Chronologie de l'affaire
Tribunal administratif de Paris 01 octobre 2014
Cour administrative d'appel de Paris 03 mai 2016

Cour administrative d'appel de Paris, 9ème Chambre, 3 mai 2016, 14PA04289

Mots clés contributions et taxes · société · taxe · transports · recouvrement · requête · service · apporteur d'affaires · rapport · solidarité · fournisseur · vérification · flash · marchandises · fraude · distribution

Synthèse

Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro affaire : 14PA04289
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Paris, 01 octobre 2014, N° 1312988/1-1
Président : M. JARDIN
Rapporteur : M. David DALLE
Rapporteur public : Mme ORIOL
Avocat(s) : SCP RICHARD

Chronologie de l'affaire

Tribunal administratif de Paris 01 octobre 2014
Cour administrative d'appel de Paris 03 mai 2016

Texte

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL 2N Envest a demandé au Tribunal administratif de Paris la décharge de l'obligation de payer les droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés sur le fondement de l'article 283-4 BIS du code général des impôts au titre de la période du 14 octobre 2009 au 30 juin 2010.

Par un jugement n° 1312988/1-1 du 1er octobre 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 17 octobre 2014, 25 mars 2015 et 5 août 2015, la SARL 2N Envest, représentée par Me Richard, avocat, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1312988/1-1 du 1er octobre 2014 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge de l'obligation de payer les droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés sur le fondement de l'article 283-4 BIS du code général des impôts au titre de la période du 14 octobre 2009 au 30 juin 2010 ;

3°) de mettre une somme de 5 000 euros à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a vérifié que son fournisseur Aréo remplissait ses obligations fiscales, comme l'attestent les deux attestations qu'elle produit, établies les 20 novembre 2009 et 23 février 2010 par l'administration fiscale ;

- elle ne connaissait pas la société Geha France, à l'égard de laquelle l'administration fiscale s'est montrée particulièrement laxiste en ne lui réclamant pas le paiement de la taxe sur la valeur ajoutée durant plusieurs années ;

- l'administration, qui avait connaissance d'un problème avec la société Geha France, ne l'a pas informée qu'elle devait cesser toute activité avec la société Aréo ;

- elle n'a fait elle-même l'objet d'aucun redressement ;

- à l'occasion de sa vérification de comptabilité, l'administration n'a pas rejeté les factures établies par son transporteur ;

- l'administration ne démontre pas qu'elle aurait vérifié la société Flash 2 Transports ;

- l'administration a pu vérifier que la société Flash 2 Transports la connaissait ;

- les numéros IMEI ne sont pas un élément pris en compte par les grossistes mais par les consommateurs finaux ;

- l'administration a commis une erreur en émettant initialement un avis de mise en recouvrement de 14 365 502 euros au lieu de 1 308 125 euros ;

- le refus de l'administration de lui rembourser des crédits de taxe sur la valeur ajoutée la met en difficulté ;

- le juge d'instruction a pris acte que son gérant n'était pas impliqué dans cette affaire.

Par des mémoires, enregistrés le 20 février 2015 et le 22 juillet 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête d'appel est insuffisamment motivée au regard de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;

- l'administration n'entend appeler en solidarité en paiement la société 2N Envest qu'à hauteur de la somme de 1 295 045 euros ;

- aucun des moyens invoqués par la requérante n'est fondé.

Par ordonnance du 21 septembre 2015, la clôture de l'instruction a été fixée au 22 octobre 2015.

Un mémoire, présenté pour la société 2N Envest, a été enregistré le 8 avril 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Dalle,

- les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public,

- et les observations de Me Richard, avocat de la société 2N Envest.

1. Considérant que la société 2N Envest, dont l'objet social est l'activité de holding, administration d'entreprises, prise de participations dans des sociétés de toutes formes, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2008 au 30 septembre 2010, au cours de laquelle elle a réalisé des opérations d'achat-revente de petits consommables pour imprimantes et de téléphones portables ; qu'estimant qu'elle avait participé, dans le cadre de cette dernière activité, à un circuit de fraude à la taxe sur la valeur ajoutée dont elle ne pouvait ignorer l'existence, l'administration a engagé, sur le fondement des dispositions de l'article 283-4 BIS du code général des impôts, sa responsabilité solidaire au paiement des droits de taxe non reversés par son fournisseur de second rang, la société Geha France, pour un montant de 1 308 125 euros ; que la société 2N Envest relève appel du jugement en date du 1er octobre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'obligation solidaire de paiement du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé en conséquence sur le fondement de l'article 283-4 BIS du code général des impôts au titre de la période du 14 octobre 2009 au 30 juin 2010 ; que devant la Cour, le ministre des finances et des comptes publics précise que l'administration n'entend plus désormais appeler en solidarité en paiement la société 2N Envest, à raison de la taxe sur la valeur ajoutée non reversée par la société Geha France, qu'à hauteur de la somme de 1 295 046 euros, au lieu de celle de 1 308 125 euros ;

2. Considérant qu'aux termes des dispositions du 4 bis de l'article 283 du code général des impôts dans sa rédaction issue de l'article 93 de la loi n° 2006-1771 du 30 décembre 2006 : " L'assujetti en faveur duquel a été effectuée une livraison de biens et qui savait ou ne pouvait ignorer que tout ou partie de la taxe sur la valeur ajoutée due sur cette livraison ou sur toute livraison antérieure des mêmes biens ne serait pas reversée de manière frauduleuse est solidairement tenu, avec la personne redevable, d'acquitter cette taxe. " ;

3. Considérant que la société 2N Envest, qui reconnaît l'existence du circuit de fraude à la taxe sur la valeur ajoutée dans lequel elle était impliquée à raison de son activité d'achat-revente de téléphones portables, conteste le caractère conscient de sa participation au schéma mis en évidence par le service ; que pour établir, ainsi qu'elle en a la charge, que la société requérante avait connaissance de l'existence de la fraude à la taxe sur la valeur ajoutée commise en amont de ses acquisitions, l'administration a relevé que la société requérante a effectué les opérations litigieuses, qui sont sans rapport avec son objet social et n'impliquaient, sur la période vérifiée, que deux clients et un seul fournisseur, par l'intermédiaire d'un apporteur d'affaires qu'elle a rémunéré par des commissions s'élevant à 40 % de ses marges commerciales ; que la société 2N Envest ne procédait pas au suivi des marchandises dont la gestion était intégralement confiée à cet apporteur d'affaires ; que plusieurs factures pro forma ont été émises par son fournisseur de premier rang, la société Aréo Distribution, avant même qu'elle n'ait reçu les bons de commande correspondants de sa cliente, la société Amco Electronics ; que les mêmes numéros d'identification " IMEI " des téléphones portables se retrouvaient plusieurs fois sur les listes des marchandises achetées par la société 2N Envest auprès de la société Aréo Distribution, ce qui signifie qu'un même produit était vendu plusieurs fois à la société 2N Envest ; que, s'agissant des produits de la marque Apple, le droit de communication exercé auprès de la société Apple France a révélé que la plupart des numéros IMEI étaient faux ; qu'enfin, si la requérante invoque un contrat de transport des marchandises qu'elle aurait conclu avec la société Flash 2 Transports, celle-ci a déclaré à l'administration ne pas connaître son existence et aucune trace de livraisons n'a pu être trouvée lors des opérations de contrôle, notamment à l'occasion de l'exercice par le service de son droit de communication auprès de la société Flash 2 Transports, d'où il est résulté que les marchandises ont en réalité été livrées directement depuis Aréo Distribution chez les clients de la requérante ; qu'ainsi, et alors même que le fournisseur direct de la société 2N Envest, la société Aréo Distribution, n'était pas défaillant, que l'intéressée aurait accompli les diligences requises pour s'assurer du sérieux de ce fournisseur, en vérifiant son numéro d'identification à la taxe sur la valeur ajoutée et en lui demandant des attestations de dépôt de ses déclarations fiscales, qu'elle n'aurait fait elle-même l'objet d'aucun rappel de taxe sur la valeur ajoutée en conséquence de la vérification de comptabilité diligentée à son encontre et qu'au cours de cette vérification, les charges correspondant aux factures émises par la société Flash 2 Transports n'auraient pas été rejetées, ni la déduction de la taxe grevant ces factures refusée, l'administration, eu égard au caractère très particulier des relations décrites ci-dessus entre les différents intervenants, établit que la société 2N Envest a consciemment participé à un circuit de fraude à la taxe sur la valeur ajoutée ; que, dès lors, même si le gérant de la société n'a pas été poursuivi pénalement, et quelle que soit l'importance de l'erreur matérielle commise par l'administration, en émettant, le 19 octobre 2011, un avis de mise en recouvrement de 14 365 502 euros avant de lui substituer, le 26 décembre 2011, l'avis de mise en recouvrement litigieux de 1 308 125 euros, c'est à bon droit que le service a mis en oeuvre la procédure prévue à l'article 283-4 bis précité du code général des impôts et demandé paiement à l'intéressée des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels la société Geha France a été assujettie pour la période du 14 octobre 2009 au 30 juin 2010 ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre défendeur, que la société 2N Envest n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, il n'y a pas lieu de faire droit à ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :



Article 1er : La requête de la société 2N Envest est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société 2N Envest et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction nationale d'enquêtes fiscales.

Délibéré après l'audience du 14 avril 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- M. Dalle, président assesseur,

- M. Blanc, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 3 mai 2016.

Le rapporteur,Le président,

D. DALLEC. JARDIN

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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