Tribunal administratif de Grenoble, 31 mai 2024, 2201175

Mots clés
mineur • rapport • requête • préjudice • requis • risque • rejet • service • tiers • transmission

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal administratif de Grenoble
  • Numéro d'affaire :
    2201175
  • Nature : Décision
  • Rapporteur : M. Ruocco-Nardo
Voir plus

Résumé

Vous devez être connecté pour pouvoir générer un résumé. Découvrir gratuitement Pappers Justice +

Suggestions de l'IA

Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Par une requête et des mémoires, enregistrés les 25 février 2022, 16 mars 2022 et 19 avril 2022, M. B A demande au tribunal d'annuler le refus du président du conseil départemental de l'Isère de lui communiquer le signalement d'une information préoccupante concernant son fils. Il soutient que : - il a droit d'obtenir la communication du signalement de l'information préoccupante concernant son fils en application de l'article L. 226-2-2 du code de l'action sociale et des familles dès lors que cette communication n'est pas contraire à l'intérêt de l'enfant ; - les dispositions de l'article L. 311-6 du code des relations entre le public et l'administration ne font pas obstacle à la communication du document dès lors qu'il connaît déjà l'identité de l'auteur du signalement et le contenu du signalement ; - le refus du département constitue le délit prévu aux articles 434-7-1 et 434-7-2 du code pénal. Par un mémoire en défense, enregistré le 4 avril 2022, le département de l'Isère conclut au rejet de la requête. Il soutient que le moyen soulevé n'est fondé. Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ; - le code pénal ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. L'Hôte, vice-président, - les conclusions de M. Ruocco-Nardo, rapporteur public, - et les observations de Mme C, représentant le département de l'Isère.

Considérant ce qui suit

: 1. Le 13 octobre 2021, M. A a demandé au service de l'aide sociale à l'enfance du département de l'Isère de lui communiquer le signalement d'une information préoccupante concernant son fils. Il s'est vu opposer un refus le 5 novembre 2021. Il a saisi le 15 novembre 2021 la Commission d'accès aux documents administratifs qui a rendu, le 13 janvier 2022, un avis favorable sous réserves. Le 11 mars 2022, une nouvelle décision de refus lui a été opposée. M. A doit être regardé comme demandant l'annulation de cette dernière décision. 2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 226-2-2 du code de l'action sociale et des familles : " Par exception à l'article 226-13 du code pénal, les personnes soumises au secret professionnel qui mettent en œuvre la politique de protection de l'enfance définie à l'article L. 112-3 ou qui lui apportent leur concours sont autorisées à partager entre elles des informations à caractère secret afin d'évaluer une situation individuelle, de déterminer et de mettre en œuvre les actions de protection et d'aide dont les mineurs et leur famille peuvent bénéficier. () Le père, la mère, toute autre personne exerçant l'autorité parentale, le tuteur, l'enfant en fonction de son âge et de sa maturité sont préalablement informés, selon des modalités adaptées, sauf si cette information est contraire à l'intérêt de l'enfant. ". Aux termes de l'article R. 226-2-2 du même code : " L'information préoccupante est une information transmise à la cellule départementale mentionnée au deuxième alinéa de l'article L. 226-3 pour alerter le président du conseil départemental sur la situation d'un mineur, bénéficiant ou non d'un accompagnement, pouvant laisser craindre que sa santé, sa sécurité ou sa moralité sont en danger ou en risque de l'être ou que les conditions de son éducation ou de son développement physique, affectif, intellectuel et social sont gravement compromises ou en risque de l'être. / La finalité de cette transmission est d'évaluer la situation d'un mineur et de déterminer les actions de protection et d'aide dont ce mineur et sa famille peuvent bénéficier. ". Aux termes du I de l'article D. 226-2-6 de ce code : " Sauf intérêt contraire du mineur, les titulaires de l'autorité parentale sont informés par le président du conseil départemental de la mise en place d'une évaluation. ". L'article D. 226-2-7 du code dispose : " I.- Un rapport est élaboré à l'issue de l'évaluation () / Sauf intérêt contraire du mineur, ce dernier ainsi que les titulaires de l'autorité parentale sont informés du contenu du rapport et des suites données à l'évaluation. ". 3. Contrairement à ce que soutient M. A, il ne résulte pas de ces dispositions, notamment celles de l'article L. 226-2-2 du code de l'action sociale et des familles, que le signalement d'une information préoccupante concernant un mineur soit communiqué aux parents de l'enfant. Les dispositions précitées prévoient seulement que les parents sont informés de la mise en place d'une évaluation, puis du contenu du rapport et des suites données à l'évaluation, sous réserve qui plus est que ces informations ne soient pas de nature à nuire à l'intérêt de l'enfant. 4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 311-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Sous réserve des dispositions des articles L. 311-5 et L. 311-6, les administrations mentionnées à l'article L. 300-2 sont tenues de publier en ligne ou de communiquer les documents administratifs qu'elles détiennent aux personnes qui en font la demande, dans les conditions prévues par le présent livre. ". Aux termes de l'article L. 311-6 du même code : " Ne sont communicables qu'à l'intéressé les documents administratifs : / 1° Dont la communication porterait atteinte () au secret médical () ; / 2° Portant une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable ; / 3° Faisant apparaître le comportement d'une personne, dès lors que la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice. ". 5. Si le signalement effectué par une personne ayant eu connaissance d'une information préoccupante concernant un mineur est en principe communicable au représentant légal de ce mineur, il en va autrement lorsque le signalement met en cause le comportement ou les agissements du représentant légal, de sorte que sa communication serait de nature à porter préjudice soit au mineur, soit à la personne ayant procédé au signalement. 6. Au cas d'espèce, il est constant que le signalement concernant le fils de M. A mettait en cause les agissements de ce dernier. Par suite, ce document ne lui était pas communicable, quand bien même il en connaitrait l'auteur et le contenu. 7. En troisième lieu, le refus du département de l'Isère de communiquer le signalement n'est pas constitutif des délits prévus aux articles 434-7-1 et 434-7-2 du code pénal qui répriment, pour les premier, le fait, par un magistrat, toute autre personne siégeant dans une formation juridictionnelle ou toute autorité administrative, de dénier de rendre la justice après en avoir été requis et de persévérer dans son déni après avertissement ou injonction de ses supérieurs et, pour le second, le fait pour toute personne qui, en raison de ses fonctions, a connaissance, en application du code de procédure pénale, d'informations issues d'une enquête ou d'une instruction en cours concernant un crime ou un délit de révéler sciemment ces informations à des tiers. 8. Il résulte de ce qui précède que la requête de M. A ne peut qu'être rejetée.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée. Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. B A et au département de l'Isère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mai 2024. Le magistrat désigné, V. L'HÔTE La greffière, L. ROUYER La République mande et ordonne au préfet de l'Isère en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N°2201175