Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 25 septembre 2012, présentée pour M. A... B..., demeurant au ...par Me De Caumont, avocat ;
M. B...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1000819 en date du 24 juillet 2012 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 février 2009 par laquelle le ministre de l'intérieur l'a informé du retrait de quatre points opéré sur le capital affecté à son permis de conduire, a prononcé la perte de validité de son titre de conduite et lui a enjoint de le restituer, et des décisions de retrait de points intervenues à la suite des infractions commises les 8 mars 2002, 8 juin 2004, 19 juillet 2005, 10 octobre 2005, 20 juin 2005, 11 juin 2007, 7 août 2007, 30 août 2007 et 16 octobre 2008, ensemble la décision du ministre en date du 15 avril 2010 refusant de procéder à la reconstitution de son capital de points ;
2°) d'annuler les décisions de retrait de points consécutives aux infractions des 8 mars 2002, 8 juin 2004, 19 juillet 2005, 11 juin 2007, 7 août 2007, 30 août 2007 et 16 octobre 2008 ainsi que, par voie de conséquence, de la décision du 18 février 2009 prononçant la perte de validité de son permis de conduire ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de reconstituer le capital de points affecté à son permis de conduire dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- lors de la constatation des infractions relevées à son encontre, il n'a pas reçu les informations prévues par les articles
L. 223-3 et
R. 223-3 du code de la route ;
- les infractions des 8 mars 2002, 8 juin 2004 19 juillet 2005 et 30 août 2007 n'ont pas été relevées par l'intermédiaire d'un radar automatique mais ont donné lieu à interception et la présomption d'information n'est donc pas établie ;
Vu le jugement et les décisions attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 25 octobre 2012, présenté par le ministre de l'intérieur qui conclut au rejet de la requête, les moyens soulevés, identiques à ceux présentés en première instance, n'étant pas fondés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la route ;
Vu le code de procédure pénale ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 janvier 2013, le rapport de Mme Rousselle, président ;
Sur les conclusions en annulation des décisions portant retrait de points :
1. Considérant qu'aux termes de
L. 11-1 du code de la route, en vigueur jusqu'au 1er juin 2001 : " Le nombre de points affecté au permis de conduire est réduit de plein droit, lorsque est établie la réalité de l'une des infractions suivantes (...). La réalité de ces infractions est établie par le paiement d'une amende forfaitaire ou par une condamnation devenue définitive" ; que l'article
L. 11-3 du même code prévoyait que : " Lorsque l'intéressé est avisé qu'une des infractions mentionnées à l'article L. 11-1 a été relevée à son encontre, il est informé de la perte de points qu'il est susceptible d'encourir, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès. Ces mentions figurent sur le formulaire qui lui est communiqué. La perte de points est portée à la connaissance de l'intéressé par lettre simple quand elle est effective (...) " ; que l'article
L. 223-1 du code de la route, dans sa rédaction en vigueur résultant de la loi du 12 juin 2003 renforçant la lutte contre la violence routière, dispose que : " Le permis de conduire est affecté d'un nombre de points. Celui-ci est réduit de plein droit si le titulaire du permis a commis une infraction pour laquelle cette réduction est prévue. / (...) Lorsque le nombre de points est nul, le permis perd sa validité. / La réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, l'exécution d'une composition pénale ou par une condamnation définitive " ; que l'article
L. 223-2 du même code prévoit que : " I. - Pour les délits, le retrait de points est égal à la moitié du nombre maximal de points. / II. - Pour les contraventions, le retrait de points est, au plus, égal à la moitié du nombre maximal de points. / III. - Dans le cas où plusieurs infractions entraînant retrait de points sont commises simultanément, les retraits de points se cumulent dans la limite des deux tiers du nombre maximal de points " ; qu'aux termes de l'article
L. 223-3 : " Lorsque l'intéressé est avisé qu'une des infractions entraînant retrait de points a été relevée à son encontre, il est informé des dispositions de l'article
L. 223-2, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès conformément aux articles L. 225-1 à L. 225-9. / Lorsqu'il est fait application de la procédure de l'amende forfaitaire ou de la procédure de composition pénale, l'auteur de l'infraction est informé que le paiement de l'amende ou l'exécution de la composition pénale entraîne le retrait du nombre de points correspondant à l'infraction reprochée, dont la qualification est dûment portée à sa connaissance ; il est également informé de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article
R. 223-3 dudit code, dans sa rédaction en vigueur résultant du décret du 11 juillet 2003 : " I. - Lors de la constatation d'une infraction entraînant retrait de points, l'auteur de celle-ci est informé qu'il encourt un retrait de points si la réalité de l'infraction est établie dans les conditions définies à l'article
L. 223-1. / II. - Il est informé également de l'existence d'un traitement automatisé des retraits et reconstitutions de points et de la possibilité pour lui d'accéder aux informations le concernant. Ces mentions figurent sur le document qui lui est remis ou adressé par le service verbalisateur. Le droit d'accès aux informations ci-dessus mentionnées s'exerce dans les conditions fixées par les articles L. 225-1 à L. 225-9 (...) " ;
2. Considérant que la délivrance, au titulaire du permis de conduire à l'encontre duquel est relevée une infraction donnant lieu à retrait de points, de l'information prévue aux articles
L. 11-3,
L. 223-3 et
R. 223-3 du code de la route constitue une garantie essentielle donnée à l'auteur de l'infraction pour lui permettre, avant d'en reconnaître la réalité par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'exécution d'une composition pénale, d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis et éventuellement d'en contester la réalité devant le juge pénal ; qu'elle revêt le caractère d'une formalité substantielle et conditionne la régularité de la procédure au terme de laquelle le retrait de points est décidé ; qu'il appartient à l'administration d'apporter la preuve, par tous moyens, de la remise d'un tel document ;
3. Considérant que, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, il ne ressort pas des pièces du dossier que les infractions en date des 8 mars 2002, 8 juin 2004, 19 juillet 2005 et 30 août 2007 ont été relevées par l'intermédiaire de radars automatiques ;
En ce qui concerne l'infraction du 19 juillet 2005 :
4. Considérant que les dispositions portant application des articles
R. 49-1 et
R. 49-10 du code de procédure pénale en vigueur à la date des infractions litigieuses, notamment celles de ses articles A. 37 à
A. 37-4 de ce code, issues de l'arrêté du 5 octobre 1999 relatif aux formulaires utilisés pour la constatation et le paiement des contraventions soumises à la procédure de l'amende forfaitaire, prévoient que lorsqu'une contravention soumise à cette procédure est relevée avec interception du véhicule mais sans que l'amende soit payée immédiatement entre les mains de l'agent verbalisateur, ce dernier utilise un formulaire réunissant, en une même liasse autocopiante, le procès-verbal conservé par le service verbalisateur, une carte de paiement matériellement indispensable pour procéder au règlement de l'amende et l'avis de contravention, également remis au contrevenant pour servir de justificatif du paiement ultérieur, qui comporte une information suffisante au regard des exigences résultant des articles
L. 223-3 et
R. 223-3 du code de la route ;
5. Considérant, dès lors, que le titulaire d'un permis de conduire à l'encontre duquel une infraction au code de la route est relevée au moyen d'un formulaire conforme à ce modèle et dont il est établi, notamment par la mention qui en est faite au système national des permis de conduire, qu'il a payé l'amende forfaitaire correspondant à cette infraction a nécessairement reçu l'avis de contravention ; qu'eu égard aux mentions dont cet avis est réputé être revêtu, l'administration doit alors être regardée comme s'étant acquittée envers le titulaire du permis de son obligation de lui délivrer les informations requises préalablement au paiement de l'amende, à moins que l'intéressé, à qui il appartient à cette fin de produire l'avis qu'il a nécessairement reçu, ne démontre s'être vu remettre un avis inexact ou incomplet ;
6. Considérant, enfin, que si l'intervention de l'arrêté du 5 octobre 1999 ne garantit pas, à elle seule, que des formulaires établis selon un modèle antérieur, où le document comportant les informations requises et celui nécessaire au paiement étaient entièrement distincts, n'aient pas continué à être utilisés pour la constatation des infractions, il résulte tant du règlement du Conseil du 3 mai 1998 concernant l'introduction de l'euro que des mesures législatives et réglementaires prises pour sa mise en oeuvre, s'agissant notamment du montant des amendes, que de tels formulaires, libellés en francs, n'ont pu être employés après le 1er janvier 2002 ; que, pour les infractions relevées avec interception du véhicule à compter de cette date, la mention au système national des permis de conduire du paiement ultérieur de l'amende forfaitaire permet donc au juge d'estimer que le titulaire du permis s'est vu remettre un avis de contravention comportant les informations requises ;
7. Considérant, en revanche, que lorsqu'une contravention soumise à la procédure de l'amende forfaitaire est relevée avec interception du véhicule et donne lieu au paiement immédiat de l'amende entre les mains de l'agent verbalisateur, il incombe à l'administration d'apporter la preuve, par la production de la souche de la quittance prévue à l'article
R. 49-2 du code de procédure pénale dépourvue de réserve sur la délivrance de l'information requise, que celle-ci est bien intervenue préalablement au paiement ;
8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'infraction d'utilisation d'un téléphone au volant, constatée par interception le 19 juillet 2005, a donné lieu à une amende forfaitaire acquittée le jour même par M.B... ; que l'administration, qui ne produit ni le procès-verbal de contravention, ni la souche de la quittance précitée, n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, que l'intéressé a reçu préalablement au paiement, l'information exigée par le code de la route ; qu'il suit de là que la décision de retrait de points doit être annulée ;
En ce qui concerne les infractions des 8 mars 2002, 8 juin 2004, 11 juin 2007, 7 août 2007 et 30 août 2007 :
9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, à supposer même que M. B... ait payé lesdites amendes forfaitaires majorées, l'administration qui ne produit pas les procès-verbaux d'infraction, ne met pas le juge à même d'apprécier si le requérant a pu disposer de l'information préalable requise par les dispositions précitées ; qu'il en résulte que les décisions de retrait de points consécutives à ces infractions doivent être annulées ;
En ce qui concerne l'infraction du 16 octobre 2008 :
10. Considérant, que l'omission de l'obligation d'information préalable est sans influence sur la régularité du retrait de points résultant de la condamnation, lorsque la réalité de l'infraction a été établie par une condamnation devenue définitive prononcée par le juge pénal, qui a statué sur tous les éléments de fait et de droit portés à sa connaissance, et que l'auteur de l'infraction a ainsi pu la contester ; que cette dernière condition est également remplie lorsque la condamnation intervient selon la procédure simplifiée régie par les articles 524 et suivants du code de procédure pénale, qui permettent au juge de statuer sans débat préalable sur une contravention de police, mais qui réservent la possibilité, pour le prévenu, de former opposition à l'ordonnance pénale ainsi prononcée et d'obtenir que l'affaire soit portée à l'audience du tribunal de police ou de la juridiction de proximité dans les formes de la procédure ordinaire ;
11. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...a fait l'objet d'une condamnation devenue définitive par la juridiction de proximité de Châlons-en-Champagne en date du 21 novembre 2008, suite à l'infraction commise le 16 octobre 2008 ; qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré d'une éventuelle absence d'information préalable est inopérant à l'appui de conclusions en annulation de la décision du ministre retirant quatre points du permis de conduire de l'intéressé ;
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision 48 SI :
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le solde de points affecté au permis de conduire de M. B...n'étant pas nul, il est fondé à soutenir que le ministre ne pouvait, par la décision attaquée qui doit être annulée, constater la perte de validité de son permis de conduire ;
13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions portant retrait de points de son permis de conduire suite aux infractions des 8 mars 2002, 8 juin 2004, 19 juillet 2005, 11 juin 2007, 7 août 2007 et 30 août 2007 ainsi que la décision 48 SI du 18 février 2009 ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
14. Considérant que l'exécution du présent arrêt implique que le ministre de l'intérieur restitue à M. B...son titre de conduite, crédité de 8 points compte tenu du stage effectué par le requérant en 2006, sous réserve qu'il n'ait pas commis, depuis le 18 février 2009, de nouvelles infractions faisant obstacle à cette restitution ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative :
15. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à payer à M. B...la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : Les décisions portant retrait de points du permis de conduire de M. B... suite aux infractions des 8 mars 2002, 8 juin 2004, 19 juillet 2005, 11 juin 2007, 7 août 2007 et 30 août 2007, ensemble la décision 48 SI du 18 février 2009 ensemble le jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 24 juillet 2012 sont annulés .
Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration de restituer à M. B...son titre de conduite crédité de 8 points dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sous réserve que M. B...n'ait pas commis de nouvelles infractions ayant entraîné des retraits de points faisant obstacle à cette restitution.
Article 3: Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.
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N° 12NC01626