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Conseil d'État, Chambres réunies, 12 octobre 2018, 414383

Chronologie de l'affaire

Conseil d'État
12 octobre 2018
Cour administrative d'appel de Versailles
20 juillet 2017
Tribunal administratif de Montreuil
2 mai 2016

Synthèse

  • Juridiction : Conseil d'État
  • Numéro d'affaire :
    414383
  • Type de recours : Plein contentieux
  • Publication : Inédit au recueil Lebon
  • Nature : Texte
  • Décision précédente :Tribunal administratif de Montreuil, 2 mai 2016
  • Identifiant européen :
    ECLI:FR:CECHR:2018:414383.20181012
  • Identifiant Légifrance :CETATEXT000037545351
  • Rapporteur : M. Olivier Gariazzo
  • Rapporteur public :
    M. Benoît Bohnert
  • Avocat(s) : CABINET BRIARD
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Résumé

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Texte intégral

Vu la procédure suivante

: M. et Mme B... A...ont demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1505076 du 2 mai 2016, ce tribunal a rejeté cette demande. Par un arrêt n° 16VE02004 du 20 juillet 2017, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par M. et Mme A... contre ce jugement. Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 18 septembre et 18 décembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, M. et Mme A... demandent au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention entre la France et la Suisse du 9 septembre 1966 modifiée, en vue d'éliminer les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune et de prévenir la fraude et l'évasion fiscales ; - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Olivier Gariazzo, maître des requêtes, - les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public. La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, au Cabinet Briard, avocat de M. et MmeA.ou établie hors de France Vu la note en délibéré, enregistrée le 8 octobre 2018, présentée par M. et Mme A.ou établie hors de France

Considérant ce qui suit

: 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité, l'administration fiscale a estimé que les sommes facturées au cours des années 2010 et 2011 à la SAS Serdiplast, sise à Oyonnax, dont M. B... A...était le dirigeant et l'associé majoritaire, par la société suisse Serdi International SA, présidente de la SAS dont elle assumait également la direction générale tout en l'ayant pour unique cliente, à raison de prestations rendues par M. A... en tant que salarié de la société suisse, étaient imposables au nom de M. et MmeA..., dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, en application des dispositions combinées du II de l'article 155 A et de l'article 34 du code général des impôts, ainsi que des stipulations de l'article 5 de la convention fiscale conclue entre la France et la Suisse le 9 septembre 1966. Les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu en résultant ont été assorties de la majoration de 80 % pour activité occulte prévue à l'article 1728 du code général des impôts. M. et Mme A... se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 20 juillet 2017 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel qu'ils avaient formé contre le jugement du 2 mai 2016 du tribunal administratif de Montreuil rejetant leur demande de décharge de ces cotisations supplémentaires et des pénalités correspondantes. 2. Aux termes de l'article 155 A du code général des impôts : " I. Les sommes perçues par une personne domiciliée ou établie hors de Franceen rémunération de services rendus par une ou plusieurs personnes domiciliées ou établies en France sont imposables au nom de ces dernières : / - soit, lorsque celles-ci contrôlent directement ou indirectement la personne qui perçoit la rémunération des services ; / - soit, lorsqu'elles n'établissent pas que cette personne exerce, de manière prépondérante, une activité industrielle ou commerciale, autre que la prestation de services ; / - soit, en tout état de cause, lorsque la personne qui perçoit la rémunération des services est domiciliée ou établie hors de Franceoù elle est soumise à un régime fiscal privilégié au sens mentionné à l'article 238 A. / II. Les règles prévues au I ci-dessus sont également applicables aux personnes domiciliées hors de France pour les services rendus en France (...) ". Les prestations dont la rémunération est ainsi susceptible d'être imposée entre les mains de la personne qui les a effectuées correspondent à un service rendu pour l'essentiel par elle et pour lequel la facturation par une autre personne domiciliée ou établie hors de Francene trouve aucune contrepartie réelle dans une intervention propre de cette dernière permettant de regarder ce service comme ayant été rendu pour son compte. 3. Lorsque l'administration apporte, dans l'hypothèse où le contribuable est domicilié ou établie hors de Franceet relève, à ce titre, des dispositions du II de l'article précité, des éléments suffisants permettant de penser que la prestation a été rendue, c'est-à-dire réalisée, en tout ou partie en France, il appartient au contribuable d'apporter, le cas échéant, toutes justifications utiles sur le lieu d'exercice de ses activités professionnelles. 4. En premier lieu, pour juger que l'administration avait fait une exacte application des dispositions précitées de l'article 155 A du code général des impôts en taxant au nom de M. et Mme A... les honoraires perçus par la société suisse Serdi International SA au titre des prestations d'assistance technique et commerciale litigieuses fournies à la SAS Serdiplast, la cour a relevé que les prestations en cause étaient réalisées par M. A... et ne pouvaient être regardées comme des services rendus pour le compte de la société suisse, puis a déterminé le lieu de réalisation de ces prestations, tout d'abord, en s'appuyant sur la présence, au demeurant non contestée, de M. A... deux jours par semaine au siège de la SAS Serdiplast à Oyonnax, ensuite, en estimant insuffisamment probantes les justifications apportées par le contribuable sur l'exercice partiel de ses activités depuis la Suisse, enfin, en faisant valoir que les prestations fournies en contrepartie des rémunérations litigieuses " ne recouvraient ni plus ni moins que les fonctions technico-commerciales que l'intéressé avait précédemment assumées au sein de la société Serdiplast jusqu'en avril 2007 et pour lesquelles il avait perçu des salaires imposables en France ". Elle en a déduit que ces prestations ne pouvaient être regardées que comme rendues en France. Elle a précisé que la présence de M. A... en France deux jours par semaine ne pouvait, compte tenu de l'absence d'éléments objectifs en ce sens, signifier qu'une partie des prestations faisant l'objet des impositions en litige était réalisée depuis la Suisse pendant le reste de la semaine. En statuant ainsi, la cour, qui a souverainement apprécié, sans les dénaturer, les faits et les pièces du dossier, n'a pas commis d'erreur de droit au regard de l'article 155 A précité du code général des impôts, contrairement à ce que soutiennent les requérants. Est sans incidence à cet égard la circonstance, relevée par ces derniers, que la cour aurait fait une lecture erronée d'un passage de la réponse apportée par l'administration aux observations des contribuables au cours de la procédure d'établissement des impositions litigieuses, dès lors qu'elle ne s'est pas fondée sur cette analyse pour déterminer le lieu de réalisation des prestations en litige. 5. En deuxième lieu, aux termes du 1 de l'article 5 de la convention entre la France et la Suisse en vue d'éliminer les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune et de prévenir la fraude et l'évasion fiscales : " Au sens de la présente Convention, l'expression " établissement stable " désigne une installation fixe d'affaires où l'entreprise exerce tout ou partie de son activité ". Aux termes du 1 de l'article 7 de la même convention : " Les bénéfices d'une entreprise d'un État contractant ne sont imposables que dans cet État, à moins que l'entreprise n'exerce son activité dans l'autre État contractant par l'intermédiaire d'un établissement stable qui y est situé. Si l'entreprise exerce son activité d'une telle façon, les bénéfices de l'entreprise sont imposables dans l'autre État, mais uniquement dans la mesure où ils sont imputables audit établissement stable ". 6. C'est sans dénaturer les faits et sans méconnaître les stipulations conventionnelles citées au point 5 ci-dessus que la cour, se référant à son analyse sur le lieu d'exercice des activités professionnelles ayant pour contrepartie la rémunération litigieuse, a ajouté qu'au sens et pour l'application de ces stipulations, cette activité s'exerçait à partir d'une installation fixe d'affaires caractérisant un établissement stable. 7. En troisième et dernier lieu, dans sa décision n° 2010-70 QPC du 26 novembre 2010, le Conseil constitutionnel a jugé que l'article 155 A précité du code général des impôts ne créait pas de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques, sous la réserve suivante : " dans le cas où la personne domiciliée ou établie hors de Franceau contribuable tout ou partie des sommes rémunérant les prestations réalisées par ce dernier, la disposition contestée ne saurait conduire à ce que ce contribuable soit assujetti à une double imposition au titre d'un même impôt ". 8. La cour n'a, contrairement à ce que soutiennent les requérants, pas commis d'erreur de droit en jugeant que cette réserve d'interprétation ne pouvait, en tout état de cause, concerner que les impositions françaises. Ils ne sauraient utilement se prévaloir à cet égard de ce que la portée de cette réserve aurait été remise en cause par un commentaire d'une décision ultérieure du Conseil constitutionnel portant sur d'autres dispositions du code général des impôts. C'est par suite à bon droit que la cour a regardé comme inopérante l'argumentation des époux A...tirée de l'imposition en Suisse des rémunérations litigieuses. 9. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de M. et Mme A... doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

-------------- Article 1er : Le pourvoi de M. et Mme A... est rejeté. Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme B...A...et au ministre de l'action et des comptes publics.

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