement sa garantie ; que néanmoins il ressort tant de l'accusé de réception de la déclaration de sinistre que du dire à l'expert du 28 novembre 2013 que la société Allianz n'est intervenue à la procédure que sous réserve de la mobilisation de ses garanties, mobilisation qu'elle a contestée, et qu'elle est intervenue à l'instance sur assignation et de manière distincte de son assurée O... dont elle n'a pas assuré la direction du procès ; qu'à aucun moment la société Allianz n'a renoncé à invoquer les clause d'exclusions figurant au contrat d'assurance de O... ; qu'aux termes des conditions spéciales du contrat responsabilité Entreprises [...]9 la société O... a souscrit auprès du Gan pour ses activités de conception, fabrication, installations et réparations de turbines et d'équipements pour centrales hydroélectriques, négoce de pièces indispensables au fonctionnement d'une centrale hydroélectrique, telles que multiplicateurs et génératrices une assurance responsabilité civile exploitation, une assurance responsabilité civile après livraison, une assurance responsabilité civile professionnelle ; que la garantie responsabilité civile après livraison a vocation à garantir l'assuré contre les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile pouvant lui incomber en raison des dommages corporels, matériels et immatériels survenant après livraison et causés aux tiers :
- par un vice propre (de la nature de ceux visés à l'article
1641 du code civil) ou un défaut de sécurité (au sens de l'article
1386-1 du code civil) des produits, ou par une malfaçon des travaux (notamment erreur ou omission commise dans la conception, la préparation, la fabrication, la transformation, la réparation, la manipulation, l'emballage, l'étiquetage, le stockage, la livraison, la présentation, le montage ou l'application)
- par une erreur ou omission commise dans les prestations accessoires à la commercialisation des produits ou à l'exécution des travaux (notamment instructions d'emploi, préconisations, conseils, formation ou assistance technique) ; que cette garantie est accordée pour les dommages corporels, matériels et immatériels, consécutifs ou non, dans la limite pour ces derniers d'un plafond de 1.200.000 € par année d'assurance ; qu'aux termes du contrat le dommage immatériel s'entend de tout préjudice pécuniaire qui résulte de la privation de jouissance totale ou partielle d'un bien ou d'un droit, de la perte d'un bénéfice, de la perte de clientèle, de l'interruption d'un service ou d'une activité, le dommage immatériel consécutif étant celui qui est la conséquence directe de dommages matériels garantis tandis que le dommage immatériel non consécutif est celui qui résulte soit d'un dommage corporel ou matériel non garanti soit d'un événement n'entraînant pas de dommage corporel ou matériel ; que par ailleurs la garantie responsabilité civile après livraison précise que la garantie de la responsabilité civile de l'assuré s'applique aux dommages immatériels non consécutifs résultant d'un dommage matériel causé aux produits livrés ou aux biens ayant fait l'objet des travaux par suite d'un vice caché des produits ou de malfaçon dans les travaux, d'un vice caché des produits livrés n'entraînant pas de dommage matériel à ces produits ou encore d'une malfaçon des travaux n'entraînant pas de dommage matériel aux biens ayant fait l'objet des travaux ; que cette assurance précise en outre que l'assureur indemnise l'assuré des frais qu'il a engagés pendant la période de validité du contrat pour la dépose du produit livré qui révèle un vice caché ou un défaut de sécurité après incorporation dans un autre produit sauf lorsque la pose initiale faisait l'objet de la prestation contractuelle de l'assuré à savoir : les frais de recherche pour repérer le produit défectueux, les frais de dépose du produit défectueux et de repose du produit réparé ou du produit de remplacement, les frais de transport du produit défectueux pour réparation et du produit réparé ou de remplacement, les frais supplémentaires de main d'oeuvre ; que les conditions spéciales de la police prévoient, s'agissant des dommages matériels pour la garantie responsabilité après livraison, l'exclusion d'une part, du coût du remboursement, de remplacement, de réparation ou de modification du produit ou du travail à l'origine du dommage ainsi que les frais destinés à remplir complètement l'engagement contractuel ou ceux occasionnés par la vente, d'autre part, les frais de mise en conformité ou de remboursement des produits ou travaux non conformes à la commande ou au marché ; que ces clauses qui n'excluent que le coût de remboursement, de mise en conformité, de remplacement, de réparation ou de modification du produit lui-même ou du travail à l'origine du dommage causé aux tiers, figurant de manière lisible aux conditions spéciales et non ambiguës, n'ont pas pour effet de vider la garantie accordée de sa substance puisqu'elles laissent subsister la garantie des dommages corporels, des dommages matériels extérieurs au produit lui-même, et des dommages immatériels causés aux tiers des suites du vice ou de la non-conformité du matériel conçu ou fourni par l'assuré ; que le coût du remplacement et des réparations du multiplicateur défaillant, conçu, construit et posé par O... ne peut donc être couvert par la garantie responsabilité civile après livraison ; qu'en revanche, les pertes d'exploitation ci-dessus évaluées constituent des préjudices immatériels non consécutifs mobilisant la police responsabilité civile après livraison ; que sur ce point, la clause excluant les dommages immatériels non consécutifs résultant de l'absence ou de l'insuffisance de performance ou de résultat du produit, travaux ou prestations livrées, c'est à dire leur inaptitude totale ou partielle à atteindre les critères techniques contractuellement définis, n'a pas vocation à s'appliquer au cas d'espèce, contrairement à ce que soutient la société Allianz, les pertes d'exploitation ci-dessus chiffrées ne résultant pas d'une inaptitude du produit livré à atteindre des critères techniques contractuellement définis, mais résultant de l'arrêt de la centrale hydroélectrique des suites de la rupture de la courroie C4 par suite d'un défaut de conception du multiplicateur à courroie imputable à l'assurée O... qui n'a pu être mis en évidence qu'après une longue expertise judiciaire ; que la société Allianz doit donc sa garantie à la société O... à l'égard de la Snc Moulin [...] au titre des pertes d'exploitations ci-dessus chiffrées sous réserve de la franchise contractuelle prévue pour les préjudices immatériels non consécutifs de la garantie responsabilité civile après livraison ; que par ailleurs la Snc Moulin [...] invoque aussi la garantie responsabilité civile professionnelle souscrite par O... ; qu'aux termes de celle-ci l'assureur garantit l'assuré contre les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile pouvant lui incomber en raison des dommages corporels, matériels et immatériels causés aux tiers par la prestation intellectuelle fournie par l'assuré et résultant de l'inexécution d'une obligation contractuelle, la garantie s'appliquant notamment du fait de faute, erreur, omission ou négligence commise dans l'exécution de la prestation, du défaut ou d'insuffisance de rendement, de performance ou de résultat des prestations ou de leur inadéquation aux besoins des tiers ; qu'en l'espèce, ainsi qu'il a été retenu ci-dessus, le multiplicateur à courroie conçu par O... est inadéquat et impropre à l'usage auquel il était contractuellement destiné pour avoir été réalisé sur des bases de calculs révélant des valeurs limites ainsi qu'un rapport de transmission inhabituel pour ce type de centrale, générant un risque de rupture permanent des courroies quelles qu'elles soient, rupture avérée le 22 juillet 2011, avec les conséquences qui en ont découlé, arrêt de la centrale et pertes d'exploitations. Les dommages matériels qui en découlent pour la Snc Moulin [...] tiers victime, à savoir la nécessité de remplacer le multiplicateur à courroie par un multiplicateur à engrenages et les dommages immatériels sont la conséquence directe de la prestation intellectuelle fournie par O... et résultent de l'inexécution de ses obligations contractuelles puisqu'elle était tenue de concevoir un multiplicateur satisfaisant à son office sur les bases qu'elle avait elle-même définies avec la société Y... et sur lesquelles elle s'était engagée à l'égard de la Snc ; qu'au regard de la garantie souscrite au titre de la prestation intellectuelle fournie par l'assuré destinée à garantir les conséquences dommageables des fautes, erreurs, omissions ou négligences commises dans l'exécution de la prestation, l'exclusion de garantie invoquée par la société Allianz figurant à l'article 18 des conditions spéciales, laquelle tend à exclure le coût de la prestation de l'assuré, de sa réfection, de son adaptation ou de son amélioration ou les frais destinés à obtenir les résultats requis ou à mener à terme la prestation c'est à dire l'essentiel des conséquences matérielles du vice de conception intellectuelle conduit à vider cette garantie de sa substance de sorte qu'elle ne peut être considérée comme limitée au sens de l'article
L 113-1 du code des assurances et ne peut recevoir application ; que dans ces conditions, la société Allianz est tenue à réparation au titre de cette garantie tant du dommage matériel résultant du coût de remplacement du multiplicateur, que des dommages immatériels consécutifs à savoir les pertes d'exploitation résultant de l'arrêt de la centrale dans les conditions ci-dessus rappelées, sous réserve des franchises contractuelles et des plafonds de garantie ; que le jugement entrepris doit donc être confirmé en ce qu'il a dit que la société Allianz devait sa garantie à la société O... sur le terrain de la responsabilité civile professionnelle ; qu'y ajoutant, la compagnie Allianz sera condamnée in solidum avec son assurée O... et les autres coobligés, dans la limite des franchises contractuelles (10 % avec un minimum de 20.000 € et un maximum de 60.000 €) et des plafonds de garantie à payer à la Snc Moulin [...] les sommes qui lui ont été allouées ci-dessus à titre de dommages et intérêts ; que compte tenu du partage de responsabilité instauré entre la société Y... et la société O..., la société Y... doit être condamnée à relever et garantir la société Allianz à hauteur de la moitié des condamnations prononcées à son encontre (arrêt, p. 22 à 25) ;
ET AUX MOTIFS RÉPUTÉS ADOPTÉS QU' il ressort des pièces du dossier que le contrat souscrit par O... auprès de la Compagnie Allianz venant aux droits du Gan Eurocourtage, le 9 février 2007 a pris fin selon Allianz, le 31 décembre 2010 ; que la société O... a souscrit le ter janvier 2011, auprès d'Allianz un contrat d'assurance sous le n° [...]9, garantissant les activités suivantes « conception, fabrication, installation et réparation de turbine et d'équipements pour centrales hydroélectriques. Négoce de pièces indispensables au fonctionnement d'une centrale hydroélectrique, telles que multiplicateur, génératrice » ; que le marché relatif au multiplicateur est signé par O... le 27 février 2007 alors que la couverture de l'assureur relève du contrat en cours jusqu'au 31 décembre 2010 ; que le fait dommageable est survenu le 22 juillet 2011, la mise en cause de la société O... est intervenue le 8 septembre 2011 ; qu'à ces deux dates , la société O... était couverte en responsabilité civile par le contrat souscrit le 1er Janvier 2011, pour la conception , fabrication, installation, et réparation de turbine et d'équipements pour centrales hydroélectriques. Négoce de pièces indispensables au fonctionnement d'une centrale hydroélectrique , telles que multiplicateur ; que l'article
L.124-5 du code des Assurances dispose que « la garantie est, selon le choix des parties, déclenchée soit par le fait dommageable, soit par la réclamation ; que dans la convention spéciale n° 41279 501-2011 dont extrait est versé aux débats par Allianz, en matière d'assurance RC fonctionnant en base réclamation « c'est l'assureur RC au jour de la déclaration de sinistre qui est le seul susceptible de voir ses garanties mobilisées. » ; qu'Allianz fonde son refus de garantie sur le fait que la police consentie à O... « est une police d'assurance facultative qui ne couvre donc pas l'activité décennale obligatoire telle que définie aux articles 1792 et suivants du Code Civil ; qu'il résulte du rapport de l'expert judiciaire, dont le Tribunal adopte les conclusions, que l'origine des désordres est de deux ordres : - inadéquation de la quatrième courroie qui après sa rupture a provoqué un arrêt de centrale pendant 15 mois, - mauvaise conception du multiplicateur ; qu'Allianz ne peut sérieusement soutenir que ces désordres relèvent d'une garantie décennale ; qu'en revanche, la responsabilité civile professionnelle est bien garantie par la police souscrite ; que c'est d'ailleurs ce que confirme Allianz dans ses conclusions (pages 11 et 12) « la police souscrite par la société O... est une police RC professionnelle qui garantit (O...) sous diverses conditions et exclusions-tant : sa responsabilité civile après livraison .... par un vice propre ....des produits, ou par une malfaçon des travaux (notamment erreur ou omission commise dans la conception) par une erreur ou omission commise dans les prestations (jugement, p. 44 et 45) ;
1°) ALORS QUE le juge est tenu de respecter le contrat, qui constitue la loi des parties ; qu'en l'espèce, la garantie « Responsabilité civile professionnelle » stipulée au contrat d'assurance souscrit par la société O... couvrait uniquement les dommages causés aux tiers « par la prestation intellectuelle fournie par l'assuré et résultant de l'inexécution d'une obligation contractuelle » ; que cette garantie, distincte de celle couvrant la « Responsabilité civile Après livraison », n'avait pas vocation à s'appliquer en cas de dommages causés par l'installation conçue et réalisée par l'assuré, mais seulement en cas de dommages causés par une prestation de nature exclusivement intellectuelle ; que la cour d'appel a décidé que la garantie « Responsabilité civile professionnelle » pouvait s'appliquer en même temps que la garantie « Responsabilité civile Après livraison », après avoir constaté que la garantie « Responsabilité civile professionnelle » ne concernait que les dommages résultant de « la prestation intellectuelle fournie par l'assuré et résultant de l'inexécution d'une obligation contractuelle » (arrêt, p. 24 § 6) et considéré que les dommages résultaient de ce que « le multiplicateur à courroie conçu par O... est inadéquat et impropre à l'usage auquel il était contractuellement destiné pour avoir été réalisé sur des bases de calcul révélant des valeurs limites ainsi qu'un rapport de transmission inhabituel pour ce type de central, générant un risque de rupture permanent des courroies » (arrêt, p. 24 dernier §) ; qu'en se prononçant ainsi, tandis qu'il résultait de ses propres constatations que les dommages ne procédaient pas de l'exécution d'une prestation intellectuelle, mais de la conception et de la réalisation d'une installation livrée au maître de l'ouvrage, la cour d'appel a violé l'article
1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, devenu l'article
1103 du même code ;
2°) ALORS QUE, SUBSIDIAIREMENT, les clauses d'exclusion stipulées dans un contrat d'assurance sont valables dès lors qu'elles sont formelles et limitées ; qu'est formelle et limitée la clause qui exclut de la garantie le coût de réfection ou de reprise de la prestation accomplie par l'assuré, dès lors que demeurent couverts les dommages causés par cette prestation ; que la cour d'appel a jugé que la clause excluant, au titre de la garantie « Responsabilité civile professionnelle », « le coût de la prestation de l'assuré, de sa réfection, de son adaptation ou de son amélioration ou les frais destinés à obtenir les résultats requis ou à mener à terme la prestation » n'était pas formelle et limitée, puisqu'elle concernait « l'essentiel des conséquences matérielles du vice de conception intellectuelle » et conduisait « à vider cette garantie de sa substance » (arrêt, p. 25 § 1) ; qu'en se prononçant ainsi, tandis que la clause laissait subsister, dans le champ de la garantie, à la fois les dommages matériels causés par la prestation défectueuse, et les dommages immatériels consécutifs, lesquels ont d'ailleurs été mis à la charge de la société Allianz au titre de la garantie « Responsabilité civile professionnelle » par la cour d'appel (arrêt, p. 25 § 2), de sorte que la clause d'exclusion était à la fois formelle et limitée, la cour d'appel a violé l'article
L. 113-1 du code des assurances ;
3°) ALORS QUE les clauses d'exclusion stipulées dans un contrat d'assurance sont valables dès lors qu'elles sont formelles et limitées ; qu'en l'espèce, la société Allianz IARD se prévalait, au titre de la garantie « Responsabilité Après livraison », d'une clause d'exclusion relative aux « dommages immatériels non consécutifs résultant de l'absence ou de l'insuffisance de performance ou de résultat des produits, travaux ou prestations livrés (c'est-à-dire leur inaptitude totale ou partielle à atteindre les critères techniques contractuellement définis », et faisait valoir que les pertes immatérielles alléguées par la société Moulin [...] étaient la conséquence directe de l'impossibilité d'obtenir une production d'électricité pérenne pour la réalisation de laquelle la centrale avait été conçue et réalisée (concl., p. 24) ; que la cour d'appel a décidé au contraire que les pertes d'exploitation ne résultaient « pas d'une inaptitude du produit livré à atteindre des critères techniques contractuellement définis, mais résultant de l'arrêt de la centrale hydroélectrique des suites de la rupture de la courroie C4 par suite d'un défaut de conception du multiplicateur à courroie imputable à l'assurée O... qui n'a pu être mis en évidence qu'après une longue expertise judiciaire » (arrêt, p. 24 § 3) ; qu'en se prononçant ainsi, tandis qu'il résultait de ses propres constatations que les pertes d'exploitation résultaient de l'absence de résultat de l'installation litigieuse, qui était dès lors impropre à satisfaire l'objectif de production pérenne d'électricité poursuivi par la société Moulin [...], la cour d'appel a violé l'article
1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, devenu l'article
1103 du même code.
DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la responsabilité du sinistre incombait pour moitié chacune aux sociétés Y... et O..., d'avoir mis hors de cause la société D..., et d'avoir condamné la société Allianz IARD, in solidum avec les sociétés Y..., O... et Axa France IARD à payer à la société Moulin [...] la somme de 241.194,88 € HT en réparation de son préjudice matériel et la somme de 414.111,66 € HT en réparation de son préjudice d'exploitation ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE, sur les causes du sinistre du 22 juillet 2011, il ressort du rapport d'expertise judiciaire que la courroie dite C4 (4ème courroie mise en place), en aramide, a été installée le 3 février 2010 et a rompu le 22 juillet 2011 après avoir fonctionné pendant 10.984 heures, provoquant l'arrêt de la centrale pendant 15 mois ; que l'expert a constaté le 28 février 2012 que cette courroie, encore en place, était fortement usée et présentait des arrachements de dents et qu'une grande quantité de poussière de caoutchouc se trouvait sur le sol, les paliers et les grilles d'aération de la génératrice ; qu'il a conclu qu'avant remise en route de la centrale avec une nouvelle courroie il convenait de contrôler la génératrice ainsi que d'autres éléments ; qu'auparavant, depuis la mise en circulation, les deux premières courroies (C1 et C2) avaient dû être changées suite à des erreurs de livraison et de fabrication reconnues par l'ensemble des parties à l'expertise ; que la courroie nº 3 a été remplacée principalement pour des problèmes de bruit ; que l'expert précise que cette courroie C4 n'était pas adaptée pour ce type de centrale hydro-électrique mais qu'elle a cependant permis de mettre en évidence des problèmes de conception, son usure ayant été probablement accélérée par les problèmes de conception relevés à savoir :
- un entraxe des deux poulies situé à la valeur limite du minimum acceptable - un diamètre de la petite poulie à une valeur très proche de la valeur minimale autorisée imposant des contraintes mécaniques importantes aux courroies
- un rapport de transmission (8,7) très largement supérieur aux rapports couramment utilisés dans la majorité des centrales de ce type (5)
- une longueur de courroie utilisée proche de la longueur limite pour ce type de courroies, les courroies utilisées dans cette installation étant toujours à leur limite d'utilisation
- une longueur maximum possible en déroulé des courroies empêchant d'avoir un rapport de transmission faible, des diamètres de poulies plus grands, des entraxes plus importants qui permettraient de transporter la puissance fournie ; que l'expert conclut que :
- étant donné la position de la turbine, la solution qui consisterait à conserver la génératrice de 750 tr/m en augmentant le diamètre de la poulie n'est pas possible (entraxe et longueur de courroie trop importants), les calculs étant explicités en page 44 du rapport
- l'utilisation d'une génératrice de 500 tr/m reste possible mais les calculs montrent que si l'on utilise un diamètre de génératrice de 400 mm la longueur de la courroie devient très proche voire dépasse les longueurs maximales autorisées ; que lors de la réunion d'expertise du 4 septembre 2013 l'expert a constaté que depuis le 11 octobre 2012 une cinquième courroie avait été installée et fonctionnait depuis 7184 heures pendant une période de 11 mois. Il a noté sur le fonctionnement de la génératrice que lorsque le «S» sortait de la poulie de la turbine le brin mou de la courroie vibrait et qu'au niveau de ce «S» la courroie subissait un déplacement vertical d'environ 2 à 3 mm. Il a aussi noté, à l'arrêt, sur toute la longueur de la courroie, une usure visible à l'oeil nu sur le dessus de la 14ème dent en partant du bas, une coloration cuivrée sur le sommet de la 14ème dent de la grande poulie et trois zones de couleur différentes sur la petite poulie ; que l'expert s'est de nouveau rendu sur les lieux le 25 février 2014 après que le gardien de la centrale ait constaté des battements anormaux de la courroie, une réduction du bruit et l'augmentation du dépôt de poussière noire ; que l'expert a constaté l'absence de bruit de claquement, un dépôt de poussière noire aux alentours du multiplicateur, au niveau de la sortie de la courroie, sur les grilles d'aération de la génératrice ; qu'il a constaté que la fréquence de vibration de la courroie (13 Hz) était tout à fait anormale et indiquait que la courroie s'était détendue, phénomène entraînant la disparition du bruit de claquement et l'apparition d'un glissement plus important provoquant la production des poussières noires, confirmant que le bruit de claquement était directement lié à la tension de la courroie ; qu'il a précisé que le glissement de la courroie pouvait s'expliquer par l'usure de la courroie, par la déformation de sa structure ou par la puissance transmise. Il a indiqué que le faible diamètre de la petite poulie nécessitait une tension de la courroie très importante, laquelle tension, alliée au glissement, entraînait une usure rapide et peut- être même une déformation ; qu'il a relevé que la production rapide de ce phénomène était très probablement corrélée à la forte puissance produite par la centrale au mois de janvier 2014 ; qu'il en a déduit que tant que les puissances fournies sont basses la centrale fonctionne sans problème apparent mais que dès que les puissances dépassent 320 kW, les problèmes apparaissent ; que tel a été le cas en 2011, où avait été enregistrée une puissance de 380 kW, les puissances de décembre 2013 et janvier 2014 ayant quant à elles dépassé les 320 kW et ce, alors que contractuellement, la génératrice est capable de fournir 400 kW ; que sur les préconisations de l'expert il a été procédé le 10 avril 2014 à une tension de la courroie. Après de nouveaux calculs de bruyance et du glissement, l'expert a observé une diminution du glissement corrélativement à l'augmentation de la tension, ce qu'il indique être normal, une augmentation du glissement depuis le 25 février au niveau de la petite poulie, les bruits de claquement ayant disparu des suites de l'usure de courroie, phénomène qui selon lui ne pouvait que s'amplifier, et il a conclu que pour éviter un glissement trop important il faudrait soit augmenter le diamètre de la petite poulie de façon significative, soit tendre encore davantage la courroie par augmentation de la fréquence, ce qui entraînerait davantage de bruit et une usure bien plus importante qui détruirait rapidement la courroie ; qu'après toutes ses constatations, analyses et mesures, l'expert conclut que sur le plan technique la conception du multiplicateur est telle que l'ensemble des cotes utilisées font que la courroie est très près de, voire dépasse, ses limites d'utilisation ce qui se traduit par une usure prématurée de la courroie largement supérieure à une usure normale et par une bruyance au-delà du seuil contractuel ; qu'il indique qu'au stade de la conception ces problèmes étaient prévisibles :
- diamètre de la petite poulie trop petit au regard de la puissance à transmettre
- rapport de transmission important (8,7) sachant qu'un rapport de 5 est communément employé dans ce type de transmission
- entraxe des deux poulies à la limite inférieure
- tension de la courroie très importante à cause du diamètre de la petite poulie et de la puissance à transmettre (usure accrue de la courroie et des paliers)
- bruit prévisible à cause de la forme en «S» d'une partie de la courroie et de la tension de celle-ci
-puissance maximum de la centrale de 400 kW en valeur contractuelle alors que la courroie installée ne peut transmettre que 384 kW ; qu'il en retient que le multiplicateur conçu entraîne une usure importante des courroies, lesquelles doivent être régulièrement retendues sous peine d'augmentation du glissement générant une perte d'exploitation et une usure irréversible et conclut qu'un tel multiplicateur n'aurait jamais dû être construit et que pour la centrale du Moulin [...] il aurait fallu utiliser un multiplicateur à engrenage ou installer une machine synchrone en bout d'arbre de la turbine équipée d'une électronique associée, solutions qui existaient le jour de la conception du multiplicateur ; que ces constatations et analyses ne peuvent être utilement remises en cause par le rapport d'expertise non contradictoire de M. E..., mandaté par Y... après le dépôt du rapport d'expertise judiciaire, daté du 23 juillet 2015, lequel ne s'est jamais rendu sur place et n'a donc vu ni l'installation ni les courroies et se contente de valider les choix techniques de conception en se retranchant derrière les interventions de la société D... ; que le représentant de cette dernière lors de la réunion d'expertise du 4 juillet 2012 a expressément indiqué que compte tenu de la génératrice choisie la société O... avait demandé à D... que les calculs de dimensionnement soient refaits pour que la vitesse de la génératrice atteigne 750 tours, que les calculs fournis par D... pour les nouvelles dimensions donnaient un rapport de 8,7, ce rapport n'étant pas couramment utilisé pour la transmission de telles puissances, et qu'une alerte avait été donnée par le logiciel d'D..., les poulies et les courroies ayant néanmoins été fabriquées ; qu'il a été précisé lors de la réunion d'expertise du 18 septembre 2012 par le représentant de la société D... que lors de la transmission des résultats ci-dessus, elle aurait mis en garde oralement la société O... sur le fait que le rapport demandé (8,7) était en dehors des spécifications de la courroie ; que l'avis de M. E... qui considère que le rapport de 8,7 n'est pas exceptionnel et a été validé par D... n'est donc pas de nature à remettre utilement et objectivement en cause les analyses de l'expert judiciaire sur la conception du multiplicateur ; que par ailleurs M. E... fait totalement l'impasse sur le phénomène de glissement observé sur site par l'expert judiciaire ; qu'après le dépôt du rapport d'expertise judiciaire, le 7 mai 2015, il a été constaté par huissier de justice (pièce 53 de la Snc) que la courroie était endommagée sur environ 13 centimètres de longueur et deux centimètres de hauteur alors que la puissance active de la centrale relevée était de 348 kW et que la tension de la courroie oscillait entre 14 et 15 Hz ; que de ces éléments, qui ne sont pas utilement techniquement et objectivement combattus, il ressort que, quelles que soient les courroies installées, y compris la dernière (C5), parfaitement adaptée à une centrale hydroélectrique (modèle Micro Hydro HTTP), leur usure prématurée et rapide est inhérente à la conception du multiplicateur ; qu'il en résulte que le sinistre du 22 juillet 2011 a pour cause déterminante, non une non-conformité de la courroie nº 4, mais un défaut de conception du multiplicateur ; qu'en conséquence, le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a mis hors de cause la société Netco, fournisseur de cette quatrième courroie ; que de même la responsabilité de la société D... en qualité de fabricant de cette quatrième courroie ne peut être recherchée dans la survenance du sinistre objet du présent litige ;
5º/ Sur les responsabilités, que le contrat de maîtrise d'oeuvre signé entre la Snc Moulin [...] et Y... le 18 mai 2006 pour la réalisation de la centrale hydroélectrique [...] est un marché de maîtrise d'oeuvre complète comprenant notamment la réalisation d'études d'avant-projet devant permettre au maître de l'ouvrage d'arrêter définitivement le programme et certains choix d'équipements en fonction de l'estimation des coûts d'investissement, d'exploitation et de maintenance, le maître d'oeuvre devant remettre au maître de l'ouvrage le descriptif détaillé des solutions techniques retenues et notamment des installations techniques, l'assistance pour la passation des contrats de travaux avec préparation de la consultation des entreprises sur la base de pièces administratives et techniques et établissement d'un dossier de consultation des entreprises, l'analyse des offres et notamment des méthodes et solutions techniques en s'assurant qu'elles sont assorties de toutes justifications et avis techniques, sans omission, erreurs ou contradictions normalement décelables par un homme de l'art, l'établissement d'un rapport d'analyse comparative proposant les offres susceptibles d'être retenues, les propositions de sélection soumises au maître de l'ouvrage, la mise au point des marchés de travaux et la direction de l'exécution des contrats de travaux outre l'assistance aux opérations de réception et ce, moyennant une rémunération de 81.567,20 € ; que les conditions dans lesquelles la société O... a pu être consultée et sélectionnée en vue des marchés turbine et multiplicateur ne sont pas explicitées ni ne résultent des pièces produites au débat, mais il est justifié que cette dernière a signé avec la Snc Moulin [...] le 27 février 2007 les marchés correspondant aux lots «Turbine» et «Multiplicateur» ; que le cahier des clauses techniques particulières du marché concernant le multiplicateur établi par le maître d'oeuvre énonce qu'il a pour objet la réalisation et la fourniture d'un multiplicateur de vitesse à axes verticaux de puissance 400 kW à installer sur l'arbre de la turbine avec génératrice asynchrone, une vitesse nominale de générateur de 750 tr/mn, une vitesse de sortie de turbine de 86 tr/mn et un couple de surcharge admissible de 3k ; qu'il précise que le fournisseur fournira les charges, réactions d'appuis, les calculs d'accouplement, l'étude de vitesse critique devant être assurée par le constructeur du multiplicateur ; que l'article 5.1.4 prévoyait un système à engrenages ; que le même jour que la signature du marché, un avenant a été dressé par le maître d'oeuvre, Y..., signé par O... et approuvé par le maître de l'ouvrage, prévoyant le remplacement du multiplicateur à engrenages prévu au cahier des clauses techniques particulières par un multiplicateur de type courroie avec les mêmes caractéristiques de vitesse : poulie moteur, vitesse de rotation 86 tr/mn, diamètre 2480 mm, poulie réceptrice, vitesse de rotation 750 tr/mn, diamètre 277 mm ; qu'il s'évince des échanges de messages électroniques entre la société G... et la société D... que le 6 février 2007, la société G..., pour le compte de O... avait sollicité des calculs pour un multiplicateur à courroie envisageant deux solutions, une solution (1) pour une puissance de 500 kW, avec vitesse de rotation entrée de 86 tr/min, vitesse de rotation sortie de 750 tr/min, entraxe à la convenance d'D..., le moins encombrant possible, et une solution (2) pour une puissance de 500 kW avec vitesse de rotation entrée de 86 tr/min mais vitesse de rotation sortie de 500 tr/min, sollicitant une réponse rapide et indiquant avoir besoin des diamètres de poulies et de l'entraxe que prévoiraient D... ; que le 13 février 2007 un premier calcul était transmis par D... à G... pour O..., semblant correspondre à la solution nº2 (pièce 3 de D...) ; que lors de la réunion d'expertise du 4 juillet 2012 le représentant d'D... a déclaré que sa société avait été contactée par le maître d'oeuvre afin de définir le diamètre et la largeur des deux poulies devant correspondre à la courroie à fabriquer, ces diamètres devant tenir compte des vitesses de la turbine et de la génératrice ; qu'il a précisé que dans un premier temps les dimensions données pour le diamètre des deux poulies correspondaient à un rapport d'environ cinq (rapport du diamètre de la grande poulie sur le diamètre de la petite poulie), la génératrice tournant à 500 tours, puis que compte tenu de la génératrice choisie la société O... a demandé que les calculs soient refaits pour que la vitesse de la génératrice soit de 750 tours ; que de fait, le 28 février 2007, la société G... sollicitait pour le compte de O... la reprise du calcul avec une vitesse de rotation de 750 tr/mn avec une vitesse moteur restant de 86 tr/mn, précisant que le rapport de transmission était modifié (diamètre réceptrice plus petit) ; que le jour même la société D... formulait ses préconisations pour une micro centrale 500 kW 750 tr/mn à l'intention de O... via G... dans les termes suivants :
- moteur strié diamètre 2415 mm
- vitesse moteur:86 tr/mn
- vitesse récepteur : 750 tr/mn
- récepteur striée diamètre : 277 mm (en fonction du rapport de transmission 8.72)
- entraxe client : min 2000 mm/max 3000 mm
- données D... entraxe sous tension 2674 mm (en fonction de la tolérance longueur)
- puissance moteur 500 kW
- quantité 100/an ; qu'étaient joints un schéma de la transmission, des relevés de mesures, les préconisations pour une courroie Poly V ; qu'il ne peut qu'être observé que les caractéristiques techniques du multiplicateur figurant à l'avenant nº1 signé le 27 février, telles qu'énoncées ci-dessus, sont identiques à celles transmises par la société D... à G... pour O... le 28 février ; que cependant lors de la réunion d'expertise du 4 juillet 2012 le représentant d'D... a bien confirmé que les données fournies par D... ont été conservées pour la réalisation de la centrale hydroélectrique, que le rapport de 8.7 n'était pas un rapport couramment utilisé pour la transmission de telles puissances, et qu'une alerte avait été donnée par le logiciel ; que cette alerte est confirmée par le résultat logiciel des données saisies produit en pièce 65 par la Snc Moulin [...], lequel fait ressortir une anomalie pour le calcul de la vitesse motrice et une alerte pour le diamètre récepteur de 277 mm ; qu'il ressort de l'ensemble de ces éléments que le maître d'oeuvre Y... a proposé la modification du choix initial d'un multiplicateur à engrenages pour un multiplicateur à courroie le jour même de la signature du marché avec O..., sans que les raisons de cette modification de dernière heure soit explicitées, que O..., pour réaliser le multiplicateur à courroie dont elle était chargée contractuellement a fait appel à la société G..., professionnel de la transmission, pour l'obtention de calculs des diamètres des poulies et des entraxes sur des bases de puissances données par O... et prévues au cahier des clauses techniques particulières rédigé par le maître d'oeuvre Y..., et que la société G..., laquelle n'a jamais été appelée à la procédure, s'est adressée à D... pour la réalisation des calculs qu'elle a ensuite transmis à O... ; que l'expertise n'a pas remis en cause les calculs délivrés in fine par D... à partir de son logiciel ; que la société D... qui a répondu aux demandes de G..., spécialiste de la transmission, sur les bases indiquées par O..., spécialiste de la conception et de la construction de microcentrales hydroélectriques, et produit des calculs exacts, ne pouvait être tenue à l'égard de ces deux professionnels d'un devoir de conseil quelconque, ceux-ci étant à même d'analyser au regard de leur spécialité et de leur compétence technique les calculs qui leur étaient transmis et d'en apprécier les incidences quant aux mesures limites révélées ; qu'étrangère aux marchés de travaux préparés par le maître d'oeuvre Y... pour le compte de la Snc Moulin [...] tout comme au projet de réalisation de la centrale du Moulin [...] elle ne pouvait davantage être tenue d'un quelconque devoir de conseil que ce soit à l'égard de Y... ou de la Snc Moulin [...] ; qu'aucune faute n'étant caractérisée à son encontre dans la réalisation de ses calculs sa responsabilité ne peut être recherchée ni par la Snc Moulin [...] ni par la société Y... ni par la société O... ; que le jugement entrepris doit donc être confirmé en ce qu'il l'a mise hors de cause ; que le sinistre trouve sa clause déterminante, ainsi que retenu ci-dessus, dans l'inadéquation du multiplicateur réalisé par O... sous le contrôle du maître d'oeuvre Y... qui a proposé au maître de l'ouvrage, novice en la matière puisqu'il s'agissait de sa première centrale, le jour même de la signature du marché, la réalisation d'un multiplicateur à courroie au lieu du multiplicateur à engrenages initialement prévu et ce, sur des bases de calculs révélant des valeurs limites ainsi qu'un rapport de transmission inhabituel pour ce type de centrale (8,7), ce qui ne pouvait échapper ni à O... au regard de sa spécialité professionnelle, ni à Y..., bureau d'études techniques et maître d'oeuvre de conception et d'exécution de la centrale ; que l'expert judiciaire précise dans sa réponse au dire de Y... du 28 novembre 2013 (page 63 du rapport) que pour des puissances transmises de l'ordre de 400 kW un rapport de 8,7 ne pouvait apporter que des problèmes ce que personne n'ignore, toutes les centrales qui fonctionnent correctement et dont la courroie a une durée de vie de plus de dix ans ayant un rapport de 5 et générant une puissance maximum de 200 à 250 kW ; qu'il relève en outre que le choix du diamètre de la petite poulie était ouvert, mais que c'est cependant celui de 277 mm qui a été retenu alors que celui de 400 mm était possible ; qu'au regard des défauts de conception relevés tant Y... que O... engagent leur responsabilité contractuelle à l'égard de la Snc Moulin [...] ; que les fautes respectives de Y... et O... ayant contribué ensemble à la réalisation du sinistre du 22 juillet 2011, leur responsabilité à l'égard de la Snc Moulin [...] doit être retenue in solidum contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, et dans leurs rapports entre eux, la responsabilité doit être partagée par moitié (arrêt, p. 11 à 16) ;
ET AUX MOTIFS RÉPUTÉS ADOPTÉS QUE, sur les responsabilités de la société Y..., le marché de maîtrise d'oeuvre confié à Y... le 27 mai 2006 par la SNC Le Moulin des Illes est versé aux débats, il est accepté par Y... le 13 juin 2006 ; qu'il concerne la réhabilitation du Moulin [...] en centrale hydroélectrique ; que la mission confiée à Y... comprend :
l'étude d'avant-projet définitif, soit :
-Déterminer les surfaces détaillées de tous les éléments du programme,
-Arrêter en plans, coupes et façades, les dimensions de l'ouvrage, ainsi que son aspect,
-Définir les principes constructifs, de fondation et de structure, ainsi que leur dimensionnement indicatif.
-Définir les matériaux.
-Établir l'estimation définitive du coût prévisionnel des travaux, décomposés en lots séparés. -Permettre au maître d'ouvrage d'arrêter définitivement le programme et certains choix d'équipements en fonction de l'estimation des coûts d'investissement, d'exploitation et de maintenance,
Assistance pour la passation des contrats de travaux ; que le marché prévoit que le Maître d'oeuvre apporte son assistance au Maître d'ouvrage pour la passation du ou des contrats de travaux, sur la base des études qu'il a approuvées, à savoir : -Préparer la consultation des entreprises de manière telle que celles-ci puissent présenter leurs offres en toute connaissance de cause, sur la base d'un dossier constitué des pièces administratives et techniques prévues au contrat ainsi que des pièces élaborées par le maître d'oeuvre, correspondant à l'étape de la conception choisie par le Maître d'Ouvrage pour cette consultation ; que le Tribunal rappellera qu'à ce stade c'est le système d'entraînement par engrenage qui a été choisi par le Maître d'Ouvrage ; que ces documents démontrent sans aucune ambiguïté que le Maître d'oeuvre à conçu et conseillé au Maître d'Ouvrage le système d'entraînement par engrenage ; qu'en date du 27 Février 2007, il est signé entre Le Moulin des Illes (maître d'ouvrage) et O... (constructeur) un avenant dressé Dar le Maître d'OEuvre Y... au terme duquel : « le multiplicateur à engrenage comme stipulé dans le CCTP est remplacé par un multiplicateur type courroie avec les mêmes caractéristiques de vitesse » ; que, dès lors, au regard des obligations contractuelles du marché rappelées ci-dessus, la Société Y..., en sa qualité de Concepteur principal du projet et Conseil du Maître d'Ouvrage ne peut sérieusement soutenir qu'elle n'a aucune responsabilité quant au choix du système d'entraînement, même s'il apparaît que ce choix lui a été suggéré par O..., laquelle, par société intermédiaire avait préalablement fait questionner D... sur le principe d'un entraînement par courroie ; que la société Y... a manifestement avalisé cette solution dont l'expert affirme avec force qu'elle n'aurait jamais dû être adoptée, en fonction notamment de la taille incompatible des deux poulies vu leur différence excessive de diamètre ; que la société Y... n'a donc pas rempli ses obligations contractuelles prévues au marché notamment dans la conception du multiplicateur que dans son devoir de conseil à la SNC Moulin [...] ; qu'en conséquence, la Société Moulin [...] est fondée, en droit, à faire constater la défaillance de la Société Y... dans l'exécution de ses obligations contractuelles avec toutes conséquences qui en découlent ; que sur les responsabilités de la société O..., la société O..., spécialiste incontesté de la construction de Centrales hydroélectrique, a accepté et signé un Marché le 27 Février 2007, versé aux débats le liant à la SNC Moulin [...], concernant notamment le lot N° 4 de la construction d'une centrale hydroélectrique sur le Salat à Prat-Bonrepaux ; que ce marché avait été établi par la société Y... ; qu'il prévoyait en particulier la construction par O... d'un multiplicateur entraîné par engrenage ; que le même jour était signé entre les parties, un avenant modifiant le système d'entraînement substituant l'entraînement par engrenage par un entraînement par courroie ; que cet avenant avait été établi par la Société Y..., laquelle ne pouvait qu'avoir avalisé cette modification dans le cadre de son mandat de Maître d'oeuvre ; que cependant, il ressort d'une pièce versée aux débats que la Société O... avait demandé à la Société D... via la Société G... le calcul pour une courroie en Poly V D..., cette dernière a fourni ses calcul le 13 Février 2007 par la même voie ; qu'il ne peut être sérieusement contesté que O... après consultation indirecte d'D..., a suggéré et obtenu l'établissement de l'avenant du 27 février 2007 avec l'accord de la Société Y..., Maître d'oeuvre ; qu'à ce sujet, l'Expert déclare « il semblerait que ces calculs aient été plus ou moins orientés par les demandes qui ont été faites (à D...) encombrement et entraxe, » ; qu'il convient de rappeler que l'Expert estime qu'au stade de la conception, les problèmes de courroies étaient prévisibles ; qu'un tel multiplicateur n'aurait jamais dû être construit ; que pour cette centrale il aurait fallu utiliser un multiplicateur à engrenage ; que dès lors, la Société O... en sa qualité de Constructeur du multiplicateur, ne peut sérieusement soutenir qu'elle n'a aucune responsabilité quant au choix du système d'entraînement par courroie ; que les pièces du dossier justifient que c'est O... qui a suggéré le système d'entraînement à courroie, que d'autre part, elle a conjointement avec la Société Y... signé l'avenant adoptant ce dernier système ; qu'en conséquence, la Société Moulin [...] est bien fondée en droit, sur le fondement contractuel, de tirer les conséquences à l'égard de O..., du défaut de conception et de construction du Multiplicateur, avec toutes conséquences qui en découlent ; que sur la responsabilité de la société Netco, par jugement du 27 mai 2013, le tribunal de Commerce de Foix a pris acte de l'appel en cause des Sociétés Netco et D... requis par la SNC Moulin [...] ; que la SNC Moulin [...] demande la condamnation solidaire de tous les acteurs de la construction de la Centrale Hydroélectrique à réparer l'ensemble des préjudices subis consécutifs aux multiples dysfonctionnements de l'installation, au nombre desquels la Société Netco ; qu'il est établi que la Société Netco est le fournisseur de la seule quatrième courroie ; que la Sté Netco verse aux débats une commande passée le 7 Mai 2008 par la Société de Travaux Publics Sévigné à la Société Netco pour une courroie Poly V 9931 PM 46 structure Aramide EM 17 suivant descriptif contrôlé avec M. S... O... , Objet: Centrale de Prat Bonrepaux ; que le Tribunal constatera que cet intermédiaire est nullement mis en cause par les parties et qu'il n'a pas qualifié dans sa commande la Centrale comme étant une Centrale Hydroélectrique ; qu'il apparaît cependant que Sévigné Travaux Publics était en liaison avec O... puisque le descriptif a été contrôlé avec M. S... (O...) ; qu'il n'est pas justifié d'un lien contractuel entre Le Moulin des Illes et la Sté Netco ; que la Société Netco réceptionnaire de cette commande, à son tour, a passé le 28 Mai 2008 à la Société [...] une commande pour cette même courroie avec les mêmes références, sans autre précision quant à la destination de celle-ci ; que le lieu de livraison prévu étant Netco - [...] ; qu'il est probable que [...] possédait ce type de courroie en stock puisqu'il est versé aux débats copie de sa commande en date du 12 Mars 2008 à D... pour une courroie comportant exactement les références déjà précisées ; qu'en conséquence, d'une part qu'il est établi que la Société Netco n'a jamais été informée des caractéristiques de la Centrale du Maître d'Ouvrage, notamment de celles du multiplicateur ; que d'autre part il est incontestable qu'elle n'a aucune responsabilité dans les défauts de conception pointés par l'Expert Judiciaire, que la Société Netco devra être mise hors de cause ; que sur les responsabilités de la société D..., la SNC Moulin [...] demande la condamnation solidaire de tous les acteurs de la construction de sa centrale hydroélectrique à réparer l'ensemble des préjudices subis consécutifs aux multiples dysfonctionnements de l'installation, au nombre desquels acteurs, la SNC D... ; que le projet initial conçu par la Sté Y... (maître d'oeuvre) et la Sté O... (constructeur du multiplicateur) prévoyait un entraînement par engrenage ; que par Avenant en date du 27 février 2007 dressé par Y... et signé par la SNC Moulin [...] (maître d'ouvrage) et O... (constructeur du Multiplicateur) « le multiplicateur à engrenage comme stipulé dans le CCTP, est remplacé par un multiplicateur type courroie avec les mêmes caractéristiques » ; que la Sté D... verse aux débats le texte d'une consultation faite par la Société G... (qui n'est pas appelée en la cause) auprès de la Société D... datée du 6 Février 2007 dont texte suivant : « objet O...) Bonjour, peux-tu me faire les calculs suivants pour un multiplicateur à courroie, Une réponse d'ici fin de semaine. Nous avons donc besoin des diamètres de poulies et l'entraxe que vous prévoyeriez; Suite à l'arrêt de ce marché , nous vous recontacterons pour un devis complet pour la fourniture de ce système. » ; qu'il est évident qu'à ce stade la Sté D... ignore le nom du Maître d'Ouvrage et qu'il s'agit d'une centrale hydroélectrique. Par contre, elle n'ignore pas que ses calculs sont destinés à O... via G... ; que suivant pièce versée aux débats, la Société D... communique à G... le 13 février 2007 les renseignements demandés destinés à la Société O... ; qu'il sera constaté que c'est après cette consultation , et donc à l'initiative de la Sté O... qu'un avenant sera proposé et signé le 27 Février 2007, actant le remplacement de l'entraînement par engrenage par l'entraînement par courroie ; que suivant pièce versée aux débats, le 28/2/2007 la Société D... adresse un nouveau calcul à O... via G... en fonction des données client, qu'il connaît être O... ; qu'il n'est pas justifié d'autre part qu'il sache que la courroie pour laquelle il fournit les calculs est destinée à équiper une centrale hydroélectrique, que le 12 Mars 2008 la Société [...] (qui n'est pas appelée en la cause) adresse une Commande à la Société D... pour : 1 courroie poly v 9931 PM structure aramide EM 17, Cette commande ne précise aucunement la destination finale ; que selon bordereau de livraison du 15 mai 2008 la Société D... facture la dite courroie à la Société [...] , il n'y est pas fait référence à un quelconque destinataire final ; que dans la journée du 12 décembre 2008 ont lieu des échanges de mail entre G... (non appelé en la cause) et la Société D... : G... indiquant à D... « conformément à ce qui avait été convenu avec Monsieur S... de chez O... nous avons procédé au remplacement de la courroie mardi 10 décembre 2008, Pouvez-vous m'indiquer l'adresse et les modalités pour le retour de la courroie incriminée ; qu'un nouvel échange de mail a eu lieu les 3 et 4 juin 2009 entre G... et D..., O... était dans la boucle ; qu'il concerne un bruit de frottement engendré par le contact entre les poulies et la gomme ou d'emprisonnement de l'air en fond de denture ; que par courrier du 9 décembre 2009, adressé à la Société G..., la Société D... lui notifie sa conclusion après une visite sur le site de la [...] : « bien qu'D... comprenne la problématique du client qui souhaite un fonctionnement feutré de la courroie, la nuisance sonore est jugée conforme aux installations industrielles de ce type. D'autre part, D... n'a observé aucun phénomène dégradant qui réduirait la durée de vie de la courroie ou la fonction principale d'électricité et qui impliquerait donc un changement de cette courroie » ; qu'il résulte de l'ensemble des pièces versées aux débats que la Société D... n'a jamais eu de lien contractuel avec la SNC Moulin [...] ; que la SNC D... ne peut relever des dispositions de l'article
1792 du Code Civil puisque n'étant pas constructeur de l'ouvrage ; que D... n'a eu pour interlocuteur direct que la Sté G... laquelle était l'intermédiaire de la Société O... ;qu'il apparaît que ce sont ces deux dernières sociétés qui ont transmis à SNC D... les données du calcul produit par cette dernière ; que ces deux sociétés paraissent être des professionnels de la transmission parfaitement aptes à apprécier les informations transmises par D... et à l'égard desquelles D... n'avait aucun obligation de conseil ; qu'enfin il apparaît que D... n'a eu lors de la conception du projet aucun contact direct les concepteurs et constructeurs (Y... et O...) que D... a été approchée par O... par l'intermédiaire de G... qui n'a pas indiqué à D... les caractéristiques du Multiplicateur ; qu'il apparaît que D... n'ayant aucun lien contractuel avec Le Moulin des Illes, n'a pas commis de faute délictuelle à l'égard de cette dernière ; que d'autre part, D... n'était pas tenue d'un devoir de conseil à l'égard de son propre cocontractant la Société G... ou même de la Société O..., tous deux professionnels avisés ; qu'enfin l'Expert dans son rapport estime que le multiplicateur n'aurait jamais dû être équipé d'un système de transmission par courroie ; que le tribunal mettra hors de cause la SNC D... et déboutera le société Moulin [...] de toutes ses demandes ;
1°) ALORS QUE tout fait générateur sans lequel le dommage ne serait pas survenu constitue une cause nécessaire de ce dommage ; qu'en l'espèce, la société Allianz IARD faisait valoir que, selon l'expert judiciaire, le sinistre avait été notamment causé par une inadaptation de la courroie C4, qui s'était rompue, au multiplicateur équipant la centrale hydroélectrique, de sorte que la société D..., fournisseur de cette courroie, avait contribué par sa faute à la survenance du sinistre (concl., p. 27) ; que la cour d'appel a pourtant jugé que le sinistre du 22 juillet 2011 avait « pour cause déterminante, non une non-conformité de la courroie n°4, mais un défaut de conception du multiplicateur » et a, dès lors, mis hors de cause la société D... (arrêt, p. 13 § 4) ; qu'en se prononçant ainsi, sans rechercher si l'inadaptation de la courroie C4, destinée à équiper une centrale hydroélectrique à la conception de laquelle la société D... avait participé, avait contribué, ne serait-ce que pour partie, à sa rupture prématurée et constituait, dès lors l'une des causes du sinistre du 22 juillet 2011, ce qui était de nature à engager la responsabilité de son fabricant, la société D..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article
1604 du code civil ;
2°) ALORS QUE le professionnel chargé d'une prestation intellectuelle est tenu, envers son client, de lui en communiquer les résultats avec exactitude ; qu'une telle prestation implique, le cas échéant, une mise en garde sur les risques révélés par les résultats de cette prestation ; qu'en l'espèce, la société Allianz IARD faisait valoir qu'elle avait chargé la société D..., par l'intermédiaire de la société G..., d'une prestation de calcul de dimensionnement du multiplicateur, sur la base des données fournies par la société Y... (concl., p. 31) ; qu'elle ajoutait que l'expert judiciaire avait conclu que le dimensionnement, tel qu'il résultait du calcul effectué par la société D..., faisait ressortir que l'installation, telle que conçue par la société Y..., se situait aux limites de toutes les contraintes admissibles et que la société D... avait pourtant validé ce calcul (concl., p. 34), sans alerter la société O... sur les incohérences de la construction envisagée et les risques pris en réalisant cette installation (concl., p. 35) ; que, pour décider le contraire, la cour d'appel a jugé que la société D... n'était pas tenue d'un devoir de conseil à l'égard de la société O..., spécialiste de la conception et de la construction de microcentrales hydroélectriques, celle-ci étant à même d'analyser, au regard de sa spécialité et de leur compétence technique les calculs qui lui avaient été transmis et d'en apprécier les incidences quant aux mesures limites révélées (arrêt, p. 15 dernier §) ; qu'en se prononçant ainsi, tandis que la société D..., chez qui la cour d'appel a relevé que, lors de ses calculs, une alerte avait été émise par le logiciel, devait rendre compte de ces calculs en précisant cette alerte, peu important les compétences de la société O... qui ne la dispensaient pas d'accomplir sa prestation, la cour d'appel a violé l'article
1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.
TROISIÈME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la responsabilité du sinistre incombait pour moitié chacune aux sociétés Y... et O..., d'avoir condamné la société Allianz IARD, in solidum avec les sociétés Y..., O... et Axa France IARD à payer à la société Moulin [...] la somme de 241.194,88 € HT en réparation de son préjudice matériel et la somme de 414.111,66 € HT en réparation de son préjudice d'exploitation, et d'avoir dit que la société Axa France IARD serait relevée et garantie de la condamnation prononcée à son encontre par la société Allianz IARD, in solidum avec la société Y..., lesquelles supporteraient cette condamnation dans leurs rapports entre elles à hauteur de 50% chacune ;
AUX MOTIFS QU' au regard des défauts de conception relevés tant Y... que O... engagent leur responsabilité contractuelle à l'égard de la Snc Moulin [...] ; que les fautes respectives de Y... et O... ayant contribué ensemble à la réalisation du sinistre du 22 juillet 2011, leur responsabilité à l'égard de la Snc Moulin [...] doit être retenue in solidum contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, et dans leurs rapports entre eux, la responsabilité doit être partagée par moitié (arrêt, p. 16 § 3 et 4) ;
ALORS QUE la contribution à la dette de responsabilité est déterminée en fonction de la gravité des fautes respectives des responsables ; qu'en l'espèce, la société Allianz IARD faisait valoir que la société Y... avait été chargée de la conception générale de l'installation et, notamment, avait défini quatre solutions techniques, dont celle d'un multiplicateur à courroie à rainure longitudinale avec un rapport de multiplication de 8,7 finalement retenue (concl., p. 31) ; qu'elle ajoutait que la société Y... avait chargé la société O... de la réalisation de ce type de multiplicateur, et que l'expert judiciaire avait conclu que le principe même d'un tel multiplicateur aurait dû être exclu compte tenu des contraintes de l'installation de la société Moulin [...] (concl., p. 32) ; qu'elle en concluait que la société Y... avait commis une faute prépondérante puisqu'elle avait défini le principe constructif critiqué par l'expert judiciaire, de sorte qu'elle devait supporter la majeure part de la dette de responsabilité (concl., p. 35) ; que la cour d'appel s'est néanmoins bornée à répartir cette dette entre les sociétés O... et Y... à hauteur de moitié chacune (arrêt, p. 16 § 4) ; qu'en se prononçant ainsi, sans procéder à la moindre analyse de la gravité respective des fautes reprochées à ces deux sociétés, et sans rechercher, comme elle y était invitée, si la société Y..., en tant que concepteur de l'installation, avait commis la faute la plus grave en optant pour un principe constructif inadapté, que la société O... s'était contentée de réaliser sur ses instructions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article
1382 du code civil, dans sa rédaction applicable en la cause, devenu l'article
1240 du même code.
QUATRIÈME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Allianz IARD, in solidum avec les sociétés Y..., O... et Axa France IARD à payer à la société Moulin [...] la somme de 414.111,66 € HT en réparation de son préjudice d'exploitation ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE, des suites du sinistre du 22 juillet 2011 la centrale est restée arrêtée pendant 15 mois sans que la cause de ce sinistre ait pu être déterminée avant l'examen de l'installation et de la 4ème courroie rompue et la mise en place le 11 octobre 2012 d'une cinquième courroie et l'observation de son fonctionnement, l'expertise judiciaire ayant été ordonnée dès le 23 janvier 2012 après une expertise amiable diligentée par la Sa Axa France Iard en janvier 2012 suite à une déclaration de sinistre de la Snc Moulin [...] du 22 juillet 2011 ; qu'aucune carence fautive ne peut être reprochée à ce titre à la Snc Moulin [...] ; que la cause déterminante du sinistre résultant du défaut de conception ci-dessus retenu, toutes les argumentations liées aux courroies elles-mêmes sont sans incidence sur l'appréciation du préjudice d'exploitation invoqué par la Snc Moulin [...] ; que les pertes d'exploitation résultant directement et nécessairement d'un arrêt de la centrale suite à un défaut de conception ou un dysfonctionnement du multiplicateur étaient prévisibles au moment de la signature du contrat entre la Snc Moulin [...] et la société O... au sens des dispositions de l'article 1150 ancien du code civil, devenu 1231-1 ; qu'aucune clause limitative de responsabilité n'a été prévue à ce titre dans la convention ; que pour calculer la perte de production pendant l'arrêt de la centrale l'expert judiciaire s'est basé sur les productions mensuelles des cinq dernières années dont il a établi les moyennes, c'est à dire depuis la mise en route de la centrale, la production variant selon les périodes de l'année en fonction du niveau d'eau et du débit du Salat à partir duquel la centrale fonctionne et produit de l'électricité ; que ces productions mensuelles résultent des productions nettes en kWh facturées mensuellement par la Snc Moulin [...] à EDF après déduction de la propre consommation de la centrale, produites à l'expert et produites au débat ; qu'en outre, l'expert judiciaire a justement pris en compte, en sus, une majoration de 5 % correspondant aux pertes liées aux arrêts lors des interventions sur les courroies mais surtout aux pertes de rendement induites par le mauvais fonctionnement des courroies, portant ainsi la perte de production totale pendant la période d'arrêt ayant suivi le sinistre du 22 juillet 2011 à la somme de 213.209,20 € HT, montant inférieur à l'estimation de production calculée par la société Y... dans l'étude de faisabilité du projet s'élevant pour la même période à 258.666 € HT ; que par ailleurs, l'analyse des résultats de la centrale depuis sa mise en fonctionnement permet une appréciation plus fine du préjudice effectivement subi qu'une limitation arbitraire aux trois années précédant le sinistre ; qu'ainsi que le soutient justement la société Y..., la perte de production correspond à une perte de chiffre d'affaires et n'est pas exactement identique à la perte d'exploitation, laquelle doit tenir compte des charges supportées en toute hypothèse par l'exploitant, la perte d'exploitation devant correspondre à la perte effective de marge sur le chiffre d'affaires ; que sur ce point, la seule charge fixe supportée par la Snc Moulin [...] consiste, le coût de la propre consommation de la centrale étant d'ores et déjà déduit, au vu des éléments du dossier, en la présence d'un gardien sur le site chargé de surveiller le fonctionnement des installations ; que dans ces conditions, il peut être retenu, ainsi que le soutient la société Y... dont la proposition n'est remise en cause par aucun élément comptable émanant de la Snc Moulin [...], que la perte effective de marge de cette dernière correspond à 94 % de la perte de production ; que le préjudice d'exploitation résultant pour la Snc Moulin [...] de l'arrêt de la centrale pendant les quinze mois écoulés du 22 juillet 2011 au 11 octobre 2012 pendant lesquels elle n'a rien produit, ressort à 94 %x 213.209,20 = 200.416,65, arrondie à 200.417 € HT ; qu'à cette somme doivent s'ajouter les pertes d'exploitation inhérentes à l'arrêt de la centrale sur la période des quatre mois nécessaires à sa remise en état, travaux à réaliser, représentant, au vu des calculs de moyennes de l'expert judiciaire, une somme totale à retenir de 68.699,77x 94 %, soit la somme de 64.577,78 arrondie à 64.578 € HT ; qu'il ressort en outre du rapport d'expertise judiciaire que la société EDF a versé 80 % de la prime correspondant à la majoration de qualité au fur et à mesure de la facturation (51.359,85 € HT) et devait ensuite verser les 20 % restant (16.292,78 € HT), et que la Snc Moulin [...] a dû rembourser la somme de 51.359,85 € HT et n'a pas bénéficié de la somme de 16.292,78 € HT ; que par ailleurs les incidents survenus sur la centrale ont fait perdre à la Snc Moulin [...] la majoration de qualité sur la période quinquennale suivante, soit la somme de 81.464,03 € HT ; qu'enfin, lors de la remise en état de la centrale les quatre mois d'arrêt nécessaires pénaliseront encore la Snc Moulin [...] sur la majoration de qualité pour un montant pouvant être évalué au vu des éléments ci-dessus à 5.430,09 € (81.464/60x4) ; qu'il n'est pas contesté que la Snc Moulin [...] a dû rembourser à EDF suite aux quinze mois d'arrêt de la centrale les sommes perçues au titre de la majoration qualité (soit 80% du tarif de la majoration prévue au contrat pendant les cinq premières années d'exploitation) ; qu'elle n'a en outre pas pu percevoir les 20 % restant dus sur la première période quinquennale, l'engagement pris d'un coefficient d'irrégularité inférieur à 0,20 lui permettant de bénéficier d'une majoration de qualité de 100 % n'ayant pas été respecté ; que contrairement à ce qui est soutenu, la Snc Moulin [...] n'a pas pu obtenir l'annulation des mois de production liés au sinistre du 22 juillet 2011 ; qu'il ressort en effet du courrier adressé par EDF à la Snc Moulin [...] le 5 juillet 2012 que la Snc Moulin [...] a bien déclaré à EDF le sinistre du 22 juillet 2011 ayant entraîné l'arrêt de la production et que EDF a invoqué l'annexe 3 des conditions générales du contrat la liant à la Snc pour considérer que l'incident n'entrait pas dans la correction des défaillances imputables soit à des accidents survenus au matériel ou aux ouvrages de génie civil, soit à des arrêts d'entretien normal et que de ce fait la période concernée par l'arrêt de production ne pouvait être retirée du calcul et de la régularisation de la majoration de qualité à laquelle la Snc pouvait prétendre, le taux de majoration de qualité devant être modifié et une régularisation en résultant ; qu'aucune défaillance n'est donc imputable à la Snc Moulin [...] dans la gestion du sinistre du 22 juillet 2011 à l'égard de EDF ; que par ailleurs le contrat avec EDF prévoit bien que pour la période quinquennale suivant les cinq premières années d'exploitation les taux réels de majoration de qualité sont calculés au vu des productions des cinq premières années d'exploitation de la centrale, une régularisation étant opérée sur les cinq années écoulées ; que compte tenu de la perte de production subie sur les cinq premières années d'exercice avec obligation de remboursement de la majoration qualité perçue pour la production de novembre 2008 à mars 2013, nécessairement, la majoration de qualité de 100 % a été perdue pour les cinq années suivantes de production de novembre 2013 à mars 2018, soit une perte de 81.464,03 € au vu des estimations de la production des mois d'hiver 2013/2018 sans arrêt d'exploitation vérifiées par l'expert judiciaire ; que le premier juge a donc justement retenu une perte effective de majorations de qualité de 149.116,66 € HT (51.359,85 + 16.292,78 + 81.464,03) ; qu'en conséquence, au vu des éléments retenus ci-dessus, infirmant le jugement entrepris, la société Y... et la société O... doivent donc être condamnées à payer à la Snc Moulin [...] la somme totale de 414.111,66 € HT au titre des pertes d'exploitation subies des suites des quinze mois d'arrêt de la centrale consécutives au sinistre du 22 juillet 2011, sous déduction des sommes déjà perçues à ce titre par la Snc en vertu de l'exécution provisoire ordonnée par le premier juge (arrêt, p. 17 à 19) ;
ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE la SNC Moulin [...] ne peut se prévaloir auprès d'EDF d'une prestation de qualité en raison d'une part des multiples arrêts de la centrale et d'autre part de livraisons non conformes à l'objectif de qualité, nécessaires pour obtenir une majoration de qualité (jugement, p. 41) ; qu'il est incontestable que durant sa remise en état, la centrale sera improductive ; qu'ainsi la SNC Moulin [...] va subir une nouvelle fois une perte d'exploitation correctement chiffrée par l'expert à 68.699,77 € HT (jugement, p. 42) ;
1°) ALORS QUE le juge doit réparer le préjudice sans qu'il en résulte ni perte ni profit pour la victime ; que pour allouer à la société Moulin [...] la somme de 64.578 € HT au titre des pertes d'exploitation pour la période nécessaire aux travaux de remise en état, la cour d'appel s'est fondée sur une durée de quatre mois estimée par l'expert judiciaire (arrêt, p. 18 § 8) ; qu'en se prononçant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il résultait des ordres de services produits aux débats, relatifs à ces travaux de remise en état, qu'ils devaient débuter le 7 mai 2015 pour s'achever le 26 mois suivant, soit une durée de 19 jours et non de quatre mois (concl., p. 42 § 3), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article
1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 et du principe de la réparation intégrale ;
2°) ALORS QUE le juge doit réparer le préjudice sans qu'il en résulte ni perte ni profit pour la victime ; que pour allouer à la société Moulin [...] la somme de 64.578 € HT au titre des pertes d'exploitation pour la période nécessaire aux travaux de remise en état, la cour d'appel a utilisé comme assiette de calcul le chiffre d'affaires annuel moyen de la société Moulin [...], incluant notamment les revenus tirés de l'exploitation de la centrale pendant les mois d'hiver sur la base d'un tarif majoré et d'une demande importante (arrêt, p. 18 § 8) ; qu'en se prononçant ainsi sans rechercher, comme elle y était invitée (concl., p. 41 § 10), si les travaux de remise en état ne devaient pas être nécessairement effectués sur la période des basses eaux, de sorte que la perte d'exploitation devait être calculée en tenant compte du chiffre d'affaires réalisé sur cette période, sur la base du tarif été moins élevé que le tarif hiver, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article
1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 et du principe de la réparation intégrale ;
3°) ALORS QUE le juge doit réparer le préjudice sans qu'il en résulte ni perte ni profit pour la victime ; que la cour d'appel a considéré que la société Moulin [...] subissait « nécessairement » une perte de la majoration de qualité de 100% pour la période 2013-2018 « compte tenu de la perte de production subie sur les cinq premières années d'exercice avec obligation de remboursement de la majoration qualité perçue pour la production de novembre 2008 à mars 2013 » (arrêt, p.19 § 6) ; qu'en se prononçant ainsi, tandis que la perte du bénéfice de la majoration de qualité de 100% pour la période 2008-2013 n'impliquait pas l'absence totale de majoration de qualité pour la période quinquennale suivante, le taux de majoration étant calculé sur la base de la production des cinq premières années, ainsi qu'il résulte de l'arrêt attaqué (arrêt, p. 19 § 5), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article
1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 et du principe de la réparation intégrale.
Moyen produit au pourvoi incident par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour les sociétés Moulin [...], Sogecomcler et Victoire.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR dit que la responsabilité du sinistre incombait pour moitié chacune aux sociétés Y... et O..., mis hors de cause la société D... et, en conséquence, rejeté les demandes formées par la société SNC Moulin [...] à l'encontre de la société D... ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « sur les causes du sinistre du 22 juillet 2011, il ressort du rapport d'expertise judiciaire que la courroie dite C4 (4ème courroie mise en place), en aramide, a été installée le 3 février 2010 et a rompu le 22 juillet 2011 après avoir fonctionné pendant 10.984 heures, provoquant l'arrêt de la centrale pendant 15 mois.
L'expert a constaté le 28 février 2012 que cette courroie, encore en place, était fortement usée et présentait des arrachements de dents et qu'une grande quantité de poussière de caoutchouc se trouvait sur le sol, les paliers et les grilles d'aération de la génératrice. Il a conclu qu'avant remise en route de la centrale avec une nouvelle courroie il convenait de contrôler la génératrice ainsi que d'autres éléments.
Auparavant, depuis la mise en circulation, les deux premières courroies (C1 et C2) avaient dû être changées suite à des erreurs de livraison et de fabrication reconnues par l'ensemble des parties à l'expertise. La courroie nº 3 a été remplacée principalement pour des problèmes de bruit.
L'expert précise que cette courroie C4 n'était pas adaptée pour ce type de centrale hydroélectrique mais qu'elle a cependant permis de mettre en évidence des problèmes de conception, son usure ayant été probablement accélérée par les problèmes de conception relevés à savoir :
- un entraxe des deux poulies situé à la valeur limite du minimum acceptable - un diamètre de la petite poulie à une valeur très proche de la valeur minimale autorisée imposant des contraintes mécaniques importantes aux courroies
- un rapport de transmission (8,7) très largement supérieur aux rapports couramment utilisés dans la majorité des centrales de ce type (5)
- une longueur de courroie utilisée proche de la longueur limite pour ce type de courroies, les courroies utilisées dans cette installation étant toujours à leur limite d'utilisation
- une longueur maximum possible en déroulé des courroies empêchant d'avoir un rapport de transmission faible, des diamètres de poulies plus grands, des entraxes plus importants qui permettraient de transporter la puissance fournie.
L'expert conclut que :
- étant donné la position de la turbine, la solution qui consisterait à conserver la génératrice de 750 tr/m en augmentant le diamètre de la poulie n'est pas possible (entraxe et longueur de courroie trop importants), les calculs étant explicités en page 44 du rapport
- l'utilisation d'une génératrice de 500 tr/m reste possible mais les calculs montrent que si l'on utilise un diamètre de génératrice de 400 mm la longueur de la courroie devient très proche voire dépasse les longueurs maximales autorisées.
Lors de la réunion d'expertise du 4 septembre 2013 l'expert a constaté que depuis le 11 octobre 2012 une cinquième courroie avait été installée et fonctionnait depuis 7184 heures pendant une période de 11 mois. Il a noté sur le fonctionnement de la génératrice que lorsque le «S» sortait de la poulie de la turbine le brin mou de la courroie vibrait et qu'au niveau de ce «S» la courroie subissait un déplacement vertical d'environ 2 à 3 mm. Il a aussi noté, à l'arrêt, sur toute la longueur de la courroie, une usure visible à l'oeil nu sur le dessus de la 14ème dent en partant du bas, une coloration cuivrée sur le sommet de la 14ème dent de la grande poulie et trois zones de couleur différentes sur la petite poulie.
L'expert s'est de nouveau rendu sur les lieux le 25 février 2014 après que le gardien de la centrale ait constaté des battements anormaux de la courroie, une réduction du bruit et l'augmentation du dépôt de poussière noire. L'expert a constaté l'absence de bruit de claquement, un dépôt de poussière noire aux alentours du multiplicateur, au niveau de la sortie de la courroie, sur les grilles d'aération de la génératrice. Il a constaté que la fréquence de vibration de la courroie (13 Hz) était tout à fait anormale et indiquait que la courroie s'était détendue, phénomène entraînant la disparition du bruit de claquement et l'apparition d'un glissement plus important provoquant la production des poussières noires, confirmant que le bruit de claquement était directement lié à la tension de la courroie. Il a précisé que le glissement de la courroie pouvait s'expliquer par l'usure de la courroie, par la déformation de sa structure ou par la puissance transmise. Il a indiqué que le faible diamètre de la petite poulie nécessitait une tension de la courroie très importante, laquelle tension, alliée au glissement, entraînait une usure rapide et peut- être même une déformation. Il a relevé que la production rapide de ce phénomène était très probablement corrélée à la forte puissance produite par la centrale au mois de janvier 2014. Il en a déduit que tant que les puissances fournies sont basses la centrale fonctionne sans problème apparent mais que dès que les puissances dépassent 320 kW, les problèmes apparaissent. Tel a été le cas en 2011, où avait été enregistrée une puissance de 380 kW, les puissances de décembre 2013 et janvier 2014 ayant quant à elles dépassé les 320 kW et ce, alors que contractuellement, la génératrice est capable de fournir 400 kW.
Sur les préconisations de l'expert il a été procédé le 10 avril 2014 à une tension de la courroie. Après de nouveaux calculs de bruyance et du glissement, l'expert a observé une diminution du glissement corrélativement à l'augmentation de la tension, ce qu'il indique être normal, une augmentation du glissement depuis le 25 février au niveau de la petite poulie, les bruits de claquement ayant disparu des suites de l'usure de courroie, phénomène qui selon lui ne pouvait que s'amplifier, et il a conclu que pour éviter un glissement trop important il faudrait soit augmenter le diamètre de la petite poulie de façon significative, soit tendre encore davantage la courroie par augmentation de la fréquence, ce qui entraînerait davantage de bruit et une usure bien plus importante qui détruirait rapidement la courroie.
Après toutes ses constatations, analyses et mesures, l'expert conclut que sur le plan technique la conception du multiplicateur est telle que l'ensemble des cotes utilisées font que la courroie est très près de, voire dépasse, ses limites d'utilisation ce qui se traduit par une usure prématurée de la courroie largement supérieure à une usure normale et par une bruyance au-delà du seuil contractuel. Il indique qu'au stade de la conception ces problèmes étaient prévisibles :
- diamètre de la petite poulie trop petit au regard de la puissance à transmettre
- rapport de transmission important (8,7) sachant qu'un rapport de 5 est communément employé dans ce type de transmission
- entraxe des deux poulies à la limite inférieure
- tension de la courroie très importante à cause du diamètre de la petite poulie et de la puissance à transmettre (usure accrue de la courroie et des paliers)
- bruit prévisible à cause de la forme en «S» d'une partie de la courroie et de la tension de celle-ci -puissance maximum de la centrale de 400 kW en valeur contractuelle alors que la courroie installée ne peut transmettre que 384 kW.
Il en retient que le multiplicateur conçu entraîne une usure importante des courroies, lesquelles doivent être régulièrement retendues sous peine d'augmentation du glissement générant une perte d'exploitation et une usure irréversible et conclut qu'un tel multiplicateur n'aurait jamais dû être construit et que pour la centrale du Moulin [...] il aurait fallu utiliser un multiplicateur à engrenage ou installer une machine synchrone en bout d'arbre de la turbine équipée d'une électronique associée, solutions qui existaient le jour de la conception du multiplicateur.
Ces constatations et analyses ne peuvent être utilement remises en cause par le rapport d'expertise non contradictoire de M. E..., mandaté par Y... après le dépôt du rapport d'expertise judiciaire, daté du 23 juillet 2015, lequel ne s'est jamais rendu sur place et n'a donc vu ni l'installation ni les courroies et se contente de valider les choix techniques de conception en se retranchant derrière les interventions de la société D.... Le représentant de cette dernière lors de la réunion d'expertise du 4 juillet 2012 a expressément indiqué que compte tenu de la génératrice choisie la société O... avait demandé à D... que les calculs de dimensionnement soient refaits pour que la vitesse de la génératrice atteigne 750 tours, que les calculs fournis par D... pour les nouvelles dimensions donnaient un rapport de 8,7, ce rapport n'étant pas couramment utilisé pour la transmission de telles puissances, et qu'une alerte avait été donnée par le logiciel d'D..., les poulies et les courroies ayant néanmoins été fabriquées. Il a été précisé lors de la réunion d'expertise du 18 septembre 2012 par le représentant de la société D... que lors de la transmission des résultats ci-dessus, elle aurait mis en garde oralement la société O... sur le fait que le rapport demandé (8,7) était en dehors des spécifications de la courroie. L'avis de M. E... qui considère que le rapport de 8,7 n'est pas exceptionnel et a été validé par D... n'est donc pas de nature à remettre utilement et objectivement en cause les analyses de l'expert judiciaire sur la conception du multiplicateur. Par ailleurs M. E... fait totalement l'impasse sur le phénomène de glissement observé sur site par l'expert judiciaire.
Après le dépôt du rapport d'expertise judiciaire, le 7 mai 2015, il a été constaté par huissier de justice (pièce 53 de la Snc) que la courroie était endommagée sur environ 13 centimètres de longueur et deux centimètres de hauteur alors que la puissance active de la centrale relevée était de 348 kW et que la tension de la courroie oscillait entre 14 et 15 Hz.
De ces éléments, qui ne sont pas utilement techniquement et objectivement combattus, il ressort que, quelles que soient les courroies installées, y compris la dernière (C5), parfaitement adaptée à une centrale hydroélectrique (modèle Micro Hydro HTTP), leur usure prématurée et rapide est inhérente à la conception du multiplicateur.
Il en résulte que le sinistre du 22 juillet 2011 a pour cause déterminante, non une non-conformité de la courroie nº 4, mais un défaut de conception du multiplicateur.
Enconséquence, le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a mis hors de cause la société Netco, fournisseur de cette quatrième courroie.
De même la responsabilité de la société D... en qualité de fabricant de cette quatrième courroie ne peut être recherchée dans la survenance du sinistre objet du présent litige.
5º/ Sur les responsabilités.
Le contrat de maîtrise d'oeuvre signé entre la Snc Moulin [...] et Y... le 18 mai 2006 pour la réalisation de la centrale hydroélectrique [...] est un marché de maîtrise d'oeuvre complète comprenant notamment la réalisation d'études d'avant-projet devant permettre au maître de l'ouvrage d'arrêter définitivement le programme et certains choix d'équipements en fonction de l'estimation des coûts d'investissement, d'exploitation et de maintenance, le maître d'oeuvre devant remettre au maître de l'ouvrage le descriptif détaillé des solutions techniques retenues et notamment des installations techniques, l'assistance pour la passation des contrats de travaux avec préparation de la consultation des entreprises sur la base de pièces administratives et techniques et établissement d'un dossier de consultation des entreprises, l'analyse des offres et notamment des méthodes et solutions techniques en s'assurant qu'elles sont assorties de toutes justifications et avis techniques, sans omission, erreurs ou contradictions normalement décelables par un homme de l'art, l'établissement d'un rapport d'analyse comparative proposant les offres susceptibles d'être retenues, les propositions de sélection soumises au maître de l'ouvrage, la mise au point des marchés de travaux et la direction de l'exécution des contrats de travaux outre l'assistance aux opérations de réception et ce, moyennant une rémunération de 81.567,20 €.
Les conditions dans lesquelles la société O... a pu être consultée et sélectionnée en vue des marchés turbine et multiplicateur ne sont pas explicitées ni ne résultent des pièces produites au débat, mais il est justifié que cette dernière a signé avec la Snc Moulin [...] le 27 février 2007 les marchés correspondant aux lots «Turbine» et «Multiplicateur ».
Le cahier des clauses techniques particulières du marché concernant le multiplicateur établi par le maître d'oeuvre énonce qu'il a pour objet la réalisation et la fourniture d'un multiplicateur de vitesse à axes verticaux de puissance 400 kW à installer sur l'arbre de la turbine avec génératrice asynchrone, une vitesse nominale de générateur de 750 tr/mn, une vitesse de sortie de turbine de 86 tr/mn et un couple de surcharge admissible de 3k. Il précise que le fournisseur fournira les charges, réactions d'appuis, les calculs d'accouplement, l'étude de vitesse critique devant être assurée par le constructeur du multiplicateur. L'article 5.1.4 prévoyait un système à engrenages.
Le même jour que la signature du marché, un avenant a été dressé par le maître d'oeuvre, Y..., signé par O... et approuvé par le maître de l'ouvrage, prévoyant le remplacement du multiplicateur à engrenages prévu au cahier des clauses techniques particulières par un multiplicateur de type courroie avec les mêmes caractéristiques de vitesse : poulie moteur, vitesse de rotation 86 tr/mn, diamètre 2480 mm, poulie réceptrice, vitesse de rotation 750 tr/mn, diamètre 277 mm.
Il s'évince des échanges de messages électroniques entre la société G... et la société D... que le 6 février 2007, la société G..., pour le compte de O... avait sollicité des calculs pour un multiplicateur à courroie envisageant deux solutions, une solution (1) pour une puissance de 500 kW, avec vitesse de rotation entrée de 86 tr/min, vitesse de rotation sortie de 750 tr/min, entraxe à la convenance d'D..., le moins encombrant possible, et une solution (2) pour une puissance de 500 kW avec vitesse de rotation entrée de 86 tr/min mais vitesse de rotation sortie de 500 tr/min, sollicitant une réponse rapide et indiquant avoir besoin des diamètres de poulies et de l'entraxe que prévoiraient D....
Le 13 février 2007 un premier calcul était transmis par D... à G... pour O..., semblant correspondre à la solution nº2 (pièce 3 de D...). Lors de la réunion d'expertise du 4 juillet 2012 le représentant d'D... a déclaré que sa société avait été contactée par le maître d'oeuvre afin de définir le diamètre et la largeur des deux poulies devant correspondre à la courroie à fabriquer, ces diamètres devant tenir compte des vitesses de la turbine et de la génératrice. Il a précisé que dans un premier temps les dimensions données pour le diamètre des deux poulies correspondaient à un rapport d'environ cinq (rapport du diamètre de la grande poulie sur le diamètre de la petite poulie), la génératrice tournant à 500 tours, puis que compte tenu de la génératrice choisie la société O... a demandé que les calculs soient refaits pour que la vitesse de la génératrice soit de 750 tours.
De fait, le 28 février 2007, la société G... sollicitait pour le compte de O... la reprise du calcul avec une vitesse de rotation de 750 tr/mn avec une vitesse moteur restant de 86 tr/mn, précisant que le rapport de transmission était modifié (diamètre réceptrice plus petit).
Le jour même la société D... formulait ses préconisations pour une micro centrale 500 kW 750 tr/mn à l'intention de O... via G... dans les termes suivants :
- moteur strié diamètre 2415 mm
- vitesse moteur:86 tr/mn
- vitesse récepteur : 750 tr/mn
- récepteur striée diamètre : 277 mm (en fonction du rapport de transmission 8.72)
- entraxe client : min 2000 mm/max 3000 mm
- données D... entraxe sous tension 2674 mm (en fonction de la tolérance longueur)
- puissance moteur 500 kW
- quantité 100/an.
Etaient joints un schéma de la transmission, des relevés de mesures, les préconisations pour une courroie Poly V.
Il ne peut qu'être observé que les caractéristiques techniques du multiplicateur figurant à l'avenant nº1 signé le 27 février, telles qu'énoncées ci-dessus, sont identiques à celles transmises par la société D... à G... pour O... le 28 février. Cependant lors de la réunion d'expertise du 4 juillet 2012 le représentant d'D... a bien confirmé que les données fournies par D... ont été conservées pour la réalisation de la centrale hydroélectrique, que le rapport de 8.7 n'était pas un rapport couramment utilisé pour la transmission de telles puissances, et qu'une alerte avait été donnée par le logiciel. Cette alerte est confirmée par le résultat logiciel des données saisies produit en pièce 65 par la Snc Moulin [...], lequel fait ressortir une anomalie pour le calcul de la vitesse motrice et une alerte pour le diamètre récepteur de 277 mm. Il ressort de l'ensemble de ces éléments que le maître d'oeuvre Y... a proposé la modification du choix initial d'un multiplicateur à engrenages pour un multiplicateur à courroie le jour même de la signature du marché avec O..., sans que les raisons de cette modification de dernière heure soit explicitées, que O..., pour réaliser le multiplicateur à courroie dont elle était chargée contractuellement a fait appel à la société G..., professionnel de la transmission, pour l'obtention de calculs des diamètres des poulies et des entraxes sur des bases de puissances données par O... et prévues au cahier des clauses techniques particulières rédigé par le maître d'oeuvre Y..., et que la société G..., laquelle n'a jamais été appelée à la procédure, s'est adressée à D... pour la réalisation des calculs qu'elle a ensuite transmis à O....
L'expertise n'a pas remis en cause les calculs délivrés in fine par D... à partir de son logiciel.
La société D... qui a répondu aux demandes de G..., spécialiste de la transmission, sur les bases indiquées par O..., spécialiste de la conception et de la construction de microcentrales hydroélectriques, et produit des calculs exacts, ne pouvait être tenue à l'égard de ces deux professionnels d'un devoir de conseil quelconque, ceux-ci étant à même d'analyser au regard de leur spécialité et de leur compétence technique les calculs qui leur étaient transmis et d'en apprécier les incidences quant aux mesures limites révélées. Etrangère aux marchés de travaux préparés par le maître d'oeuvre Y... pour le compte de la Snc Moulin [...] tout comme au projet de réalisation de la centrale du Moulin [...] elle ne pouvait davantage être tenue d'un quelconque devoir de conseil que ce soit à l'égard de Y... ou de la Snc Moulin des Ille.
Aucune faute n'étant caractérisée à son encontre dans la réalisation de ses calculs sa responsabilité ne peut être recherchée ni par la Snc Moulin [...] ni par la société Y... ni par la société O....
Le jugement entrepris doit donc être confirmé en ce qu'il l'a mise hors de cause » ;
ET AUX MOTIFS RÉPUTÉS ADOPTÉS QUE « sur les responsabilités de la société Y..., le marché de maîtrise d'oeuvre confié à Y... le 27 mai 2006 par la SNC Le Moulin des Illes est versé aux débats, il est accepté par Y... le 13 juin 2006.
Il concerne la réhabilitation du Moulin [...] en centrale hydroélectrique.
La mission confiée à Y... comprend :
l'étude d'avant-projet définitif, soit :
-Déterminer les surfaces détaillées de tous les éléments du programme,
-Arrêter en plans, coupes et façades, les dimensions de l'ouvrage, ainsi que son aspect,
-Définir les principes constructifs, de fondation et de structure, ainsi que leur dimensionnement indicatif.
-Définir les matériaux.
-Établir l'estimation définitive du coût prévisionnel des travaux, décomposés en lots séparés.
-Permettre au maître d'ouvrage d'arrêter définitivement le programme et certains choix d'équipements en fonction de l'estimation des coûts d'investissement, d'exploitation et de maintenance.
Assistance pour la passation des contrats de travaux.
Le marché prévoit que le Maître d'oeuvre apporte son assistance au Maître d'ouvrage pour la passation du ou des contrats de travaux, sur la base des études qu'il a approuvées, à savoir :
-Préparer la consultation des entreprises de manière telle que celles-ci puissent présenter leurs offres en toute connaissance de cause, sur la base d'un dossier constitué des pièces administratives et techniques prévues au contrat ainsi que des pièces élaborées par le maître d'oeuvre, correspondant à l'étape de la conception choisie par le Maître d'Ouvrage pour cette consultation.
Le Tribunal rappellera qu'à ce stade c'est le système d'entraînement par engrenage qui a été choisi par le Maître d'Ouvrage.
Ces documents démontrent sans aucune ambiguïté que le Maître d'oeuvre à conçu et conseillé au Maître d'Ouvrage le système d'entraînement par engrenage.
Or en date du 27 Février 2007, il est signé entre Le Moulin des Illes (maître d'ouvrage) et O... (constructeur) un avenant dressé Dar le Maître d'OEuvre Y... au terme duquel : « le multiplicateur à engrenage comme stipulé dans le CCTP est remplacé par un multiplicateur type courroie avec les mêmes caractéristiques de vitesse ».
Dès llors, au regard des obligations contractuelles du marché rappelées ci-dessus, la Société Y..., en sa qualité de Concepteur principal du projet et Conseil du Maître d'Ouvrage ne peut sérieusement soutenir qu'elle n'a aucune responsabilité quant au choix du système d'entraînement, même s'il apparaît que ce choix lui a été suggéré par O..., laquelle, par société intermédiaire avait préalablement fait questionner D... sur le principe d'un entraînement par courroie.
La société Y... a manifestement avalisé cette solution dont l'expert affirme avec force qu'elle n'aurait jamais dû être adoptée, en fonction notamment de la taille incompatible des deux poulies vu leur différence excessive de diamètre.
La société Y... n'a donc pas rempli ses obligations contractuelles prévues au marché notamment dans la conception du multiplicateur que dans son devoir de conseil à la SNC Moulin [...].
En conséquence, la Société Moulin [...] est fondée, en droit, à faire constater la défaillance de la Société Y... dans l'exécution de ses obligations contractuelles avec toutes conséquences qui en découlent.
Sur les responsabilités de la société O....
La société O..., spécialiste incontesté de la construction de Centrales hydroélectrique, a accepté et signé un Marché le 27 Février 2007, versé aux débats le liant à la SNC Moulin [...], concernant notamment le lot N° 4 de la construction d'une centrale hydroélectrique sur le Salat à Prat-Bonrepaux.
Ce marché avait été établi par la société Y....
Il prévoyait en particulier la construction par O... d'un multiplicateur entraîné par engrenage.
Le même jour était signé entre les parties, un avenant modifiant le système d'entraînement substituant l'entraînement par engrenage par un entraînement par courroie.
Cet avenant avait été établi par la Société Y..., laquelle ne pouvait qu'avoir avalisé cette modification dans le cadre de son mandat de Maître d'oeuvre.
Cependant, il ressort d'une pièce versée aux débats que la Société O... avait demandé à la Société D... via la Société G... le calcul pour une courroie en Poly V D..., cette dernière a fourni ses calculs le 13 février 2007 par la même voie.
Il ne peut être sérieusement contesté que O... après consultation indirecte d'D..., a suggéré et obtenu l'établissement de l'avenant du 27 février 2007 avec l'accord de la Société Y..., Maître d'oeuvre.
A ce sujet, l'Expert déclare « il semblerait que ces calculs aient été plus ou moins orientés par les demandes qui ont été faites (à D...) encombrement et entraxe, »
Il convient de rappeler que l'Expert estime qu'au stade de la conception, les problèmes de courroies étaient prévisibles. Un tel multiplicateur n'aurait jamais dû être construit. Pour cette centrale il aurait fallu utiliser un multiplicateur à engrenage.
Dès lors, la Société O... en sa qualité de Constructeur du multiplicateur, ne peut sérieusement soutenir qu'elle n'a aucune responsabilité quant au choix du système d'entraînement par courroie.
Les pièces du dossier justifient que c'est O... qui a suggéré le système d'entraînement à courroie, que d'autre part, elle a conjointement avec la Société Y... signé l'avenant adoptant ce dernier système. En conséquence, la Société Moulin [...] est bien fondée en droit, sur le fondement contractuel, de tirer les conséquences à l'égard de O..., du défaut de conception et de construction du Multiplicateur, avec toutes conséquences qui en découlent.
Sur la responsabilité de la société Netco,
Par jugement du 27 mai 2013, le tribunal de Commerce de Foix a pris acte de l'appel en cause des Sociétés Netco et D... requis par la SNC Moulin [...].
La SNC Moulin [...] demande la condamnation solidaire de tous les acteurs de la construction de la Centrale Hydroélectrique à réparer l'ensemble des préjudices subis consécutifs aux multiples dysfonctionnements de l'installation, au nombre desquels la Société Netco.
Il est établi que la Société Netco est le fournisseur de la seule quatrième courroie.
La Sté Netco verse aux débats une commande passée le 7 Mai 2008 par la Société de Travaux Publics Sévigné à la Société Netco pour une courroie Poly V 9931 PM 46 structure Aramide EM 17 suivant descriptif contrôlé avec M. S... O... , Objet: Centrale de Prat Bonrepaux.
Le Tribunal constatera que cet intermédiaire est nullement mis en cause par les parties et qu'il n'a pas qualifié dans sa commande la Centrale comme étant une Centrale Hydroélectrique.
Ilapparaît cependant que Sévigné Travaux Publics était en liaison avec O... puisque le descriptif a été contrôlé avec M. S... (O...).
Il n'est pas justifié d'un lien contractuel entre Le Moulin des Illes et la Sté Netco.
La Société Netco réceptionnaire de cette commande, à son tour, a passé le 28 Mai 2008 à la Société [...] une commande pour cette même courroie avec les mêmes références, sans autre précision quant à la destination de celle-ci. Le lieu de livraison prévu étant Netco - [...].
Il est probable que [...] possédait ce type de courroie en stock puisqu'il est versé aux débats copie de sa commande en date du 12 Mars 2008 à D... pour une courroie comportant exactement les références déjà précisées.
En conséquence, d'une part il est établi que la Société Netco n'a jamais été informée des caractéristiques de la Centrale du Maître d'Ouvrage, notamment de celles du multiplicateur, d'autre part il est incontestable qu'elle n'a aucune responsabilité dans les défauts de conception pointés par l'Expert Judiciaire.
La Société Netco devra être mise hors de cause.
Sur les responsabilités de la société D...,
Par jugement du 27 mai 2013, le tribunal de commerce de Foix a pris acte de l'appel en cause de la société D... requise par la SNC Moulin [...].
La SNC Moulin [...] demande la condamnation solidaire de tous les acteurs de la construction de sa centrale hydroélectrique à réparer l'ensemble des préjudices subis consécutifs aux multiples dysfonctionnements de l'installation, au nombre desquels acteurs, la SNC.
Le projet initial conçu par la Sté Y... (maître d'oeuvre) et la Sté O... (constructeur du multiplicateur) prévoyait un entraînement par engrenage.
Par avenant en date du 27 février 2007 dressé par Y... et signé par la SNC Moulin [...] (maître d'ouvrage) et O... (constructeur du Multiplicateur) « le multiplicateur à engrenage comme stipulé dans le CCTP, est remplacé par un multiplicateur type courroie avec les mêmes caractéristiques ».
La Sté D... verse aux débats le texte d'une consultation faite par la Société G... (qui n'est pas appelée en la cause) auprès de la Société D... datée du 6 Février 2007 dont texte suivant : « objet O...) Bonjour, peux-tu me faire les calculs suivants pour un multiplicateur à courroie, Une réponse d'ici fin de semaine. Nous avons donc besoin des diamètres de poulies et l'entraxe que vous prévoyeriez; Suite à l'arrêt de ce marché, nous vous recontacterons pour un devis complet pour la fourniture de ce système. ».
Il est évident qu'à ce stade la Sté D... ignore le nom du Maître d'Ouvrage et qu'il s'agit d'une centrale hydroélectrique. Par contre, elle n'ignore pas que ses calculs sont destinés à O... via G....
Suivant pièce versée aux débats, la Société D... communique à G... le 13 février 2007 les renseignements demandés destinés à la Société O....
Il sera constaté que c'est après cette consultation, et donc à l'initiative de la Sté O... qu'un avenant sera proposé et signé le 27 Février 2007, actant le remplacement de l'entraînement par engrenage par l'entraînement par courroie.
Suivant pièce versée aux débats, le 28/2/2007 la Société D... adresse un nouveau calcul à O... via G... en fonction des données client, qu'il connaît être O... ; qu'il n'est pas justifié d'autre part qu'il sache que la courroie pour laquelle il fournit les calculs est destinée à équiper une centrale hydroélectriqu.
Le 12 Mars 2008 la Société [...] (qui n'est pas appelée en la cause) adresse une Commande à la Société D... pour : 1 courroie poly v 9931 PM structure aramide EM 17, Cette commande ne précise aucunement la destination finale.
Selon bordereau de livraison du 15 mai 2008 la Société D... facture la dite courroie à la Société [...] , il n'y est pas fait référence à un quelconque destinataire final.
Dans la journée du 12 décembre 2008 ont lieu des échanges de mail entre G... (non appelé en la cause) et la Société D... : G... indiquant à D... « conformément à ce qui avait été convenu avec Monsieur S... de chez O... nous avons procédé au remplacement de la courroie mardi 10 décembre 2008, Pouvez-vous m'indiquer l'adresse et les modalités pour le retour de la courroie incriminée.
Un nouvel échange de mail a eu lieu les 3 et 4 juin 2009 entre G... et D..., O... était dans la boucle.
Il concerne un bruit de frottement engendré par le contact entre les poulies et la gomme ou d'emprisonnement de l'air en fond de denture.
Par courrier du 9 décembre 2009, adressé à la Société G..., la Société D... lui notifie sa conclusion après une visite sur le site de la [...] : « bien qu'D... comprenne la problématique du client qui souhaite un fonctionnement feutré de la courroie, la nuisance sonore est jugée conforme aux installations industrielles de ce type. D'autre part, D... n'a observé aucun phénomène dégradant qui réduirait la durée de vie de la courroie ou la fonction principale d'électricité et qui impliquerait donc un changement de cette courroie ».
Il résulte de l'ensemble des pièces versées aux débats que la Société D... n'a jamais eu de lien contractuel avec la SNC Moulin [...].
La SNC D... ne peut relever des dispositions de l'article
1792 du Code Civil puisque n'étant pas constructeur de l'ouvrage.
D... n'a eu pour interlocuteur direct que la Sté G... laquelle était l'intermédiaire de la Société O....
Il apparaît que ce sont ces deux dernières sociétés qui ont transmis à SNC D... les données du calcul produit par cette dernière.
Ces deux sociétés paraissent être des professionnels de la transmission parfaitement aptes à apprécier les informations transmises par D... et à l'égard desquelles D... n'avait aucune obligation de conseil.
Enfin il apparaît que D... n'a eu lors de la conception du projet aucun contact direct les concepteurs et constructeurs (Y... et O...) que D... a été approchée par O... par l'intermédiaire de G... qui n'a pas indiqué à D... les caractéristiques du Multiplicateur.
Il apparaît que D... n'ayant aucun lien contractuel avec Le Moulin des Illes, n'a pas commis de faute délictuelle à l'égard de cette dernière.
D'autre part, D... n'était pas tenue d'un devoir de conseil à l'égard de son propre cocontractant la Société G... ou même de la Société O..., tous deux professionnels avisés.
Enfin l'Expert dans son rapport estime que le multiplicateur n'aurait jamais dû être équipé d'un système de transmission par courroie.
Le tribunal mettra hors de cause la SNC D... et déboutera le société Moulin [...] de toutes ses demandes » ;
1°) ALORS QUE tout fait générateur sans lequel le dommage ne serait pas survenu constitue une cause nécessaire de ce dommage ; que la société le Moulin des Illes a fait valoir dans ses conclusions que l'expertise judiciaire avait démontré que le sinistre avait pour origine l'inadéquation de la 4ème courroie fabriquée par D... qui avait contribué par sa faute à la survenance du sinistre ; qu'après avoir constaté que la 4ème courroie avait rompu le 22 juillet 2011 provoquant l'arrêt de la centrale pendant 15 mois, que la courroie n'était pas adaptée pour ce type de centrale mais qu'elle avait permis de mettre en évidence des problèmes de conception, la cour d'appel a néanmoins jugé que le sinistre du 22 juillet 2011 avait « pour cause déterminante, non une non-conformité de la courroie n°4, mais un défaut de conception du multiplicateur » et elle a, dès lors, mis hors de cause la société D... ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si l'inadaptation et la non-conformité de la courroie C4 fabriquée par la société D..., qui ont provoqué sa rupture et l'arrêt de la centrale pendant 15 mois ne constituaient pas pour partie l'une des causes du sinistre du 22 juillet 2011, ce qui était de nature à engager la responsabilité de son fabricant, la société D..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article
1604 du code civil ;
2°) ALORS QUE le professionnel chargé d'une prestation intellectuelle est tenu de communiquer les résultats avec exactitude ; que la SNC Moulin [...] a fait valoir dans ses conclusions d'appel que lors des opérations d'expertise, la société D..., chargée des calculs pour un multiplicateur de type courroie, avait admis que le rapport de multiplication 86/750 tr/min excédait les préconisations standards et avait déclenché une alerte de son logiciel lors de l'établissement de ses calculs pour laquelle elle n'avait formulé aucune réserve ; qu'ayant constaté que l'expert avait relevé que le rapport de transmission (8,7) était largement supérieur aux rapports utilisés dans la majorité de ce type de centrale, et que la conception du multiplicateur était telle que la courroie dépassait ses limites d'utilisation ce qui avait conduit à une usure irréversible et prématurée, la cour d'appel a cependant énoncé qu'aucune faute n'était caractérisée à l'encontre de la société D... dans la réalisation de ses calculs, pour en déduire que sa responsabilité ne pouvait être recherchée par la société Moulin [...] ; qu'en excluant ainsi toute faute de la société D... dans la réalisation de ses calculs pour l'exonérer de sa responsabilité, sans s'expliquer sur son absence de formulation de réserves quant à l'alerte déclenchée par le rapport de multiplication proposé pour la conception du multiplicateur qui s'est avéré être la cause de l'usure prématurée et rapide des courroies et par conséquent du sinistre du 22 juillet 2011, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article
1382 du code civil dans sa rédaction applicable au litige.