Tribunal de grande instance de Paris, 23 septembre 2011, 2009/04936

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
  • Numéro de pourvoi :
    2009/04936
  • Domaine de propriété intellectuelle : BREVET
  • Numéros d'enregistrement : FR9312832
  • Parties : SEFI-INTRAFOR SAS ; SOLS ET FONDATIONS SAS / COFRASUD ; DINOBAT ; TECHNIQUE BETON ; SONOCO IPD FRANCE ; SONOCO SAS ; LANCERY SAFIRE ; TONELLI FRANCE SAS

Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Paris
2013-04-03
Tribunal de grande instance de Paris
2011-09-23

Texte intégral

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARISJUGEMENT rendu le 23 Septembre 2011 3ème chambre 2ème sectionN°RG: 09/04936 DEMANDERESSES SOCIETE S.A.S SEFI-INTRAFOR, représentée par son Président- Directeur-Général M. Laurent F.[...]91350 GRIGNYreprésentée par Me Yves MARCELLIN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D0420 SOCIETE S.A.S SOLS ET FONDATIONS, représentée par son Président-Directeur-Général M. Alexandre L.ZI920 rue Saint Gabriel45200 AMILLYreprésentée par Me Yves MARCELLIN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D0420 DÉFENDERESSESSociété COFRASUD[...]82710 BRESSOLS représentée par Me Gilles HUVELIN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D1188 Me Thierry D avocat au Barreau de PARIS Société DINOBATZone Act'Isère38570 LE CHEYLAS représentée par Me Renaud THOMAS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire Cl583 Société TECHNIQUE BETONZI avenue Albert Einstein77552 MOISSY CRAMAYEL représentée par Me Anne ALCARAZ, de la SELARL VINCI avocat au barreau de PARIS, vestiaire #L0047 Société SONOCO IPD FRANCE[...]67590 SCHWEIGHOUSE SUR MODERreprésentée par Me Jean-Luc SCHMERBER, de la SCP SCHMERBER6 ASSOCIES avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0179 Société SONOCO, SAS[...]67590 SCHWEIGHOUSE SUR MODER représentée par Me Jean-Luc SCHMERBER, de la SCP SCHMERBER6 ASSOCIES avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0179 Société LANCERY SAFIREZI de la Litte[...]92390 VILLENEUVE LA GARENNEreprésentée par Me Jean-Luc SCHMERBER, de la SCP SCHMERBER & ASSOCIES avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0179Société TONELLI FRANCE, SASAvenue du District - Parc Industriel57380 FAULQUEMONT représentée par Me Guillaume DAUCHEL, du Cabinet SEVELLEC avocat au barreau de PARIS, vestiaire W09 COMPOSITION DU TRIBUNALVéronique R, Vice-Président, signataire de la décisionEric H. Vice-PrésidentValérie DISTINGUIN, Jugeassistés de Jeanine R, FF Greffier, signataire de la décision DEBATSA l'audience du 02 Septembre 201 :tenue en audience publique JUGEMENTPrononcé en audience publiqueContradictoireen premier ressort FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES La SAS SEFI-INTRAFOR est notamment titulaire, pour l'avoir acquis le 2 juillet 2002 de la société GFA, d'un brevet français déposé le 27 octobre 1993 sous le n°93-12832, publié sous le n°2 711 704 et délivré le 5 avril 1996, ayant pour titre « Procédé permettant la réalisation, soit d'un vide, soit d'une zone déformable entre le sol et une dalle béton en utilisant un coffrage perdu biodégradable », lequel a fait l'objet d'un contrat de licence au profit de la société SOLS ET FONDATIONS. Ayant appris :- par un devis du 25 avril 2008 de la société COFRASUD à la société URBAINE DE TRAVAUX, que la société COFRASUD offrait d'utiliser et utilisait un procédé dénommé COFRASOL dont les caractéristiques reproduiraient les revendications 1 et 2 dudit brevet, - par un devis du 25 avril 2008 de la société TECHNIQUE BETON à la société URBAINE DE TRAVAUX, que la société TECHNIQUE BETON offrait d'utiliser et utilisait un procédé dénommé SOL VIDE dont les caractéristiques reproduiraient les revendications 1 et 2 dudit brevet,- par le site internet de la société DINOBAT, que cette dernière offrait d'utiliser et utilisait le même procédé dénommé SOL VIDE,- par un devis du 24 avril 2008 de la société LANCERY SAFIRE à la société URBAINE DE TRAVAUX, que la société LANCERY SAFIRE offrait d'utiliser et utilisait un procédé dénommé SONOPLASCOL dont les caractéristiques reproduiraient les revendications 1 et 2 dudit brevet,- que ce procédé SONOPLASCOL était commercialisé par les sociétés SONOCOIPD FRANCE et SONOCO, les sociétés SEFI-INTRAFOR et SOLS ET FONDATIONS ont, selon actes d'huissier des 18,20, 25 février et 4 mars 2009, fait assigner les sociétés COFRASUD, DINOBAT, TECHNIQUE BETON, SONOCO IPD FRANCE, SONOCO et LANCERY SAFIRE, devant le Tribunal de grande instance de PARIS en contrefaçon des revendications 1 et 2 du brevet français 93-12832 (2 711 704), aux fins d'obtenir, outre des mesures d'interdiction sous astreinte définitive de 15.000 euros par infraction constatée et de 100.000 euros jour de retard, que le Tribunal se réservera le pouvoir de liquider, de confiscation des dispositifs argués de contrefaçon, ainsi que la publication du jugement à intervenir dans dix journaux ou périodiques de leur choix, aux frais avancés et solidaires des sociétés défenderesses dans la limite d'un budget global de 100.000 euros pour chacune d'elle, la condamnation de chacune des défenderesses à verser à chacune d'elles la somme de 150.000 euros, à titre de provision à valoir sur l'indemnisation de leur préjudice, à fixer à dire d'expert, et celle de 20.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction au profit de leur conseil, le tout sous le bénéfice de l'exécution provisoire. Par acte du 8 septembre 2009, les sociétés SONOCO IPD FRANCE, SONOCO et LANCERY SAFIRE ont fait assigner en garantie la société TONELLI FRANCE, et les deux instances ont été jointes par ordonnance du 6 novembre 2009. Par conclusions signifiées le 27 janvier 2011, les sociétés SEFI-INTRAFOR et SOLS ET FONDATIONS font savoir qu'une brochure, versée aux débats par la société DINOB AT et représentant un matériau CLA YBO ARD, commercialisé par la société DUF AYLITE, antériorise le brevet 93-12832 (2 711 704), elles entendent se désister de leur instance et de leur action de l'encontre de l'intégralité des défenderesses. Compte tenu de leur bonne foi, elles demandent à ce que les demandes formées contre elles au titre tant de la procédure abusive que des frais irrépétibles soient rejetées. Par conclusions du 9 février 2011, les sociétés SONOCO IPD FRANCE, SONOCO et LANCERY SAFIRE demandent au Tribunal de constater le désistement des deux demanderesses dont elles prennent acte, mais sollicitent la condamnation de celles-ci à leur payer la somme globale de 20.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile. Par ailleurs, elles demandent qu'il leur soit donné acte de leur désistement d'instance pour ce qui concerne leur appel en garantie contre la société TONELLI, et de l'accord de celle-ci pour ce qui est de ce désistement. Par écritures du 17 février 2011, la société DINOB AT prend acte du désistement d'instance et d'action des sociétés SEFI-INTRAFOR et SOLS ET FONDATIONS, mais maintient l'intégralité de ses demandes. En conséquence, elle demande au Tribunal de :- dire et juger que le brevet FR 93-12832 (2 711 704) est nul pour défaut de nouveauté et d'activité inventive,- condamner solidairement les sociétés SEFI-INTRAFOR et SOLS ET FONDATIONS à lui verser la somme de 20.000 euros pour procédure abusive,- les condamner à lui verser la somme de 18 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,- leur ordonner de lui restituer l'original de sa pièce 10, à savoir la brochure datée de 1992 de la société DUFAYLITE DEVELOPMENTS portant sur le matériau CLAYBOARD,- les condamner aux dépens. Par conclusions du 11 mars 2011, la société TECHNIQUE BETON reprend à son compte les demandes de la société DINOB AT, sauf en ce qu'elle chiffre à 10.000 euros celle formée au titre de l'article 700 du Code de procédure civile. La société COFRASUD n'a pas conclu à nouveau depuis ses écritures du 3 mai 2010 dans lesquelles elle demandait la nullité du brevet en cause, ainsi que les sommes de 4.000 euros à chacune des deux demanderesses au titres des frais irrépétibles. La société TONELLI n'a jamais conclu au fond. L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 mai 2011.

MOTIFS DE LA DÉCISION

- Sur la portée du brevet français n° FR 93 -12832 (2 711 704) La partie descriptive du brevet dont s'agit n'ayant pas été versée aux débats, il est impossible d'en préciser la portée. Il ressort cependant des écritures des défenderesses que, le 27 octobre 1993, Monsieur Serge L a déposé auprès de l'INPI un demande de brevet français n°93-12832, et qu'à la s uite du rapport de recherche adressé à ce dernier par les services de l'INPI le 16 juin 1995, n'ont subsisté aux revendications d'origine que deux seules revendications, toutes les deux invoquées, et dont la teneur suit : 1. Procédé pour réaliser, dans un bâtiment, soit un vide, soit une zone déformable, entre le sol et une dalle de béton armé, ce procédé consistant :a) à déposer, entre les murs extérieurs et le mur de refond sur le sol ou sur un remblai, un coffrage perdu, biodégradable, en carton ;b) à couler sur ce coffrage une dalle en béton ;c) après séchage et durcissement du béton, à injecter dans le coffrage en carton une quantité d'eau apte à ramollir et à décomposer ce carton; Ce procédé doit être caractérisé en ce qu'avant le coulage du béton, on ménage des réservations tubulaires à travers la dalle et en ce qu'après séchage et durcissement du béton, l'eau est injectée par ces réservations tubulaires dans le coffrage en carton à travers la dalle. 2. Procédé selon la revendication 1, caractérisé en ce que sur la face du coffrage en carton destinée à venir en contact avec la dalle de béton est collé un film plastique. Il apparaît que cette demande a été publiée le 5 mai 1995 sous le n°2 711 704 et que le brevet a été délivré le 5 avr il 1996 sous le titre « Procédé permettant la réalisation, soit d'un vide, soit d'une zone déformable entre le sol et une dalle béton en utilisant un coffrage perdu biodégradable », et que par acte du 4 décembre 2001 Monsieur L a cédé ce brevet à la société GFA LAMOTTE, laquelle l'a cédé à son tour à la société SEFI-1NTRAFOR le 2 juillet 2002. - Sur la validité du brevet français 93-12832 (2 711 704) II résulte de l'article L.611-11 du Code de la propriété intellectuelle qu'une invention est considérée comme nouvelle si elle n'est pas comprise dans l'état de la technique. En l'espèce, les sociétés défenderesses, en particulier les sociétés DINOBAT et COFRASUD, font valoir qu'il ressort du rapport de recherche que trois brevets britanniques sont cités comme éléments de la technique existant au moment de la demande de brevet déposée par Monsieur L. Elles considèrent plus particulièrement que le brevet litigieux ne fait que reprendre les procédés de l'un d'entre eux, le brevet GB-A-2 235 235, à savoir le produit dénommé CLAYBOARD de la société DUFAYLITE DEVELOPMENTS LTD, qui expose notamment que, « après séchage et durcissement du béton, l'eau est injectée par ces réservations tubulaires dans le coffrage en carton à travers la dalle ». Ainsi qu'il a été dit, les sociétés SEFI-INTRAFOR et SOLS ET FONDATIONS ne contestent plus que cette antériorité soit destructrice de nouveauté, en indiquant que la brochure qui la représente, datée de 1992, « antériorise effectivement leur brevet 93-12832 ». Il convient donc de prononcer la nullité de ce brevet dans ses deux revendications.- Sur la contrefaçon En conséquence, l'examen de la contrefaçon alléguée est sans objet. - Sur la garantie De même, la demande en garantie formée par les sociétés SONOCO IPD FRANCE, SONOCO et LANCERY SAFIRE à l'encontre de la société TONELLI apparaît sans objet. - Sur la procédure abusive L'exercice d'une action en justice constitue, en principe, un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages-intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi, ou d'erreur grossière équipollente au dol. En l'espèce, la preuve d'une quelconque intention de nuire ou légèreté blâmable de la part des sociétés SEFI-INTRAFOR et SOLS ET FONDATIONS, qui ont pu légitimement se méprendre sur l'étendue de leurs droits, n'est pas rapportée. En effet, les demanderesses font valoir à juste titre que la brochure dont s'agit, qui est dépourvue de date, ne leur a été communiquée que le 29 novembre 2010, et qu'elles ont alors très peu de temps après, le 27 janvier 2011, décidé de se désister, ce qui montre leur absence d'intention de nuire ou de légèreté. Les sociétés DINOBAT et TECHNIQUE BETON seront donc déboutées de leurs demandes présentées à ce titre. - Sur les autres demandes II y a lieu de condamner les sociétés SEFI-INTRAFOR et SOLS ET FONDATIONS, partie perdante, aux dépens. En outre, elles doivent être condamnées à verser d'une part aux sociétés SONOCO IPD FRANCE, SONOCO et LANCERY SAFIRE, d'autre part à la société DINOB AT, en troisième lieu à la société TECHNIQUE BETON et enfin à la société COFRASUD, qui ont dû exposer des frais irrépétibles pour faire valoir leurs droits, une indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile qu'il est équitable de fixer à la somme, pour chacune d'elles, de 7.000 euros. Enfin, l'original de sa pièce 10 sera restituée à la société DINOB AT.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et rendu en premier ressort, - PRONONCE la nullité des revendications 1 et 2 du brevet FR 93-12832 (2 711 704) pour absence de nouveauté ; - DIT que la présente décision, une fois devenue définitive, sera transmise à 1TNPI par les soins du greffier saisi à la requête de la partie la plus diligente pour inscription au Registre National des Brevets ; - REJETTE toutes les demandes des sociétés SEFI-INTRAFOR et SOLS ET FONDATIONS ; - REJETTE les demandes formées au titre de la procédure abusive ; - CONDAMNE in solidum la société SEFI-INTRAFOR et la société SOLS ET FONDATIONS à payer la somme de 7.000 euros aux sociétés SONOCO IPD FRANCE, SONOCO et LANCERY SAFIRE, la somme de 7.000 euros à la société DINOBAT, la somme de 7.000 euros à la société TECFINIQUE BETON et la somme de 7.000 euros à la société COFRASUD, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ; - CONDAMNE in solidum la société SEFI-INTRAFOR et la société SOLS ET FONDATIONS aux dépens ; - ORDONNE la restitution à la société DINOBAT de l'original de sa pièce n° 10.