Tribunal de grande instance de Paris, 22 juin 2010, 2009/07884

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
  • Numéro de pourvoi :
    2009/07884
  • Domaine de propriété intellectuelle : DESSIN ET MODELE
  • Numéros d'enregistrement : 000561022-0010
  • Parties : JEAN CASSEGRAIN SAS ; LONGCHAMP SAS / 3SH HELLINE

Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Paris
2011-11-04
Tribunal de grande instance de Paris
2010-06-22

Texte intégral

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS JUGEMENT rendu le 22 Juin 2010 3ème chambre 1ère section N° RG : 09/07884 DEMANDERESSES S.A.S JEAN C [...]75001 PARIS S.A.S LONGCHAMP [...]75001 PARIS représentées par Me Yves COURSIN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire C2186 DEFENDERESSE Société 3SH "HELLINE" 4 Place de la République 59170 CROIX représentée par Me Raymond DEHORS - SCP Raymond DEHORS & Associés, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0375 COMPOSITION DU TRIBUNAL Marie-Christine C, Vice Présidente Marie S. Vice Présidente Cécile VITON, Juge assistées de Léoncia BELLON, Greffier DEBATS A l'audience du 31 Mai 2010 tenue publiquement devant Marie S et Cécile VITON, juges rapporteurs, qui, sans opposition des avocats, ont tenu seules l'audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en ont rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l'article 786 du Code de Procédure Civile. JUGEMENT Prononcé par mise à disposition au greffe Contradictoirement en premier ressort EXPOSE DU LITIGE La SAS JEAN C a pour activité la prise de participation dans toutes sociétés qu'elle qu'en soient la forme et l'objet et notamment dans le secteur des produits de luxe. Sa filiale, la société LONGCHAMP, ayant pour activité toutes prestations industrielles et commerciales se rapportant à la fabrication, l'achat, la vente de bagages, d'articles de maroquinerie, d'accessoires de mode ou tous autres produits de luxe, assure de manière exclusive la fabrication et la distribution des modèles créés par la société JEAN CASSEGRAIN. Celle-ci revendique la titularité des droits d'auteur sur un modèle de sac référencé 2923 sous la dénomination Rival qui aurait été créé en 2005 par son bureau de style. Ce modèle a fait l'objet d'un dépôt communautaire le 14 juillet 2006 sous le numéro 000561022-0010 auprès de l'OHMI. La société 3SH, ayant pour associées la société 3 SUISSES FRANCE et la société allemande HEINE, a une activité de vente par catalogue. Elle commercialise ses produits par le biais d'un catalogue papier intitulé « Helline » et sur son site internet . La société JEAN CASSEGRAIN, ayant constaté qu'un sac était offert à la vente sur le catalogue de vente par correspondance "Helline mode citadine printemps 2009" et sur le site internet qu'elle estimait reproduire servilement les caractéristiques du sac Rival, a fait réaliser un procès-verbal de constat de commercialisation sur internet par acte d'huissier en date du 11 mars 2009, puis un procès-verbal de constat d'achat sur Internet par acte d'huissier en date du 27 mars 2009. Le 9 avril 2009, elle a fait procéder à des opérations de saisie- contrefaçon au siège de la société 3SH, laquelle a été suspendue pour permettre au saisi de récupérer les documents comptables et commerciaux détenus par la société HEINE en Allemagne, et poursuivie le 21 avril pour l'appréhension de ces documents par l'huissier. C'est dans ces circonstances que, par acte d'huissier du 5 mai 2009, la société JEAN CASSEGRAIN et la société LONGCHAMP ont assigné la société 3SH devant le Tribunal de céans. Dans leurs dernières conclusions en date du 3 février 2010, la société JEAN CASSEGRAIN et la société LONGCHAMPdemandent au Tribunal, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, de :-les juger recevables et bien fondées et rejeter tous arguments contraires, -juger que la société 3SH a commis des actes de contrefaçon du modèle de sac LONCHAMP dont la société JEAN CASSEGRAIN détient les droits d'auteur au sens des dispositions des livres 1 à 3 du Code de la propriété intellectuelle, et les droits de modèle au sens des dispositions du livre 5 du même code,-juger que la société 3SH a commis des actes de concurrence déloyale et parasitaires au préjudice de la société LONGCHAMP au sens de l'article 1382, voire1383 du Code civil, -faire interdiction à la société 3SH de fabriquer, faire fabriquer, importer, exporter, détenir, proposer à la vente, exposer, reproduire, vendre, et d'une manière générale commercialiser des sacs constituant la contrefaçon ou la copie du modèle invoqué, sous astreinte de 2.000 € par infraction constatée et ce, dès la signification de la décision à intervenir, -condamner la société 3 SH à payer, sauf à parfaire, 200.000 € à chacune des sociétés JEAN CASSEGRAIN et LONGCHAMP, -autoriser les demanderesses à faire publier la décision à intervenir par extraits ou en entier, éventuellement illustrée d'un dessin ou d'une photographie du sac LONGCHAMP, dans trois journaux ou revues de leur choix et condamner la société 3SH à rembourser les frais de publication à hauteur d'une somme globale de 20.000 €, -condamner la société 3SH à faire figurer le dispositif de la décision sous le titre « PUBLICATION JUDICIAIRE » en haut de la page d'accueil de son site internet « www.helline.fr » en lettres noires sur fond blanc de type arial en taille 14 pendant 30 jours consécutifs, et ce, 15 jours après la signification de la décision, sous astreinte de 1.500 € par jour de retard, -condamner la société 3SH au paiement de la somme de 10.000 € au titre de l'article700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens, lesquels comprendrontnotamment les frais de constat et de saisie-contrefaçon. Au soutien de leurs demandes, la société JEAN CASSEGRAIN et la société LONGCHAMP font valoir qu'elles sont recevables à agir d'une part, en qualité de titulaire des droits d'auteur et des droits sur le modèle en ce qui concerne la société JEAN CASSEGRAIN et, d'autre part, en qualité de fabriquant et distributeur exclusif s'agissant de la société LONGCHAMP. Elles soutiennent que le sac invoqué est original et nouveau du fait de la combinaison caractéristique de ses différents éléments. Elles estiment que la société 3SH a commis des actes de contrefaçon, le sac litigieux reproduisant l'intégralité des caractéristiques du modèle invoqué et l'aspect d'ensemble des sacs étant identique. Elles avancent également que les agissements de la société 3SH constituent une faute à l'égard de la société LONGCHAMP qui détient les droits d'exploitation sur ce modèle car ils portent atteinte à la valeur commerciale de ces modèles, qui se trouvent en conséquence banalisés, ce qui cause un préjudice certain et distinct de celui subi par la société JEAN CASSEGRAIN. Enfin, elles exposent subir un préjudice aggravé du fait de la notoriété du modèle, de la commercialisation à un prix très inférieur du modèle litigieux et de sa médiocre qualité, ainsi que l'importance des actes poursuivis, plus de 100.000 catalogues ayant été diffusé en France et le sac présenté sur le site internet de la défenderesse. Dans ses conclusions en date du 31 mars 2010, la société 3SH sollicite du Tribunal, à titre principal, de :-dire et juger que l'action en contrefaçon engagée par la sociétéJEAN CASSEGRAIN et la société LONGCHAMP à son encontre est irrecevable etmal fondée,-dire et juger leur action en concurrence déloyale et parasitaire irrecevable et malfondée,

En conséquence

, les débouter de l'ensemble de leurs demandes, fins, moyens et conclusions. A titre subsidiaire:-constater que la société JEAN CASSEGRAIN et la société LONGCHAMP nejustifient pas d'un préjudice en relation directe avec les faits fautifs allégués, En conséquence, les débouter de l'ensemble de leurs demandes, fins, moyens et conclusions au titre des indemnisations réclamées et subsidiairement, leur accorder l'euro symbolique en les déboutant en tout état de cause de leur demande de publication de la décision à intervenir, En tout état de cause et à titre reconventionnel:-condamner la société JEAN CASSEGRAIN et la société LONGCHAMP à lui verserla somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,-les condamner aux entiers dépens, dont distraction au profit de la S.C.P. RaymondDEHORS & Associés, avocats aux offres de droit, qui pourra les recouvrerdirectement conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédurecivile. A l'appui de ses prétentions, la société 3SH fait valoir qu'elle n'est pas responsable de l'origine des faits de contrefaçon, n'ayant fait que reprendre une présentation d'un modèle fini figurant déjà dans la base de données de la société HEINE, associée et partenaire commerciale qui a la maîtrise des approvisionnements et des stocks, alors qu'elle n'a aucun contrôle sur les achats, n'étant qu'un simple vecteur de distribution en France. Elle soutient qu'il est critiquable et fautif que les demanderesses se soient abstenues de mettre en cause le fournisseur, la société WABERSICH ACCESSOIRES, seule responsable de la « création » et de la commercialisation du produit litigieux. Elle précise que le sac litigieux n'a pas été un produit phare du catalogue « Helline », n'ayant comme fonction que d'accessoiriser « dans une couleur difficile » une gamme de vêtements jaunes avec une vocation plus décorative que mercantile et que n'exerçant pas d'activité de maroquinerie, elle n'est pas en situation de concurrence avec les demanderesses. Par ailleurs, elle estime que les demanderesses ne démontrent pas l'existence d'actes de concurrence déloyale et parasitaires distincts des faits de contrefaçon et que le distributeur doit rapporter la preuve d'une situation de concurrence, inexistante en l'espèce et d'un risque de confusion, ainsi que d'un préjudice au niveau de la variation des ventes. Enfin, elle soutient que les demanderesses n'apportent pas la preuve de la réalité, de la matérialité et du quantum du préjudice qu'elles allèguent et ne justifient pas des investissements portant sur le sac, ni d'une perte de clientèle en relation avec la date de parution et de diffusion du catalogue « Helline » et la vente des 4 sacs litigieux et qu'il n'est pas démontré que la clientèle haut de gamme de la marque LONGCHAMP ait eu connaissance de la commercialisation du sac en cause. L'ordonnance de clôture a été prononcée le 14 avril 2010. Dans de nouvelles conclusions « d'incident aux fins de rejet de pièces et récapitulatives n°2 » du 11 mai 2010, la société 3 SH sollicite en outre de constater la communication tardive des pièces adverses n°157 incluant le plan presse de l'année 2008 ainsi que l'analyse des ventes de 2006 à mars 2010 et de les rejeter des débats. Elle soutient que les pièces lui ont été communiquées par télécopie le 8 avril 2010 à 17hO6 et n'ont pu être appréciées alors qu'elles étaient susceptibles d'être mal interprétées dans la perspective d'une éventuelle appréciation de l'existence ou non d'un éventuel préjudice, et qu'en tout état de cause, il n'existe aucun lien entre la date de parution du catalogue « Helline » et la chute des ventes qu'évoquent les sociétés demanderesses via cette dernière pièce. Elle fait valoir qu'en l'absence de communication des pièces en temps utile, elle n'a pas été à même d'organiser sa défense. EXPOSE DES MOTIFS Sur la recevabilité des conclusions signifiées par la société 3SH le11 mai 2010 En vertu de l'article 783 du Code de procédure civile, aucune conclusion ne peut être déposée après l'ordonnance de clôture, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office. L'article 784 du même Code dispose que l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il existe une cause grave depuis qu'elle a été rendue. En l'espèce, dans ses conclusions signifiées le 11 mai 2010, soit près d'un mois après l'ordonnance de clôture, la société 3 SH ne sollicite pas le rabat de l'ordonnance de clôture. Les sociétés demanderesses ont communiqué à la défenderesse six jours avant l'audience de mise en état, à laquelle l'ordonnance de clôture devait être prononcée, de nouvelles pièces, à savoir le plan presse 2007-2008 et les ventes du sac RIVAL de 2006 à 2010. La société 3 SH a sollicité par courrier du 12 avril 2010 du juge de la mise en état un report de la clôture, prétendant avoir reçu « ce jour » de nouvelles pièces. Il n'a pas été fait droit à cette demande et l'affaire a été clôturée. Même si la production tardive de pièces, détenues par les demanderesses depuis le début de l'instance, participe d'une démarche à la limite de la déloyauté, force est de constater que la société 3SH ne justifie d'aucune cause grave intervenue depuis le prononcé de l'ordonnance de clôture, qui, seule, autoriserait sa révocation. En conséquence, les conclusions du 11 mai 2010 seront déclarées irrecevables. Sur les actes de contrefaçon A titre liminaire, il convient de constater que la défenderesse ne conteste pas la protection du sac au titre du droit d'auteur, ni que le modèle communautaire enregistré lui est opposable. Il n'est pas plus contesté que le sac incriminé constitue la reproduction servile du modèle Rival. L'article L. 122-4 du Code de la propriété intellectuelle dispose que toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droits ou ayant cause est illicite. Par ailleurs, en vertu de l'article 19 § 1 du règlement 6/2002 sur les dessins ou modèles communautaires, « le dessin ou modèle communautaire enregistré confère à titulaire le droit exclusif de l'utiliser et d'interdire à tout tiers de l'utiliser sans son consentement. Par utilisation au sens de la présente disposition, on entend en particulier la fabrication, l'offre, la mise sur le marché, l'importation, l'exportation ou l'utilisation d'un produit dans lequel le dessin ou modèle est incorporé ou auquel celui-ci est appliqué, ou le stockage du produit à ces mêmes fins ». Il n'est pas contesté que la copie servile du sac RIVAL a été reproduite dans le catalogue printemps 2009 « Helline » et sur le site de la société 3SH destinés au public français et que ce modèle a été importé en France puisque 4 exemplaires ont été vendus. La société 3SH est mal fondée à reprocher aux sociétés demanderesses de ne pas avoir mis en cause le fabricant du sac, celles-ci étant libres de ne solliciter la réparation de leur préjudice qu'à l'égard de la société ayant commercialisé le produit en France. Au surplus, la société 3SH avait la possibilité de mettre en cause la société allemande fabricante dans le cadre de la présente instance, ce dont elle s'est abstenue. En conséquence, la société 3SH a commis des actes de contrefaçon au préjudice de la société JEAN CASSEGRAIN, titulaire du modèle communautaire n°000561022-0010 et des droits d'auteur au sens du livre I du Code de la propriété intellectuelle sur le modèle de sac RIVAL référencé 2923. Sur les actes de concurrence déloyale et parasitaires Contrairement à ce que soutient la défenderesse, les actes de concurrence déloyale et parasitaires dont la société LONGCHAMP sollicite la réparation ne sont pas similaires aux actes de contrefaçon dont elle s'est rendue coupable à l'égard du titulaire des droits d'auteur et du modèle communautaire. En effet, les actes de contrefaçon constituent des actes de concurrence déloyale à l'égard du fabricant et distributeur du modèle qui ne dispose pas d'un droit privatif sur le modèle. Ainsi, la reproduction servile du sac constitue une faute et le contrefacteur profite des investissements réalisés la société LONGCHAMP à travers les différentes campagnes publicitaires qui ont contribué à la notoriété du sac Rival. En conséquence, la société 3SH s'est rendue coupable d'actes de concurrence déloyale et parasitaires à l'encontre de la société LONGCHAMP. Sur les mesures réparatrices Le sac Rival, renommé récemment Rodéo, figure depuis 2006 sans interruption dans les collections commercialisées par la société LONGCHAMP. Les demanderesses justifient de l'ampleur des campagnes de promotion, ce sac ayant été reproduit dans les principaux magazines de la presse féminine à l'automne 2006 (notamment Vogue, Officiel, Gala, Elle, Glamour, Version Fémina, Biba, Jalouse, Madame F, Marie-Claire) mais aussi dans le JDD et Le nouvel observateur. La représentation de ce modèle dans la presse, décliné en plusieurs couleurs et imprimés, s'est poursuivie au printemps et à l'été 2007 et plus sporadiquement depuis. Ce sac a été qualifié de « nouveau sac phare de la maison » (Gala, 9 août 2006), « Le sac de l'automne » (Elle, 11 septembre 2006), la « star de la saison 2006 » (Le nouvel observateur, 7 septembre 2006) et « le best of » de la collection Longchamp (Marie C 2, printemps été 2007). Il a été présenté comme un des plus grand succès de la marque, dénommé par les consommatrices « sac Kate M », la notoriété du modèle ayant attiré des clientes plus jeunes et a rendu la marque « plus branchée » (Officiel, juin juillet 2007). En effet, Kate M a été choisie comme égérie de ce modèle, posant notamment nue dans un lit avec ce sac. En conséquence, lors des faits de contrefaçon en 2009, les consommatrices féminines s'intéressant à la mode connaissaient ce modèle. Ces consommatrices ne peuvent être réduites à des consommatrices de luxe, la marque Longchamp touchant, en dépit de prix élevés, une clientèle plus étendue ainsi qu'il résulte des articles de presse versés aux débats, la société défenderesse ne rapportant pas au demeurant la preuve que son public n'est pas lecteur des magazines dans lesquels le sac a été présenté. Il résulte de l'attestation du commissaire aux comptes de la société 3SH en date du 16 mars 2010 qu'il a été vendu en France 4 exemplaires du sac litigieux. Par ailleurs, la défenderesse avait commandé seulement 50 modèles de ce sac et il n'est pas contesté par les sociétés demanderesses que sa distribution et sa commercialisation ont cessé après les opérations de saisie-contrefaçon. Le sac contrefaisant a été présenté sur le site , ainsi que cela a été constaté par procès-verbal le 11 mars 2009, comme une des meilleures ventes. Si cette affirmation est fausse, sauf à supposer que les produits du catalogue « Helling » se vendent généralement en dessous de 4 exemplaires, elle a contribué à banaliser le produit qui figurait aussi en couverture du catalogue diffusé en France à 100.190 exemplaires. Le sac contrefaisant était commercialisé au prix de 99,90 euros et décrit en « aspect peau ». Ainsi, en dépit d'une très faible commercialisation de ce sac, liée à son originale couleur jaune, il a été présenté par la société 3SH de manière importante tant par le biais de ses catalogues que par sa mise en valeur sur le site internet. L'association de ce modèle original de la société JEAN CASSEGRAIN aux produits de la marque HELLING a contribué à banaliser ce sac et à porter atteinte à la réputation de la société. Le préjudice moral de la société CASSEGRAIN résultant du non respect de sa création et de la dégradation de son image et de sa renommée sera réparé par l'allocation d'une somme de 15.000 euros. Le préjudice patrimonial de la société LONGCHAMP lié à la commercialisation est très faible en raison du nombre de sacs vendus (4) ; le préjudice commercial subi doit être évalué en tenant compte de l'atteinte portée à l'image de ce distributeur exclusif qui offre à la vente les produits sous sa marque et en assure la publicité, et de la banalisation du produit, or il ne ressort pas des pièces versées au débat le montant des investissements publicitaires consacrés à ce produit ni le montant quantifiable des conséquences économiques de la banalisation du produit (baisse du chiffre d'affaires par exemple) de sorte que le préjudice subi sera réparé par l'allocation de 1.000 euros. La commercialisation du sac contrefaisant ayant cessé, il sera fait droit en tant que besoin aux mesures d'interdiction. Afin de réparer intégralement le préjudice des demanderesses, il convient également d'ordonner des mesures de publication judiciaire dans deux journaux mais les circonstances de l'espèce ne justifient pas une mesure de publication judiciaire sur le site internet , la commercialisation du sac ayant cessé depuis avril 2009. Sur les autres demandes L'exécution provisoire est compatible avec la nature de la présente décision et nécessaire. Elle sera ordonnée mais ne portera sur les mesures de publication judiciaire. La société 3SH succombant, elle sera condamnée aux dépens. Elle devra en outre payer à la société JEAN CASSEGRAIN la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les frais de saisie contrefaçon et de constat qui ne constituent pas des frais afférents à la présente instance au sens de l'article 695 du Code de procédure civile mais ayant été engagés par la demanderesse en vue de la présente instance font partie des frais irrépétibles, et à la société LONGCHAMP la somme de 2.000 euros.

PAR CES MOTIFS

. Le Tribunal statuant par jugement contradictoire, en premier ressort et mis à la disposition du public par le greffe le jour du délibéré, Déclare irrecevables les conclusions du 11 mai 2010 de la société 3SH, Dit que la société 3SH a commis des actes de contrefaçon au préjudice de la société JEAN CASSEGRAIN, titulaire du modèle communautaire n°000561022-0010 et des droits d'auteur au sens du livre I du Code de la propriété intellectuelle sur le modèle de sac RIVAL référencé 2923 en important, reproduisant et offrant à la vente un sac reproduisant les caractéristiques du modèle enregistré 000561022-0010, Dit qu'en commercialisant ce sac contrefaisant, la société 3SH a commis des actes de concurrence déloyale et parasitaires au préjudice de la société LONGCHAMP, Condamne la société 3SH à payer à la société JEAN CASSEGRAIN la somme de QUINZE MILLE EUROS (15.000 euros) en réparation de son préjudice subi du fait des actes de contrefaçon, Condamne la société 3SH à payer à la société LONGCHAMP la somme de MILLE EUROS (1.000 euros) en réparation de son préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyales et parasitaires, Interdit en tant que de besoin à la société 3SH d'importer, de faire fabriquer, de détenir, de proposer à la vente, d'exposer et de reproduire le sac référencé 028 453 sous astreinte de CENT EUROS (100 euros) par infraction constatée, cette astreinte prenant effet passé un délai de 15 jours suivant la signification du présent jugement et courant pendant un délai de trois mois, Se réserve la liquidation de l'astreinte, Ordonne la publication judiciaire dans deux journaux ou revues au choix des sociétés JEAN CASSEGRAIN et LONGCHAMP, aux frais avancés de la société 3SH, sans que le coût de chacune de ces publications n'excède la somme de CINQ MILLE EUROS (5.000 euros) HT, du communiqué suivant qui pourra être illustré d'une photo ou d'un dessin du sac RIVAL:"Par jugement rendu le 22 juin 2010 par le Tribunal de Grande Instance de Paris, la 3SH a été condamnée pour avoir commercialisé dans son catalogue Helling printemps 2009 un sac qui constitue la contrefaçon du sac Rival ou Rodéo créé par la société JEAN CASSEGRAIN et commercialisé par la société LONGCHAMP", Ordonne l'exécution provisoire de laprésente décision à l'exception des mesures de publication judiciaire, Condamne la société 3SH aux dépens de l'instance, Condamne la société 3SH à payer à la société JEAN CASSEGRAIN la somme de 3.000 euros outre les frais de constat et de saisie-contrefaçon et à la société LONGCHAMP la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.