CIV. 3
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 9 novembre 2017
Rejet
M. X..., président
Arrêt n° 1111 FS-P+B+I
Pourvoi n° M 16-23.120
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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Statuant sur le pourvoi formé par
la société Chouchou, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...],
contre l'arrêt rendu le 17 mai 2016 par la cour d'appel de Toulouse (1re chambre, section 1), dans le litige l'opposant à la société Compagnie foncière Alpha, société en nom collectif, dont le siège est [...],
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l'article
R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 3 octobre 2017, où étaient présents : M. X..., président, Mme Y..., conseiller référendaire rapporteur, Mme Masson-Daum, conseiller doyen, Mme Brenot, MM. Echappé, Parneix, Mmes Andrich, Dagneaux, Provost-Lopin, conseillers, Mmes Meano, Collomp, M. Jariel, Mme Schmitt, conseillers référendaires, M. Z..., avocat général référendaire, Mme Berdeaux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Y..., conseiller référendaire, les observations de la SCP Capron, avocat de la société Chouchou, de la SCP Delvolvé et Trichet, avocat de la société Compagnie foncière Alpha, l'avis de M. Z..., avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen
unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 17 mai 2016), que, le 14 février 2008, la société Compagnie foncière Alpha, qui avait consenti le 1er février 1999 à la société Chouchou un bail commercial, lui a délivré un congé avec offre de renouvellement et indemnité d'éviction ; qu'après l'avoir mise en demeure, le 4 janvier 2013, d'avoir à exploiter les lieux conformément à la destination du bail, elle a, le 18 mars 2013, rétracté son offre en raison d'un motif grave et légitime tenant à la violation de la destination des lieux prévue au contrat ; que, le 19 avril 2013, elle l'a assignée en validité du refus de renouvellement ;
Attendu que la société Chouchou fait grief à
l'arrêt d'accueillir cette demande, alors, selon le moyen :
1°/ que le point de départ du délai de prescription applicable à l'action que le bailleur, qui a délivré au preneur un congé avec offre de renouvellement, qui a rétracté cette offre de renouvellement conformément à l'article
L. 145-57 du code de commerce, et qui entend, pour valider le congé qu'il a délivré et pour éviter en outre de devoir payer l'indemnité d'éviction, se prévaloir d'un motif grave et légitime de refus de renouvellement, est la date de la délivrance du congé ;
qu'en décidant
le contraire, la cour d'appel a violé l'article
L. 145-60 du code de commerce ;
2°/ que, dans le cas où le délai de prescription commence de courir à compter du jour où une partie a eu connaissance d'un événement, il convient d'assimiler le jour où cette partie aurait dû avoir connaissance de cet événement au jour où elle en a eu effectivement connaissance ; qu'en énonçant que « le point de part de ce délai [celui que prévoit l'article
L. 145-60 du code de commerce] est le jour où le bailleur qui refuse le renouvellement découvre le motif grave et légitime qui fonde son refus », sans retenir la date à laquelle un bailleur prudent et diligent qui refuse le renouvellement aurait dû découvrir le motif grave et légitime qui fonde son refus, la cour d'appel a violé l'article
L. 145-60 du code de commerce, ensemble l'article
2225 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant retenu, à bon droit, que le délai de prescription de l'action en rétractation de l'offre de renouvellement du bail pour motif grave et légitime court à compter du jour où le bailleur a eu connaissance de l'infraction qui fonde son refus et relevé, souverainement, que la bailleresse avait découvert l'exercice d'activités non autorisées par le bail le 7 mars 2012, la cour d'appel en a exactement déduit que l'action n'était pas prescrite ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS
:
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Chouchou aux dépens ;
Vu l'article
700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Chouchou et la condamne à payer à la société Compagnie foncière Alpha la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE
au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Capron, avocat aux Conseils, pour la société Chouchou
Le pourvoi fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR :
. validé le congé que la Compagnie financière Alpha a délivré le 1er septembre 2008 à la société Chouchou ;
. ordonné à la société Chouchou, sous une astreinte de 100 € par jour de retard à compter de la signification du jugement entrepris, de déguerpir des locaux commerciaux qui lui ont été donnés à bail ;
. fixé l'indemnité d'occupation à la somme de 1 261 € par mois ;
AUX MOTIFS QUE « la sàrl Chouchou fonde son moyen de prescription sur les dispositions de l'article
L. 145-60 du code de commerce qui mentionne une prescription de deux ans » (cf. arrêt attaqué, p. 4, motifs de la décision, 1er alinéa) ; que « le point de départ de ce délai est le jour où le bailleur qui refuse le renouvellement découvre le motif grave et légitime qui fonde son refus » (cf. arrêt attaqué, p. 4, motifs de la décision, 2e alinéa) ; qu'« en l'espèce, ledit motif grave et légitime est la vente d'alcool et d'épicerie » (cf. arrêt attaqué, p. 4, motifs de la décision, 3e alinéa) ; qu'il n'est pas contesté que la vente d'alcool et d'épicerie était pratiquée dans les lieux loués avant le congé avec offre de renouvellement délivré le 14 février 2008 [; qu']il convient donc de déterminer à quelle date le bailleur a eu connaissance de cette activité » (cf. arrêt attaqué, p. 4, motifs de la décision, 4e alinéa) ; que « c'est [
] à bon droit que le premier juge a retenu le 7 mars 2012 comme point de départ du délai de prescription, et considéré que l'introduction de l'instance par acte du 19 avril 2013 avait efficacement interrompu le délai de prescription » (cf. arrêt attaqué, p. 5, 2e alinéa) ;
1. ALORS QUE le point de départ du délai de prescription applicable à l'action que le bailleur, qui a délivré au preneur un congé avec offre de renouvellement, qui a rétracté cette offre de renouvellement conformément à l'article
L. 145-57 du code de commerce, et qui entend, pour valider le congé qu'il a délivré et pour éviter en outre de devoir payer l'indemnité d'éviction, se prévaloir d'un motif grave et légitime de refus de renouvellement, est la date de la délivrance du congé ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article
L. 145-60 du code de commerce ;
2. ALORS, en toute hypothèse, QUE, dans le cas où le délai de prescription commence de courir à compter du jour où une partie a eu connaissance d'un événement, il convient d'assimiler le jour où cette partie aurait dû avoir connaissance de cet événement au jour où elle en a eu effectivement connaissance ; qu'en énonçant que « le point de part de ce délai [celui que prévoit l'article
L. 145-60 du code de commerce] est le jour où le bailleur qui refuse le renouvellement découvre le motif grave et légitime qui fonde son refus », sans retenir la date à laquelle un bailleur prudent et diligent qui refuse le renouvellement aurait dû découvrir le motif grave et légitime qui fonde son refus, la cour d'appel a violé l'article
L. 145-60 du code de commerce, ensemble l'article
2225 du code civil.