LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatre février mil neuf cent quatre vingt onze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire BAYET, les observations de la société civile professionnelle Michel et Christophe NICOLAY et de LANOUVELLE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général RABUT ; Statuant sur le pourvoi formé par :
RICHARD X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de RIOM, chambre correctionnelle, en date du 7 février 1990 qui l'a condamné du chef de revente de produits à perte à une amende de 20 000 francs ; Vu le mémoire produit ; Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1er de la loi du 2 juillet 1963 d modifiée, 31 et 33 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, et
593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale,
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jérôme A..., directeur du magasin Cora de Y..., coupable du délit de revente de marchandises à perte, et l'a condamné à une amende 20 000 francs,
"aux motifs que la rétrocession d'une somme d'argent au titre d'un budget publicitaire destiné à financer la campagne de vente promotionnelle d'un distributeur ne saurait être assimilée à une remise, ristourne ou rabais au sens de l'article 31 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 nécessairement portés sur les factures ou conditions de vente, mais constitue au sens de l'article 33 du même texte un contrat de coopération commerciale destiné à rémunérer un service spécifique ; qu'en conséquence le prévenu doit rapporter la preuve écrite des accords de coopération commerciale, définissant avec précision leur étendue quant au nombre des articles concernés et la durée de l'opération commerciale considérée ; "alors que l'obligation d'un écrit imposée par l'article 33 alinéa 3 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ne concerne que les conditions dans lesquelles un distributeur se fait rémunérer par ses fournisseurs en contrepartie de services spécifiques ; qu'en statuant ainsi par un motif abstrait et général - reposant au surplus sur la notion de "contrat de coopération commerciale" au sens d'un texte qui n'emploie pas cette expression, au lieu de rechercher concrètement pour chacun des trois produits litigieux (Peaudouce, Skip, Regal) quelles prestations particulières ne relevant pas d'actes d'achat ou de vente, et constituant donc des "services spécifiques" au sens de ce texte auraient été accomplies en espèce par le distributeur, prévenu, au profit de chacun des trois fournisseurs de ces produits, la Cour a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 33 alinéa 3 précité" ; Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme partiellement que Jérôme A..., responsable d'un "hypermarché" a été poursuivi pour avoir revendu en l'état des produits à un prix inférieur à leur prix d'achat effectif, faits prévus et réprimés par l'article 1er I de la loi de finances rectificative du 2 juillet 1963 modifié par l'article 32 de
l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; d
Attendu que pour déclarer le prévenu coupable de cette infraction et répondre aux conclusions en défense soutenant que les prix pratiqués devaient être appréciés après imputation de différentes ristournes normales ou consenties à titre exceptionnel de promotion, la cour d'appel énonce que, pour renverser la présomption édictée par l'article 32 de l'ordonnance précitée, le prévenu doit rapporter la preuve de l'existence de ristournes, rabais et remises hors facture d'achat, certaines en leur principe et chiffrables en leur montant ; Que les juges retiennent que la rétrocession de sommes d'argent, alléguée en l'espèce, à l'occasion d'une campagne de vente promotionnelle résulte d'un accord de coopération commerciale ; qu'à cet égard, relèvent les juges, le prévenu ne produit aucun accord écrit, mais des factures dites de participation du fournisseur au budget publicitaire du distributeur, documents laissant subsister une équivoque sur leur finalité réelle et ne précisant pas clairement les services rendus et la volonté formelle du fournisseur de voir les sommes rétrocédées utilisées à diminuer le prix d'achat effectif des produits livrés ; qu'ainsi, selon les juges, cette rétrocession ne saurait être assimilée à une remise, ristourne ou rabais, au sens de l'article 31 de ladite ordonnance ; que les juges concluent que pour trois des produits en cause, le prix de revente pratiqué était inférieur au prix d'achat effectif tel que visé à l'article 32 précité ; Attendu qu'en l'état de ces constatations et énonciations, exemptes d'insuffisance et propres à l'espèce soumise à son examen, la cour d'appel, qui a souverainement apprécié les faits et circonstances de la cause soumis aux débats contradictoires, a fait l'exacte application des textes visés au moyen lequel ne peut dès lors qu'être écarté ; Sur le mémoire proposant un moyen additionnel ; Attendu que ce mémoire a été produit après l'expiration du délai imparti et postérieurement au dépôt du rapport par le conseiller commis ; qu'il y a lieu, conformément aux dispositions de l'article
590 alinéa 3 du Code de procédure pénale, de le déclarer irrecevable ; Et attendu que l'arrêt est régulier en la d forme ; REJETTE le pourvoi ; Condamne le demandeur aux dépens ; Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ; Où étaient présents :
M. Tacchella conseiller le plus ancien faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Bayet conseiller rapporteur, MM. Souppe, Gondre, Hébrard, Hecquard, Culié conseillers de la chambre, M. de Z... de Massiac conseiller référendaire, M. Rabut avocat général, Mme Mazard greffier de chambre ; En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;