TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de DIJON JUGEMENT RENDU LE 11 JANVIER 2010
AFFAIRE N° : 09/01107
ENTRE : S.A.R.L. YSEAL DEVELOPPEMENT immatriculée au RCS D'AUXERRE sous le numéro 487 979 742 dont le siège social est sis [...] 89240 LINDRY prise en la personne de son gérant en exercice, domicilié de droit audit siège représentée par la SCP DOUMERG/GAUTHIER/KOVAC/ROUVROY avocats au barreau de DIJON plaidant
Intervenante volontaire : SARL HARCLES immatriculée au RCS D'AUXERRE sous le numéro 414 435 008 dont le siège social est sis [...] 89000 AUXERRE, prise en la personne de son gérant en exercice, domicilié de droit audit siège représentée par la SCP DOUMERG/GAUTHIER/KOVAC/ROUVROY, avocats au barreau de DIJON plaidant DEMANDERESSES
ET:
S.A.R.L. DP immatriculée au RCS de DIJON sous le numéro 441 687 530 dont le siège social est sis [...] 21000 DIJON prise en la personne de son gérant en exercice, domicilié de droit audit siège représentée par Me Sophie BOUCHARD-STECH, avocat au barreau de DIJON plaidant
S.A.R.L. ARC immatriculée au RCS de DIJON sous le numéro 492 675 236, dont le siège social est sis [...] 21000 DIJON, prise en la personne de son gérant en exercice, domicilié de droit audit siège représentée par Me Sophie BOUCHARD-STECH, avocat au barreau de DIJON plaidant
S.A.R.L. SMO immatriculée au RCS de DIJON sous le numéro 407 653 468, dont le siège social est sis [...] 21000 DIJON, prise en la personne de son gérant en exercice, domicilié de droit audit siège représentée par Me Sophie BOUCHARD-STECH, avocat au barreau de DIJON plaidant
S.A.R.L. JJR immatriculée au RCS de DIJON sous le numéro 441 522 620, dont le siège social est sis [...] 21000 DIJON, prise en la personne de son gérant en exercice, domicilié de droit audit siège représentée par Me Sophie BOUCHARD-STECH, avocat au barreau de DIJON plaidantS.A.R.L. 7 ADP immatriculée au RCS de DIJON sous le numéro 504 236 076, dont le siège social est sis [...] 21000 DIJON, prise en le personne de son gérant en exercice, domicilié de droit audit siège représentée par Me Sophie BOUCHARD-STECH, avocat au barreau de DIJON plaidant
DEFENDERESSES
COMPOSITION DU TRIBUNAL : Lors des débats : Dominique RICARD 1er Vice-Président, Siégeant à Juge Rapporteur avec l'accord des parties ;
GREFFIER : Nicole HOMÉCOURT ; Lors du délibéré : Dominique RICARD 1er Vice-Président, qui a rendu compte, conformément à l'article
786 du Code de Procédure Civile aux autres magistrats composant la Chambre : - Madame Michèle B, Vice-Présidente, - Madame Catherine MASSAUT, Juge,
JUGEMENT : Prononcé publiquement par mise à disposition du jugement au greffe du Tribunal, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article
450 du code de procédure civile ; Contradictoire, et en premier ressort. Rédigé par : Dominique RICARD S par Dominique RICARD, Président et Mme HOMÉCOURT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire;
RAPPELS DES FAITS :
La SARL YSEAL Développement expose avoir pour objet social la création, le développement, la commercialisation et l'exploitation, directement ou par contrat, de franchise de tout concept, marque, logo et savoir-faire dans le domaine de la coiffure et notamment, de la marque YSEAL Coiffure.
Elle indique avoir été créée le 17 novembre 2005 et être titulaire de la marque YSEAL Coiffure laquelle a été déposée le 21 mars 2003 sous le numéro 033216543 à l'Institut National de la propriété intellectuelle.
La SARL YSEAL Développement ajoute que ladite marque lui appartient à la suite d'un contrat de cession de marque en date du 7 septembre 2006 enregistré à l'INPI et publié au registre national de marque sous le numéro 433847.
La SARL YSEAL Développement précise que les sociétés DP, ARC, SMO, SSR et 7 ADP, dont le gérant est Monsieur L, exercent l'activité de coiffure dans différents salons en utilisant illicitement la marque YSEAL et les signes distinctifs du réseau de franchise tel que, notamment, le logo.
Autorisée par ordonnance du Président du Tribunal de grande instance de Dijon en date du 20 février 2009, la SARL YSEAL Développement a fait assigner à jour fixe par actes d'huissier en date des 2 et 3 mars 2009 la SARL DP, la SARL ARC, la SARL SMO, la SARL SSR ainsi que la SARL 7 ADP afin de voir, sur le fondement des articles
L 713-2,
L 713-3,
L 713-4 du Code de la propriété intellectuelle et de l'article
1382 du Code civil :
- dire et juger que les sociétés DP, ARC, SMO, SSR et 7 ADP ont porté atteinte au droit de la marque YSEAL Coiffure,
- dire et juger que cette atteinte constitue une contrefaçon entraînant la responsabilité des sociétés susvisées,
- condamner in solidum les défenderesses à lui verser la somme de 60.000 euros à titre de dommages et intérêts,
- interdire aux sociétés DP, ARC, SMO, SSR et 7 ADP d'utiliser la marque YSEAL ainsi que tous signesdistinctifs dont la propriété lui appartient et ce sous peine d'une astreinte de 5.000 euros par infraction constatée par voie d'huissier,
- condamner lesdites sociétés à cesser toute exploitation de la marque YSEAL et de ses signes distinctifs, et ce sous astreinte de 1.000 euros par jour à compter de la présente décision.
La SARL YSEAL Développement sollicite enfin la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article
700 du Code de procédure civile ainsi que l'exécution provisoire de la présente décision.
La SARL YSEAL Développement fait valoir :
- que l'enregistrement de la marque YSEAL Coiffure a été fait pour les classes de produits ou services numéros 3, 16, 21 et 44, à savoir salons de coiffure et de beauté, cosmétiques, parfums, shampoings et produits capillaires, produits de l'imprimerie, photographie, catalogue de coiffure, peignes et brosserie,
- que les défenderesses ont accompli des actes interdits et illicites à propos de produits ou services identiques à ceux pour lesquels la marque YSEAL Coiffure est enregistrée,
- que les défenderesses utilisent la marque et tous signes distinctifs ou de reconnaissance de la marque YSEAL Coiffure tels que logo et enseigne et que cette imitation factice crée nécessairement un risque de confusion dans l'esprit du public,
- qu'elle n'a pu implanter de franchises dans la ville de Dijon compte tenu de l'utilisation compte tenu de l'utilisation illicite de la marque YSEAL Coiffure par les sociétés DP, ARC, SMO, SSR, et 7 ADP.
Dans des écritures ultérieures, la SARL YSEAL Développement fait en outre ressortir :
- que la marque YSEAL Coiffure lui appartient à la suite d'un contrat de cession de marque en date du 7 septembre 2006 passé avec la SARL HARCLES,
- qu'un second dépôt de la marque YSEAL Coiffure a été effectué le 13 mai 2005 dans la classe 44 pour les services désignés suivants : salons de coiffure,
- que la marque dont elle se prévaut porte bien sur des salons de coiffure.
La SARL HARCLES est intervenue volontairement en la cause par écritures en date du 25 novembre 2009.
La SARL YSEAL Développement conclut à se voir adjuger le bénéfice de son exploit introductif d'instance et la SARL HARCLES demande, à titre subsidiaire, au Tribunal de ce siège de voir :
- dire et juger que la SARL HARCLES a, en tout état de cause, acquis un droit d'usage sur la marque YSEAL Coiffure et que ce droit d'usage est opposable aux sociétés DP, ARC, SMO, SSR et 7 ADP,
- dire et juger que lesdites sociétés ont porté atteinte au titulaire de la marque YSEAL Coiffure et que cette atteinte constitue une contrefaçon, - condamner in solidum la SARL DP, la SARL ARC, la SARL SMO, la SARL SSR et la SARL 7 ADP à lui payer la somme de 60.000 euros à titre de dommages et intérêts,
- interdire aux défenderesses d'utiliser la marque YSEAL Coiffure ainsi que tous signes distinctifs dont la propriété appartient à la SARL HARCLES, ce sous peine d'une astreinte de 5.000 euros par infraction constatée par voie d'huissier,
- condamner ces dernières à cesser toute exploitation de la marque YSEAL et de ses signes distinctifs et ce sous astreinte de 1.000 euros par jour à compter de la présente décision.
La SARL HARCLES sollicite la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article
700 du Code de procédure civile ainsi que l'exécution provisoire de la présente décision.La SARL SMO, la SARL ARC, la SARL DP, la SARL SSR et la SARL 7 ADP objectent :
- qu'aucune urgence ne justifie une assignation à jour fixe,
- que l'ordonnance autorisant la SARL YSEAL Développement à assigner à jour fixe a été obtenue en occultant l'existence d'une relation d'affaire de longue date entre les sociétés en cause et leurs dirigeants,
- que la SARL YSEAL Développement a versé aux débats un contrat de cession qui ne concerne pas la marque YSEAL Coiffure n°033216543 déposée en 2003,
- que la SARL YSEAL Développement devra être déclarée irrecevable en son action par défaut de qualité à agir au motif qu'elle ne saurait se prévaloir de la marque YSEAL Coiffure,
- que la SARL HARCLES ne peut davantage tirer des droits de la marque YSEAL Coiffure déposée en 2003 sous le n°033216543 dans la mesure où ladite m aque a été rejetée pour tous les produits et services touchant à la coiffure,
- que la SARL HARCLES, intervenante volontaire au procès, doit être déclarée également irrecevable en son action.
La SARL SMO, la SARL DP, la SARL ARC, la SARL SSR et la SARL 7 ADP rétorquent au fond :
- que la SARL SMO a été créée en juin 1996 par Monsieur Olivier L, coiffeur, et son épouse à l'époque où leur activité a commencé à prendre de l'expansion avec l'ouverture de plusieurs salons de coiffure à Dijon, Autun, Langres, Chalon -sur-Saône,
- que la SARL DP et la SARL SSR sont des sociétés de location gérance émanations de la SARL SMO et que les SARL ARC et 7 ADP ont été créées ensuite pour les besoins de nouvelles ouvertures de salons sur l'agglomération dijonnaise,
- que la SARL YSEAL Développement a été créée en 2006 par Monsieur Laurent P pour exercer la même activité de coiffure et que ce dernier a été salarié de Monsieur Olivier L qu'il quittera pour travailler dans un salon de coiffure franchisé "Diagonal",
- que Monsieur P a constitué la SARL HARCLES en 1998 pour ouvrir son propre salon de coiffure sous j'enseigne Diagonal et que Monsieur L a rejoint l'enseigne Diagonal au mois de septembre 2002,
- que Monsieur L et Monsieur P ont décidé de concert au printemps de l'année 2003 de s'émanciper de leur franchiseur pour créer leur propre enseigne de salons de coiffure autour d'un concept marketing qui leur serait propre, en l'occurrence le concept YSEAL Coiffure,
- que Monsieur L et Monsieur P ont créé et adopté l'enseigne YSEAL Coiffure pour leurs propres salons,
- que la SARL HARCLES a tenté de déposer cette enseigne comme marque mais que ce dépôt sera refusé à la suite d'une opposition formulée par les laboratoires Pierre FABRE,
- qu'il a été convenu que Monsieur P développe l'enseigne YSEAL dans la région de Bourgogne-Nord et que Monsieur L la développe en Bourgogne-Sud,
- que la coopération commerciale entre Monsieur L et Monsieur P s'est traduite par le partage des remises quantitatives de fin d'année sur les produits de marque L'ORÉAL,
- que la coopération commerciale entre Monsieur L, gérant des SARL SMO, DP, ARC, SSR et 7 ADP et Monsieur P, gérant de la SARL HARCLES est établie, ce au vu des pièces produites aux débats,
- que la SARL SMO va adopter l'enseigne YSEAL Coiffure au mois de février 2004, tout comme les salons de coiffure gérés par les sociétés DP, SSR et DR,
- que les salons de coiffure de Monsieur L ont adopté l'enseigne YSEAL Coiffure avec le consentement de Monsieur P et de la SARL HARCLES,- qu'elles ont acquis un droit d'usage sur l'enseigne YSEAL Coiffure dès le mois de janvier 2004, soit avant le 13 mai 2005, date à laquelle le dépôt de la marque YSEAL Coiffure a été effectué.
Les sociétés SMO, DP, ARC, SSR et 7 ADP demandent dès lors au Tribunal de :
- dire et juger qu'elles ont acquis un droit d'usage sur l'enseigne YSEAL Coiffure et que ce droit d'usage est opposable à la SARL YSEAL Développement,
- dire et juger que l'aire de chalandise desdites sociétés s'étend à l'agglomération dijonnaise et à l'agglomération d'Autun,
- dire que ce droit d'usage sur l'enseigne YSEAL Coiffure est également acquis pour les fonds de commerce de coiffure sis [...] (Haute-Marne) et [...] à Chalon-sur- Saône (Saône-et-Loire),
- dire et juger que la SARL YSEAL Développement ne peut se prévaloir d'aucun droit sur la marque YSEAL Coiffure dans les agglomérations de Dijon, Autun, Chalon-sur-Saône, Langres aussi longtemps qu'il restera un fonds de commerce utilisant l'enseigne YSEAL Coiffure dans lesdites agglomérations,
- dire que la SARL HARCLES n'a pu acquérir de droit d'usage sur la marque YSEAL Coiffure car le droit de marque s'acquiert uniquement par le dépôt de la marque,
- débouter dans ces conditions la SARL YSEAL Développement de son action en contrefaçon.
A titre reconventionnel, la SARL SMO, la SARL DP, la SARL ARC, la SARL SSR et la SARL 7 ADP demandent au Tribunal de :
- dire et juger que la marque YSEAL Coiffure déposée le 13 mai 2005 sous le numéro 053358800 a été déposée en fraude des droits de la SARL SMO et que la copropriété de la marque YSEAL Coiffure doit être attribuée à cette dernière,
- condamner in solidum la SARL YSEAL Développement et la SARL HARCLES à leur payer à chacune la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.
Les défenderesses font ainsi observer :
- que Monsieur L a été, dans le cadre de la SARL SMO, l'un des artisans de la marque YSEAL Coiffure,
- que Monsieur P s'est bien gardé d'informer Monsieur L de ce qu'il avait finalement redéposé la marque YSEAL Coiffure le 13 mai 2005 en la limitant strictement aux services de coiffure, ce, au nom de la SARL HARCLES,
- que la SARL SMO a participé à la création de l'enseigne et du concept YSEAL Coiffure et exploite ladite enseigne depuis l'année 2004, en sorte qu'elle est en droit de revendiquer la copropriété de la marque YSEAL Coiffure déposée en fraude de ses propres droits.
Les sociétés défenderesses demandent, à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où il ne sera pas fait droit à la revendication de la copropriété de la marque YSEAL Coiffure formulée par la SARL SMO, au Tribunal de dire et juger que la marque YSEAL Coiffure est nulle car déposée en fraude des droits de la SARL SMO, en application de l'article
L 714-3 du Code de la propriété intellectuelle.
La SARL SMO réclame à la SARL YSEAL Développement et à la SARL HARCLES la somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article
700 du Code de procédure civile.
La SARL YSEAL Développement et la SARL HARCLES répliquent :
- que l'enseigne YSEAL Coiffure a été créée par la SARL YSEAL Développement et que la procédure d'assignation à jour fixe est parfaitement valable et légitime,
- que la SARL YSEAL Développement est bien propriétaire de la marque YSEAL Coiffure laquelle porte sur des salons de coiffure,- que Monsieur L n'a pas quitté le réseau de franchise Diagonal Coiffure en même temps que Monsieur P afin de créer la marque YSEAL Coiffure,
- que ce dernier a créé seul, dans le courant de l'année 2003, la marque YSEAL Coiffure,
- que la preuve est rapportée de l'existence matérielle d'actes de contrefaçon commis par les défenderesses ainsi que de l'usage illicite de la marque YSEAL Coiffure,
- que la SARL YSEAL Développement bénéficie d'un droit d'usage antérieur à celui revendiqué par la SARL SMO dans la mesure où elle a utilisé la dénomination sociale YSEAL Coiffure dès l'année 2003,
- qu'un contrat de coopération commerciale entre la société L'OREAL et la société YSEAL Développement a été conclu le 6 octobre 2003,
- que cette dernière a déposé la marque YSEAL Coiffure le 21 novembre 2003, qu'elle a procédé à un second dépôt le 13 mai 2005 et qu'elle a enfin conclu un contrat de cession de marque avec la SARL HARCLES,
- qu'en tout état de cause, les droits allégués par la SARL SMO au titre de l'usage de la marque YSEAL Coiffure ne peuvent concerner que cette dernière et ne peuvent créer un quelconque droit au profit des autres défenderesses qui sont des entités juridiques indépendantes,
- que la SARL HARCLES a, au demeurant, bénéficié d'un droit d'usage antérieur au droit d'usage revendiqué par la SARL SMO,
- que l'usage d'une marque sans autorisation de son propriétaire n'est pas créateur de droit,
- que la SARL SMO a tenté d'usurper la marque YSEAL Coiffure en la copiant purement et simplement et en créant la confusion dans l'esprit du public,
- que la marque YSEAL Coiffure a été loyalement et légalement déposée, sans aucune violation légale ou conventionnelle ni en fraude des droits d'un tiers.
La SARL YSEAL Développement et la SARL HARCLES concluent au rejet de la demande reconventionnelle formulée par la SARL DP, la SARL ARC, la SARL SMO, la SARL SSR et par la SARL 7 ADP et leur réclament la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article
700 du Code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION :
II y a lieu de constater que la SARL HARCLES est intervenue volontairement en la cause.
Il apparaît que le Président du Tribunal de ce siège a autorisé, par ordonnance en date du 20 février 2009, la SARL YSEAL Développement à faire assigner à jour fixe la SARL DP, la SARL ARC, la SARL SMO, la SARL SSR et la SARL 7 ADP.
Il est constant que l'autorisation d'assigner à jour fixe a été accordée à la SARL YSEAL Développement au vu des pièces produites par cette dernière et notamment du dépôt de la marque YSEAL Coiffure, le 21 mars 2003, à l'Institut National de la propriété intellectuelle sous le numéro 033216543, et du contrat de cession de ladite marque conclu le 7 septembre 2006 entre la demanderesse et la SARL HARCLES.
Il suit de ce qui précède que les défenderesses ne sauraient remettre en cause la procédure à jour fixe, prévue par l'article
788 du Code de procédure civile, initiée par la SARL YSEAL Développement.
L'article
L 716-5 du Code de la propriété intellectuelle dispose que l'action en contrefaçon est engagée par le propriétaire de la marque.
Force est de relever que la SARL HARCLES a déposé à l'INPI la marque YSEAL Coiffure sous le numéro 033216543.Il s'avère, cependant, que le Directeur général de l'Institut National de la Propriété Industrielle a indiqué dans un projet de décision du 4 novembre 2003 statuant sur l'opposition formulée par la SA Pierre FABRE, dermo-cosmétique ; que ladite opposition était reconnue justifiée en ce qu'elle porte sur les produits et services suivants : cosmétique, parfums, shampoings et produits capillaires, catalogue de coiffure, peignes et brosserie, salons de coiffure et de beauté.
Il est constant que la SARL HARCLES a effectué le 13 mai 2005, à l'INPI, un second dépôt de la marque YSEAL Coiffure sous le numéro 053358800 pour le service désigné, à savoir : salons de coiffure, et que cet enregistrement a été publié au bulletin officiel de la propriété industrielle n° 05/42 volume II d u 21 octobre 2005.
II est acquis que la SARL HARCLES a, par acte sous seing privé en date du 7 septembre 2006, enregistré à l'INPI et publié au registre national des marques, sous le numéro 439847, cédé la marque YSEAL Coiffure à la SARL YSEAL Développement.
Il en résulte que la SARL YSEAL Coiffure est bien propriétaire de la marque YSEAL Coiffure et qu'elle doit, dès lors, être déclarée recevable en son action.
La SARL HARCLES doit également, au vu des développements susvisés, être déclarée recevable en son action.
Il ressort des éléments de la cause que Monsieur Laurent P, gérant de la SARL YSEAL Développement, a été salarié de Monsieur Olivier L durant dix mois dans le salon de coiffure de ce dernier sis à Sens, ce durant l'année 1991.
Il apparaît que Monsieur P a constitué, le 29 septembre 1998, la SARL HARCLES pour ouvrir son propre salon de coiffure à Sens, sous l'enseigne Diagonal, l'EURL Corine FABRI, société du groupe Diagonal, ayant prêté la somme de 110.000 euros à Monsieur P afin d'aider ce dernier à implanter le salon de coiffure susvisé.
Il n'est pas sans intérêt de relever qu'une résiliation amiable du contrat de franchise liant la SARL Diagonal gestion à la SARL HARCLES, pour la période comprise entre le 15 avril 2002 et le 31 mars 2005, est intervenue le 1er avril 2003.
Il est acquis que Monsieur L, gérant de la SARL SMO, et Monsieur P, ex-gérant de la SARL HARCLES et gérant de la SARL YSEAL Développement, ont tous deux exploité leurs salons de coiffure dans le cadre d'un contrat de franchise de l'enseigne Diagonal, Monsieur LAMQUIN ayant également résilié à l'amiable, le 31 janvier 2004, le contrat de franchise le liant avec la SARL Diagonal gestion.
Il résulte de l'attestation établie le 12 octobre 2009 par Monsieur Hervé F, gérant de la SARL Diagonal, que Monsieur P et Monsieur L ont résilié le contrat de franchise les liant avec la SARL Diagonal pour créer leur propre enseigne qui s'est avérée être YSEAL Coiffure.
Les défenderesses ont versé aux débats une attestation en date du 2 juin 2009 émanant de Monsieur Alain B, de laquelle il ressort que Monsieur L lui a présenté Monsieur P, dans le courant de l'année 2002, comme étant son associé dans le projet du concept marketing YSEAL Coiffure.
Monsieur B a ainsi rapporté, dans son témoignage, avoir invité en Italie ces derniers au salon COSMOS- PROF 2004 -Salon international de la cosmétique et de la coiffure - et les avoir mis en relation avec des fournisseurs de linges jetables et de mobilier.
II s'avère que la transition entre l'enseigne Diagonal et l'enseigne YSEAL Coiffure a été annoncée dans la presse gratuite dans le courant de l'année 2004 et que Monsieur P a adressé par fax du 20 janvier 2004 l'insertion publicitaire qu'il a fait publier dans le journal d'annonces Paru-Vendu n°128 à savoir : D iagonal devient YSEAL Coiffure - Nouveau nom - Mêmes équipes - Mêmes tarifs - Auxerre -Sens - Tonnerre - prochainement Joigny.
Il n'est pas indifférent d'observer que Monsieur L a également fait passer une insertion publicitaire dans le journal d'annonces Paru-Vendu en date du 2 février 2004 mentionnant le changement d'enseigne de ses trois salons de coiffure sis à Dijon, à savoir Diagonal Coiffure Dijon devenu YSEAL Coiffure.Il n'est pas sans intérêt de remarquer que Monsieur Santino N, Directeur régional Sud-Est pour la société L'OREAL a précisé dans son attestation que Monsieur L lui avait été décrit comme étant l'associé de Monsieur P et le copropriétaire de l'enseigne YSEAL Coiffure.
Force est ainsi de relever que la SARL HARCLES, dont le gérant est Monsieur P, a rétrocédé à la SARL SMO, dont le gérant est Monsieur L, au titre de l'année 2004, sous l'intitulé coopération commerciale, la somme de 5.068,19 euros représentant le partage des remises quantitatives de fin d'année obtenues auprès des fournisseurs sur les produits achetés, ladite rétrocession étant reversée pour partie soit 1.152,11 euros à la SARL DP et qu'elle a, en outre, rétrocédé à la SARL SMO les sommes de 5.780,84 euros et de 3.888,96 euros au titre des années 2005 et 2006.
Il importe de souligner que Monsieur P et Monsieur L ont, tel que cela résulte de courriers en date des 30 septembre 2003 et 30 janvier 2004, négocié ensemble des remises sur produits auprès de la société COOPERE laquelle leur a fait bénéficier de tarifs préférentiels.
Il ressort des pièces produites en la cause que Monsieur L, gérant de la SARL SMO, a fait réaliser, le 4 juin 2004, des cartes de fidélité PASS YSEAL.
Monsieur Pierre D, gérant de la SARL Imprimerie Mercure sise à Chenôve, a spécifié dans son attestation en date du 20 avril 2009, que Monsieur L lui avait demandé, dans le courant de l'année 2002 de réaliser des cartes de fidélité PASS YSEAL et que Monsieur P s'était présenté à lui comme étant l'associé de Monsieur L.
Monsieur Joël T, artisan Taxi, précise dans son témoignage en date du 25 mars 2009 que son beau-frère Monsieur L lui a demandé à plusieurs reprises de déposer divers cartons auprès du salon de coiffure YSEAL sis à Joigny appartenant à Monsieur P.
Il y a en outre lieu de noter que la SARL SMO a rétrocédé à la SARL HARCLES quatre boîtes de 400 cartes PASS YSEAL d'un montant de 492,78 euros et qu'elle a établi deux factures les 23 juin 2003 et 23 mai 2005 au nom de la SARL HARCLES pour la fourniture de sucettes aux clients des salons de coiffure, ainsi qu'une facture en date du 20 mai 2004 de 1.573,94 euros pour la fourniture de poudre décolorante à la société susvisée.
Il est acquis que la SARL HARCLES a rétrocédé à la SARL ARC dont le gérant est Monsieur L un meuble AGV-Groupe tel que cela ressort de la facture en date du 30 novembre 2006.
L'article
L 713-6 du Code de la propriété intellectuelle énonce que l'enregistrement d'une marque ne fait pas obstacle à l'utilisation du même signe comme enseigne lorsque l'utilisation est antérieure à l'enregistrement.
L'article
L 712-6 du même code prévoit que si un enregistrement a été demandé soit en fraude des droits d'un tiers, soit en violation d'une obligation légale, la personne qui estime avoir un droit sur la marque peut revendiquer sa propriété en justice et qu'à moins que le disposant ne soit de mauvaise foi, l'action en revendication se prescrit par trois ans à compter de la publication de la demande d'enregistrement.
Il apparaît que la SARL SMO a adopté l'enseigne YSEAL Coiffure dès le mois de février 2004 comme en atteste l'extrait K bis du 2 mars 2004 et que la SARL DP, la SARL SSR, la SARL Dl gérées par la SARL SMO ont également adopté cette enseigne.
Il importe ainsi de souligner que la pose de l'enseigne YSEAL Coiffure a été réalisée, dans le courant du mois de janvier 2004, sur le salon de coiffure exploité par la SARL SMO sis [...], sur le salon de coiffure sis [...] (SARL SSR), sur le salon de coiffure sis [...] (SARL DP), sur le salon de coiffure sis [...] (SARL Dl), sur le salon de coiffure sis 15, rue aux Cordiers à Autun (SARL SMO), ainsi que sur le salon sis [...] à Chalon-sur-Saône (SARL SMO).
Il suit de ce qui précède que Monsieur L, gérant des sociétés défenderesses et que Monsieur P, gérant de la SARL HARCLES, ont entretenu une véritable coopération commerciale et que les salons de coiffure de Monsieur L ont adopté l'enseigne YSEAL Coiffure avec le plein accord et le parfait consentement de la SARL HARCLES.
Il faut rappeler que la marque YSEAL Coiffure déposée le 21 mars 2003 par la SARL HARCLES sous lenuméro 033216543 à l'INPI a été rejetée pour les produits et les services de coiffure, en sorte que l'enregistrement de ladite marque ne doit être pris en considération qu'à la suite du dépôt à l'INPI effectué le 13 mai 2005 par la SARL HARCLES.
Il suit de ce qui précède que la SARL SMO a participé, dès l'année 2003, à la création de l'enseigne et du concept YSEAL Coiffure et qu'elle exploite ladite enseigne depuis le mois de janvier 2004, soit avant le dépôt effectué le 13 mai 2005 par la SARL HARCLES de la marque YSEAL Coiffure à l'INPI.
La SARL YSEAL Développement ne saurait soutenir qu'elle a utilisé la dénomination sociale YSEAL Coiffure dès l'année 2003 dans la mesure où elle n'a été créée que le 17 novembre 2005.
S'il est vrai que la SARL HARCLES a utilisé la dénomination sociale YSEAL Coiffure, elle ne rapporte cependant pas la preuve d'un usage constant et régulier de la marque et de la dénomination sociale YSEAL Coiffure antérieur à l'usage, par la SARL SMO et des autres sociétés défenderesses, de d'enseigne YSEAL Coiffure.
Il n'est au demeurant pas inutile de rappeler que le droit sur la marque ne peut être invoqué qu'après le dépôt et l'enregistrement de ladite marque et qu'il ne s'acquiert pas par l'usage.
Il apparaît, au vu des développement susvisés, que le droit d'usage acquis tant par la SARL SMO que par la SARL DP, la SARL ARC, la SARL SSR et la SARL 7 ADP sur l'enseigne YSEAL Coiffure et antérieur au 13 mai 2005, date à laquelle la SARL HARCLES a déposé à l'INPI la marque YSEAL Coiffure et qu'il s'étend sur toute l'aire de chalandise des sociétés susvisées, à savoir sur l'agglomération dijonnaise et sur l'agglomération d'AUTUN (Saône et Loire).
Il s'ensuit que les sociétés SMO, DP, ARC, SSR et 7 ADP sont titulaires d'un droit et usage sur l'enseigne YSEAL Coiffure ; que ce droit est opposable à la SARL YSEAL Développement et qu'elles sont en droit d'interdire l'usage de la marque YSEAL Coiffure sur leur aire de chalandise, en l'occurrence l'agglomération dijonnaise et l'agglomération d'Autun.
Il s'avère, en outre, que les salons de coiffure que Monsieur L a vendu avec l'enseigne sis [...] et [...] à Chalon-sur-Saône bénéficient du droit d'usage opposable à la marque YSEAL Coiffure.
Il y a lieu de dire et juger que la SARL YSEAL Développement ne peut se prévaloir d'aucun droit sur la marque YSEAL Coiffure dans les agglomérations de Dijon, Autun, Chalon-sur-Saône, Langres aussi longtemps qu'il restera un fonds de commerce utilisant l'enseigne YSEAL Coiffure dans lesdites agglomérations.
Il échet, au vu des développements susvisés, de débouter la SARL YSEAL Développement et la SARL HARCLES de leur demande tendant à voir dire et juger que la SARL DP, la SARL ARC, la SARL SMO, la SARL SSR et la SARL 7 ADP ont commis une contrefaçon de la marque YSEAL Coiffure et de l'intégralité de leurs demandes subséquentes.
Il apparaît, au regard des pièces versées aux débats, que la SARL SMO a assuré, depuis l'année 2003, la promotion de l'enseigne YSEAL Coiffure, qu'elle exploite ladite enseigne depuis le mois de janvier 2004 en accord avec la SARL HARCLES, et que Monsieur P, gérant de ladite société, n'a pas informé Monsieur L, gérant de la SARL SMO, de ce qu'il avait déposé à nouveau la marque YSEAL Coiffure le 13 mai 2005 en la limitant aux services de coiffure, ce au nom de la SARL HARCLES.
Il est manifeste que la SARL HARCLES a déposé la marque YSEAL Coiffure en sachant pertinemment que les salons de coiffure dirigés par Monsieur L portaient l'enseigne YSEAL Coiffure.
Le tribunal est en mesure de considérer que la marque YSEAL Coiffure a été déposée le 13 mai 2005 en fraude de ses droits, au sens de l'article
L 712-6 du Code de la propriété intellectuelle.
Il y a dès lors lieu d'attribuer la copropriété de la marque YSEAL Coiffure à la SARL SMO.
La SARL YSEAL Développement et la SARL HARCLES n'ayant fait que d'user de leur droit d'agir en justice, il y a lieu de rejeter la demande de dommages et intérêts formulée à leur encontre par la SARL SMO, la SARL DP, la SARL ARC, la SARL SSR et la SARL 7 ADP pour procédure abusive.
Il semble inéquitable de laisser à la charge de la SARL SMO les frais exposé à l'occasion de cetteinstance et non compris dans les dépens.
Il convient de leur allouer la somme de 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article
700 du Code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
:
Le Tribunal, statuant publiquement, en premier ressort par jugement contradictoire,
- constate que la SARL HARCLES est intervenue volontairement en la cause ;
- dit et juge que la procédure à jour fixe diligentée par la SARL YSEAL Développement est fondée ;
- déclare la SARL YSEAL Développement et la SARL HARCLES recevable en leur action ;
- dit et juge que la SARL SMO, la SARL DP, la SARL ARC, la SARL SSR et la SARL 7 ADP ont acquis un droit d'usage sur l'enseigne YSEAL Coiffure et que ce droit d'usage est opposable à la SARL YSEAL Développement ;
- dit et juge que l'aire de chalandise de la SARL SMO, de la SARL DP, de la SARL ARC, de la SARL SSR et de la SARL 7 ADP s'étend à l'agglomération dijonnaise et à l'agglomération d'Autun ;
- dit que ce droit d'usage sur l'enseigne est également acquis pour les fonds de commerce de coiffure situés [...] et [...] à Chalon-sur-Saône ;
- dit et juge que la SARL YSEAL Développement ne peut se prévaloir d'aucun droit sur la marque YSEAL Coiffure dans les agglomérations de Dijon, Autun, Chalon-sur-Saône et Langres aussi longtemps qu'il restera un fonds de commerce utilisant l'enseigne dans les agglomérations susvisées ;
- déboute la SARL YSEAL Coiffure et la SARL HARCLES de leur demande tendant à voir dire et juger que la SARL DP, la SARL ARC, la SARL SMO, la SARL SSR et la SARL 7 ADP ont commis une contrefaçon de la marque YSEAL Coiffure et de l'intégralité de leurs demandes ;
- dit et juge que la marque YSEAL Coiffure déposée le 13 mai 2005 à l'INPI sous le numéro 053358800 a été déposée en fraude des droits de la SARL SMO ;
- attribue la copropriété de la marque YSEAL Coiffure à la SARL SMO;
- déboute la SARL YSEAL Développement et la SARL HARCLES de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
- condamne, in solidum, la SARL YSEAL Développement et la SARL HARCLES à payer à la SARL SMO la somme de 1.500 euros en application de l'article
700 du Code de procédure civile ;
- condamne la SARL YSEAL Développement et la SARL HARCLES aux dépens avec faculté de versement direct au profit de Maître BOUCHARD-STECH, avocat, dans les conditions de l'article
699 du Code de procédure civile.