Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 3 avril 2018 par lequel le préfet du Doubs a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait éloigné.
Par un jugement n° 1801096 du 25 septembre 2018, le tribunal administratif de Besançon a rejeté la demande.
Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 3 avril 2018 par lequel le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait éloignée.
Par un jugement n° 1801097 du 25 septembre 2018, le tribunal administratif de Besançon a rejeté la demande.
Procédure devant la cour :
I. ) Par une requête, un mémoire et des pièces complémentaires, enregistrés sous le n°19NC00087, les 14 et 17 janvier, 5 mars, 2 avril et 29 mai 2019, M. B... D..., représenté par Me Bocher-Allanet, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 25 septembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 avril 2018 par lequel le préfet du Doubs a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait éloigné ;
2°) d'annuler cet arrêté du 3 avril 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Doubs de lui délivrer un titre de séjour temporaire sur le fondement du 11° de l'article
L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou à défaut du 7° de ce même article dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, à défaut, dans ce même délai, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de procéder au réexamen de sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des articles
L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
Sur le refus de séjour :
- la procédure est irrégulière dès lors qu'il n'a eu connaissance de l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration que devant les premiers juges ;
- le préfet était tenu de saisir la commission du titre de séjour ;
- le préfet ne pouvait légalement se fonder sur la circonstance qu'il constituerait une menace à l'ordre public en consultant seulement le fichier " traitement des antécédents judiciaires " ; il n'a pas été informé de cette consultation le privant de la possibilité de demander la suppression des mentions le concernant ;
- l'arrêté méconnait le 11° de l'article
L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté méconnait les dispositions du 7° de l'article
L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'arrêté méconnait les articles 3-1 et 7 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le préfet a méconnu l'article
L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
- il est excipé de l'illégalité du refus de séjour ;
- la décision méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les articles 3-1 et 7 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision méconnait l'article
L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Sur le délai de retour volontaire :
- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
- il est excipé de l'illégalité du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 février 2019, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête.
Il soutient les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.
II. ) Par une requête, un mémoire et des pièces complémentaires, enregistrés sous le n°19NC00088, les 14 janvier et 5 mars 2019, Mme C... D..., représentée par Me Bocher-Allanet, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 25 septembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 avril 2018 par lequel le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait éloignée ;
2°) d'annuler cet arrêté du 3 avril 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Doubs de lui délivrer un titre de séjour temporaire sur le fondement du 7° de l'article
L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou à défaut de l'article
L. 313-14 du même code dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, à défaut, dans ce même délai, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de procéder au réexamen de sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des articles
L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
Sur le refus de séjour :
- l'arrêté méconnait les dispositions du 7° de l'article
L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'arrêté méconnait les articles 3-1 et 7 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le préfet a méconnu l'article
L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
- il est excipé de l'illégalité du refus de séjour ;
- la décision méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les articles 3-1 et 7 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- son époux n'est pas en état de voyager ;
Sur le délai de retour volontaire :
- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
- il est excipé de l'illégalité du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ;
M. et Mme D... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par des décisions du 18 décembre 2018.
Vu :
- les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles
R. 313-22,
R. 313-23 et
R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision du Conseil constitutionnel n° 2017-670 QPC du 27 octobre 2017 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Lambing a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit
:
1. Les requêtes n° 19NC00087 et 19NC00088, présentées pour M. et Mme D..., concernent la situation des membres d'une même famille au regard de leur droit au séjour en France. Elles soulèvent des questions identiques et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
2. M. D..., né en 1979 de nationalité géorgienne, serait entré irrégulièrement en France le 23 mars 2014 selon ses déclarations. Il a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 21 août 2014 confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 15 mai 2015. Le 28 août 2014, M. D... a par ailleurs déposé une demande de titre de séjour pour raisons de santé qui a fait l'objet d'un refus assorti d'une mesure d'éloignement le 9 mars 2015. Le 21 juillet 2015, l'intéressé a déposé à nouveau une demande de titre de séjour en se prévalant de son état de santé. Un titre de séjour lui a été délivré le 14 avril 2016. L'intéressé a été rejoint par son épouse, née en 1983 de nationalité géorgienne, qui est entrée régulièrement en France le 20 août 2016 sous couvert d'un visa court séjour délivré par les autorités grecques. Le 30 août 2016, Mme D... a demandé un titre de séjour " vie privée et familiale ". M. D... a, quant à lui, demandé le renouvellement de son titre de séjour. Par arrêtés du 3 avril 2018, le préfet du Doubs a refusé de leur délivrer un titre de séjour et les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de leur pays d'origine. M. et Mme D... relèvent appel des jugements du 25 septembre 2018 par lesquels le tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande tendant à l'annulation de ces arrêtés du 3 avril 2018.
Sur la légalité des refus de séjour :
3. En premier lieu, aux termes de l'article
R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour l'application du 11° de l'article
L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis (...) au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / (...) ". Aux termes de l'article
R. 313-23 du même code : " Le rapport médical mentionné à l'article
R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre (...). Il transmet son rapport médical au collège de médecins. / (...) / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis (...). La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. / (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 27 décembre 2016 susvisé : " Au vu du certificat médical et des pièces qui l'accompagnent ainsi que des éléments qu'il a recueillis au cours de son examen éventuel, le médecin de l'office établit un rapport médical (...). ". Aux termes du premier alinéa de l'article 5 du même arrêté : " Le collège de médecins à compétence nationale de l'office comprend trois médecins instructeurs des demandes des étrangers malades, à l'exclusion de celui qui a établi le rapport. ". Enfin, aux termes de l'article 6 du même arrêté : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / Cet avis mentionne les éléments de procédure. / (...) Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. / L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège. ".
4. Il ne résulte d'aucune de ces dispositions ni d'aucun principe que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration doit être communiqué au demandeur. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la procédure est irrégulière au motif que M. D... n'aurait eu connaissance de cet avis qu'au stade de la procédure contentieuse.
5. En deuxième lieu, d'une part, aux termes de l'article
R. 40-28 du code de procédure pénale dans sa version applicable au présent litige : " II. - Peuvent être destinataires des mêmes données : / (...) 3° Les organismes de coopération internationale en matière de police judiciaire et les services de police étrangers, dans les conditions énoncées à l'article
L. 235-1 du code de la sécurité intérieure. (...) ". Aux termes de l'article
L. 235-1 du code de la sécurité intérieure : " Les données contenues dans les traitements automatisés de données à caractère personnel gérés par les services de police et de gendarmerie nationales peuvent être transmises, dans le cadre des engagements internationaux régulièrement introduits dans l'ordre juridique interne, à des organismes de coopération internationale en matière de police judiciaire ou à des services de police étrangers, qui représentent un niveau de protection suffisant de la vie privée, des libertés et des droits fondamentaux des personnes à l'égard du traitement dont ces données font l'objet ou peuvent faire l'objet. Le caractère suffisant du niveau de protection assuré par un Etat s'apprécie en fonction notamment des dispositions en vigueur dans cet Etat, des mesures de sécurité qui y sont appliquées, des caractéristiques propres du traitement, telles que ses fins et sa durée, ainsi que de la nature, de l'origine et de la destination des données traitées. ".
6. Il résulte de ces dispositions, contrairement à ce que soutient M. D..., que le préfet en tant que service de police étrangers au sens des dispositions précitées, pouvait légalement consulter le traitement d'antécédents judiciaires.
7. D'autre part, aux termes du 1er alinéa de l'article
230-8 du code de procédure pénale alors en vigueur relatif au traitement d'antécédents judiciaires : " Le traitement des données à caractère personnel est opéré sous le contrôle du procureur de la République territorialement compétent qui demande qu'elles soient effacées, complétées ou rectifiées, notamment en cas de requalification judiciaire. La rectification pour requalification judiciaire est de droit. Le procureur de la République se prononce sur les suites qu'il convient de donner aux demandes d'effacement ou de rectification dans un délai d'un mois. En cas de décision de relaxe ou d'acquittement devenue définitive, les données personnelles concernant les personnes mises en cause sont effacées, sauf si le procureur de la République en prescrit le maintien, auquel cas elle fait l'objet d'une mention. Lorsque le procureur de la République prescrit le maintien des données personnelles relatives à une personne ayant bénéficié d'une décision d'acquittement ou de relaxe devenue définitive, il en avise la personne concernée. Les décisions de non-lieu et de classement sans suite font l'objet d'une mention, sauf si le procureur de la République ordonne l'effacement des données personnelles. Lorsqu'une décision fait l'objet d'une mention, les données relatives à la personne concernée ne peuvent faire l'objet d'une consultation dans le cadre des enquêtes administratives prévues aux articles
L. 114-1,
L. 234-1 à
L. 234-3 du code de la sécurité intérieure et à l'article 17-1 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité. Les décisions du procureur de la République prévues au présent alinéa ordonnant le maintien ou l'effacement des données personnelles sont prises pour des raisons liées à la finalité du fichier au regard de la nature ou des circonstances de commission de l'infraction ou de la personnalité de l'intéressé. ". Aux termes de l'article R. 40-31 du même code : " Le traitement des données à caractère personnel fait l'objet du contrôle et du suivi prévus aux articles 230-8 et 230-9. / Les demandes de rectification ou d'effacement des données émanant des personnes intéressées peuvent être adressées soit directement au procureur de la République territorialement compétent ou au magistrat mentionné à l'article 230-9 soit, par l'intermédiaire de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, au responsable du traitement. Toute demande de rectification ou d'effacement adressée au procureur de la République territorialement compétent ou au magistrat mentionné à l'article 230-9 doit, à peine d'irrecevabilité, être adressée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. ".
8. La circonstance que M. D... n'aurait pas été mis à même de demander l'effacement du traitement d'antécédents judiciaires de la mention des faits relevés par le préfet au soutien de l'arrêté contesté est sans incidence sur la légalité de la décision lui refusant le séjour dès lors que la matérialité des interpellations n'est pas contestée. En outre, il ressort des motifs de la décision du Conseil constitutionnel n° 2017-670 QPC du 27 octobre 2017 que le premier alinéa de l'article
230-8 du code de procédure pénale a été déclaré inconstitutionnel, au demeurant qu'à compter du 1er mai 2018 soit postérieurement à la décision contestée, en tant que ces dispositions privaient les personnes mises en cause dans une procédure pénale, autres que celles ayant fait l'objet d'une décision d'acquittement, de relaxe, de non-lieu ou de classement sans suite, de toute possibilité d'obtenir l'effacement de leurs données personnelles inscrites dans le fichier des antécédents judiciaires. M. D..., n'établissant pas avoir bénéficié d'une décision d'acquittement, de relaxe, de non-lieu ou de classement sans suite, n'est pas fondé à se prévaloir de cette décision du Conseil constitutionnel pour arguer de l'irrégularité de la consultation du fichier par le préfet. Il s'ensuit que le moyen tiré de ce que M. D... n'a pu demander l'effacement des mentions le concernant doit être rejeté.
9. Par ailleurs, aux termes de
L. 234-1 du code de la sécurité intérieure du code de la sécurité intérieure : " Un décret en Conseil d'Etat fixe la liste des enquêtes administratives mentionnées à l'article
L. 114-1 qui donnent lieu à la consultation des traitements automatisés de données personnelles mentionnés à l'article
230-6 du code de procédure pénale, y compris pour les données portant sur des procédures judiciaires en cours, dans la stricte mesure exigée par la protection de la sécurité des personnes et la défense des intérêts fondamentaux de la Nation. Il détermine les conditions dans lesquelles les personnes intéressées sont informées de cette consultation. ". Aux termes de l'article
L. 114-1 du même code : " (...) V. - Il peut être procédé à des enquêtes administratives dans les conditions prévues au second alinéa du I du présent article pour la délivrance, le renouvellement ou le retrait d'un titre ou d'une autorisation de séjour sur le fondement des articles L. 121-4,
L. 122-1,
L. 311-12,
L. 313-3,
L. 314-3 et
L. 316-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou des stipulations équivalentes des conventions internationales ainsi que pour l'application des articles
L. 411-6,
L. 711-6,
L. 712-2 et
L. 712-3 du même code. "
10. Il résulte de ces dispositions qu'ayant déposé une demande de titre de séjour sur le fondement de l'article
L. 313-11, M. D... n'est pas fondé à soutenir qu'il n'a pas été informé de la consultation par le préfet du fichier " traitement d'antécédents judiciaires " le concernant.
11. Enfin, il ressort des pièces du dossier, et en particulier de l'extrait du fichier " traitement d'antécédents judiciaires " concernant M. D..., que l'intéressé a été interpellé les 2 septembre 2014, 17 septembre 2015, 1er juillet 2017 et 23 mars 2018 pour des faits de vols à l'étalage et vols en réunion dans des magasins de sport et hypermarchés. Si le requérant fait valoir que ces mentions n'établissent pas que des condamnations pénales auraient été prononcées à son encontre, cette seule circonstance ne saurait faire obstacle à ce que le préfet se fonde sur ces éléments dont la matérialité des faits ayant donné lieu aux interpellations est établie. Dans ces conditions, et eu égard à la gravité et à la répétition de ces faits, le préfet du Doubs n'a pas fait une inexacte appréciation des circonstances de l'espèce en estimant que la présence de M. D... sur le territoire français constituait une menace pour l'ordre public.
12. En troisième lieu, aux termes du 11° de l'article
L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. (...) ".
13. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
14. Il ressort des pièces du dossier que M. D... est suivi depuis 2015 pour une cirrhose virale B. A la suite d'une amélioration de son état en janvier 2017, il a été retiré de la liste de transplantation hépatique. Il bénéficie d'un traitement médicamenteux composé de Viread, Gutron, Aldactone, Propranolol et Previscan. Selon l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 9 mai 2017, l'état de santé du requérant nécessite une prise en charge médicale, dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié. Le préfet, qui n'a pas suivi cet avis, s'est prévalu des éléments communiqués par l'ambassade de France en Géorgie le 25 mars 2016, des fiches pays extraites de la base de données MedCoi, d'un rapport et de la liste des médicaments essentiels établie par les autorités géorgiennes. Ces éléments de sources différentes confirment la présence des médicaments adaptés à l'hépatite B en Géorgie même si le coût du traitement est important. En outre, le préfet a produit en première instance un courriel du conseiller santé du ministère de l'intérieur du 31 juillet 2018 qui indique que tous les médicaments prescrits à M. D... sont disponibles en Géorgie. Si le requérant produit un certificat du centre de santé de Tbilissi qui l'a soigné depuis 2010 précisant que les médicaments Viread et Previscan ne sont pas disponibles, il n'est cependant pas précisé que des molécules équivalentes n'existeraient pas. Par ailleurs, le courrier du ministère de la santé géorgien du 2 novembre 2017 produit par le requérant confirme la possibilité de prise en charge des patients atteints d'hépatite et de cirrhose. Les termes généraux de ce courrier, qui indiquent seulement que le programme de protection de la santé publique ne couvre pas les médicaments antiviraux, ne précisent pas que l'antiviral Viread n'est pas disponible en Géorgie au titre du traitement de la cirrhose. Enfin, M. D..., qui ne justifie pas de sa situation financière en Géorgie, n'est pas fondé à faire valoir que le rapport de l'organisation suisse d'aide aux réfugiés du 28 août 2018 pointe les difficultés d'accès aux soins des personnes les plus démunies. D'autre part, M. D... ne saurait utilement se prévaloir de l'état de santé d'une tierce personne atteinte de cirrhose et reconduite en Géorgie, qui au demeurant était atteinte d'autres pathologies en sus d'une cirrhose, pour attester de l'indisponibilité de traitement dans son pays d'origine. En outre, le certificat médical du 24 avril 2019 produit pour la première fois en appel, faisant état d'orifices herniaires nécessitant une consultation en chirurgie, décrit une situation postérieure à la décision attaquée. Enfin, la circonstance que M. D... ne serait pas en capacité de voyager est sans incidence sur la légalité de la décision lui refusant le séjour qui n'a ni pour objet ni pour effet d'éloigner le requérant. Par suite, en refusant d'admettre M. D... au séjour, le préfet du Doubs n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article
L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
15. En quatrième lieu, aux termes du 7° de l'article
L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
16. Les requérants se prévalent essentiellement de l'ancienneté de leur séjour en France, de leurs efforts d'insertion et de la scolarisation de leurs enfants. A... ressort des pièces du dossier que M. D... était présent en France depuis quatre ans à la date de la décision attaquée et son épouse n'était arrivée que depuis moins de deux ans accompagnée de leurs deux filles. Le requérant a fait l'objet le 9 mars 2015, avant l'arrivée en France de son épouse, d'une mesure d'éloignement à laquelle il n'a pas déféré. Les intéressés n'établissent pas être isolés dans leur pays d'origine où ils ont vécu jusqu'à l'âge de trente-cinq ans pour M. D... et trente-trois ans pour son épouse. Ils n'apportent aucun élément établissant qu'ils seraient dans l'impossibilité de poursuivre leur vie privée et familiale en Géorgie avec leurs deux filles et leur fils né en France. Enfin, les requérants n'établissent pas avoir fait preuve d'une intégration particulière en France. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que des dispositions du 7° de l'article
L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne peuvent être accueillis.
17. En cinquième lieu, aux termes du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ".
18. Ainsi qu'il a déjà été dit, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. et Mme D... seraient dans l'impossibilité de poursuivre leur vie familiale en Géorgie avec leurs deux filles nées en 2006 et 2008, ni que ces dernières seraient dans l'impossibilité d'y poursuivre une scolarité normale. Les deux filles n'étant en France que depuis moins de deux ans à la date des décisions contestées, et alors qu'elles ont vécu majoritairement en Géorgie, la perte de repères en cas de retour dans leur pays d'origine n'est pas établie. Il en est de même pour leur fils né en France fin 2017. En outre, eu égard à ce qui a été dit au point 14, dès lors que le préfet établit que M. D... pourra bénéficier d'un traitement approprié en Géorgie, les risques de décès du père des enfants ne sont pas établis. Par suite et alors que les décisions en litige n'ont, ni pour objet, ni pour effet, de séparer les enfants de leurs parents, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ne peut qu'être écarté.
19. En sixième lieu, l'article 7 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, aux termes duquel : " l'enfant est enregistré aussitôt sa naissance et a droit à un nom, le droit d'acquérir une nationalité et dans la mesure du possible le droit de connaître ses parents et être élevés par eux " crée seulement des obligations entre Etats et n'ouvre pas de droits à leurs ressortissants. Il s'ensuit que les requérants ne peuvent utilement s'en prévaloir.
20. En septième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article
L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article
L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 ".
21. Les circonstances que M. et Mme D... sont présents en France depuis quatre années pour M. D... et moins de deux ans pour Mme D... à la date des décisions attaquées, que leurs enfants y sont scolarisés et que Mme D... souhaite travailler ne suffisent pas à démontrer que leur admission au séjour répondrait à des considérations humanitaires ou se justifierait au regard de motifs exceptionnels. Eu égard à ce qui a été dit au point 14, l'état de santé de M. D... ne constitue pas non plus des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels. Dans ces conditions, ils ne sont pas fondés à soutenir que le préfet du Doubs aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant de les admettre au séjour sur le fondement des dispositions de l'article
L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
22. En dernier lieu, aux termes de l'article
R. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :: " Le préfet (...) saisit pour avis la commission lorsqu'il envisage de refuser de délivrer ou de renouveler l'un des titres mentionnés aux articles
L. 313-11, L. 314-11 et L. 314-12 à l'étranger qui remplit effectivement les conditions qui président à leur délivrance. / La commission est également saisie dans les cas prévus aux articles
L. 313-14 et L. 431-3. (...) ".
23. Il résulte de ce qui précède que M. D..., qui ne remplit pas les conditions posées par les articles
L. 313-11 et
L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne peut se prévaloir de l'absence de saisine de la commission du titre de séjour. Dans ces conditions, le préfet du Doubs, en ne soumettant pas à la commission du titre de séjour, pour avis, la demande de l'intéressé, n'a pas entaché son arrêté d'un vice de procédure.
Sur la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français :
24. En premier lieu, compte tenu de ce qui vient d'être dit, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que les décisions en litige doivent être annulées par voie de conséquence de l'annulation des décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour.
25. En deuxième lieu, eu égard aux circonstances analysées aux points14, 16, 18 et 19, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences des décisions en litige sur la situation personnelle des requérants. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas méconnu les stipulations du premier paragraphe de l'article 3 et de l'article 7 de la convention internationale des droits de l'enfant, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que les dispositions du 7° de l'article
L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
26. En troisième lieu, aux termes de l'article
L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ".
27. Eu égard à ce qui a été dit au point 14, le moyen tiré de ce que la décision concernant M. D... portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions précitées du 10° de l'article
L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En outre, M. et Mme D... se bornent à soutenir que les décisions contestées sont entachées d'une erreur d'appréciation dans la mesure où l'état de santé de l'intéressé ne lui permet pas de voyager sans risque à destination de son pays d'origine. Ils n'établissent pas la réalité de leurs allégations alors même que M. D... a été en capacité de venir seul en France.
28. En quatrième lieu, aux termes de l'article
L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. (...) Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. (...) ".
29. Les requérants n'apportent aucun élément de nature à établir que l'état de santé de M. D... aurait justifié qu'ils se voient octroyer un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. Ils n'établissent pas non plus que le jeune âge de leur fils ferait obstacle à un délai de départ volontaire de trente jours. Par suite, les intéressés ne sont pas fondés à soutenir que les décisions par lesquelles le préfet ne leur a accordé qu'un délai de départ volontaire de trente jours sont entachées d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation.
Sur la légalité des décisions portant fixation du pays de destination :
30. Compte tenu de ce qui a été dit précédemment, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que les décisions en litige doivent être annulées par voie de conséquence des décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français.
31. Il résulte de tout ce qui précède, que M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : Les requêtes de M. D... et Mme D... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D... et à Mme C... D... et au ministre de l'intérieur.
Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet du Doubs.
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N° 19NC00087, 19NC00088