Cour de cassation, Deuxième chambre civile, 31 mars 2016, 14-27.987

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2016-03-31
Cour nationale de l'incapacité et de la tarification (CNITAAT)
2014-09-30

Texte intégral

CIV. 2 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 31 mars 2016 Rejet Mme FLISE, président Arrêt n° 504 F-D Pourvoi n° K 14-27.987 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

Statuant sur le pourvoi formé par

la société Nestlé Waters Supply Sud, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], ayant un établissement secondaire lieu-dit [Adresse 3], contre l'arrêt rendu le 30 septembre 2014 par la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail (section accident du travail - maladie professionnelle), dans le litige l'opposant à la caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 1], dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation ; La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 3 mars 2016, où étaient présents : Mme Flise, président, Mme Le Fischer, conseiller référendaire rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, Mme Szirek, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme Le Fischer, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat de la société Nestlé Waters Supply Sud, de la SCP Foussard et Froger, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 1], et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen

unique : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail, 30 septembre 2014), que contestant le taux d'incapacité permanente partielle fixé, le 29 février 2008, par la caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 1] (la caisse) au bénéfice de M. [I], atteint d'une affection prise en charge au titre du tableau n° 42 des maladies professionnelles, la société Nestlé Waters Supply Sud (la société) a saisi d'un recours un tribunal du contentieux de l'incapacité ;

Attendu que la société fait grief à

l'arrêt de rejeter ce recours, alors, selon le moyen : 1°/ qu'il résulte des articles L. 141-10, R. 143-32 et R. 143-33 du code de la sécurité sociale que la caisse est tenue de transmettre au médecin consultant désigné par la juridiction technique l'entier rapport médical ayant contribué à la fixation du taux d'incapacité de travail permanente ; qu'aux termes de l'article R. 143-33 du code de la sécurité sociale, ce rapport doit comprendre l'ensemble des éléments d'appréciation sur lesquels le médecin conseil s'est fondé ; qu'au cas présent, il résultait des constatations de la CNITAAT que le bilan audiométrique sur lequel s'était appuyé le médecin-conseil de la caisse pour évaluer le taux d'incapacité permanente partielle de M. [I] n'avait pas été transmis à l'expert désigné par juridiction ; qu'en refusant toutefois de prononcer l'inopposabilité de la décision de prise en charge cependant que l'entier rapport médical ayant contribué à la fixation du taux d'incapacité de travail permanente n'avait pas été communiqué selon les modalités fixées par l'article L. 143-10 du même code, la CNITAAT n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et violé les articles L. 143-10, R. 143-32 et R. 143-33 du code de la sécurité sociale ; 2°/ qu'il résulte de l'article R. 143-8 du code de la sécurité sociale que, dès la première instance et avant l'ouverture des débats, la caisse est tenue de fournir l'ensemble des documents médicaux concernant l'affaire pour les contestations relatives à l'état d'incapacité sans pouvoir opposer l'indépendance du service du contrôle médical vis-à-vis de la caisse ou les réserves émises par celle-ci sur le respect du secret médical ; que si la caisse n'est pas tenue de fournir les éléments qui ne sont pas compris dans l'entier rapport médical selon la procédure de l'article L. 141-10 du code de la sécurité sociale, il lui appartient, en revanche, de produire les éléments du dossier médical ayant déterminé le taux d'incapacité qui ne sont pas compris dans ce rapport conformément aux modalités de l'article R. 143-8 du code de la sécurité sociale ; qu'à défaut, l'employeur n'est pas mis en mesure d'exercer de manière effective son droit au recours et la décision de la caisse, dont le bien-fondé n'est pas établi à son égard, lui est inopposable ; qu'au cas présent, en considérant que la caisse n'était pas tenue de communiquer les examens audiométriques, cependant que les pièces médicales non comprises dans le rapport médical doivent être communiquées à l'employeur dès la première instance et avant l'ouverture des débats, sans que l'indépendance du service du contrôle médical vis-à-vis de la caisse ou les réserves émises par celle-ci sur le respect du secret médical puissent être opposés à l'employeur, la CNITAAT a violé l'article R. 143-8 du code de la sécurité sociale et l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu

que la communication d'un document couvert par le secret médical peut être réalisée avec l'accord de l'assuré ou suivant les modalités définies aux articles L. 143-10, R. 143-32 et R. 143-33 du code de la sécurité sociale, lesquels permettent de trouver un juste équilibre entre la confidentialité des données médicales et les exigences d'un procès équitables garanties, respectivement, par les articles 8 et 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; Et attendu que, sous couvert d'un grief de violation des articles L. 143-10, R. 143-32 et R. 143-33 du code de la sécurité sociale, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation souveraine, par la Cour nationale, d'une part, de ce qu'il avait été satisfait par le médecin-conseil aux exigences des dispositions susmentionnées, d'autre part, de la valeur et de la portée des éléments de fait et de preuve débattus devant elle ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS

: REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Nestlé Waters Supply Sud aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Nestlé Waters Supply Sud et la condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 1] la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mars deux mille seize.

MOYEN ANNEXE

au présent arrêt Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat aux Conseils, pour la société Nestlé Waters Supply Sud Il est fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a fixé à 30 % à la date de consolidation intervenue le 12/09/2007, le taux d'incapacité permanente opposable à la société NESTLE WATERS SUPPLY résultant de la maladie professionnelle constatée le 12 septembre 2007 dont Monsieur [F] [I] est atteint. AUX MOTIFS QUE « l'article R. 143-33 du code de la sécurité sociale dispose : "l'entier rapport médical mentionné à l'article L. 143-10 comprend : 1° L'avis et les conclusions motivées données à la caisse d'assurance maladie sur le taux d'incapacité permanente partielle à retenir ; 2° Les constatations et les éléments d'appréciation sur lesquels l'avis s'est fondé." Que ces dispositions n'imposent pas la communication de pièces médicales ayant permis au médecin conseil de rendre un avis, mais la reprise au sein du rapport d'incapacité permanente partielle des constatations et éléments d'appréciation sur lesquels l'avis est fondé ; Par ailleurs que, la caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 1] verse aux débats le rapport d'évaluation des séquelles établi par le médecin conseil reprenant l'analyse d'un bilan audiométrique, ainsi que le certificat médical initial ; Que ces pièces ont permis au médecin consultant désigné par le tribunal du contentieux de l'incapacité et à celui désigné par la Cour d'émettre un avis sur le taux d'incapacité présenté par la victime ; Que l'employeur a bénéficié d'un recours effectif et que le principe de la contradiction a été respecté ; Qu'il y a ainsi lieu de rejeter la demande d'inopposabilité formée par l'employeur ; A titre liminaire, qu'aux termes de l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale, "le taux d'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle compte tenu du barème indicatif d'invalidité." Qu'à la date du 12 septembre 2007, M. [F] [I] présentait une surdité de perception bilatérale. Qu'ainsi, au vu des éléments soumis à son appréciation, contradictoirement débattus et avec le médecin consultant dont elle adopte les conclusions, la Cour constate que les séquelles décrites ci-dessus justifiaient la reconnaissance d'un taux d'incapacité de 30 % à l'égard de la société NESTLE WATERS SUPPLY SUD. Qu'en conséquence, la Cour confirmera le jugement déféré » ; ALORS QU'il résulte des articles L. 141-10, R. 143-32 et R. 143-33 du Code de la sécurité sociale que la caisse est tenue de transmettre au médecin consultant désigné par la juridiction technique l'entier rapport médical ayant contribué à la fixation du taux d'incapacité de travail permanente ; qu'aux termes de l'article R. 143-33 du Code de la sécurité sociale, ce rapport doit comprendre l'ensemble des éléments d'appréciation sur lesquels le médecin conseil s'est fondé ; qu'au cas présent, il résultait des constatations de la CNITAAT que le bilan audiométrique sur lequel s'était appuyé le médecin conseil de la caisse pour évaluer le taux d'incapacité permanente partielle de Monsieur [I] n'avait pas été transmis à l'expert désigné par juridiction (Arrêt p. 6) ; qu'en refusant toutefois de prononcer l'inopposabilité de la décision de prise en charge cependant que l'entier rapport médical ayant contribué à la fixation du taux d'incapacité de travail permanente n'avait pas été communiqué selon les modalités fixées par l'article L. 143-10 du même Code, la CNITAAT n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et violé les articles L. 143-10, R. 143-32 et R. 143-33 du Code de la sécurité sociale ensemble ; ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QU'il résulte de l'article R. 143-8 du Code de la sécurité sociale que, dès la première instance et avant l'ouverture des débats, la caisse est tenue de fournir l'ensemble des documents médicaux concernant l'affaire pour les contestations relatives à l'état d'incapacité sans pouvoir opposer l'indépendance du service du contrôle médical vis-à-vis de la caisse ou les réserves émises par celle-ci sur le respect du secret médical ; que si la caisse n'est pas tenue de fournir les éléments qui ne sont pas compris dans l'entier rapport médical selon la procédure de l'article L. 141-10 du Code de la sécurité sociale, il lui appartient, en revanche, de produire les éléments du dossier médical ayant déterminé le taux d'incapacité qui ne sont pas compris dans ce rapport conformément aux modalités de l'article R. 143-8 du Code de la sécurité sociale ; qu'à défaut, l'employeur n'est pas mis en mesure d'exercer de manière effective son droit au recours et la décision de la caisse, dont le bien-fondé n'est pas établi à son égard, lui est inopposable ; qu'au cas présent, en considérant que la caisse n'était pas tenue de communiquer les examens audiométriques, cependant que les pièces médicales non comprises dans le rapport médical doivent être communiquées à l'employeur dès la première instance et avant l'ouverture des débats, sans que l'indépendance du service du contrôle médical vis-à-vis de la caisse ou les réserves émises par celle-ci sur le respect du secret médical puissent être opposés à la société NESTLE WATERS SUPPLY SUD, la CNITAAT a violé l'article R. 143-8 du Code de la sécurité sociale et l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.