Cour d'appel de Pau, Chambre 1, 4 avril 2018, 16/00348

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2020-02-06
Cour d'appel de Pau
2018-04-04

Texte intégral

PS/AM Numéro 18/1299 COUR D'APPEL DE PAU 1ère Chambre

ARRÊT

DU 04/04/2018 Dossier : 16/00348 Nature affaire : Demande en paiement de l'indemnité d'assurance dans une assurance de dommages Affaire : Compagnie d'assurances GROUPAMA D'OC C/ [X] [O] épouse [M] [E] [M] Grosse délivrée le : à : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS A R R Ê T prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 04 avril 2018, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. * * * * * APRES DÉBATS à l'audience publique tenue le 05 février 2018, devant : Monsieur SERNY, magistrat chargé du rapport, assisté de Madame FITTES-PUCHEU, greffier, présente à l'appel des causes, Monsieur SERNY, en application des articles 786 et 907 du code de procédure civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de : Madame BRENGARD, Président Monsieur CASTAGNE, Conseiller Monsieur SERNY, Conseiller qui en ont délibéré conformément à la loi. dans l'affaire opposant : APPELANTE : Compagnie d'assurances GROUPAMA D'OC, compagnie d'assurance mutuelle agricole [Adresse 1] [Adresse 1] [Adresse 1] [Localité 1] représentée et assistée de Maître Frédéric BERNAL de la SCP COUDEVYLLE - LABAT - BERNAL, avocat au barreau de PAU INTIMES : Madame [X] [O] épouse [M] née le [Date naissance 1] 1956 à [Localité 2] de nationalité française [Adresse 2] [Localité 3] Monsieur [E] [M] né le [Date naissance 2] 1925 à [Localité 4] de nationalité française [Adresse 2] [Localité 3] représentés et assistés de Maître Stéphane SUISSA, avocat au barreau de PAU sur appel de la décision en date du 23 DECEMBRE 2015 rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PAU Vu l=acte d'appel initial du 02 février 2016 ayant donné lieu à l'attribution du présent numéro de rôle, Vu le jugement rendu le 23 décembre 2015 par le tribunal de grande instance de PAU qui a condamné la compagnie GROUPAMA à verser une indemnité de 20.000 euros aux consorts [M] [O] en dédommagement d'une caravane dont le tribunal a jugée qu'elle avait été volée, Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 13 juin 2016 par la compagnie GROUPAMA D'OC, Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 21 septembre 2016 par la compagnie GROUPAMA D'OC, Vu l=ordonnance de clôture délivrée le 17 janvier 2017, Le rapport ayant été fait oralement à l=audience. Les faits constants Les consorts [O] [M], aujourd'hui mariés, ont fait l'acquisition le 07 octobre 2011 d'une caravane de marque BURSTNER modèle TRECENTO 490 TS immatriculée [Immatriculation 1] au prix de 24.960,50 euros et l'ont assuré selon contrat souscrit par [E] [M] auprès de la compagnie GROUPAMA. Le contrat garantit le risque de vol. Il s'agit là des seuls faits constants. Le jugement dont appel Retenant la thèse des époux [M] [O] selon laquelle le véhicule aurait été volé dans la nuit du 29 au 30 avril 2013 dans les locaux de la société STAND CARS CONSULTING - elle-même non assurée contre ce risque et ayant essuyé un refus de garantie par son propre assureur - à qui ils auraient confié ledit véhicule en dépôt-vente selon acte en date du 15 janvier 2013, le jugement - considérant comme démontré le risque à garantir - a condamné la société GROUPAMA, à leur payer une indemnité de 20.000 euros compensant la perte de ce véhicule, outre 3.000 euros en réparation du préjudice moral et 1.500 euros en compensation de frais irrépétibles.

Prétentions et moyens des parties

La compagnie d'assurance GROUPAMA conclut à l'infirmation du jugement en faisant valoir qu'elle est victime d'une fraude consistant à déclarer être victime d'un vol que rien ne prouve et s'appuie sur cela sur un faisceau d'indices consistant notamment dans la tardiveté de la déclaration de sinistre et l'irrégularité du registre de police, pour en déduire que la réalité du fait dommageable est douteuse. Elle demande 500 euros de dommages-intérêts pour abus de procédure ainsi que l'allocation de 2.000 euros en compensation de frais irrépétibles. Les époux [O] [M] poursuivent la confirmation du jugement et demandent 2.500 euros de dommages-intérêts supplémentaires au titre des frais irrépé

MOTIFS

Q propriétaires n'aient pas encore été mariés lors de la survenance du fait dommageable n'a aucune incidence ; le contrat d'assurance certes a été passé par l'un d'eux pour assurer un bien mais ils avaient convenu entre eux d'être copropriétaires ; le bien a certes pu passer pour l'assureur comme étant la propriété du souscripteur du contrat alors qu'il ne s'agissait que d'une apparence donnée à une propriété en réalité indivise ; mais cela ne modifiait en rien l'objet du contrat, et la compagnie ne soutient pas que la situation ait faussé pour elle l'appréciation du risque assuré ; c'est donc par des motifs inopérants que la compagnie d'assurance invoque aujourd'hui la signature du contrat d'assurance par l'un seul des deux copropriétaires pour s'opposer à la demande d'indemnisation formée par le couple. Le fait que le véhicule ait été assuré au nom de [E] [M] sans mention de l'identité de sa compagne, depuis devenue sa femme, n'emporte aucune conséquence quant à la preuve du risque qui se serait réalisé et dont la garantie est litigieuse. Il y a bien eu effraction des locaux de la société STAND CARS CONSULTING mais la compagnie d'assurance de cette société a refusé sa garantie ; elle n'est pas dans la cause ce qui signifie que les demandeurs, tiers lésés, n'entendent pas agir contre elle ; la compagnie GROUPAMA ne peut pas le leur reprocher ; la question posée est de savoir si le contrat qu'elle a signé avec les consorts [O] [M] couvre ou non le risque qui s'est réalisé d'un vol dans les locaux d'une société tierce, auquel cas la compagnie GROUPAMA pourrait rechercher la responsabilité du dépositaire, ce que ne font pas les consorts [O] [M] en raison des insolvabilités de la société autant qu'en raison des liens personnels qu'ils peuvent avoir ou avoir eu avec son gérant. La tardiveté de la déclaration de sinistre ne prouve rien car cette déclaration intervient après le refus de garantie non contesté que l'assureur de la société STAND CARS CONSULTING a opposé à celle-ci ; il était tout à fait normal que l'on cherchât d'abord à obtenir la garantie de l'assureur de la personne dont on disait qu'elle détenait le véhicule en qualité de dépositaire. En revanche, le livre de police est rédigé de manière irrégulière (voir photographie du rapport d'assurance) et une ligne a manifestement été rajoutée entre les autres pour faire croire à une chronologie des ventes permettant de faire jouer la garantie ; ce seul fait, établi par l'assureur, n'est pas contesté : il rend sa falsification vraisemblable de sorte que ce document perd sa valeur probante de la réalité, à la date du vol, du contrat de dépôt vente invoqué par les consorts [O] [M]. L'absence de production de la copie complète de l'enquête de police qui a suivi le dépôt de plainte de la société, va dans le même sens. C'est donc à bon droit que la compagnie GROUPAMA soutient que la réalité du contrat de dépôt vente à la date de l'effraction et la présence du véhicule dans les locaux de la société sont donc douteuses. Il s'ensuit que les époux [O] [M] ne démontrent pas la réalité du contrat de dépôt vente et ne prouvent donc pas que le véhicule a bien été volé dans les locaux de cette société dans la nuit du 29 au 30 avril 2013 ; la preuve du risque assurée n'est donc pas rapportée par les assurés qui doivent être déboutés de leur action forcée en exécution du contrat d'assurance. Par ces seuls motifs, le jugement sera infirmé. La demande reconventionnelle pour abus de procédure n'est pas justifiée, car si la fraude est hautement vraisemblable, elle n'est pas prouvée ; l'infirmation n'est en effet juridiquement prononcée qu'en raison de l'affaiblissement des preuves à rapporter, sous le régime de la procédure civile, de la présence effective du véhicule dans les locaux de la société STAND CARS CONSULTING à la date à laquelle il est prétendu qu'il s'y trouvait. L'équité commande en revanche de faire droit à la demande en paiement que formule la compagnie GROUPAMA en compensation de frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, * infirme le jugement dont appel, * dit que la société GROUPAMA ne doit pas garantie aux époux [O] [M] et déboute ces derniers de toutes leurs prétentions, * déboute la société GROUPAMA de sa demande indemnitaire pour procédure abusive, * mais condamne les époux [M] [O] à lui payer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, * les condamne aux dépens de première instance et d'appel. Le présent arrêt a été signé par Mme Marie-Florence BRENGARD, Président, et par Mme Julie FITTES-PUCHEU, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. LE GREFFIER, LE PRESIDENT, Julie FITTES-PUCHEU Marie-Florence BRENGARD