Cour de cassation, Chambre commerciale, financière et économique, 6 octobre 2009, 06-20.360

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2009-10-06
Cour d'appel de Chambéry
2006-05-23

Texte intégral

Attendu, selon l'arrêt attaqué

, que depuis le 20 janvier 1998, la société Ski (la société) était titulaire auprès du Crédit agricole des Savoie (la banque) d'un compte courant numéroté 9356611052 ; que ce compte a servi de support à différentes conventions dont une ouverture de crédit d'un montant de 100 000 francs, consentie le 18 novembre 1998, pour le remboursement de laquelle MM. X... et Y... (les cautions) se sont rendus cautions solidaires, à concurrence de 60 000 francs chacun ; que le 27 octobre 1999, la société a souscrit auprès de la banque une deuxième convention de compte courant numérotée 9356611053 ; qu'après la mise en redressement judiciaire de la société par jugement du 11 avril 2000, celle ci a ouvert auprès de la banque un troisième compte courant numéroté 94504598050 ; que le 16 juin 2000, la banque a déclaré sa créance tout en indiquant qu'à cette date, les soldes des comptes courants n° 9356611053 et 94504598050 étaient créditeurs ; que la société ayant été mise en liquidation judiciaire par jugement du 20 octobre 2000, la banque a assigné les cautions en exécution de leurs engagements ; que par jugement du 13 mai 2003, M. Y... a été mis en redressement judiciaire ;

Sur le premier moyen

, pris en sa première branche, qui est recevable :

Vu

les articles 1290 et 1291 du code civil et l'article L. 621 24 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ;

Attendu que pour constater qu'en raison de la compensation légale intervenue le 20 octobre 2000, la créance de la banque est de 10 155,67 euros, l'arrêt retient

que du fait du prononcé de la liquidation judiciaire, les soldes des comptes courants n° 94504598050 et n° 9356611052 étant devenu exigibles, la compensation s'est opérée de plein droit ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi

, sans avoir constaté que les créances réciproques des parties étaient certaines, liquides et exigibles avant l'ouverture de la procédure collective, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

Et sur le second moyen

, pris en sa première branche :

Vu

l'article 48 de la loi du 1er mars 1984, devenu l'article L. 313 22 du code monétaire et financier ; Attendu qu'en cas de retard apporté à l'information de la caution, prévue à l'article précité, la déchéance des intérêts est encourue pour la période comprise entre le 31 mars de l'année en cours et la date à laquelle l'information a été effectivement donnée ; Attendu que l'arrêt prononce la déchéance du droit aux intérêts conventionnels pour la période du 18 novembre 1998 au 14 février 2000, puis à compter du 17 février 2001, en ce qui concerne M. Y... tandis que la banque est déchue du droit aux intérêts conventionnels pour la totalité de la période en ce qui concerne M. X... ;

Attendu qu'en statuant ainsi

, après avoir relevé que l'information avait été donnée à M. Y... les 14 février 2000 et 17 février 2001 tandis qu'elle avait été donnée le 17 février 2001 à M. X..., la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations ;

PAR CES MOTIFS

, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, infirmant le jugement, il a constaté qu'en raison de la compensation légale intervenue le 20 octobre 2000, la créance de la banque était de 10 155,67 euros, dit que le Crédit agricole des Savoie est déchu du droit aux intérêts conventionnels, en ce qui concerne M. Y... pour la période du 18 novembre 1998 au 14 février 2000 puis à compter du 17 février 2001 et en ce qui concerne M. X..., pour la totalité de la période, l'arrêt rendu le 23 mai 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ; Condamne MM. X... et Y... et M. Z..., ès qualités, aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande du Crédit agricole des Savoie ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du six octobre deux mille neuf

MOYENS ANNEXES

au présent arrêt Moyens produits par la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat pour le Crédit agricole des Savoie PREMIER MOYEN DE CASSATION LE POURVOI REPROCHE A L'ARRET INFIRMATIF ATTAQUE D'AVOIR constaté qu'en raison de la compensation légale intervenue le 20 octobre 2000, la créance du CREDIT AGRICOLE DES SAVOIE est de 10.155,67 AUX MOTIFS QUE, subsidiairement, M. Didier Y... invoque l'exception de compensation à la date du prononcé de la liquidation judiciaire, le 20 octobre 2000, au motif que le montant existant au crédit du compte n° 94504598050 devait se compenser de plein droit avec le crédit porté sur le compte n°9356611052 en application des dispositions des articles 1290, 1293 du Code civil ou à défaut en application de la compensation conventionnelle et des dispositions des articles 1297, 1256 du Code civil ; que du fait du prononcé de la liquidation judiciaire, le solde des comptes courants n°94504598050 (+38.548,54 F) et n°9356611052 (-105.165,40F) étant devenus exigibles, la compensation s'est opérée de plein droit, si bien que la dette subsistante était alors de 66.616,86 F (10.155,67 ), soit un montant restant supérieur à l'engagement de chacune des cautions ; ALORS D'UNE PART QUE la compensation légale ne s'opère à l'égard d'une entreprise en difficulté que si les conditions ont été réunies avant l'ouverture de la procédure collective ; qu'en décidant que la compensation de plein droit des soldes des comptes courants de la société SKI 35 s'était opérée du fait du prononcé de la liquidation judiciaire de cette société, tandis que cette compensation ne pouvait se produire qu'avant l'ouverture de la procédure collective, la Cour d'appel a violé les articles 1289, 1290 et 1291 du Code civil ; ALORS D'AUTRE PART QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que seul Monsieur Y... ayant invoqué l'exception de compensation à la date de la liquidation judiciaire, la Cour d'appel qui décide que, du fait de cette compensation, la créance de l'exposante se trouvait limitée également à l'égard de Monsieur X..., a violé l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ; SECOND MOYEN DE CASSATION LE POURVOI REPROCHE A L'ARRET INFIRMATIF ATTAQUE D'AVOIR dit que le CREDIT AGRICOLE DES SAVOIE est déchu du droit aux intérêts conventionnels, en ce qui concerne M. Didier Y... pour la période du 18 novembre 1998 au 14 février 2000, puis à compter du 17 février 2001, et D'AVOIR dit que le CREDIT AGRICOLE DES SAVOIE est déchu du droit aux intérêts conventionnels, en ce qui concerne M. Daniel X... pour la totalité de la période, AUX MOTIFS QUE le CREDIT AGRICOLE DES SAVOIE verse notamment aux débats des listings informatiques intitulés «ETAT DES INFORMATIONS AUX CAUTIONS» concernant la situation des encours garantis : - au 31 décembre 1999 (M. Didier Y...) - au 31 décembre 2000 (M. Daniel X... et M. Didier Y...) et portant mention d'une date d'expédition respectivement les 14 février 2000 et 17 février 2001 ; qu'il produit en outre pour ces exercices 1999 et 2000 deux constats d'huissiers dressés les 23, 24, et 25 février 2000, 20, 22, et 23 février 2001 établissant, par sondages, la réalité des envois en nombre aux destinataires dont les noms figurent sur ces listings, et comportant des exemplaires des lettres adressées auxquelles sont jointes sous forme d'un tableau les informations apparaissant dans le listing ; que ces éléments établissent suffisamment que le CREDIT AGRICOLE DES SAVOIE a respecté l'obligation d'information : - de M. Didier Y... pour les exercices 1999 et 2000 - de M. Daniel X... pour le seul exercice 2000, en conséquence de quoi, l'établissement bancaire se trouve déchu du droit aux intérêts conventionnels, en ce qui concerne M. Didier Y..., à compter du 17 février 2001 et pour la période du 18 novembre 1998 au 14 février 2000 ; que s'agissant de M. Daniel X..., la déchéance s'applique pour la totalité de la période ; ALORS D'UNE PART QUE le défaut d'accomplissement de la formalité prévue au premier alinéa de l'article L.313-22 du Code monétaire et financier emporte, dans les rapports entre la caution et l'établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information, ou depuis la date à laquelle elle aurait dû être fournie, jusqu'à la date de communication de la nouvelle information ; que la Cour d'appel ayant relevé que le contrat avait été conclu le 18 novembre 1998, et que l'exposant avait accompli la formalité d'information à l'égard de Monsieur Y... le 14 février 2000 pour l'exercice 1999 et le 17 février 2001 pour l'exercice 2000, et à l'égard de Monsieur X... le 17 février 2001 pour l'exercice 2000, il en résulte que l'exposant n'est pas déchu du droit aux intérêts conventionnels pour les périodes du 18 novembre 1998 au 31 mars 1999 et du 14 février 2000 au 31 mars 2002 dans ses rapports avec Monsieur Y..., et pour les périodes du 18 novembre 1998 au 31 mars 1999 et du 17 février 2001 au 31 mars 2002 dans ses rapports avec Monsieur X... ; qu'en décidant cependant que l'exposant est déchu du droit aux intérêts conventionnels en ce qui concerne M. Didier Y... pour la période du 18 novembre 1998 au 14 février 2000, puis à compter du 17 février 2001 et en ce qui concerne M. Daniel X... pour la totalité de la période, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L.313-22 du Code monétaire et financier. ALORS D'AUTRE PART QUE l'imputation légalement faite du paiement effectué par le débiteur principal est opposable à la caution, et, jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi du 25 juin 1999, dont l'article 114 a complété le second alinéa de l'article 48 de la loi du 1er mars 1984, devenu l'article L.313-22 du Code monétaire et financier, l'établissement de crédit qui n'a pas accompli la formalité prévue au premier alinéa de ce texte n'est déchu du droit aux intérêts conventionnels que s'ils n'ont pas été acquittés par le débiteur principal ; qu'en déclarant l'exposant déchu du droit aux intérêts à compter du jour du contrat de cautionnement du 18 novembre 1998, donc pour une période antérieure à l'entrée en vigueur de la loi du 25 juin 1999, la Cour d'appel a violé les articles 2288 du Code civil et, par fausse application du second alinéa de l'article L.313-22 du Code monétaire et financier.