Tribunal administratif de Besançon, 16 septembre 2022, 2201418

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal administratif de Besançon
  • Numéro d'affaire :
    2201418
  • Type de recours : Plein contentieux
  • Dispositif : Rejet
  • Commentaires :
  • Avocat(s) : SELARL DEVEVEY
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Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Par une requête, enregistrée le 23 août 2022,la société Groupe Hélios, représentée par Me Lalanne, avocat, demande au juge des référés statuant en application de l'article L. 551-1 du code de justice administrative : 1°) d'annuler la procédure de publicité et mise en concurrence engagée par Grand Besançon Métropole pour l'attribution du lot n°1 " travaux de signalisation horizontale Secteur Nord-Ouest ", pour l'attribution du lot n°2 " travaux de signalisation horizontale Secteur Saint-Vitois et Sud-Ouest ", pour l'attribution du lot n°3 " travaux de signalisation horizontale Secteur Plateau " et pour l'attribution du lot n°4 " travaux de signalisation horizontale Secteur Est et Dame Blanche " ; 2°) de mettre à la charge de Grand Besançon Métropole la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - elle a fait acte de candidature et déposé une offre, elle présente donc un intérêt à agir ; - Grand Besançon Métropole n'a pas respecté la règle de la limitation du nombre de lots susceptibles d'être attribués à un même candidat dès lors que les sociétés attributaires des quatre lots sont les filiales d'un même groupe avec le même gérant ; - elle était classée en bonne position pour les quatre lots de sorte qu'elle est susceptible d'être lésée ; - en recourant à la procédure adaptée Grand Besançon Métropole a méconnu ses obligations de publicité et de mise en concurrence puisque Grand Besançon Métropole s'est réservé la possibilité de conclure un ou plusieurs nouveaux contrats sans pour autant en limiter le montant maximum lesquels sont dès lors réputés excéder les seuils de la procédure formalisée ; - le choix de la procédure est susceptible d'avoir lésé la société dans la mesure où cette dernière sera privée de la possibilité de soumettre une offre pour l'attribution des accords-cadres ayant pour objet la réalisation de prestations similaires. Par un mémoire en défense, enregistré le 8 septembre 2022, Grand Besançon Métropole, représenté par la Selarl Centaure avocats, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société Groupe Hélios une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le moyen tiré de la limitation du nombre des lots susceptibles d'être attribués à un même candidat n'est pas fondé ; - le moyen tiré du recours irrégulier à une procédure adaptée ne relève pas de l'office du juge précontractuel et au surplus le moyen est mal fondé ; - en tout état de cause, le risque de lésion n'est pas caractérisé pour la requérante. Par un mémoire, enregistré le 9 septembre 2022, la société Bourgogne Franche-Comté Signaux, représentée par Me Landbeck, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société Groupe Hélios une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la société Groupe Hélios ne justifie pas d'un intérêt lésé ; - elle ne justifie à tout le moins pas d'un intérêt à agir pour les lots 1 et 2 ; - les prétentions de la requérante sont mal fondées. Par un mémoire, enregistré le 9 septembre 2022, la société Bourgogne Franche-Comté Signaux, représentée par Me Landbeck, a communiqué une pièce couverte par le secret du droit des affaires et soustraite du contradictoire. Par un mémoire, enregistré le 9 septembre 2022, la société Global Signalisation, représentée par Me Devevey, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société Groupe Hélios une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les moyens ne sont pas fondés ; - en tout état de cause, la requérante ne justifie pas de la lésion de ses intérêts par les prétendus manquements. Par un mémoire, enregistré le 9 septembre 2022, la société Global Signalisation, représentée par Me Devevey, a communiqué des pièces couvertes par le secret du droit des affaires et soustraites du contradictoire. Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la commande publique ; - le code de justice administrative. Le président du tribunal administratif a désigné Mme A en application de l'article L. 511-2 du code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Au cours de l'audience publique qui s'est tenue le 12 septembre 2022 en présence de Mme Chiappinelli, greffière, Mme A a lu son rapport et entendu : - les observations de Me Lalanne, représentant la société Groupe Hélios qui a renouvelé, en les développant ou les précisant, les conclusions et les autres moyens de la requête ; - les observations de Me Blanchard, pour Grand Besançon Métropole qui a renouvelé, en les développant ou les précisant, les conclusions et les autres moyens de son mémoire en défense ; - les observations de Me Devevey, représentant la société Global Signalisation qui a renouvelé, en les développant ou les précisant, les conclusions et les autres moyens de ses mémoires ; - les observations de Me Landbeck, représentant la société Bourgogne Franche-Comté Signaux qui a renouvelé, en les développant ou les précisant, les conclusions et les autres moyens de ses mémoires. La clôture de l'instruction a été prononcée à l'issue de l'audience.

Considérant ce qui suit

: 1. Grand Besançon Métropole a lancé une consultation sous la forme d'une procédure adaptée ouverte pour la passation d'accord-cadre ayant pour objet les travaux de signalisation horizontale sur son territoire, les prestations étant réparties en cinq lots correspondant à cinq zones géographiques. La société Groupe Hélios a fait acte de candidature pour chacun des cinq lots. Par courriers du 5 août 2022 notifiés le 23 août 2022, elle a été informée du rejet de ses offres et de l'attribution des lots n° 1 et 2 à la société Global Signalisation, des lots n° 3 et 4 à la société Bourgogne Franche-Comté Signaux et du lot n°5 à la société Signature. 2. Aux termes de l'article L. 551-1 du code de justice administrative : " Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu'il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation par les pouvoirs adjudicateurs de contrats administratifs ayant pour objet l'exécution de travaux, la livraison de fournitures ou la prestation de services, avec une contrepartie économique constituée par un prix ou un droit d'exploitation, la délégation d'un service public ou la sélection d'un actionnaire opérateur économique d'une société d'économie mixte à opération unique. / Le juge est saisi avant la conclusion du contrat. ". 3. Il appartient au juge administratif, saisi en application de l'article L. 551-1 du code de justice administrative, de se prononcer sur le respect des obligations de publicité et de mise en concurrence incombant à l'administration. En vertu de cet article, les personnes habilitées à agir pour mettre fin aux manquements du pouvoir adjudicateur à ses obligations de publicité et de mise en concurrence sont celles qui sont susceptibles d'être lésées par de tels manquements. Il appartient, dès lors, au juge des référés précontractuels de rechercher si l'opérateur économique qui le saisit se prévaut de manquements qui, eu égard à leur portée et au stade de la procédure auquel ils se rapportent, sont susceptibles de l'avoir lésé ou risquent de le léser, fût-ce de façon indirecte en avantageant un opérateur économique concurrent. 4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 2113-10 du code de la commande publique : " Les marchés sont passés en lots séparés, sauf si leur objet ne permet pas l'identification de prestations distinctes. / () ". 5. En l'espèce, le règlement de la consultation de l'accord cadre de travaux de signalisation horizontale du Grand Besançon Métropole en son article 1.4 prévoit : " Décomposition de la consultation. Les prestations sont réparties en 5 lots géographiques. Chaque lot fera l'objet d'un accord-cadre. Les candidats ont la possibilité de soumettre des offres pour un ou plusieurs lots. Un même candidat pour se voir attribuer un nombre maximal de 4 lots selon les modalités ci-dessous () ". Il est alors mentionné pour la règle d'attribution relative aux lots n°1 à 4 qu'un même candidat se verra attribuer au maximum 3 lots. 6. A l'appui de sa requête en référé, la société requérante soutient qu'en désignant attributaire des lots n° 1 et 2 la société Global Signalisation et des lots n° 3 et 4 la société Bourgogne Franche-Comté Signaux, Grand Besançon Métropole n'a pas respecté la règle de limitation du nombre de lots susceptible d'être attribué à un même candidat figurant en son article 1.4 du règlement de consultation dès lors que les sociétés Global Signalisation et Bourgogne Franche-Comté Signaux, filiales de la même société holding ne présentent pas d'autonomie commerciale. 7. Il résulte toutefois de l'instruction que si les sociétés Global Signalisation et Bourgogne Franche-Comté Signalisation, filiales détenues par la société Holding NS ont le même président également président directeur général de la société Holding NS, les deux sociétés attributaires des lots 1 à 4, ayant des sièges sociaux et des établissements géographiquement distincts, interviennent néanmoins chacune dans des domaines d'activités différents, disposent chacune de leurs propres moyens matériels et humains et n'ont d'ailleurs pas classé les lots dans le même ordre de priorité souhaité du fait de la localisation de leurs établissements, autant d'éléments de nature à caractériser une stratégie commerciale propre. Ainsi, les seules circonstances que les sociétés soient détenues par la même société holding et présidées par la même personne physique, ne peuvent suffire à établir une absence d'autonomie commerciale, et par suite, à regarder ces deux sociétés comme un seul et même soumissionnaire, alors que la société requérante n'établit pas que les offres des soumissionnaires seraient identiques dans leurs spécifications techniques. Dans ces conditions, la société Groupe Hélios n'est pas fondée à soutenir que Grand Besançon Métropole a méconnu le règlement de la consultation de la procédure d'appel d'offres en attribuant les lots 1 à 4 aux sociétés Global Signalisation et Bourgogne Franche-Comté Signaux et, ce faisant, aurait privé de toute portée son choix d'allotissement. 8. En second lieu, aux termes de l'article R. 2122-7 du code de la commande publique : " L'acheteur peut passer un marché de travaux ou de services sans publicité ni mise en concurrence préalables ayant pour objet la réalisation de prestations similaires à celles qui ont été confiées au titulaire d'un marché précédent passé après mise en concurrence. Le premier marché doit avoir indiqué la possibilité de recourir à cette procédure pour la réalisation de prestations similaires. Sa mise en concurrence doit également avoir pris en compte le montant total envisagé, y compris celui des nouveaux travaux ou services. Lorsqu'un tel marché est passé par un pouvoir adjudicateur, la durée pendant laquelle les nouveaux marchés peuvent être conclus ne peut dépasser trois ans à compter de la notification du marché initial ". 9. En l'espèce, aux termes de l'article 1.5 du cahier des clauses administratives particulières applicable, " Le pouvoir adjudicateur pourra confier au titulaire de l'accord cadre, en application des articles L. 2122-1 et R. 2122-7 du code de la commande publique, un ou plusieurs nouveaux accords- cadres ayant pour objet la réalisation de prestations similaires. La durée pendant laquelle un nouvel accord cadre pourra être conclu ne peut dépasser 3 ans à compter de la notification du présent accord-cadre. ". 10. La société Groupe Hélios soutient que Grand Besançon Métropole s'est réservé la possibilité de conclure un ou plusieurs accords-cadres sans pour autant limiter le montant de ces futurs contrats lesquels sont dès lors réputés excéder les seuils de la procédure formalisée. 11. Il résulte de l'instruction que si le pouvoir adjudicateur a indiqué, à l'article 1.6. du règlement de consultation, qu'il se réservait la possibilité de confier ultérieurement des prestations similaires au titulaire du marché, aucune autre précision ne figure dans les pièces contractuelles concernant le chiffrage de ces éventuelles nouvelles prestations. Toutefois, si l'absence de prise en compte, dans le marché initial, du prix des prestations similaires susceptibles d'être ultérieurement demandées au titulaire, est susceptible d'entacher d'illégalité cet éventuel futur marché, elle est sans incidence sur la régularité de la procédure de passation du marché initial. En tout état de cause, la société requérante n'établit pas que la potentielle passation d'un marché de prestations similaires aurait une influence sur la stratégie des soumissionnaires relative au prix de sorte qu'elle ne démontre pas en quoi un tel manquement, à le supposer même établi, aurait été susceptible de la léser. 12. Il résulte de ce qui précède que la société requérante ne pouvant se prévaloir d'aucun manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence susceptible de l'avoir lésée, sa demande ne peut qu'être rejetée. Sur les frais liés au litige : 13. Aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, ou pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ". 14. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de Grand Besançon Métropole, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande la société requérante au titre des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens. 15. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Groupe Hélios le versement, au profit de Grand Besançon Métropole, d'une somme de 1 500 euros ainsi qu'une somme de 1 000 euros chacune au bénéfice des sociétés Global Signalisation et Bourgogne Franche-Comté Signaux au titre de ces mêmes frais.

ORDONNE :

Article 1er : La requête de la société Groupe Hélios est rejetée. Article 2 : La société Groupe Hélios versera à Grand Besançon Métropole une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : La société Groupe Hélios versera à la société Global Signalisation et à la société Bourgogne Franche-Comté Signaux une somme de 1 000 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Groupe Hélios, à Grand Besançon Métropole, à la société Global Signalisation et à la société Bourgogne Franche-Comté Signaux. Fait à Besançon, le 16 septembre 2022. La juge des référés, S. A La République mande et ordonne au préfet du Doubs, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière