RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 2
ARRÊT DU 19 Mars 2015
(n° , 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/11419
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 Septembre 2014 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS - section encadrement - RG n° F13/2455
DEMANDERESSES AU CONTREDIT
SOCIETE BRIQ
[Adresse 2]
[Adresse 2]
SOCIETE SYCOMORE
[Adresse 3]
[Adresse 3]
représentées par Me Jocelyne SKORNICKI LASSERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : D0671 substituée par Me Anne-sophie CONRATTE, avocat au barreau de PARIS, toque : E1419
DEFENDEUR AU CONTREDIT
Monsieur [H] [F]
[Adresse 1]
[Adresse 2]
comparant en personne, assisté de Me Adrien BROUSSE, avocat au barreau de PARIS, toque : G0748
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article
945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 février 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Nicolas BONNAL, Président, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Nicolas BONNAL, Président
Madame Martine CANTAT, Conseiller
Monsieur Christophe ESTEVE, Conseiller
GREFFIER : Madame FOULON, lors des débats
ARRET :
- contradictoire
- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article
450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Nicolas BONNAL, Président et par Madame FOULON, Greffier.
*******
Statuant sur le contredit formé le 25 septembre 2014 par les sociétés BRIQ et SYCOMORE contre un jugement rendu le 18 septembre 2014 par le conseil de prud'hommes de PARIS, rendu à l'issue d'une audience de départage, qui, saisi par M. [H] [F] de demandes tendant à voir dire que ces deux sociétés étaient ses employeurs conjoints et à les voir condamner à lui payer diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture du dit contrat de travail, et statuant sur l'exception d'incompétence soulevée par les deux sociétés, a retenu l'existence d'un contrat de travail entre les parties, à compter du mois de juin 2008, et s'est dit compétent pour connaître du litige les opposant';
Vu la déclaration de contredit et les conclusions transmises à la cour et soutenues à l'audience du 13 février 2015 pour la société à responsabilité limitée BRIQ et la société anonyme SYCOMORE, auxquelles on se référera pour un plus ample exposé des moyens et prétentions de ces demanderesses au contredit, qui sollicitent de la cour qu'elle':
- infirme le jugement déféré,
- dise que le conseil de prud'hommes est incompétent, faute que M. [H] [F] ait été leur salarié, au profit du tribunal de commerce de PARIS,
- condamne M. [H] [F] à leur payer à chacune la somme de 2'000 euros sur le fondement des dispositions de l'article
700 du code de procédure civile et aux dépens';
Vu les conclusions transmises à la cour et soutenues à l'audience pour M. [H] [F], auxquelles on se référera pour un plus ample exposé des moyens et prétentions du défendeur au contredit, qui demande à la cour de':
- confirmer le jugement déféré sur le principe de l'existence d'un contrat de travail le liant aux sociétés BRIQ et SYCOMORE et sur la compétence,
- le reformer sur la date de son embauche et fixer celle-ci au 1er janvier 1997,
- évoquer l'affaire au fond,
- condamner solidairement les sociétés BRIQ et SYCOMORE à lui payer une somme de 3'500 euros sur le fondement des dispositions de l'article
700 du code de procédure civile';
Vu la note en délibéré datée du 19 février 2015 adressée pour M. [H] [F] avec l'autorisation du magistrat chargé d'instruire l'affaire';
SUR CE, LA COUR
Sur les faits constants
Il résulte des pièces produites et des débats que':
- la société BRIQ a été créée le 3 octobre 1996, par M. [H] [F], qui en détenait la moitié des parts sociales et en a été désigné gérant, et deux autres associés,
- M. [H] [F] était rémunéré par cette société avec la qualité de dirigeant et pour un emploi de directeur technique,
- le 3 juin 2008, les associés de la société BRICQ, dont M. [H] [F], alors détenteur de 790 parts sociales sur 1'000, ont cédé leurs parts à la société SYCOMORE, dont ils sont devenus parallèlement actionnaires,
- M. [H] [F], qui avait conservé une part sociale de la société BRIQ, en est demeuré gérant et est resté rémunéré par elle en la même qualité et pour le même emploi,
- lors de l'assemblée générale de la société BRIQ du 23 octobre 2012, il a été mis un terme au mandat de gérant de M. [H] [F],
- le 27 février 2013, M. [H] [F] a saisi le conseil de prud'hommes de PARIS de la procédure dans le cadre de laquelle a été rendue la décision déférée.
Sur la compétence du conseil de prud'hommes
Il doit être rappelé qu'aux termes de l'article L'1411-1 du code du travail, «'le conseil de prud'hommes règle par voie de conciliation les différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions du présent code entre les employeurs, ou leurs représentants, et les salariés qu'ils emploient'» et qu'«'il juge les litiges lorsque la conciliation n'a pas abouti'», qu'il y a contrat de travail, ce qui détermine donc la compétence de la juridiction du travail, lorsqu'une personne s'engage à travailler pour le compte et sous la direction d'une autre moyennant rémunération et que, spécialement, le lien de subordination ainsi exigé est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur, qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné, le fait que le travail soit effectué au sein d'un service organisé pouvant constituer un indice de l'existence d'un lien de subordination lorsque l'employeur en détermine unilatéralement les conditions d'exécution.
L'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à la convention, mais des conditions de faits dans lesquelles est exercée l'activité litigieuse. Il appartient en conséquence au juge d'examiner ces conditions de fait et de qualifier la convention conclue entre les parties, sans s'arrêter à la dénomination qu'elles avaient retenue entre elles.
Spécifiquement, le cumul entre un mandat social et un contrat de travail au sein d'une même entreprise est possible, à la condition que le salarié exerce des fonctions techniques indépendantes du mandat social, dans un lien de subordination et moyennant une rémunération distincte de celle versée au titre du mandat.
Sur la période antérieure au mois de juin 2008
À supposer que M. [H] [F], qui n'a pas formé de contredit de compétence contre la décision déférée, puisse contester celle-ci en ce qu'elle a partiellement retenu l'exception d'incompétence formée par les sociétés BRIQ et SYCOMORE, seules demanderesses au contredit, pour ce qui concerne la période s'étendant de la création de la société BRIQ au rachat de l'essentiel de ses parts sociales par la société SYCOMORE, il sera observé que la réalité de fonctions techniques distinctes du mandat social de gérant n'est pas démontrée.
Il résulte des pièces produites, et n'est nullement contesté, que M. [H] [F] n'a reçu, à compter du 1er janvier 1997, qu'une rémunération unique, matérialisée par la remise de bulletins de paie qui mentionnent sa position de dirigeant et un emploi de directeur technique, et ne font état d'aucune cotisation à l'assurance chômage.
De même, s'il n'est pas contesté que M. [H] [F] disposait de compétences techniques, notamment acquises lorsqu'il avait été salarié de la société APPLE, et qui ont permis à la société BRIQ de concevoir, développer et commercialiser des outils multimédia, conformément à son objet social, ces compétences, dans la petite structure que constituait la société BRIQ, qui, en juin 2008, avait, sans tenir compte de l'intéressé, deux salariés, M. [L] [B] à temps complet et M. [P] [W] (par ailleurs associé minoritaire) à temps partiel, ne peuvent être distinguées de l'exercice du mandat social.
M. [H] [F] détenait, à la création de la société, la moitié des parts sociales. Il n'est pas contesté qu'il n'a jamais, entre 1997 et 2008, cédé de parts et n'est donc à aucun moment devenu associé minoritaire, ainsi que le confirment d'ailleurs les procès-verbaux des assemblées générales ordinaires des années 2002 à 2004, 2006 et 2007 versés aux débats. Il résulte encore des pièces produites que ce n'est qu'après le mois de juin 2007, date à laquelle il ne détenait encore que la moitié des parts de la société, qu'il est devenu associé majoritaire, étant rappelé qu'au mois de juin 2008, avant de les céder à la société SYCOMORE, il détenait 790 parts sociales de la société BRIQ sur 1'000.
En tout état de cause, il n'est produit aucun élément de nature à démontrer que, pendant cette période, M. [H] [F] aurait été placé dans un lien de subordination à l'égard de la société BRIQ.
À la supposer recevable, la demande d'infirmation du jugement déféré pour ce qui concerne la période antérieure au mois de juin 2008 sera, en conséquence, rejetée.
Sur la période postérieure au mois de juin 2008
M. [H] [F] soutient d'abord que les sociétés demanderesses au contredit ont eu à son égard, à compter du mois de juin 2008, la qualité de co-employeur, dès lors qu'ainsi qu'il l'a soutenu pour la période précédente, il existait une relation salariée entre lui et la société BRIQ, qu'est caractérisée, entre cette société et la société SYCOMORE, dont elle était la filiale, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction, et qu'enfin, il était également placé sous un lien de subordination direct à l'égard de la société SYCOMORE.
Pour prospérer, une telle argumentation suppose qu'il soit démontré, d'une part, qu'il existait pendant cette période une relation salariée entre l'une ou l'autre des sociétés SYCOMORE et BRIQ et M. [H] [F] et, d'autre part, non seulement qu'il existait entre ces deux sociétés la triple confusion alléguée, mais encore que cette situation caractérisait une immixtion de la société mère à son seul profit dans la gestion de sa filiale, qui privait celle-ci de toute autonomie industrielle, commerciale et administrative.
Or, les pièces que M. [H] [F] produit aux débats montre que l'imbrication entre ces deux sociétés était étroite, et que son action pour l'une et l'autre société, pendant la période considérée, était globalement dirigée par le directeur général de la société SYCOMORE, M. [R] [S].
Est ainsi produit le contrat conclu par ces deux sociétés ensemble avec la société CHÂTEAU DE CHENONCEAU, dans une version non signée, mais dont le contenu n'est pas contesté, qui stipulait la fourniture par mise à disposition sous forme de location par la société SYCOMORE à ce client commun du matériel nécessaire à une prestation de visite guidée audio-vidéo de ce monument, matériel prenant notamment la forme d'audio-guides remis aux visiteurs, prestation conçue et développée par la société BRIQ, laquelle assurait également la maintenance des matériels correspondants, organisait des paiements par le client à ces deux sociétés, lesquelles ne pouvaient exercer qu'ensemble leur faculté de résiliation. Un contrat conclu entre les sociétés SYCOMORE et BRIQ le 1er mai 2011 organisait le reversement par celle-là à celle-ci d'une partie de sa marge sur le loyer du matériel.
Les documents relatifs à l'exécution de ce contrat montrent que M. [H] [F] s'occupait aussi des prestations dues par la société SYCOMORE, et notamment de la commande des casques audio à livrer au client, et qu'il sollicitait de M. [R] [S] que le virement correspondant soit effectué.
De façon plus générale, sont produits aux débats de très nombreux courriers électroniques, adressés indifféremment à M. [H] [F] à son adresse dépendant de la société BRIQ ou à son autre adresse électronique au nom de la société SYCOMORE, qui caractérisent le lien de subordination dans lequel celui-ci se trouvait à l'égard de M. [R] [S].
C'est ainsi que, spécialement pour l'exercice de ses fonctions de gérant de la société BRIQ, M. [H] [F] était en relation étroite avec M. [R] [S]':
- le 17 mai 2012, il demandait son autorisation pour effectuer les démarches réclamées au nom de l'URSSAF pour débloquer le compte de la société, après des impayés, autorisation qu'il obtenait le lendemain, M. [R] [S] virant le 1er juin suivant les fonds nécessaires sur le compte de la société BRIQ,
- fin mai, comme début juillet 2012, M. [H] [F] sollicitait du même directeur général le virement de son salaire,
- M. [R] [S] lui donnait le 12 juillet 2012 des instructions pour retirer les liasses fiscales de la société BRIQ.
Parallèlement, M. [H] [F] était présenté par M. [R] [S] comme un collaborateur de la société SYCOMORE, agissait vis-à-vis des clients de cette société comme un des préposés de celle-ci, et recevait les instructions correspondantes du directeur général':
- le 18, puis le 20 mai 2010, M. [H] [F] écrivait, à l'en-tête de la société SYCOMORE et/ou depuis l'adresse électronique de cette société, au familistère de GUISE, pour lui présenter un devis, et faisait de même le 29, puis le 30 novembre 2010 à l'intention de l'INSTITUT DE FRANCE, le 2 mai 2011 à un responsable de la maison de Victor HUGO, le 30 juillet 2011 au musée du LOUVRE, le 14 octobre 2011 à l'attention de l'établissement public de VERSAILLES, le 8 novembre 2011 à l'adresse de la société TEMPORA,
- M. [R] [S] ou un de ses collaborateurs indiquaient à des clients que c'était M. [H] [F] qui suivait leur dossier au sein de la société SYCOMORE': ainsi le 16 août 2011 à une société LE HUB AGENCE, le 21 mars 2012 en vue d'un déplacement chez un client à [Localité 1], les 18 novembre 2011 et 6 février 2012 pour les prestations proposées à l'établissement public de VERSAILLES, le 19 décembre 2011 dans un courriel à M. [O], le 20 décembre 2011 pour un client à TUNIS, le 29 avril 2010 pour la province de NAMUR,
- un collaborateur de SYCOMORE indiquait le 9 février 2012 au directeur général de celle-ci que c'était M. [H] [F] qui allait préparer «'l'inventaire précis des contenus SYCOMORE'» en vue d'une réunion avec le client CITYRAMA,
- M. [H] [F] rendait compte, le 17 novembre 2011, de la promotion qu'il avait faite, lors d'une table ronde, «'des activités de SYCOMORE'», les 19 janvier 2011, 21 juillet 2011, 30 mai 2012 et 12 septembre 2012 des résultats d'un rendez-vous avec un client, le 8 mars 2012 des suites du dépôt d'une marque, les 19 janvier 2011, 22, puis 30 juillet 2011 des détails de la proposition faite à un client ou de l'appel d'offres émis par un client potentiel.
M. [H] [F] recevait encore des instructions de M. [R] [S], voire de ses collaborateurs, d'être présent à une réunion (20 août 2009, 28 octobre 2009, 2 novembre 2011, 23 avril 2012), de préparer une présentation (14 décembre 2011), d'adresser un cahier des charges ou un devis à des interlocuteurs (17 mars 2010, 21 décembre 2011), de faire des recherches dans une direction spécifiée (29 novembre 2011, 7 mars 2012), de renouveler un nom de domaine (27 juillet 2012), de revoir un document qu'il lui avait soumis pour avis (20 juillet 2009, 22 novembre 2010, 3 janvier 2012), de lui parler d'une proposition d'intervention dans un colloque (13 août 2009), de l'informer sur la disponibilité d'un studio d'enregistrement (28 juin 2009).
M. [H] [F] sollicitait l'approbation de M. [R] [S], le 10 février 2012, sur un projet de courrier à un client, le 2 octobre 2012 sur la présence de la société à un salon professionnel, puis le 11 octobre, sur les modalités de cette présence.
À ces éléments qui caractérisent l'existence d'un lien de subordination avec le directeur général de la société SYCOMORE, s'ajoutent ceux qui établissent son intégration au sein du service organisé de cette société': organigramme de cette société, où il apparaissait comme «'chef de projet iPod iPhone'» au sein du «'service multimédia web'», service dépendant lui-même du «'service production'», une carte de visite de la société SYCOMORE à son nom, mentionnant les fonctions de «'directeur développement & nouvelles technologies'», l'usage d'un téléphone mobile de cette société, le rappel dont il était un des destinataires des horaires de travail au sein de la société, plusieurs demandes pour renseigner les plannings hebdomadaires, l'usage d'un bureau dans les locaux de la société (étant observé que la pièce dont se prévaut à cet égard M. [H] [F] émane d'un préposé de la société SYCOMORE, et a donc plus de valeur probante que l'attestation produite par les sociétés demanderesses au contredit émanant d'une prestataire externe, présente au siège de la société depuis le mois d'avril 2012, qui affirme que l'intéressé n'y avait pas de bureau).
La réalité du pouvoir de sanction qui caractérise également le lien de subordination est suffisamment établie par la décision prise par la société SYCOMORE, en qualité d'actionnaire de la société BRIQ, de mettre fin au mandat de gérant que détenait M. [H] [F].
Les diverses pièces produites qui démontrent la réalité du lien de subordination allégué ne permettent pas de distinguer si M. [R] [S], directeur général de la société SYCOMORE, a usé de son pouvoir de direction, de contrôle et de sanction au nom de cette société, ou au titre de représentant de l'actionnaire principal, détenant 998 des 1'000 parts sociales de la société BRIQ, dès lors qu'il résulte encore des pièces du dossier que la société SYCOMORE s'immisçait au quotidien dans la gestion de la société BRIQ, et que ces deux sociétés connaissaient une situation de confusion de direction, d'intérêts et d'activités.
Les instructions données par M. [R] [S], directeur général de la société SYCOMORE, à M. [H] [F] pour l'exercice de ses fonctions de gérant de la société BRIQ déjà analysées ci-dessus établissent la réalité d'une unité de direction entre les deux sociétés, au delà du seul fait que la première nommée détenait 998 des 1'000 parts sociales de la seconde.
L'imbrication également déjà analysée des contrats conclus entre les deux sociétés et leurs clients démontrent également l'unité d'activités et d'intérêts entre les deux sociétés, laquelle résulte aussi des pièces produites démontrant que le site internet de la société BRIQ renvoyait à celui de la société SYCOMORE, que cette dernière société présentait sur le dit site internet le système AUDIOPEN, dont la marque avait pourtant fait l'objet d'un dépôt à l'[Établissement 1] ([Établissement 1]) au nom de la société BRIQ par M. [H] [F], le 1er octobre 2009, ou encore qu'ayant remporté un appel d'offres en Italie, la société SYCOMORE demandait à M. [H] [F] de lui donner toutes les informations sur les suites du dépôt de la dite marque dans ce pays.
Sont également produits aux débats, dans le même sens, un courriel adressé le 28 septembre 2011 à la ville de RUEIL-MALMAISON expliquant que les prestations réalisées pour cette collectivité locale l'étaient par «'la société SYCOMORE, au travers de sa filiale BRIQ'», des échanges internes à la société SYCOMORE, entre le 26 octobre et le 23 novembre 2010, auxquels participaient M. [H] [F], pour déterminer au nom de laquelle des deux sociétés il serait opportun de proposer un contrat à un client, et un courriel du 11 avril 2012 de M. [H] [F] à M. [R] [S] mentionnant qu'avait été évoquée son «'intégration dans SYCOMORE, pour la moitié de [s]on temps (ce qui est actuellement largement le cas), l'autre mi-temps restant chez BRIQ'».
Si les éléments montrant que la comptabilité de la société BRIQ était effectuée par le service comptable de la société SYCOMORE ne sont pas significatifs de l'immixtion alléguée, qui ne peut se déduire de la simple fourniture d'une telle prestation de service par la société mère au bénéfice d'une filiale, il résulte, en revanche, d'autres pièces versées aux débats que les salaires de M. [H] [F] ont été à de nombreuses reprises pris en charge directement par la société SYCOMORE.
Ainsi, même si, comme le font observer les sociétés demanderesses au contredit, M. [H] [F] détenait la signature sur le compte bancaire de la société BRIQ, et qu'il en a usé pour régler une somme qui lui était due personnellement, copie d'un chèque à son ordre du 7 septembre 2012 signé de lui et annoté «'salaire août'», étant à cet égard produite, il a déjà été mentionné que fin mai puis début juillet 2012, M. [H] [F] avait dû solliciter M. [R] [S] pour obtenir un virement permettant le paiement du dit salaire, et il doit être ajouté qu'il est démontré qu'au mois de février 2012 également, le montant du salaire de M. [H] [F] a été viré sur son compte bancaire personnel depuis la société SYCOMORE, et qu'au moment de la révocation de ses fonctions de gérant, le paiement des notes de frais et émoluments qui lui étaient dus au titre des mois précédents a été également pris en charge par la société SYCOMORE.
Il résulte de ce qui précède que M. [H] [F] était placé dans un lien de subordination à l'égard de M. [R] [S], directeur général de la société SYCOMORE, qui elle-même détenait 998 des 1'000 parts sociales de la société BRIQ, que les deux sociétés présentaient une confusion de direction, d'intérêts et d'activités, et que la maison mère s'est immiscée à son seul profit dans la gestion de sa filiale, en privant celle-ci de toute autonomie commerciale et administrative.
Le contredit sera donc rejeté.
Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a reconnu l'existence d'une relation salariée dans le cadre d'un co-emploi entre M. [H] [F] et les sociétés SYCOMORE et BRIQ, et ce à compter du mois de juin 2008.
Sur la demande d'évocation
Afin de ne pas priver les parties d'un double degré de juridiction, la cour estime qu'il n'est pas de bonne justice, au sens de l'article
89 du code de procédure civile, d'évoquer le fond de l'affaire, ainsi que le sollicite M. [H] [F].
L'affaire sera, en conséquence, renvoyée au conseil de prud'hommes de PARIS.
Sur les frais irrépétibles et les frais du contredit
Les sociétés SYCOMORE et BRIQ, qui succombent en leur contredit, seront condamnées in solidum à en prendre en charge les frais, et à payer à M. [H] [F] la somme de 2'000 euros sur le fondement des dispositions de l'article
700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Rejette le contredit de compétence';
Dit qu'il a existé entre M. [H] [F] et les sociétés SYCOMORE et BRIQ, dans le cadre d'un co-emploi, une relation salariée à partir du mois de juin 2008';
Dit en conséquence que le conseil de prud'hommes de PARIS est compétent pour connaître des demandes formées par M. [H] [F] au titre de l'exécution et de la rupture de ce contrat de travail';
Rejette la demande de M. [H] [F] tendant à l'infirmation du jugement pour ce qui concerne la période antérieure au mois de juin 2008';
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions';
Dit n'y avoir lieu à évocation';
Renvoie l'affaire devant le conseil de prud'hommes de PARIS';
Condamne in solidum les sociétés SYCOMORE et BRIQ à payer à M. [H] [F] la somme de 2'000 euros sur le fondement des dispositions de l'article
700 du code de procédure civile';
Condamne in solidum les sociétés SYCOMORE et BRIQ aux frais du contredit.
LE GREFFIER LE PRESIDENT