Affaire C-30/04
Ursel Koschitzki
contre
Istituto nazionale della previdenza sociale (INPS)
(demande de décision préjudicielle, introduite par le Tribunale di Bolzano)
«Sécurité sociale des travailleurs migrants - Règlement (CEE) nº 1408/71 - Pension de vieillesse - Calcul du montant théorique de la prestation - Prise en compte du montant nécessaire afin d'atteindre le traitement minimal prévu par la loi nationale»
Conclusions de l'avocat général M. F. G. Jacobs, présentées le 4 mai 2005
Arrêt de la Cour (première chambre) du 21 juillet 2005
Sommaire de l'arrêt
Sécurité sociale des travailleurs migrants - Assurance vieillesse et décès - Calcul des prestations - Détermination du montant théorique - Prise en compte d'un complément destiné à atteindre la pension minimale prévue par la législation d'un État membre - Absence - Conditions
(Règlement du Conseil nº 1408/71, art. 46, § 2, a))
L'article 46, paragraphe 2, sous a), du règlement nº 1408/71, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement nº 2001/83, tel que modifié par le règlement nº 3096/95, doit être interprété en ce sens que, pour déterminer le montant théorique de la pension servant de base au calcul de la pension proratisée, l'institution compétente n'est pas obligée de prendre en considération un complément destiné à atteindre la pension minimale prévue par la législation nationale lorsque, en raison du dépassement des limites de revenus fixées par la législation nationale relative audit complément, un assuré qui a exercé toute son activité professionnelle dans l'État membre en cause ne pourrait pas prétendre à un tel complément.
(cf. point 38 et disp.)
ARRÊT DE LA COUR (première chambre)
21. juillet 2005 (*)
«Sécurité sociale des travailleurs migrants - Règlement (CEE) n° 1408/71 - Pension de vieillesse - Calcul du montant théorique de la prestation - Prise en compte du montant nécessaire afin d'atteindre le traitement minimal prévu par la loi nationale»
Dans l'affaire C-30/04,
ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l'article 234 CE, introduite par le Tribunale di Bolzano (Italie), par décision du 9 janvier 2004, parvenue à la Cour le 28 janvier 2004, dans la procédure
Ursel Koschitzki
contre
Istituto Nazionale della Previdenza Sociale (INPS),
LA COUR (première chambre),
composée de M. K. Lenaerts, président de la quatrième chambre, faisant fonction de président de la première chambre, Mme N. Colneric (rapporteur), MM. K. Schiemann, E. Juhász et M. Ilešič, juges,
avocat général: M. F. G. Jacobs,
greffier: Mme L. Hewlett, administrateur principal,
vu la procédure écrite et à la suite de l'audience du 17 mars 2005,
considérant les observations présentées:
- pour Mme Koschitzki, par Mes M. Rossi, R. Ciancaglini et K. de Guelmi Cuccurullo, avvocati,
- pour l'Istituto nazionale della previdenza sociale (INPS), par Mes A. Todaro, A. Riccio et N. Valente, avvocati,
- pour la Commission des Communautés européennes, par Mme L. Pignataro et M. D. Martin, en qualité d'agents,
ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 4 mai 2005,
rend le présent
Arrêt
1. La demande de décision préjudicielle porte sur l'interprétation de l'article 46, paragraphe 2, sous b), du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CEE) n° 2001/83 du Conseil, du 2 juin 1983 (JO L 230, p. 6), tel que modifié par le règlement (CE) n° 3096/95 du Conseil, du 22 décembre 1995 (JO L 335, p. 10, ci-après le «règlement n° 1408/71»).
2. Cette demande a été présentée dans le cadre d'un litige opposant Mme Koschitzki à l'Istituto Nazionale della Previdenza Sociale (Office national de sécurité sociale, ci-après l'«INPS») au sujet du calcul de la pension de vieillesse proratisée de Mme Koschitzki.
Le cadre juridique
La réglementation communautaire
3. L'article 1er du règlement n° 1408/71 prévoit:
«Aux fins de l'application du présent règlement:
[...]
t) les termes 'prestations', 'pensions' et 'rentes' désignent toutes les prestations, pensions et rentes, y compris tous les éléments à charge des fonds publics, les majorations de revalorisation ou allocations supplémentaires, sous réserve des dispositions du titre III, ainsi que les prestations en capital qui peuvent être substituées aux pensions ou rentes et les versements effectués à titre de remboursement de cotisations».
4. L'article 46, paragraphes 1 à 3, du règlement n° 1408/71, intitulé «Liquidation des prestations», dispose:
«1. Lorsque les conditions requises par la législation d'un État membre pour avoir droit aux prestations sont satisfaites sans qu'il soit nécessaire de faire application de l'article 45 ni de l'article 40, paragraphe 3, les règles suivantes sont applicables:
a) l'institution compétente calcule le montant de la prestation qui serait due:
i) d'une part, en vertu des seules dispositions de la législation qu'elle applique;
ii) d'autre part, en application du paragraphe 2;
[...]
2. Lorsque les conditions requises par la législation d'un État membre pour avoir droit aux prestations ne sont satisfaites que, après l'application de l'article 45 et/ou de l'article 40, paragraphe 3, les règles suivantes sont applicables:
a) l'institution compétente calcule le montant théorique de la prestation à laquelle l'intéressé pourrait prétendre si toutes les périodes d'assurance et/ou de résidence accomplies sous les législations des États membres auxquelles a été soumis le travailleur salarié ou non salarié avaient été accomplies dans l'État membre en cause et sous la législation qu'elle applique à la date de la liquidation de la prestation. Si, selon cette législation, le montant de la prestation est indépendant de la durée des périodes accomplies, ce montant est considéré comme le montant théorique visé au présent point a);
b) l'institution compétente établit ensuite le montant effectif de la prestation sur la base du montant théorique visé au point a), au prorata de la durée des périodes d'assurance ou de résidence accomplies avant la réalisation du risque sous la législation qu'elle applique, par rapport à la durée totale des périodes d'assurance et de résidence accomplies avant la réalisation du risque sous les législations de tous les États membres en question.
3. L'intéressé a droit, de la part de l'institution compétente de chaque État membre en question, au montant le plus élevé calculé conformément aux paragraphes 1 et 2, sans préjudice, le cas échéant, de l'application de l'ensemble des clauses de réduction, de suspension ou de suppression prévues par la législation au titre de laquelle cette prestation est due.
Si tel est le cas, la comparaison à effectuer porte sur les montants déterminés après l'application desdites clauses.»
5. L'article 46 bis, du même règlement, intitulé «Dispositions générales relatives aux clauses de réduction, de suspension ou de suppression applicables aux prestations d'invalidité, de vieillesse ou de survivants en vertu des législations des États membres» dispose à son paragraphe 3:
«Pour l'application des clauses de réduction, de suspension ou de suppression prévues par la législation d'un État membre en cas de cumul d'une prestation d'invalidité, de vieillesse ou de survivants avec une prestation de même nature ou une prestation de nature différente ou avec d'autres revenus, les règles suivantes sont applicables:
a) il n'est tenu compte des prestations acquises au titre de la législation d'un autre État membre ou des autres revenus acquis dans un autre État membre que si la législation du premier État membre prévoit la prise en compte des prestations ou des revenus acquis à l'étranger;
b) il est tenu compte du montant des prestations à verser par un autre État membre avant déduction de l'impôt, des cotisations de sécurité et autres retenues individuelles;
c) il n'est pas tenu compte du montant des prestations acquises au titre de la législation d'un autre État membre qui sont servies sur la base d'une assurance volontaire ou facultative continue;
d) lorsque des clauses de réduction, de suspension ou de suppression sont applicables au titre de la législation d'un seul État membre du fait que l'intéressé bénéficie des prestations de même ou de différente nature dues en vertu de la législation d'autres États membres ou d'autres revenus acquis sur le territoire d'autres États membres, la prestation due en vertu de la législation du premier État membre ne peut être réduite que dans la limite du montant des prestations dues en vertu de la législation ou des revenus acquis sur le territoire des autres États membres.»
6. L'article 46 quater du règlement n° 1408/71, intitulé «Dispositions particulières applicables en cas de cumul d'une prestation ou de plusieurs prestations visées à l'article 46 bis paragraphe 1 avec une ou plusieurs prestations de nature différente ou avec d'autres revenus, lorsque deux ou plusieurs États membres sont concernés», dispose à son paragraphe 2:
«S'il s'agit d'une prestation calculée conformément à l'article 46 paragraphe 2, la prestation ou les prestations de nature différente des autres États membres ou les autres revenus et tous les éléments prévus par la législation de l'État membre pour l'application des clauses de réduction, de suspension ou de suppression sont pris en compte en fonction du rapport entre les périodes d'assurance et/ou de résidence visées à l'article 46 paragraphe 2 point b) et retenues pour le calcul de ladite prestation.»
La réglementation nationale
7. Le complément destiné à atteindre la pension minimale est une prestation que la République italienne verse, par l'intermédiaire de l'INPS, notamment au titulaire d'une pension d'invalidité, de vieillesse ou aux survivants, pour compléter la pension elle-même, si le montant de cette dernière telle qu'il résulte du calcul des cotisations versées est inférieur au «minimum vital». Le montant de la pension minimale, fixé annuellement et soumis à certaines conditions de revenus, est entièrement à la charge de la fiscalité générale.
8. L'article 6 du décret-loi n° 463, du 12 septembre 1983, portant mesures urgentes en matière de sécurité sociale et de maîtrise des dépenses publiques, dispositions pour divers secteurs de l'administration publique et prorogation de certains délais (GURI n° 250, du 12 septembre 1983, ci-après le «décret-loi n° 463/83»), devenu, après modification, la loi n° 638, du 11 novembre 1983 (GURI n° 310, du 11 novembre 1983, ci-après la «loi n° 638/83») a subordonné le droit au complément à la condition générale que le bénéficiaire ne possède pas de revenus supérieurs à un seuil déterminé ni de revenus cumulés avec ceux de son conjoint dépassant un seuil plus élevé, moyennant certaines exceptions fixées par la loi.
9. L'article 4 du décret législatif n° 503, du 30 décembre 1992 (supplément ordinaire à la GURI n° 305, du 30 décembre 1992, ci-après le «décret législatif n° 503/92»), qui a reformulé l'article 6 de la loi n° 638/83, a fixé de nouvelles limites de revenus pour l'obtention d'un tel complément. Le calcul de la limite de revenus inclut le revenu du conjoint cohabitant, non séparé légalement.
10. L'article 1er, paragraphe 16, de la loi n° 335, du 8 août 1995, portant réforme du régime de pension obligatoire et complémentaire (supplément ordinaire à la GURI n° 190, du 16 août 1995, ci-après la «loi n° 335/95»), pose le principe général selon lequel «[l]es dispositions relatives au complément destiné à atteindre le montant minimal ne s'appliquent pas aux pensions liquidées exclusivement selon le régime de cotisations».
11. Aux termes de l'article 3, paragraphe 15, de la loi n° 335/95:
«À partir de la date d'entrée en vigueur de la présente loi, le montant mensuel des pensions, dont le droit est ou a été acquis en vertu du cumul des périodes d'assurance et de cotisation prévu par des accords ou des conventions internationales en matière de sécurité sociale, ne peut être inférieur, par année de cotisation, à un quarantième de la pension minimale en vigueur à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, ou à la date d'admission à la pension, si celle-ci est ultérieure à ladite date. En cas d'année incomplète, ledit montant ne peut être inférieur à 6 000 lires par mois.»
Le litige au principal
et la question préjudicielle
12. Mme Koschitzki est titulaire d'une pension de vieillesse italienne depuis le mois d'octobre 1996. Elle a totalisé 262 semaines de cotisations en Italie et 533 semaines en Allemagne, soit en tout 795 semaines de cotisations.
13. Mme Koschitzki disposait, en octobre 1996, d'un revenu familial supérieur à la limite indiquée à l'article 4 du décret législatif n° 503/92. En 1996, le revenu familial, représenté par son revenu et celui du conjoint cohabitant, a atteint 39 769 000 ITL, soit 20 538,97 euros. La même année, la limite indiquée à l'article 6 de la loi n° 638/83, tel que modifié par l'article 4 du décret législatif n° 503/92, était fixée à 660 300 ITL, soit 341,01 euros par mois.
14. Mme Koschitzki et l'INPS s'opposent sur la question de savoir si le complément destiné à atteindre la pension minimale italienne doit être pris en compte pour déterminer le montant théorique de la pension servant de base au calcul de la pension proratisée.
15. En invoquant l'arrêt du 24 septembre 1998, Stinco et Panfilo (C-132/96, Rec. p. I-5225), Mme Koschitzki estime qu'il convient de répondre par l'affirmative à cette question. Elle soutient que la pension proratisée italienne dont elle est entrée en jouissance le 1er octobre 1996 doit être calculée comme suit: pension minimale 1996 (660 300 ITL = 341,01 euros) x coefficient de réduction proportionnelle visé à l'article 46, paragraphe 2, point b), du règlement n° 1408/71 (262 semaines : 795 semaines = 0,32956) = 217 600 ITL (112,38 euros).
16. D'après l'INPS, dans le cas d'espèce, il n'y a pas lieu de prendre en compte le complément en cause pour déterminer le montant théorique. Ce montant serait de 36 540 ITL (18,87 euros), ce qui aboutirait à une pension proratisée italienne de 12 042 ITL (6,21 euros) par mois.
17. L'INPS a finalement décidé de verser une pension d'un montant de 83 000 ITL, soit 42,86 euros par mois.
18. Dans sa décision de renvoi, le Tribunale di Bolzano observe que le texte de l'arrêt Stinco et Panfilo, précité, semble donner raison à Mme Koschitzki quant au mode de calcul. Il lui semble cependant que cet arrêt n'ait pas précisé si ledit complément, qui constitue la base de calcul de la pension proratisée italienne, doit toujours être pris en compte même si le revenu familial dépasse le plafond mentionné par la loi italienne.
19. Dans l'affaire au principal, le revenu familial, à savoir le revenu de Mme Koschitzki et celui de son conjoint cohabitant, aurait dépassé incontestablement le plafond de revenu. D'après la législation italienne, Mme Koschitzki n'aurait pas droit au complément destiné à atteindre la pension minimale italienne.
20. Le juge de renvoi expose que, d'après la thèse de l'INPS, le mode de calcul suggéré par la requérante aboutirait à un résultat injuste en termes d'égalité de traitement entre un pensionné italien et un pensionné «international». Si la Cour donnait raison à l'INPS, il faudrait ajouter, à la fin du dispositif de l'arrêt Stinco et Panfilo, précité, la précision: «si les limites de revenus et les autres conditions qu'elle prévoit ne sont pas dépassées».
21. Dans ces circonstances, le Tribunale di Bolzano a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:
«À la lumière de l'article 42 […] CE […], qui, dans le domaine de la sécurité sociale, impose l'adoption des mesures nécessaires pour l'établissement de la libre circulation des travailleurs, l'article 46, paragraphe 2, sous b), du règlement (CEE) n° 1408/71, doit-il être interprété en ce sens que la base de calcul de la pension proratisée italienne doit toujours être constituée par la pension virtuelle complétée pour atteindre le minimum, même si les limites de revenus fixées par la loi italienne pour le complément destiné à atteindre la pension minimale (article 6 de la loi n° 638/83, modifié par l'article 4 du décret législatif 503/92) sont dépassées, ou en ce sens que cette base doit être constituée par la pension virtuelle pure (montant théorique non complété) lorsque le pensionné dépasse les limites de revenu fixées par la loi italienne pour l'obtention du complément précité?»
Sur la question préjudicielle
22. L'article 46, paragraphe 2, sous b), du règlement n° 1408/71, auquel se réfère la question posée, renvoie au montant théorique visé audit paragraphe 2, sous a). La juridiction de renvoi demande en substance si, pour déterminer, en application de l'article 46, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 1408/71, le montant théorique de la pension servant de base au calcul de la pension proratisée, un complément destiné à atteindre la pension minimale prévue par la législation nationale doit être pris en compte, lorsque les limites de revenus fixées par la législation nationale relative à ce complément sont dépassées.
23. En vue de répondre à cette question, il y a lieu de rappeler que la Cour a constaté au point 22 de l'arrêt Stinco et Panfilo, précité, que l'article 46, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 1408/71 doit être interprété en ce sens qu'il oblige l'institution compétente à prendre en considération, pour déterminer le montant théorique de la pension servant de base au calcul de la pension proratisée, un complément destiné à atteindre la pension minimale prévue par la législation nationale.
24. Dans l'affaire ayant donné lieu à cet arrêt, l'INPS avait octroyé à MM. Stinco et Panfilo des pensions proratisées conformément à l'article 46, paragraphe 2, du règlement n° 1408/71, calculées sur la base des pensions fictives que les demandeurs auraient perçues s'ils avaient travaillé en Italie toute leur vie professionnelle. Le montant de ces pensions fictives était d'un niveau tel que, dans l'hypothèse où les intéressés auraient effectivement eu droit à des pensions nationales de ce montant, le complément prévu par la loi italienne leur aurait été accordé afin d'atteindre la pension minimale (voir arrêt Stinco et Panfilo, précité, point 8).
25. En l'occurrence, en raison du dépassement des limites de revenus fixées par la législation nationale relative au complément destiné à atteindre la pension minimale, un assuré dans la situation de Mme Koschitzki qui a exercé toute son activité professionnelle dans l'État membre en cause ne pourrait prétendre à ce complément.
26. En vue de déterminer si, dans de telles conditions, le complément en cause doit être pris en considération pour le calcul du montant théorique visé à l'article 46, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 1408/71, il convient d'interpréter cette disposition à la lumière de son libellé et de sa finalité.
27. Il résulte des dispositions expresses de l'article 46, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 1408/71 que le montant théorique doit être calculé comme si l'assuré avait exercé toute son activité professionnelle exclusivement dans l'État membre en cause (arrêt du 26 juin 1980, Menzies, 793/79, Rec. p. 2085, point 10).
28. Quant à la finalité de cet article, la Cour a déjà constaté que le calcul à effectuer en vertu de cette disposition a pour objet d'assurer au travailleur le montant théorique maximal auquel il pourrait prétendre si toutes ses périodes d'assurance avaient été accomplies dans l'État en cause (arrêt Menzies, précité, point 11).
29. Il s'ensuit que, si la législation de l'État membre en cause prévoit que le droit au complément est subordonné à la condition générale que le bénéficiaire ne possède pas de revenus supérieurs à un seuil déterminé ni de revenus cumulés avec ceux de son conjoint cohabitant dépassant un seuil plus élevé, cette disposition doit également être prise en considération pour le calcul du montant théorique visé à l'article 46, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 1408/71.
30. Mme Koschitzki soutient, néanmoins, qu'une autre solution s'impose. À cet égard, elle avance, d'une part, qu'il faudrait tenir compte de la définition du mot «prestation» figurant à l'article 1er, sous t), du règlement n° 1408/71, qui dispose que «les termes 'prestations', 'pensions' et 'rentes' désignent toutes prestations, pensions et rentes, y compris tous les éléments à charge des fonds publics […]». Dès lors qu'il s'agirait d'un élément de la prestation de base, le complément destiné à atteindre la pension minimale ne pourrait être exclu de la détermination de la pension théorique.
31. Toutefois, afin de déterminer le montant théorique d'une pension, la seule qualification dudit complément comme «prestation» au sens de l'article 1er, sous t), du règlement n° 1408/71 ne préjuge en rien la manière dont le complément doit être pris en considération. L'obligation de prendre en considération ce complément n'implique pas une obligation de lui donner un contenu différent de celui qu'il a sous la législation nationale.
32. Il s'ensuit que la qualification de «prestation» du complément destiné à atteindre la pension minimale italienne n'oblige pas à inclure, dans la détermination du montant théorique visé à l'article 46, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 1408/71, un complément auquel un pensionné ne pourrait pas prétendre s'il relevait uniquement de la législation nationale.
33. D'autre part, Mme Koschitzki invoque certains arguments fondés sur une interprétation des articles 46, paragraphe 3, 46 bis et 46 quater du règlement n° 1408/71. Elle soutient, premièrement, que la fixation du plafond de revenu par la législation italienne doit s'analyser comme une clause de réduction au sens desdits articles 46 bis et 46 quater. Deuxièmement, elle estime que, conformément à l'article 46, paragraphe 3, de ce règlement, le calcul de son droit à pension en vertu du paragraphe 2 de ce même article doit être effectué, dans une première phase, sans tenir compte des dispositions de la législation nationale relatives à la réduction. L'application des clauses de réduction interviendrait seulement dans la seconde phase du calcul, lorsque l'on procède à la comparaison entre le montant de la prestation due en vertu de la seule législation nationale, avec application de ses règles anti-cumul, et le montant de la prestation due en vertu du droit communautaire, avec application de ses règles anti-cumul. Elle rappelle, à cet égard, l'arrêt du 11 juin 1992, Di Crescenzo et Casagrande (C-90/91 et C-91/91, Rec. p. I-3851, point 27).
34. Ces considérations reposent sur une lecture erronée du règlement n° 1408/71.
35. Il est de jurisprudence constante qu'une règle nationale doit être qualifiée de clause de réduction, au sens du règlement n° 1408/71, si le calcul qu'elle impose a pour effet de réduire le montant de la pension à laquelle l'intéressé peut prétendre du fait qu'il bénéficie d'une prestation dans un autre État membre (voir, notamment, arrêts du 22 octobre 1998, Conti, C-143/97, Rec. p. I-6365, point 25, et du 7 mars 2002, Insalaca, C-107/00, Rec. p. I-2403, point 16).
36. En revanche, ne constitue pas une clause de réduction au sens des articles 46, paragraphe 3, 46 bis et 46 quater du règlement n° 1408/71, une règle nationale telle que celle en cause dans l'affaire au principal.
37. En ce qui concerne l'arrêt Di Crescenzo et Casagrande, précité, il visait une situation dans laquelle une clause de réduction des prestations au sens du règlement n° 1408/71 était en cause. Cet arrêt ne confirme donc pas la thèse soutenue par la requérante.
38. Il résulte de tout ce qui précède qu'il convient de répondre à la question posée que l'article 46, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 1408/71 doit être interprété en ce sens que, pour déterminer le montant théorique de la pension servant de base au calcul de la pension proratisée, l'institution compétente n'est pas obligée de prendre en considération un complément destiné à atteindre la pension minimale prévue par la législation nationale lorsque, en raison du dépassement des limites de revenus fixées par la législation nationale relative audit complément, un assuré qui a exercé toute son activité professionnelle dans l'État membre en cause ne pourrait pas prétendre à un tel complément.
Sur les dépens
39. La procédure
revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement.
Par ces motifs
, la Cour (première chambre) dit pour droit:
L'article 46, paragraphe 2, sous a), du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CEE) n° 2001/83 du Conseil, du 2 juin 1983, tel que modifié par le règlement (CE) n° 3096/95 du Conseil, du 22 décembre 1995, doit être interprété en ce sens que, pour déterminer le montant théorique de la pension servant de base au calcul de la pension proratisée, l'institution compétente n'est pas obligée de prendre en considération un complément destiné à atteindre la pension minimale prévue par la législation nationale lorsque, en raison du dépassement des limites de revenus fixées par la législation nationale relative audit complément, un assuré qui a exercé toute son activité professionnelle dans l'État membre en cause ne pourrait pas prétendre à un tel complément.
Signatures
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* Langue de procédure: l'italien.