REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 6
ARRÊT DU 15 JUIN 2022
(n° , 18pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/02019 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBL3A
Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Novembre 2019 -Tribunal de Commerce de paris RG n° 2015062170
APPELANT
Monsieur [K] [C]
né le 30 Janvier 1978 à LONDRES (ROYAUME UNI), de nationalité française
22 avenue de Criolla
92150 SURESNES
Représenté par Me Yoann ALLARD de l'AARPI ABSYS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : D0152
INTIMES
Monsieur [D] [E]
né le 17 Septembre 1976 à CRETEIL (VAL-DEMARNE),de nationalité française
27 rue Brochant
75017 PARIS
Non représenté, dont la signification de la déclaration d'appel a été fait en date du 23 juillet 2021conformément à l'article
659 du code de procédure civile
SA CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL
agissant sur poursuites et diligences de son Président du Conseil d'Administration, Monsieur [H] [W], et de son Directeur Général, Monsieur [O] [T] représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.
6 Avenue de Provence
75009 PARIS
N° SIRET : 542 01 6 3 81
Représentée par Me Isabelle SIMONNEAU de la SELEURL IS AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : D0578
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 05 Avril 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Pascale SAPPEY-GUESDON, faisant fonction de Président
Mme Florence BUTIN, Conseillère
Mme Pascale LIEGEOIS, Conseillère
qui en ont délibéré,
un rapport a été présenté à l'audience par SAPPEY-GUESDON, Conseillère dans les conditions prévues par l'article
804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Madame Anaïs DECEBAL
ARRET :
- DEFAUT
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article
450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Pascale SAPPEY-GUESDON, faisant fonction de Président et par Anaïs DECEBAL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.
*
* *
FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
La société BEYOND TRAVELING, dont l'activité d'agence de voyage a débuté le 1er octobre 2009, et qui avait pour gérants messieurs [K] [C] et [D] [E], a été titulaire, à partir du 26 mars 2013, d'un compte courant ouvert dans les livres de la société CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL (ci-après 'le CIC').
Par acte sous seing privé en date du 20 décembre 2013, le CIC a consenti à la société BEYOND TRAVELING un prêt professionnel d'un montant de 100 000 euros, au taux d'intérêt de 3 % l'an, remboursable en 48 mensualités de 2 213,43 euros chacune, avec un taux effectif global de 5,07873 %. Ce contrat de prêt inclut les engagements de caution solidaire de messieurs [C] et [E], chacun dans la limite de 25 000 euros et pour une durée de 72 mois. La société BEYOND TRAVELING a cessé de s'acquitter des échéances du prêt.
Par ailleurs, le CIC a consenti à la société BEYOND TRAVELING un crédit de trésorerie, pour un montant total de 100 000 euros, sous forme d'escompte de billets à ordre.
Ainsi la société BEYOND TRAVELING a émis :
- le 24 février 2015, un billet à ordre de 25 000 euros, à échéance du 24 avril 2015, avalisé par monsieur [C], et escompté le 24 février 2015 au taux de 3,048 % l'an,
- le 3 mars 2015, un billet à ordre de 25 000 euros, à échéance du 3 mai 2015, avalisé par monsieur [C], et escompté le 3 mars 2015 au taux de 3,039 % l'an,
- le 11 mars 2015, un billet à ordre de 25 000 euros, à échéance du 4 mai 2015, avalisé par monsieur [E], et escompté le 11 mars 2015 au taux de 3,035 % l'an,
- le 21 mars 2015, un billet à ordre de 25 000 euros, à échéance du 12 mai 2015, avalisé par monsieur [E], et escompté le 21 mars 2015 au taux de 3,024 % l'an.
Ces billets à ordre n'ont pas été honorés par la société BEYOND TRAVELING.
La société BEYOND TRAVELING étant défaillante dans le réglement des échéances du prêt et des effets de commerce, la position de son compte courant étant largement débitrice [et les plans d'apurement du solde débiteur mis en place n'ayant pas été respectés] le CIC a par lettres recommandées avec accusé de réception datées du 13 mai 2015, mis en demeure monsieur [C] d'avoir à payer les deux premiers billets à ordre, et monsieur [E] d'avoir à payer les deux derniers billets à ordre, avant le 27 mai 2015.
Par ailleurs le CIC a mis en demeure la société BEYOND TRAVELING d'avoir à honorer les échéances impayées du prêt, puis par lettre recommandée avec accusé de réception datée du 8 juin 2015, en a prononcé la déchéance du terme. Le même jour, le CIC a mis en demeure messieurs [C] et [E] d'avoir à honorer leur engagement de caution avant le 22 juin 2015.
Par jugement en date du 16 juillet 2015, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la société BEYOND TRAVELING ' anticipant la date de cessation des paiements au 15 octobre 2014. Le 18 août 2015, le CIC a déclaré sa créance entre les mains du mandataire judiciaire, se décomposant ainsi : 75 876,33 euros au titre du capital restant dû et des intérêts du prêt, et 100 000 euros correspondant aux quatres billets à ordre impayés.
Cette procédure de liquidation judiciaire sera clôturée pour insuffisance d'actif, par jugement du 6 avril 2017.
Selon actes d'huissier séparés en date des 7 et 16 octobre 2015, la banque a fait assigner monsieur [C] et monsieur [E] à comparaître devant le tribunal de commerce de Paris, leur réclamant le paiement des sommes qu'elle estime lui être dues par eux en leurs qualités de caution et d'avaliste des billets à ordre.
En cours de procédure, après avoir vendu un bien immobilier monsieur [E] le 25 septembre 2018 a pu désintéresser le CIC, à hauteur d'une somme de 85 496,32 euros correspondant au montant de sa dette réactualisée.
Par jugement contradictoire en date du 7 novembre 2019, le tribunal a statué selon le dispositif suivant :
(...)'Déboute M. [K] [C] de sa demande, avant dire droit, d'injonction de production de documents,
Déboute M. [K] [C] de sa demande d'ordonner une expertise avec pour mission de calculer le TEG du prêt du 20 décembre 2013,
Dit prescrite la demande de M. [K] [C] fondée sur une erreur du TEG,
Dit que la demande de M. [K] [C] en responsabilité du CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL, pour soutien abusif de la société BEYOND TRAVELING, lors de l'octroi du prêt du 20 décembre 2013, est recevable,
Déboute M. [K] [C] de sa demande en dommages et intérêts fondée sur un soutien abusif, par le CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL à la société BEYOND TRAVELING, lors de l'octroi du prêt du 20 décembre 2013,
Dit que la demande de M. [K] [C] en responsabilité du CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL, pour soutien abusif de la société BEYOND TRAVELING, lors de l'émission des billets à ordre, est recevable,
Déboute M. [K] [C] de sa demande en dommages et intérêts fondée sur un soutien abusif, par le CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL, à la société BEYOND TRAVELING, lors de l'émission des billets à ordre,
Condamne M. [K] [C] à payer au CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL les sommes de':
- 25 000 euros ès qualités de caution solidaire avec intérêts au taux légal à compter du 9 juin 2015,
- 25 000 euros ès qualités d'avaliste du billet à ordre créé le 24 février 2015 et à échéance du 24 avril 2015 avec intérêts au taux contractuel de 3,048 % à compter du 25 avril 2015, date d'échéance du billet à ordre, avec anatocisme à compter du 7 octobre 2015,
- 25 000 euros ès qualités d'avaliste du billet à ordre créé le 3 mars 2015 et à échéance du 3 mai 2015 avec intérêts au taux contractuel de 3,039 % à compter du 4 mai 2015, date d'échéance du billet à ordre, avec anatocisme à compter du 7 octobre 2015,
Condamne M. [D] [E] à payer au CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL en quittance valable ou deniers, les sommes de':
- 25 000 euros ès qualités de caution solidaire avec intérêts au taux légal à compter du 9 juin 2015,
- 25 000 euros ès qualités d'avaliste du billet à ordre créé le 11 mars 2015 et à échéance du 4 mai 2015 avec intérêts au taux contractuel de 3,035 % à compter du 5 mai 2015, date d'échéance du billet à ordre, avec anatocisme à compter du 16 octobre 2015,
- 25 000 euros ès qualités d'avaliste du billet à ordre créé le 21 mars 2015 et à échéance du 12 mai 2015 avec intérêts au taux contractuel de 3,024 % à compter du 13 mai 2015, date d'échéance du billet à ordre, avec anatocisme à compter du 16 octobre 2015,
Dit que M. [K] [C] s'acquittera de la partie de sa dette, contractée ès qualités de caution solidaire, soit 25 000 euros majorés des intérêts au taux légal, en y ajoutant celle relative à l'article 700 du code de préocédure civile, en 1 échéance dans les 12 mois de la signification du présent jugement, et que la dette sera immédiatement exigible, au terme de ce délai, sans mise en demeure,
Condamne M. [K] [C] à payer au CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL la somme de'3 000 euros au titre de l'article
700 du code de procédure civile,
Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement,
Condamne M. [K] [C] aux dépens (...)'.
Par déclaration reçue au greffe de la cour le 23 janvier 2020 monsieur [C] a interjeté appel de ce jugement.
Monsieur [E] bien que régulièrement intimé n'a pas constitué avocat.
À l'issue de la procédure d'appel clôturée le 8 février 2022 les moyens et prétentions des parties s'exposent de la manière suivante.
Par uniques conclusions communiquées par voie électronique le 21 août 2020 l'appelant
demande à la cour,
'Vu les articles
L. 313-1 et
R. 313-1 du code de la consommation,
Vu l'article L. 218-1 (anciennement L. 137-1) du code de la consommation,
Vu l'article
2254 du code civil,
Vu l'article 1343-5 (anciennement 1244-1) du code civil,
Vu les pièces versées au débat,'
de bien vouloir :
'Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 7 novembre 2019 en ce qu'il a':
Débouté monsieur [K] [C] de sa demande, avant-dire droit, de faire injonction au CIC de produire les relevés bancaires de la société BEYOND TRAVELING au moment de la souscription du crédit litigieux, soit du 20 décembre 2013 jusqu'à la clôture du compte ;
Débouté monsieur [K] [C] de sa demande tendant à voir ordonner une expertise avec pour mission de calculer le TEG du prêt du 20 décembre 2013 ;
Dit prescrite la demande de monsieur [K] [C] fondée sur une erreur du TEG ;
Dit que la demande de monsieur [K] [C] en responsabilité du CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL (CIC) pour soutien abusif de la société BEYOND TRAVELING lors de l'octroi du prêt du 20 décembre 2013 n'était pas fondée ;
Dit que la demande de monsieur [K] [C] en responsabilité du CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL (CIC) pour soutien abusif de la société BEYOND TRAVELING lors de l'émission des billets à ordre n'était pas fondée ;
Condamné monsieur [K] [C] à régler au CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL (CIC) les sommes suivantes':
- 25 000 euros en sa qualité attribuée de caution solidaire avec intérêts au taux légal à compter du 9 juin 2015,
- 25 000 euros en sa qualité attribuée d'avaliste du billet à ordre créé le 24 février 2015 et à échéance du 24 avril 2015 avec intérêts au taux contractuel de 3,048 % à compter du 25 avril 2015, date d'échéance du billet à ordre, avec anatocisme à compter du 7 octobre 2015,
- 25 000 euros en sa qualité attribuée d'avaliste du billet à ordre créé le 3 mars 2015 et à échéance du 3 mai 2015 avec intérêts au taux contractuel de 3,039 % à compter du 4 mai 2015, date d'échéance du billet à ordre, avec anatocisme à compter du 7 octobre 2015,
Condamné monsieur [K] [C] à verser au CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL (CIC) une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article
700 du code de procédure civile ;
Débouté monsieur [K] [C] en sa demande de déchéance des intérêts conventionnels du crédit attaqué ;
Débouté monsieur [K] [C] en sa demande tendant à voir condamner le CIC à lui verser 25 000 euros de dommages et intérêts pour le soutien abusif dans le cadre de la souscription du cautionnement ;
Débouté monsieur [K] [C] en sa demande tendant à voir condamner le CIC à lui verser 50 000 euros de dommages et intérêts pour le soutien abusif dans le cadre de l'émission des billets à ordre alors que la situation financière de la société BEYOND TRAVELING était irrémédiablement compromise ;
Débouté monsieur [K] [C] en sa demande subsidiaire tendant, en cas de condamnation à son encontre, à reporter à deux années le règlement éventuellement mis à la charge, et, de façon encore plus subsidiaire, lui accorder des délais de paiement sur 24 mois ;
Assorti le jugement de l'exécution provisoire ;
Débouté monsieur [K] [C] en sa demande de condamnation de 4 000 euros à l'encontre du CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL (CIC) sur le fondement de l'article
700 du code de procédure civile ;
Et statuant à nouveau,
Avant dire droit
Faire injonction au CIC de fournir les relevés bancaires de la société BEYOND TRAVELING au moment de la souscription du crédit soit le 20 décembre 2013 jusqu'à la clôture du compte ;
Sur le cautionnement / sur le crédit
Dire et juger recevable, non prescrite et bien fondée la demande formulée par l'appelant concernant le caractère irrégulier du TEG du crédit litigieux,
Prononcer la déchéance des intérêts conventionnels du crédit litigieux et dire que les intérêts légaux s'appliqueront,
Dire et juger que le CIC ne rapporte pas la preuve d'avoir respecté son obligation d'information annuelle de la caution,
Dire et juger que le montant garanti par monsieur [K] [C] est de 25 000 euros en ce compris les intérêts et autres majorations compte tenu des termes de l'acte de cautionnement, du défaut d'obligation d'information annuelle et de la déchéance des intérêts liée à l'irrégularité du TEG ;
Dire et juger que le CIC a commis des fautes en accordant le crédit litigieux, en ne vérifiant pas la situation financière précise des cautions, en faisant perdre à l'appelant une chance de ne pas se porter caution et en aggravant le sort de ces dernières à travers l'émission de billets à ordre ;
Dire et juger que les critères posés par l'article
L. 650-1 du code de commerce sont établis et que la responsabilité du CIC lors de l'octroi du crédit du 20 décembre 2013 est engagée;
Dire et juger qu'il ne peut être opposé à la caution l'article
L. 650-1 du code de commerce lorsque la caution invoque la perte de chance de ne pas s'engager comme caution en raison du comportement de la banque ;
Dire et juger que les fautes du CIC ont occasionné un préjudice de 25 000 euros au concluant ;
Condamner le CIC à verser 25 000 euros à monsieur [C] et rappeler que les créances réciproques entre les parties peuvent faire l'objet d'une compensation ;
Sur les billets à ordre
Dire et juger que le CIC a commis une faute en acceptant d'émettre des billets à ordre tout en sachant que la situation financière de la société BEYOND TRAVELING était irrémédiablement compromise ;
Annuler les billets à ordre par application de l'alinéa 2 de l'article
L. 650-1 du code de commerce ;
Dire et juger que cette faute est à l'origine d'un préjudice pour les avalistes et fixer le quantum de ce préjudice à 50 000 euros pour monsieur [C] ce qui correspond à l'intégralité des montants des billets à ordre avalisés ;
Condamner le CIC à verser cette somme de 50 000 euros à monsieur [C] et rappeler que les créances réciproques entre les parties peuvent faire l'objet d'une compensation ;
Subsidiairement, en cas de condamnation
Reporter à deux années, à compter du prononcé de la décision à intervenir, le règlement qui serait éventuellement mis à la charge de monsieur [K] [C] et, de façon encore plus subsidiaire, lui accorder des délais de paiement sur 24 mois ;
En tout état de cause,
Débouter le CIC en toutes ses demandes ;
Condamner le CIC à verser 4 000 euros à monsieur [K] [C] au titre de l'article
700 du code de procédure civile ;
Condamner le CIC aux entiers dépens.'
Par dernières conclusions communiquées par voie électronique le 9 décembre 2020 à monsieur [K] [C] [signifiées le 15 décembre 2020 à monsieur [E
]] l'intimé, la société CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL
demande à la cour,
'Vu les articles
1103 et
1343-2 du code civil.
Vu les articles
L. 511-12, L. 512-1 et suivants et
L. 650-1 du code de commerce.
Vu l'article
122 du code de procédure civile,'
de bien vouloir :
'A titre principal
Confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 7 novembre 2019 en
ce qu'il a :
- jugé prescrite l'action en déchéance des intérêts du prêt numéro 30066 10911 00020093302 compte tenu de la prétendue irrégularité du TEG,
- jugé la demande de monsieur [K] [C] mal fondée compte tenu de l'absence de soutien abusif par le CIC de la société BEYOND TRAVELING et rejeté la demande de dommages et intérêts de 25 000 euros,
- jugé que le CIC est un porteur de bonne foi des deux billets à ordre escomptés,
- rejeté la demande de dommages et intérêts de 50 000 euros au titre des deux billets à ordre escomptés par le CIC et avalisés par monsieur [K] [C],
- condamné monsieur [K] [C] à la somme de 3 000 euros au titre de l'article
700 du code de procédure civile,
- rejeté la demande de suspension et de délai de vingt-quatre mois pour la condamnation de monsieur [K] [C] en sa qualité d'avaliste des deux billets à ordre dont le CIC est porteur de bonne foi,
- condamné monsieur [K] [C] en quittances et deniers en sa qualité de caution solidaire et d'avaliste des deux billets à ordre dont le CIC est porteur ;
Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 7 novembre 2019 en ce qu'il a :
- déclaré recevable l'action de monsieur [K] [C] tirée de sa qualité à agir pour se porter demandeur reconventionnel au titre d'un prétendu soutien abusif de la société BEYOND TRAVELING,
- jugé recevable l'action en soutien abusif de monsieur [K] [C] en sa qualité d'avaliste et jugé que le principe de l'inopposabilité des exceptions ne serait pas applicable au CIC, porteur de bonne foi des billets à ordre souscrits par la société BEYOND TRAVELING,
- accordé douze mois de délai à compter de la signification du jugement pour la condamnation de monsieur [K] [C] à hauteur de 25 000 euros outre intérêts au titre de son engagement de caution solidaire et en paiement de l'indemnité au titre de l'article
700 du code de procédure civile ;
En conséquence :
Juger de l'absence de contestation par monsieur [D] [E] du principe et du quantum de la créance du CIC et de son paiement de la somme de 85 496,32 euros ;
Déclarer prescrite l'action en contestation du TEG du prêt numéro 30066 10911 00020093302 ;
Juger que le CIC n'a pas commis de fraude au sens de l'article
L. 650-1 du code de commerce et que les garanties n'étaient pas disproportionnées, de sorte que sa responsabilité ne peut pas être engagée sur ce fondement ;
Déclarer irrecevable l'action en responsabilité du CIC pour soutien abusif de la société
BEYOND TRAVELING introduite par monsieur [K] [C] en qualité de caution
solidaire compte tenu de la fin de non-recevoir tenant au défaut de qualité à agir ;
Juger que le cautionnement de monsieur [K] [C] garantit le seul paiement du contrat de prêt du 20 décembre 2013 ;
Déclarer irrecevable, compte tenu de la fin de non-recevoir tenant au défaut de qualité à agir la demande de monsieur [K] [C] tendant à affecter son engagement de caution souscrit le 20 décembre 2013 à la garantie des billets à ordre ;
Juger que monsieur [K] [C] est une caution avertie et un avaliste averti ;
Le débouter de ses demandes en qualité d'avaliste compte tenu du principe d'inopposabilité des exceptions attaché aux titres cambiaires, le CIC étant porteur de bonne foi ;
Débouter monsieur [K] [C] de ses demandes, fins et conclusions ;
En conséquence
Condamner monsieur [K] [C], en sa qualité de caution solidaire de la société
BEYOND TRAVELING, à payer au CIC la somme de 75 876,33 euros au titre du prêt numéro 30066 10911 00020093302 limité à la somme de 25 000 euros, majorée des intérêts au taux légal du 9 juin 2015 jusqu'au parfait paiement ;
Condamner monsieur [K] [C] à payer au CIC la somme de 25 000 euros, en sa qualité d'avaliste du billet à ordre créé le 24 février 2015 et à échéance du 24 avril 2015, majorée des intérêts au taux contractuel de 3,048 % du 25 avril 2015 jusqu'au parfait paiement ;
Condamner monsieur [K] [C] à payer au CIC la somme de 25 000 euros, en sa qualité d'avaliste du billet à ordre créé le 3 mars 2015 et à échéance du 3 mai 2015, majorée des intérêts au taux contractuel de 3,039 % du 4 mai 2015 jusqu'au parfait paiement ;
Condamner monsieur [D] [E] en deniers et quittance au paiement des
sommes dues :
- au titre du prêt numéro 30066 10911 00020093302 souscrit par la société BEYOND
TRAVELING, impayé à concurrence de 75 876,33 euros, pour lequel il s'est porté caution à hauteur de 25 000 euros, majoré des intérêts au taux légal du 9 juin 2015 jusqu'au parfait paiement,
- en sa qualité d'avaliste du billet à ordre de 25 000 euros créé le 11 mars 2015 et à
échéance du 4 mai 2015, majoré des intérêts au taux contractuel de 3,035 % du 5 mai
2015 jusqu'au parfait paiement,
- en sa qualité d'avaliste du billet à ordre de 25 000 euros créé le 21 mars 2015 et à
échéance du 12 mai 2015, majorée des intérêts au taux contractuel de 3,024 % du 13
mai 2015 jusqu'au parfait paiement ;
Ordonner la capitalisation des intérêts par application de l'article
1343-2 du code civil ;
A titre subsidiaire
Confirmer le jugement rendu par le tribunal de cmmerce de Paris le 7 novembre 2019 en
ce qu'il a :
-jugé prescrite l'action en déchéance des intérêts du prêt numéro 30066 10911 00020093302 compte tenu de la prétendue irrégularité du TEG,
- jugé la demande de monsieur [K] [C] mal fondée compte tenu de l'absence de soutien abusif par le CIC de la société BEYOND TRAVELING et rejeté la demande de dommages et intérêts de 25 000 euros,
- jugé que le CIC est porteur de bonne foi des deux billets à ordre escomptés,
- rejeté la demande de dommages et intérêts de 50 000 euros au titre des deux billets à ordre escomptés par le CIC et avalisés par monsieur [K] [C],
- condamné monsieur [K] [C] à la somme de 3 000 euros au titre de l'article
700 du code de procédure civile,
- rejeté la demande de suspension et de délai de vingt-quatre mois pour la condamnation de monsieur [K] [C] en sa qualité d'avaliste des deux billets à ordre dont le CIC est porteur de bonne foi,
- condamné monsieur [K] [C] en quittances et deniers en sa qualité de caution solidaire et d'avaliste des deux billets à ordre dont le CIC est porteur ;
Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 7 novembre 2019 en ce qu'il a :
- déclaré recevable l'action de monsieur [K] [C] tirée de sa qualité à agir pour se porter demandeur reconventionnel au titre d'un prétendu soutien abusif de la société BEYOND TRAVELING,
- jugé recevable l'action en soutien abusif de monsieur [K] [C] en sa qualité d'avaliste et jugé que le principe de l'inopposabilité des exceptions ne serait pas applicable au CIC, porteur de bonne foi des billets à ordre souscrits par la société BEYOND TRAVELING,
- accordé douze mois de délai à compter de la signification du jugement pour la condamnation de monsieur [K] [C] à hauteur de 25 000 euros outre intérêts au titre de son engagement de caution solidaire et en paiement de l'indemnité au titre de l'article
700 du code de procédure civile ;
Débouter monsieur [K] [C] de sa demande en contestation du TEG du prêt numéro 30066 10911 00020093302, ne rapportant pas la preuve de son inexactitude ;
Juger que l'action en déchéance des intérêts sur le fondement de l'article L. 341-2 (L. 312-33 ancien) du code de la consommation est irrecevable, s'agissant d'un crédit professionnel ;
Le débouter de l'intégralité de ses demandes ;
Juger de l'absence de contestation par monsieur [D] [E] du principe et du quantum de la créance du CIC et de son paiement de la somme de 85 496,32 euros ;
En conséquence
Condamner monsieur [K] [C], en sa qualité de caution solidaire de la société
BEYOND TRAVELING, à payer au CIC la somme de 75 876,33 euros au titre du prêt retracé sous le numéro 30066 10911 00020093302 limité à la somme de 25 000 euros, majorée des intérêts au taux légal du 9 juin 2015 jusqu'au parfait paiement ;
Condamner monsieur [K] [C] à payer au CIC la somme de 25 000 euros, en sa qualité d'avaliste du billet à ordre créé le 24 février 2015 et à échéance du 24 avril 2015, majorée des intérêts au taux contractuel de 3,048 % du 25 avril 2015 jusqu'au parfait paiement ;
Condamner monsieur [K] [C] à payer au CIC la somme de 25 000 euros, en sa qualité d'avaliste du billet à ordre créé le 3 mars 2015 et à échéance du 3 mai 2015, majorée des intérêts au taux contractuel de 3,039 % du 4 mai 2015 jusqu'au parfait paiement ;
Condamner monsieur [D] [E] en deniers et quittance au paiement des sommes dues :
- au titre du prêt numéro 30066 10911 00020093302 souscrit par la société BEYOND
TRAVELING, impayé à concurrence de 75 876,33 euros, pour lequel il s'est porté caution à hauteur de 25 000 euros, majoré des intérêts au taux légal du 9 juin 2015 jusqu'au parfait paiement,
- en sa qualité d'avaliste du billet à ordre de 25 000 euros créé le 11 mars 2015 et à échéance du 4 mai 2015, majoré des intérêts au taux contractuel de 3,035 % du 5 mai 2015 jusqu'au parfait paiement,
- en sa qualité d'avaliste du billet à ordre de 25 000 euros créé le 21 mars 2015 et à échéance du 12 mai 2015, majorée des intérêts au taux contractuel de 3,024 % du 13 mai 2015 jusqu'au parfait paiement ;
Ordonner la capitalisation des intérêts par application de l'article
1343-2 du code civil ;
A titre principal et subsidiaire
Condamner monsieur [K] [C] au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article
700 du code de procédure civile et des entiers dépens.'
Par application des dispositions de l'article
455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions précitées.
MOTIFS DE LA DECISION
Fondamentalement, monsieur [C] soutient qu'il est en droit d'opposer au créancier, le CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL, l'ensemble des arguments qui auraient pu être développés à l'égard du prêteur de fonds par le débiteur principal la société BEYOND TRAVELING.
Sur l'engagement de monsieur [C] en qualité de caution
L'appelant fait ainsi valoir qu'il peut, en sa qualité de caution, non seulement opposer des moyens de défense qui lui sont propres, mais également arguer de l'irrégularité du taux effectif global du prêt consenti à la société BEYOND TRAVELING ainsi que du soutien abusif dont la banque s'est rendue coupable à l'égard de cette dernière.
Sur le taux effectif global
Monsieur [C] soutient qu'il n'est pas possible d'invoquer la prescription abrégée, d'une année, figurant parmi les stipulations du contrat de prêt, sauf à violer l'article
2254 du code civil, de sorte que, par voie de conséquence, le jugement déféré devra être infirmé en ce qu'il a déclaré prescrite sa demande fondée sur le caractère erroné du taux effectif global.
Le dernier paragraphe du contrat de prêt du 20 décembre 2013 intitulé - 'ELECTION DE DOMICILE - DROIT APPLICABLE - COMPÉTENCE - PRESCRIPTION', en ce qui concerne la prescription est rédigé en ces termes : 'Les actions de toute nature, y compris les exceptions qui pourraient être opposées, mettant en cause le prêteur au titre des intérêts, commissions, frais et accessoires de toute nature dus au prêteur ou perçus par lui, sont prescrites à l'issue d'un délai d'un an. Ce délai court à compter de la convention écrite pour les éléments qui y figurent(...)'.
L'article
2254 du code civil dispose :
'La durée de la prescription peut être abrégée ou allongée par accord des parties. Elle ne peut toutefois être réduite à moins d'un an ni étendue à plus de 10 ans.
Les parties peuvent également, d'un commun accord, ajouter aux causes de suspension ou d'interruption prévues par la loi.
Les dispositions des deux alinéas précédents ne sont pas applicables aux actions en paiement ou en répétition des salaires, arrérages de rente, pensions alimentaires, loyers, fermages, charges locatives, intérêts des sommes prêtées et, généralement, aux actions en paiement de tout ce qui est payable par années ou à des termes périodiques plus courts'.
Pour dire n'y avoir lieu d'écarter la prescription abrégée d'un an convenue entre les parties au contrat de prêt, le tribunal a estimé que l'action en déchéance des intérêts conventionnels comme sanction d'une inexactitude du taux effectif global n'est pas une action en paiement au sens de l'article
2254 du code civil.
Monsieur [C] considère à raison, que contrairement à ce qu'a affirmé le tribunal, au cas présent la demande relative au caractère erroné du taux effectif global a bien pour incidence de combattre l'action en paiement des intérêts formulée par la banque.
Par application du dernier alinéa de l'article
2254 du code civil, les stipulations contractuelles instituant une prescription abrégée de un an, ne peuvent être écartées.
Le contrat de prêt a été signé par les parties le 20 décembre 2013 et les prétentions de monsieur [C] résultent au plus tôt de ses premières conclusions devant le tribunal de commerce du 22 juin 2016.
Ainsi, au vu de ce qui précède, le délai de prescription, quinquennale comme ressortant de l'application de l'article
L110-4 du code de commerce, l'action que monsieur [C] exerce, en déchéance du droit du prêteur aux intérêts conventionnels, n'est pas prescrite, et le jugement déféré doit être infirmé de ce chef.
Au fond, il sera fait observer que monsieur [C], qui ne verse aux débats aucune étude émanant d'un spécialiste en mathématiques financières et se contente de produire une simple simulation numérisée, alors que la preuve lui en incombe échoue à démontrer que les erreurs qu'il invoque affecteraient l'exactitude du taux effectif global au delà de la décimale prévue par l'annexe à l'article
R 313-1 du code de la consommation paragraphe d). Une mesure expertable n'étant pas destiner à pallier la carence des parties monsieur [C] doit être débouté de cette demande.
Sur le soutien abusif
Monsieur [C] allègue que le CIC s'est rendu coupable d'un soutien abusif en ce qu'il a octroyé un prêt à la société BEYOND TRAVELING alors qu'il était informé de sa situation irrémédiablement compromise. Monsieur [C] fait observer que l'objet du crédit litigieux était de 'renforcer le fonds de roulement' de la société, ce qui dénote que la situation financière de cette dernière était déjà difficile à cette époque. La production des relevés de compte de la société au moment de l'octoi du crédit eût été éclairante, mais la banque, tout au long de la procédure, s'est refusée à communiquer ces documents, que monsieur [C] ne détient pas puisqu'ils ont été conservés par le mandataire liquidateur dans le cadre de la procédure collective.
Monsieur [C] se dit recevable en sa qualité de caution, à invoquer le soutien abusif commis par le banquier et à réclamer une indemnisation liée à son propre préjudice.
Aussi, monsieur [C] fait valoir que l'article
L. 650-1 du code de commerce n'est pas opposable à la caution agissant contre la banque pour avoir perdu une chance de ne pas souscrire le cautionnement. La responsabilité de la banque peut être engagée dès lors que le soutien apporté est fautif et/ou lorsque la situation financière de la caution n'a pas été correctement analysée par la banque, ce qui est précisément le cas en l'espèce.
La société CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL répond que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a retenu que la banque n'a pas commis de faute dans l'octroi de ses concours. En sa qualité de caution, monsieur [C] n'ignorait pas la situation irrémédiablement compromise de la société BEYOND TRAVELING lorsqu'il s'est engagé.
Bien plus, et contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, monsieur [C] n'est pas recevable à agir à l'encontre de la banque sur le fondement d'un soutien abusif de cette dernière envers la société cautionnée. À titre subsidiaire, si la cour estimait l'action de monsieur [C] recevable, elle retiendrait que le CIC ne connaissait pas l'existence de la situation irrémédiablement compromise de la société BEYOND TRAVELING ; si par extraordinaire la cour estimait que le CIC a commis une faute, elle ne pourra que débouter de sa demande monsieur [C], qui ne démontre pas le quantum de son prétendu préjudice ni l'existence d'un lien de causalité.
Sur ce,
En droit la caution est recevable à invoquer le soutien abusif apporté à la société dont elle garantit l'engagement.
Il revient alors à la caution de faire la démonstration de ce que la situation de la société était irrémédiablement compromise, tel que le soutient monsieur [C] lequel allègue aussi que le CIC a recouru à des garanties disproportionnées.
Le tribunal a relevé :
- que le prêt et le cautionnement sont en date du 20 décembre 2013 ;
- que la date de cessation des paiements a été anticipée au 15 octobre 2014, soit moins de 18 mois avant le jugement d'ouverture de la procédure collective, ce qui signifie que la situation n'était pas irrémédiablement compromise avant cette date (alors que monsieur [C] de ce simple élément déduit exactement le contraire) ;
- que les échéances du prêt ont été payées jusqu'à celle du 15 mars 2015 comprise, soit pendant 15 mois, ce qui contredit la thèse d'une situation irrémédiablement compromise en décembre 2013, ce à quoi monsieur [C] objecte que ces échéances ont pu être payées grâce à une ligne de découvert autorisé, de sorte que le non paiement pouvait être prévisible et donc ne permet pas d'écarter la faute de la banque ;
- que les derniers comptes disponibles à la date de l'octroi du prêt du 20 décembre 2013, ceux de 2012, révèlent une situation saine : 'une activité en plein essor, une dette financière extrêmement réduite, des frais financiers contenus, un besoin en fonds de roulement réduit et des résultats en nette progression'... 'éléments qui ne démontrent pas une situation irrémédiablement compromise' ; monsieur [C] oppose que la banque pouvait faire mieux que s'en tenir à ce seul document, et se devait, ce dont elle s'est abstenue, de se livrer à une analyse globale de la situation financière de la société, notamment en s'intéressant au solde du compte, vraisemblablement débiteur compte tenu des quelques relevés produits en faisant état seulement quelques mois plus tard, ou encore à la fiche patrimoniale caution faisant apparaître un crédit antérieur lui aussi garanti par la caution de monsieur [C] ;
- que monsieur [C] ne démontre pas que la banque aurait disposé sur la situation de la société d'informations que lui-même n'aurait pas eues.
Au vu de l'ensemble de ces éléments, c'est à bon droit que le tribunal, sans qu'il soit besoin de faire injontion à la banque de produire pièces ou éléments complémentaires, a pu juger que monsieur [C] ne démontre aucun comportement fautif dans l'octroi du prêt à la société BEYOND TRAVELING, et qu'a fortiori il ne fait pas la preuve d'une fraude ou d'une immixtion du prêteur de fonds dans les affaires de son client de nature à faire déroger au principe de non responsabilité du banquier résultant des dispositions de l'article
L. 650-1 du code de commerce.
Sur les moyens de défense propres à la caution
1- Monsieur [C] demande que son cautionnement soit limité à la somme de 25 000 euros sans possibilité de lui ajouter intérêts contractuels ou autres majorations, ce qu'à exactement dit le tribunal déboutant le CIC de sa demande contraire.
Il suffit de se reporter aux termes de l'engagement de caution de monsieur [C], pour se convaincre du bien fondé de sa demande, et de ce qu'il y a lieu de confirmer sur ce point la décision du premier juge lequel a écrit :'Les intérêts contractuels ne sauraient être applicables en ce que le plafond d'engagement s'applique à l'ensemble des sommes dues et non seulement au principal', et a précisé que l'intérêt légal est de droit à compter du 9 juin 2015 ' lendemain de la mise en demeure.
2- Monsieur [C] pour solliciter la déchéance du droit du prêteur aux intérêts conventionnels du prêt, invoque tant le caractère erroné du taux effectif global prêt (évoqué supra) que le défaut d'information annuelle à caution (sans véritablement développer sur le sujet). Il invoque aussi, dans le cours de ses écritures, la disproportion de son engagement de caution, exposant que le CIC s'est abstenu de procéder à un contrôle sérieux de son état d'endettement, ce qui caractérise une faute de la banque ayant fait perdre à monsieur [C] une chance de ne pas se porter caution ; toutefois il est à noter que monsieur [C] ne formalise au dispositif de ses conclusions d'appel aucune demande tendant à voir déclarer inopposable son engagement de caution au motif qu'il serait disproportionné à son patrimoine, ses revenus et charges (et d'ailleurs il en était de même en première instance).
En définitive la déchéance du prêteur de son droit aux intérêts conventionnels ne peut que, le cas échéant, découler d'un manquement de la banque à son obligation d'information annuelle à la caution.
L'article
L. 313-22 du code monétaire et financier dispose que :'Les établissements de crédit ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement. Si l'engagement est à durée indéterminée, ils rappellent la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée. Le défaut d'accomplissement de la formalité prévue à l'alinéa précédent emporte, dans les rapports entre la caution et l'établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information. Les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette.'
Si aucune forme n'est exigée de la banque pour l'envoi de ces informations, il lui incombe toutefois de prouver qu'elle a satisfait à son obligation d'information annuelle, dont on rappellera qu'elle pèse sur l'établissement bancaire jusqu'à l'extinction de la dette.
En l'espèce, la banque produit au débat à titre de justificatif, uniquement deux lettres portant information annuelle, adressées à monsieur [C] ' pièce 47 ' datées du 24 février 2014 et 20 février 2015, qui comportent les indications idoines, mais ont vraisemblablement fait l'objet d'un envoi par courrier simple. Or en l'état actuel de la jurisprudence de la Cour de cassation, la seule production de la copie d'une lettre simple ne suffit pas, en soi, à rapporter la preuve de son envoi.
Ainsi en définitive, il doit être retenu que la banque n'a jamais délivré à la caution aucune information valide, et doit être déchue en totalité de son droit aux intérêts, conformément au texte de l'article
L. 313-22 du code monétaire et financier, précité.
Ceci étant, en toute hypothèse le montant en principal de la dette diminuée des intérêts échus au regard des pièces de la banque excède manifestement et de manière notable le montant de 25 000 euros qui est la limite supérieure de l'engagement de monsieur [C] lequel ne peut être condamné qu'à concurrence de cette somme.
En conséquence de ce qui précède, monsieur [C] sera donc tenu, en sa qualité de caution, au paiement de la somme de 25 000 euros portant intérêts au taux légal à compter du 9 juin 2015, comme il a été dit par le tribunal dans le jugement déféré.
Sur l'engagement de monsieur [C] en qualité d'avaliste des billets à ordre
Comme en première instance, monsieur [C] soutient tout d'abord avoir avalisé les billets à ordre en qualité de représentant de la société BEYOND TRAVELING et non à titre personnel ' ce que conteste la société CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL et qu'a écarté, à juste titre, le premier juge, après examen de l'effet de commerce.
En second lieu, monsieur [C] allègue que le CIC a agi de mauvaise foi en requérant les deux avals alors que la situation de la société était compromise puisque son découvert bancaire atteignait alors 'plusieurs dizaines de milliers d'euros'.
La banque intimée sollicite l'infirmation du jugement en ce qu'il a jugé recevable l'action exercée par monsieur [C] fondée sur le soutien abusif qu'aurait apporté le CIC à la société BEYOND TRAVELING lors de l'émission des billets à ordre, et sa confirmation en ce qu'il a débouté monsieur [C] de sa demande de dommages et intérêts de ce chef. Etant de bonne foi, le CIC peut se prévaloir de l'inopposabilité des exceptions pour exiger de monsieur [C] l'exécution de son engagement cambiaire.
Sur ce,
1- Aucune critique sérieuse ne peut être opposée au raisonnement du tribunal retenant, au regard des dispositions combinées des articles
L. 511-1 et
L. 511-12 du code de commerce, que le principe d'inopposabilité des exceptions du droit cambiaire ne trouve pas application lorsque l'effet n'a pas circulé, ce qui correspond au cas d'espèce.
Le premier juge a pu valablement en déduire que l'avaliste est en droit d'opposer au créancier les exceptions qui appartiennent au débiteur.
L'action en responsabilité de monsieur [C] à l'encontre du CIC fondée sur le soutien abusif que celui-ci aurait apporté à la société BEYOND TRAVELING, lors de l'émission des billets à ordre, est donc recevable.
2- Sur le fond, le premier juge a rappelé les termes de l'article
L. 511-12 du code de commerce posant le principe de l'inopposabilité des exceptions au porteur de bonne foi d'un effet de commerce, pour retenir qu'en l'espèce, il n'est pas démontré que le CIC aurait agi de mauvaise foi, laquelle consiste en ce que le porteur, c'est à dire le CIC, avait conscience de causer un dommage au débiteur cambiaire, puisqu'ici le compte de la société BEYOND TRAVELING à chaque fois a été immédiatement crédité du montant du billet à ordre. C'est également à bon droit que le premier juge a souligné que la seule prise de garantie ne manifeste pas, en soi, la mauvaise foi de la banque.
S'agissant de la responsabilité de la banque à l'égard de la caution, le tribunal a estimé que le financement produit par le CIC a été fautif au moment de l'émission des billets à ordre, la situation de la société BEYOND TRAVELING étant irrémédiablement compromise au regard de la date de cessation des paiements, quele tribunal de commerce anticipera au 15 octobre 2014, d'une insuffisance d'actifs de 700 000 euros, du solde débiteur du compte variant, sur la période courant entre début janvier 2015 et fin juin 2015, entre 109 000 euros et 160 000 euros, de saisies-attribution qui n'ont pu être exécutées en janvier et février 2015, pour des montants d'environ 13 250 euros et 3 800 euros, et eu égard aussi au fait que le plan d'amortissement du solde débiteur du compte courant proposé le 13 mars 2015 par le CIC, n'a pas pu être respecté.
Pour autant, sauf à s'immiscer dans les affaires de sa cliente, le CIC n'avait pas accès à l'intégralité de ces informations, dont certaines ne seront connues qu'ultérieurement, au moment de l'ouverture de la procédure collective. En outre s'il ne pouvait lui échapper que la situation financière de la société BEYOND TRAVELING était délicate puisque la position durablement débitrice du compte à conduit la banque à solliciter de cette dernière des efforts conséquents pour remédier à la situation, l'échec de ces mesures n'a été définitivement avéré (cf courrier du CIC en date du 4 mai 2015) qu'alors que les billets à ordre litigieux avaient déjà été émis depuis plusieurs semaines.
Il résulte de ces considérations que monsieur [C] doit être débouté de sa demande indemnitaire formée en sa qualité d'avaliste.
Sur les délais de paiement
Compte tenu de sa situation financière personnelle et de la situation de crise sanitaire, monsieur [C] sollicite le report à deux ans du règlement de l'éventuelle condamnation qui serait mise à sa charge, et à défaut, des délais de paiement sur 24 mois, en application de l'article
1343-5 du code civil.
Le tribunal a, à bon droit, jugé qu'il n'y a pas lieu à délai de grâce en matière cambiaire, en vertu des dispositions spéciales de l'article
L. 511-81 du code de commerce.
Le premier juge a toutefois fait droit (partiellement, le délai étant ramené à 1 an) à la demande de report du paiement de la somme due au titre de l'engagement de caution, en considération de la proposition de monsieur [C] de procéder à la vente d'un bien immobilier.
En vertu de l'article 1345-5 du code civil, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge, peut dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues.
Tel aménagement de la dette n'est envisageable que si leur montant le permet eu égard aux facultés contributives du débiteur et que les propositions faites pour l'apurement de la dette permettent à celui-ci de s'en acquitter dans le respect des droits du créancier.
En outre, l'octroi de délais de paiement n'est pas de plein droit.
Ensuite, une demande de report de paiement de la dette pour être reçue doit être appuyée par des éléments suffisamment précis, tangibles, et certains, permettant de croire à un désintéressement du créancier à l'expiration du délai de grâce.
Monsieur [C] ne justifie pas avoir accompli d'effectives et récentes diligences en vue de la vente de son bien immobilier, déjà évoquée en première instance et qui a participé à la décision du premier juge de reporter le paiement de la dette à un an.
Au vu de l'ancienneté de la dette il ne saurait être question de lui accorder un délai de grâce supplémentaire, que ce soit sous la forme d'un nouveau report, ou de l'échelonnement sollicité à titre subsidiaire, monsieur [C] ne donnant aucune indication concrète quant au montant des versements échelonnés qu'il effectuerait alors.
Dans ces conditions, en l'état, la demande de délais de paiement formulée par monsieur [C] sous la forme d'un échelonnement de la dette que sous celle d'un simple report, ne peut qu'être rejetée.
Sur les demandes avant dire droit
Le litige étant tranché sans qu'il y ait besoin, ni de faire injonction au CIC de produire les relevés de comptes de la société BEYOND TRAVELING que monsieur [C] estimait propres à démontrer que la situation de la société était irrémédiablement compromise au moment des concours bancaires, la cour disposant d'éléments suffisants d'appréciation, ni de recourir à expertise quant au taux effectif global, l'action étant prescrite, ces demandes avant dire droit de monsieur [C] sont rejetées, et le jugement déféré confirmé de ces chefs.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Monsieur [C], qui échoue en son appel, supportera la charge des dépens et ne peut prétendre à aucune somme sur le fondement de l'article
700 du code de procédure civile. En revanche pour des raisons tenant à l'équité il y a lieu de faire droit à la demande de l'intimé formulée sur ce même fondement, mais uniquement dans la limite de la somme de 3 500 euros.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant dans les limites de l'appel,
INFIRME le jugement déféré en ce qu'il a dit prescrite l'action en déchéance de monsieur [K] [C] fondé sur une erreur affectant le taux effectif global,
et statuant à nouveau du chef infirmé,
le déboute de cette demande ;
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions concernant tant monsieur [D] [E] que monsieur [K] [C],
sauf en ce que le tribunal a accordé à ce dernier un report du paiement de sa dette de caution,
et statuant à nouveau du chef infirmé,
déboute monsieur [K] [C] de ses demandes fondées sur l'article 1345-5 du code civil ;
Y ajoutant :
CONDAMNE monsieur [K] [C] à payer à la société CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article
700 du code de procédure civile à raison des frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;
DÉBOUTE monsieur [K] [C] de sa propre demande formulée sur ce même fondement ;
CONDAMNE Monsieur [K] [C] aux entiers dépens d'appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,