République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 2 SECTION 2
ARRÊT DU 28/04/2022
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N° de MINUTE : 22/
N° RG 21/01351 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TPWI
N° RG 21/02903 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TUOR, procédures jointes par ordonnance de jonction rendue le 6 janvier 2022 sous le N° 21/01351
Jugement (N°2018001787) rendu le 15 décembre 2020 par le tribunal de commerce de Boulogne sur Mer
APPELANTE
La Société Opale Aéro System, SARL, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
Ayant son siège social 23 rue de la Motte 62250 Marquise / France
représentée par Me Hervé Leclercq, avocat au barreau de Boulogne sur Mer
INTIMÉE
SARL RS Dispositif, prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège.
Ayant son siège social 777 Route de Strazeele 59190 Caestre
représentée par Me David-Franck Pawletta, avocat au barreau de Lille
DÉBATS à l'audience publique du 01 février 2022 tenue par Agnès Fallenot magistrat chargé d'instruire le dossier qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article
786 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Audrey Cerisier
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Laurent Bedouet, président de chambre
Nadia Cordier, conseiller
Agnès Fallenot, conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 28 avril 2022 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Laurent Bedouet, président et Marlène Tocco, greffier lors du délibéré, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 11 janvier 2022
FAITS ET PROCÉDURE
La SARL Opale Aero System, laquelle a pour activité la conception, la fabrication, la location et la vente de produits destinés au loisir aérien, a passé deux contrats avec la SARL Amalgame, agence de publicité, sur la base de deux devis établis le 14 mars 2016 et acceptés le 30 mars 2016 :
- le premier dénommé « Territoire de communication » pour un montant de 3 550 euros HT soit 4 260 euros TTC, relatif à la création de l'image d'un futur site de commerce par internet ;
- le second dénommé « Site e-commerce », relatif à la rénovation d'un site existant (opale-paramodels) et à la conception d'un nouveau site (opales-parachutes), d'un montant 16 450 euros HT soit 19 740 euros TTC.
Les factures n°1611087 du 24 novembre 2016 pour 2 130 euros HT soit 2 556 euros TTC, et n°1612051 du 20 décembre 2016 pour 4 935 euros HT soit 5 922 euros TTC, correspondant aux soldes dus à la livraison, conformément aux conditions de paiement convenues entre les parties, sont restées impayées.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 11 juillet 2017, la société Amalgame a adressé une mise en demeure à la société Opale Aero System, en vain.
Par acte d'huissier le 22 novembre 2017, elle lui a fait signifier une sommation de payer, également sans résultat.
Saisi par la société Amalgame, le président du tribunal de commerce de Boulogne-sur-Mer a rendu une injonction de payer en date du 13 décembre 2017, ordonnant à la société Opale Aero System de régler les sommes dues au titre des deux factures litigieuses, avec intérêts de retard au taux de 3 fois le taux d'intérêt légal à compter de la date d'échéance de chaque facture, outre 80 euros d'indemnité forfaitaire et 120 euros d'indemnité pour frais irrépétibles.
Cette décision a été frappée de caducité, à la suite de l'opposition formée par la société Opale Aero System, en raison de la non consignation des frais de greffe.
Par courrier du 15 décembre 2017 la société Opale Aero System a fait part à la société Amalgame de ses griefs sur la qualité de la prestation rendue, arguant de préjudices dus à un manque à gagner sur son chiffre d'affaires, et aux coûts de personnel mis en 'uvre pour pallier ses manquements, lui proposant, à titre de règlement amiable, un abandon du solde des factures, ainsi qu'une somme forfaitaire de 50 000 euros de dommages et intérêts.
Par courrier en réponse du 29 janvier 2018, la société Amalgame lui a répondu que les griefs allégués n'étaient pas de son fait puisque la société Opale Aero System avait décidé de faire son affaire personnelle de l'hébergement du site, et a réitéré sa demande en paiement, rejetant la demande de dommages et intérêts.
Par acte d'huissier en date du 12 avril 2018, la société Amalgame a fait citer la société Opale Aero System à comparaître devant le tribunal de commerce de Boulogne-sur-Mer pour obtenir sa condamnation au paiement.
Par acte du 17 janvier 2020 avec effet au 1er janvier 2020, la société Amalgame a fait l'objet d'une dissolution sans liquidation et de la transmission universelle de son patrimoine au profit de la société RS Dispositif, société composée des deux mêmes associés et des deux mêmes dirigeants que la société Amalgame.
Par jugement rendu le 15 décembre 2020, le tribunal de commerce de Boulogne-sur-Mer a statué en ces termes :
CONDAMNE la société OPALE AERO SYSTEM à payer à la société AMALGAME les sommes suivantes :
' 2 130 € HT (2 556 € TTC) au titre de la facture n°161 1087 du 24/11/2016 avec intérêts légaux à compter du 11 juillet 2017
' 2 435 € HT (2 922 € TTC) au titre de la facture n°1612051 du 20/12/2016
DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes.
ORDONNE l'exécution provisoire du Jugement.
LAISSE à chacune des parties la charge de ses frais irrépétibles.
DIT que les frais et dépens, liquidés concernant les frais de greffe à la somme de 73.22 euros TTC, seront partagés par moitié entre les parties.
Par déclaration du 4 mars 2021, la société Opale Aero System a relevé appel de cette décision en ces termes : « il est relevé appel et demandé la réformation du jugement du 15 décembre 2020 en ce que le Tribunal de Commerce a : - Condamné la société OPALE AERO SYSTEM à payer à la société AMALGAME les sommes de : * 2.130 € HT (2.556 € TTC) au titre de la facture n° 161 1087 du 24 novembre 2016 avec intérêts légaux à compter du 11 juillet 2017, * 2.435 € HT (2.922 € TTC) au titre de la facture n° 161 2051 du 20 décembre 2016. - Débouté la société OPALE AERO SYSTEM de sa demande de condamnation de la société AMALGAME à lui payer la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts. - Débouté la société OPALE AERO SYSTEM de sa demande de condamnation de la société AMALGAME à lui payer la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article
700 du Code de procédure civile, ainsi qu'en tous les frais et dépens. - Débouté la société OPALE AERO SYSTEM de sa demande subsidiaire de nomination d'un Expert Judiciaire. »
Cette procédure a été enrôlée sous le numéro de RG 21/1351.
Par déclaration du 26 mai 2021, la société Opale Aero System a de nouveau relevé appel de cette décision dans les mêmes termes.
Cette procédure a été enrôlée sous le numéro de RG 21/2903.
Une ordonnance de jonction a été rendue le 6 janvier 2022.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par conclusions régularisées par le RPVA le 2 juillet 2021, la société Opale Aero System demande à la cour de :
Infirmer la décision du tribunal de commerce de BOULOGNE SUR MER en date du 15 décembre 2020 en ce qu'il a condamné la société OPALE AERO SYSTEM à régler à AMALGAME différentes sommes.
Condamner la société RS DISPOSITIF venant aux droits de la société AMALGAME à payer à la société OPALE AERO SYSTEM sur le fondement des articles 1231-1 et suivants du Code civil la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation des pertes subies, des gains manqués, des travaux de reprise et de la dégradation de l'image de marque.
Dire que cette somme se compensera avec les sommes liées aux travaux de conception et de remise à jour du site.
Condamner la société RS DISPOSITIF venant aux droits de la société AMALGAME à la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article
700 du Code de procédure civile ainsi qu'en tous les frais et dépens.
Subsidiairement,
Nommer Expert avec pour mission d'examiner les documents contractuels et le site livré, de constater les dysfonctionnements existants et les remèdes à apporter avec les dates de ces derniers, de dire si le site était opérationnel en décembre 2016 et l'impact des désordres constatés sur son fonctionnement dans le cadre d'une activité d'e-commerce.
La société Opale Aero System plaide qu'elle disposait déjà d'un site internet, nécessaire à son activité, qu'elle souhaitait moderniser.
La conception du site par la société Amalgame a duré anormalement longtemps. Le devis a été signé le 30 mars 2016 et l'envoi d'éléments graphiques a eu lieu le 5 avril 2016. Une relance sur le projet a été faite le 2 mai 2016. Un nouveau mail du 9 mai 2016 a été adressé afin d'obtenir enfin une réponse le 10 mai 2016, indiquant que les éléments seraient transmis la semaine suivante. Finalement les éléments ont été envoyés par le site We transfer le 15 juin 2016. Pour autant, la livraison n'a eu lieu que le 23 décembre 2016 à 10h47 et a dû être finalisée par la cliente.
Dès la mise en place, il a été remonté à la société Amalgame une liste de problèmes à corriger très rapidement, lesquels auraient déjà dû être identifiés lors du développement. Si la société Amalgame indique ne jamais avoir été chargée du développement informatique, il s'agit d'une affirmation osée au regard du contrat liant les parties.
La société Amalgame a en réalité mis en 'uvre un produit insuffisamment préparé et adapté à sa contractante, la laissant trouver les meilleures solutions et reportant sur l'hébergeur tous les dysfonctionnements alors qu'il était hors de cause. Elle était pourtant clairement informée du système existant auprès de son client et a retenu délibérément la plateforme Prestashop. Si le site est aujourd'hui fonctionnel, ce n'est pas du fait de l'intervention de la société Amalgame mais parce qu'il y a eu des correctifs effectués par la société Opale Aero System.
Ces dysfonctionnements importants, puisque les seules sources de revenus de la société Opale Aero System sont liées à la vente par internet de ses produits, ont entraîné une perte de chiffre d'affaires conséquente pouvant être estimée à 140 000 euros. La comparaison avec le chiffre d'affaires 2016-2017 montre une perte de 83 187,86 euros. L'entreprise était en pleine expansion. Ce n'est qu'à la fin de l'année 2017 que les bugs ont été partiellement résolus et que l'activité 2018 a pu reprendre un cours normal, ce qui s'est fait immédiatement ressentir positivement. Cette reprise s'est confirmée sur l'exercice 2019 avec une augmentation du chiffre d'affaires de 15 %.
Avec le gain manqué de chiffre d'affaires 2017, il existe un préjudice de plus de 133 786,27 euros. En outre, la société Opale Aero System a dû réaliser 500 heures de travail pour tenter de résoudre les problèmes non solutionnés par la société Amalgame, ce qui représente un coût de 12 750,02 euros. La marge commerciale dégagée du chiffre d'affaires manqué, et les autres postes de préjudices justifient l'allocation de dommages et intérêts à hauteur de 50 000 euros.
Subsidiairement, si la cour s'estimait insuffisamment éclairée, il y aurait lieu de nommer un expert.
Par conclusions régularisées par le RPVA le 27 août 2021, la société RS Dispositif demande à la cour de :
Vu les pièces versées au débat,
Vu les articles
1103,
1104 et
1353 du Code civil
DÉCLARER recevable l'appel incident de la société R.S. DISPOSITIF venant aux droits de la société AMALGAME,
INFIRMER le jugement du 15 décembre 2020 en ce qu'il a imputé à la société intimée une réduction de ses factures à hauteur de 3 000 € et qu'il a en conséquence limité la condamnation de la société OPALE AERO SYSTEM au titre des deux factures impayées de 2 556 € avec intérêt au taux légal à compter du 11 juillet 2017 et 2 922 €, soit 5 478 €, et en ce qu'il a débouté la société intimée de sa demande de condamnation au titre de l'article 700,
Statuant à nouveau, en conséquence,
CONDAMNER la société OPALE AERO SYSTEM à payer à la société R.S. DISPOSITIF venant aux droits de la société AMALGAME la somme de 8 478 € (2 556,00 € + 5 922,00 €), avec intérêts au taux légal à compter du 11 juillet 2017,
CONDAMNER la société OPALE AERO SYSTEM à la somme de 3.500 € au titre de l'article
700 du Code de procédure civile de première instance
LE CONFIRMER pour le surplus,
En tout état de cause,
DEBOUTER la société OPALE AERO SYSTEM de l'ensemble de ses demandes, fin et conclusions.
CONDAMNER la société OPALE AERO SYSTEM à la somme de 5000 € au titre de l'article
700 du Code de procédure civile en cause d'appel
CONDAMNER la société OPALE AERO SYSTEM aux entiers dépens.
La société Amalgame expose avoir établi le 14 mars 2016 deux devis, le premier correspondant à la création de l'image du futur site e-commerce modernisé et relooké et le second à la conception de l'amélioration du site existant. Il n'était pas prévu de délai d'exécution. Au demeurant, les nombreux échanges de correspondances sur la période de conception avant la livraison ne font pas le moindre état d'un quelconque retard.
L'exécution complète de la prestation (création de l'image et réalisation technique du site), appelée build, s'est terminée en décembre 2016. Le run, à savoir la mise en exploitation, relevait de la seule responsabilité du client, ce dernier ayant des compétences informatiques et techniques.
Les relations client-prestataire se sont tendues après l'exécution du contrat, la société Opale Aero System sollicitant des prestations complémentaires importantes qui n'étaient en aucun cas prévues au devis initial. En effet, lors de la phase du build, le client n'a cessé de réclamer la gratuité sur des améliorations de son site qui demandaient un travail complémentaire important, ce qui a été refusé.
Il n'appartenait pas à la société Amalgame d'assister le client dans la mise en 'uvre effective du site, la société Opale Aero System étant parfaitement libre d'ajouter, de compléter ou d'adjoindre tout logiciel ou fonctionnalité supplémentaire après la livraison de son site remodelé. A aucun moment, un service de tierce maintenance applicative (TMA) n'a été mis en 'uvre. Pour autant, les collaborateurs de la société Amalgame, particulièrement consciencieux, ont tenté effectivement d'assister la société Opale Aero System dans le cadre de la coordination du site e-commerce avec le logiciel de facturation, qui a généré des difficultés.
Manifestement, en avril 2017, les dysfonctionnements ou incidents rencontrés ont disparu et le site a fonctionné normalement. Il a été utilisé depuis cette date et l'est encore aujourd'hui.
Les incidents ou dysfonctionnements qui ont été rencontrés sont liés à la mise en exploitation et à l'exploitation du site. La société Amalgame a honoré ses engagements, instruit le dossier, conçu l'amélioration du site e-commerce existant et livré le produit. Aucune réserve n'a été apportée jusqu'au mois de janvier 2019, sauf pour contrecarrer une procédure d'injonction de payer. Aucune proposition de paiement n'est intervenue. La mauvaise foi de la société Opale Aero System est patente et la demande de paiement des factures est bien fondée.
La présentation et l'analyse faites par la société Opale Aéro System des chiffres qu'elle verse aux débats pour établir son préjudice est critiquable, ses demandes incohérentes et sa carence dans l'administration de la preuve patente.
La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et des prétentions et moyens des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l'article
455 du Code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 11 janvier 2022.
SUR CE
S'agissant de la loi applicable aux relations contractuelles unissant les parties, l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations prévoit, au titre des dispositions transitoires qu'elle entre en vigueur au 1er octobre 2016, les contrats conclus avant cette date demeurant soumis à la loi ancienne.
En conséquence, la relation contractuelle entre les parties, issue des contrats signés le 30mars 2016, se trouve soumise à l'ancienne législation.
Sur la demande en paiement
Aux termes de l'article 1134 ancien du Code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.
Aux termes de l'article 1147 ancien du Code civil, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.
Aux termes des articles
6 et
9 du Code de procédure civile, à l'appui de leurs prétentions, les parties ont la charge d'alléguer les faits propres à les fonder et il leur incombe de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de leurs prétentions.
L'article
L 110-3 du Code de commerce précise qu'à l'égard des commerçants, les actes de commerce peuvent se prouver par tous moyens à moins qu'il n'en soit autrement disposé par la loi.
Aux termes de l'article
146 du Code de procédure civile, une mesure d'instruction ne peut être ordonnée sur un fait que si la partie qui l'allègue ne dispose pas d'éléments suffisants pour le prouver. En aucun cas une mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l'administration de la preuve.
En l'espèce, la société Amalgame s'est engagée à réaliser, au profit de la société Opale Aero System :
- au titre du contrat « territoire de communication »:
la détermination d'un diagnostic (forces, faiblesses, opportunités, menaces pour faire émerger un positionnement) ;
la création du positionnement (réflexion stratégique et créative sur la charte graphique, style rédactionnel...) ;
la réalisation des maquettes d'intention, mise au net des concepts ;
- au titre du contrat « site de e-commerce » :
la définition des spécifications fonctionnelles et la gestion de projet ;
la création graphique (webdesign personnalisé) ;
l'installation, la configuration de Prestashop et l'installation des modules suivants : module de paiement, module gestion de livraison, modules personnalisation de produits, modules référencement, modules relances panier, module loi Hamon ;
le développement Front End ;
l'intégration du module de livraison envoimoinscher.com ;
la gestion multi langues.
Le transfert de compétences à l'utilisation de Prestashop et l'hébergement, en option, n'ont pas été souscrits par la cliente.
Le contenu des mails entre les parties de juin à novembre 2016 démontrent, ainsi que l'ont justement souligné les premiers juges, la satisfaction de la société Opale Aero System quant à la réalisation du contrat « territoire de communication ».
En revanche, concernant les sites de e-commerce, des tensions sont apparues à compter de septembre 2016, mais uniquement à propos du site opale-paramodels.com, la société Opale Aero System ayant reconnu elle-même ne pas être « en mesure de tout fournir pour les parachutes pour le moment » selon un mail du 20 septembre 2016.
La société Opale Aero System reproche à la société Amalgame que la conception de ce site ait excédé la durée prévue, et produit, à l'appui de cette allégation, le « rétroplanning général » que la société Amalgame lui avait fourni « à titre indicatif » par mail du 21 mars 2016, prévoyant une mise en production 16 semaines après la réception du bon de commande, étant précisé que les devis ont été acceptés le 30 mars 2016 et le site livré le 23 décembre 2016.
Les parties n'ont cependant pas donné valeur contractuelle à ce document. S'il n'en reste pas moins que la société Amalgame devait remplir sa prestation dans un délai raisonnable, il peut être retenu, des échanges entre les parties, outre un retard dû à la société Opale Aero System concernant le site opale-parachutes.com, l'existence de questionnements autour du « périmètre initial d'intervention » de la société Amalgame et des demandes complémentaires de la part de la société Opale Aero System « suite au recettage », avant-dernière phase du projet, lesquels ont manifestement contribué à l'allongement du délai de « mise en production », phase ultime du projet.
Le choix de la plateforme Prestashop, dont la société Opale Aero System décrie les possibilités natives qu'elle considère comme insuffisantes par rapport à ses besoins, se trouve manifestement au coeur des difficultés ayant surgi.
Des interrogations liées à la capacité de cet outil à répondre aux besoins de la cliente ont effectivement émergé au mois de septembre 2016, portant notamment sur la gestion des stocks basés sur des ensembles. Des demandes de corrections ont été faites sur ce point non seulement en phase de conception, mais également après le lancement des sites, le 23 décembre 2016, compte tenu des bugs relevés, l'installation d'un module complémentaire ayant alors été préconisée par la société Amalgame.
Il est établi par les pièces versées, et reconnu par la prestataire, que le personnel de la société Opale Aero System est largement intervenu pour corriger les dysfonctionnements repérés. Cependant, rien ne justifie que ces bugs aient gravement et durablement affecté le fonctionnement du site. En effet aucune des pièces fournies ne justifie de la persistance des difficultés au-delà du 3 février 2017, la société Opale Aero System ne démontrant pas la réalité des « nombreux désordres », notamment de gestion des stocks, allégués par son conseil dans son courrier du 15 décembre 2017.
C'est de manière tout aussi péremptoire que l'appelante affirme que le commercial de la société Amalgame lui avait garanti que la plateforme Prestashop permettrait de répondre à tous ses besoins. Aucun des éléments produits ne permet en tout état de cause de mettre en évidence les spécifications techniques et fonctionnalités expressément requises par la société Opale Aero System lors de la signature du contrat. Celui-ci détaille les modules dont l'installation était prévue, la cliente ne pouvant dès lors exiger l'ajout d'autres modules destinés à compléter les fonctionnalités de base de Prestashop en refusant d'en payer le coût. Il sera observé que le mail du 21 mars 2016 déjà évoqué proposait à cette dernière l'ajout d'un certain nombre de modules payants destinés à répondre à ses demandes complémentaires, proposition réitérée par un mail du 8 juillet 2016.
Par ailleurs, il ne peut être accordé aucune valeur probante aux mails envoyés par Monsieur [P] [V] à son conseil chiffrant les pertes directes de chiffre d'affaires liées à la baisse de fréquentation du site en 2017, les « pertes potentielles » au regard des perspectives de croissance envisagées, et les coûts de personnels, nul ne pouvant se constituer de preuve à soi-même.
Les autres pièces produites aux débats (graphiques divers, liasses fiscales, attestations de la société Ekza, expert-comptable) établissent tout au plus une baisse de fréquentation du site en 2017 par rapport à 2016, mais ne mettent en évidence aucune répercussion financière, puisqu'il en ressort une progression constante du chiffre d'affaires de la société Opale Aero System et un résultat comptable systématiquement bénéficiaire entre 2016 et 2018.
Il n'est finalement produit aucun élément de nature à établir les préjudices allégués au titre des pertes subies, des gains manqués, des travaux de reprise et de la dégradation de l'image de marque.
La société Opale Aero System échoue donc à rapporter la preuve qui lui incombe de l'existence d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité justifiant son refus de s'acquitter du solde des factures de la société Amalgame et sa demande de dommages et intérêts.
Il n'y a pas lieu, en application de l'article
146 du code de procédure civile, d'ordonner une expertise pour suppléer sa complète carence probatoire, dont il lui revient d'assumer les conséquences.
Il convient dès lors de la condamner à payer à la société RS Dispositif, venant aux droits de la société Amalgame :
- 2 130 euros HT soit 2 556 euros TTC au titre de la facture n°1611087 du 24 novembre 2016 ;
- 4 935 euros HT soit 5 922 euros TTC au titre de la facture n°1612051 du 20 décembre 2016 ;
avec intérêts au taux légal à compter du 11 juillet 2017, conformément à sa demande.
Il convient en outre de la débouter de sa demande de dommages et intérêts avec compensation entre les sommes dues, et de sa demande subsidiaire d'expertise.
La décision entreprise sera réformée en ce sens.
Sur les dépens
Aux termes de l'article
696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
L'issue du litige justifie de condamner la société Opale Aero System aux dépens d'appel et de première instance. La décision entreprise sera réformée en ce sens.
Sur les frais irrépétibles
Aux termes de l'article
700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
La décision entreprise sera infirmée en ce qu'elle a laissé à chacune des parties la charge de ses frais irrépétibles de première instance sur le fondement de l'article
700 du code de procédure civile.
La société Opale Aero System sera condamnée à verser à la société RS Dispositif, venant aux droit de la société Amalgame, la somme de euros 2000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et 2000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel, et déboutée de sa propre demande de ce chef.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement rendu le 15 décembre 2020 par le tribunal de commerce de Boulogne-sur-Mer en ce qu'il a condamné la société Opale Aero System à payer à la société Amalgame la somme de 2 130 euros HT (2 556 euros TTC) au titre de la facture n°161 1087 du 24 novembre 2016 avec intérêts légaux à compter du 11 juillet 2017, sauf à dire que ce paiement doit être fait au bénéfice de la société RS Dispositif ;
L'infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne la société Opale Aero System à payer à la société RS Dispositif la somme de 4 935 euros HT soit 5 922 euros TTC au titre de la facture n°1612051 du 20 décembre 2016 avec intérêts au taux légal à compter du 11 juillet 2017 ;
Déboute la société Opale Aero System de sa demande de dommages et intérêts ;
Déboute la société Opale Aero System de sa demande d'expertise ;
Condamne la société Opale Aero System à payer à la société RS Dispositif la somme de 2 000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et celle de 2 000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel ;
Déboute la société Opale Aero System de sa propre demande au titre de ses frais irrépétibles ;
Condamne la société Opale Aero System aux dépens de première instance et d'appel.
Le greffierLe président
Marlène ToccoLaurent Bedouet