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Tribunal administratif de Marseille, 9ème Chambre, 17 mars 2023, 2009560

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal administratif de Marseille
  • Numéro d'affaire :
    2009560
  • Type de recours : Excès de pouvoir
  • Dispositif : Rejet
  • Rapporteur : M. Garron
  • Nature : Décision
  • Décision précédente :Tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence, 16 mars 2018
  • Avocat(s) : GIRAUD-GAY ET ASSOCIES
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Chronologie de l'affaire

Tribunal administratif de Marseille
17 mars 2023
Chambre correctionnelle de la cour d'appel d'Aix-en-Provence
5 juillet 2021
Tribunal administratif de Marseille
15 mars 2021
Tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence
12 décembre 2019
Chambre correctionnelle du TGI d'Aix-en-Provence
12 décembre 2019
Préfète de police des Bouches-du-Rhône
12 septembre 2018
Préfète de police des Bouches-du-Rhône
5 juin 2018
Tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence
16 mars 2018

Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Par une requête et un mémoire, enregistrés les 8 décembre 2020 et 4 juillet 2022, M. A C, représenté par Me Gay, demande au tribunal : 1°) d'annuler la décision implicite de rejet de sa demande du 26 août 2020 tendant à ce que la préfète de police des Bouches-du-Rhône procède à l'effacement de son inscription du fichier national des interdits d'acquisition et de détention d'armes (FINIADA) ; 2°) d'enjoindre à la préfète de police des Bouches-du-Rhône de procéder à l'effacement de son inscription du FINIADA sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens. Il soutient que : - la décision attaquée est dépourvue de base légale en l'absence de mentions dans le bulletin n° 2 de son casier judiciaire ; - elle est entachée d'une interprétation erronée des faits de l'espèce ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Par un mémoire en défense, enregistré le 24 février 2022, et un mémoire, enregistré le 15 septembre 2022 et non communiqué en application du dernier alinéa de l'article R. 611-1 du code de justice administrative, la préfète de police des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête. Elle fait valoir que les moyens soulevés par M. C ne sont pas fondés. Par ordonnance du 1er août 2022, la clôture d'instruction est intervenue à la même date en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code pénal ; - le code de la sécurité intérieure ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme B, - les conclusions de M. Garron, rapporteur public, - et les observations de Me Gay, représentant M. C.

Considérant ce qui suit

: 1. Par une ordonnance d'homologation du 16 mars 2018, le président du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence (TGI) a condamné M. C à 500 euros d'amende pour violences volontaires avec usage d'une arme ayant entraîné une incapacité de travail inférieure à huit jours pour des faits relatifs à une altercation qui s'est déroulée le 17 juin 2017 entre lui-même et un individu s'étant introduit en état d'ébriété dans sa propriété. Cette condamnation a été portée au bulletin n° 2 de son casier judiciaire. Par une décision du 5 juin 2018, la préfète de police des Bouches-du-Rhône a ordonné au requérant de se dessaisir de ses armes et l'a informé de son inscription au FINIADA. Le recours hiérarchique de M. C a été rejeté par une décision du 12 septembre 2018. Par un jugement n° 1809170 du 15 mars 2021 devenu irrévocable, le tribunal administratif de Marseille a rejeté les conclusions à fin d'annulation de deux décisions du 5 juin et 12 septembre 2018. Par un jugement du 12 décembre 2019, la chambre correctionnelle du TGI d'Aix-en-Provence a décidé, sur demande du requérant, qu'il ne serait plus fait mention de la condamnation prononcée le 16 mars 2018 de ce dernier au bulletin n° 2 de son casier judiciaire. Par une lettre du 26 août 2020, reçue le 28, M. C a demandé l'effacement de son inscription au FINIADA à la préfète de police des Bouches-du-Rhône. Cette demande a été implicitement rejetée. Le requérant demande au tribunal d'annuler cette décision et d'enjoindre à la préfète de police de procéder à l'effacement sollicité. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 312-3 du code de la sécurité intérieure, dans sa rédaction applicable au litige : " Sont interdites d'acquisition et de détention d'armes des catégories B et C et d'armes de catégorie D soumises à enregistrement : / 1° Les personnes dont le bulletin n° 2 du casier judiciaire comporte une mention de condamnation pour l'une des infractions suivantes : / () / -violences volontaires prévues aux articles 222-7 et suivants [du code pénal] ; () ". Aux termes de l'article 222-13 du code pénal, dans sa rédaction applicable au litige : " Les violences ayant entraîné une incapacité de travail inférieure ou égale à huit jours ou n'ayant entraîné aucune incapacité de travail sont punies de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende lorsqu'elles sont commises : / () / 10° Avec usage ou menace d'une arme () ". D'autre part, aux termes de l'article L. 312-16 du code de la sécurité intérieure, dans sa rédaction applicable au litige : " Un fichier national automatisé nominatif recense : / () / 2° Les personnes interdites d'acquisition et de détention d'armes des catégories B et C et des armes de catégorie D soumises à enregistrement en application de l'article L. 312-3 () ". Aux termes de l'article L. 312-13 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Il est interdit aux personnes ayant fait l'objet de la procédure prévue à la présente sous-section d'acquérir ou de détenir des armes des catégories B, C et D. / () / Cette interdiction est levée par le représentant de l'Etat dans le département s'il apparaît que l'acquisition ou la détention d'armes par la personne concernée n'est plus de nature à porter atteinte à l'ordre public ou à la sécurité des personnes ". 3. Il ressort de la combinaison de ces dispositions que sont interdites d'acquisition et de détention d'armes des catégories B et C et d'armes de catégorie D soumises à enregistrement et inscrites de ce fait au FINIADA, les personnes dont le bulletin n° 2 du casier judiciaire comporte une mention notamment de condamnation pour violences volontaires avec usage ou menace d'une arme ayant entraîné une incapacité de travail inférieure ou égale à huit jours ou n'ayant entraîné aucune incapacité de travail. Cette interdiction est levée par le représentant de l'Etat dans le département s'il apparaît que l'acquisition ou la détention d'armes par la personne concernée n'est plus de nature à porter atteinte à l'ordre public ou à la sécurité des personnes. En revanche, l'effacement de l'inscription des condamnations de l'intéressé du bulletin n° 2 de son casier judiciaire n'a ni pour objet ni pour effet de permettre l'effacement de son inscription au FINIADA dès lors que celui-ci ne constitue pas le corollaire du premier. 4. Si M. C soutient que la décision attaquée est dépourvue de base légale au motif que le jugement du 12 décembre 2019 mentionné au point 1 a exclu du bulletin n° 2 de son casier judiciaire, sur sa demande, la mention de la condamnation prononcée à son encontre par le jugement du 16 mars 2018, il résulte de ce qu'il vient d'être dit au point précédent que cette circonstance est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée, laquelle est exclusivement fondée sur le refus de la préfète de police de lever l'interdiction d'acquisition et de détention d'armes des catégories B et C et d'armes de catégorie D soumises à enregistrement prise à l'encontre du requérant en application de l'article L. 312-13 du code de la sécurité intérieure. Dès lors, le moyen tiré de l'existence d'une erreur de droit tenant à l'absence de base légale de la décision attaquée doit être écarté. 5. En second lieu, aucune disposition législative ou réglementaire ne fixant la durée de l'inscription au FINIADA, il appartient au représentant de l'Etat dans le département de procéder à la suppression de cette inscription lorsque, saisi d'une demande en ce sens, il considère que l'acquisition ou la détention d'armes par la personne concernée n'est plus de nature à porter atteinte à l'ordre public ou à la sécurité des personnes. Par ailleurs, les faits constatés par le juge pénal et qui commandent nécessairement le dispositif d'un jugement ayant acquis force de chose jugée s'imposent à l'administration comme au juge administratif. Enfin, la légalité d'une décision doit être appréciée à la date à laquelle elle a été prise, en tenant compte, le cas échéant, d'éléments objectifs postérieurs. 6. Il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'ordonnance du 16 mars 2018 homologuée par le président du TGI d'Aix-en-Provence, devenue irrévocable, que M. C a été reconnu coupable d'avoir commis le 17 juin 2017 des violences volontaires avec arme ayant entraîné une incapacité totale de travail n'excédant pas huit jours. Par suite, la matérialité de ces faits doit être regardée comme établie. Si le requérant soutient qu'il a été ce jour-là victime d'une agression par un intrus ayant pénétré sur sa propriété et se trouvant en état d'ivresse manifeste et qu'il a été dans l'obligation d'utiliser la crosse de son arme et ses poings pour se défendre, cette circonstance n'est pas de nature à remettre en cause la matérialité des faits constatés par le juge judiciaire. De plus, si M. C soutient qu'il s'est dessaisi de l'ensemble des armes mentionnées dans la décision du 5 juin 2018, il ne l'établit pas par la seule production d'une lettre de son conseil datée le 8 octobre 2018. En outre, il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'extrait produit par la préfète de police du fichier AGRIPPA qui a pour finalité l'enregistrement et le suivi des autorisations et des récépissés de déclarations et d'enregistrements délivrés par l'autorité administrative relatifs au régime des matériels de guerre, armes et de leurs éléments ainsi que des munitions des catégories A et B et des armes et éléments d'arme de la catégorie C et du 1° de la catégorie D, que M. C ne s'était toujours pas dessaisi à la date de la décision attaquée de deux carabines et d'un réducteur de son. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier, notamment du traitement des antécédents judiciaires (TAJ), que le 20 juin 2017, les services de gendarmerie ont effectué au domicile de M. C, se présentant comme collectionneur depuis de nombreuses années, une perquisition et ont placé sous scellés à cette occasion 113 armes, munitions et éléments d'armes. Par un jugement correctionnel du 11 décembre 2018, le requérant a été condamné à 18 mois d'emprisonnement avec sursis pour détention d'une arme de catégorie A illégale, d'armes et d'éléments essentiels d'armes de catégorie B sans autorisation, d'armes de catégorie C non déclarées et d'armes de catégorie D1 non enregistrées, jugement confirmé sur ce point par un arrêt du 5 juillet 2021, devenu irrévocable, de la chambre correctionnelle de la cour d'appel d'Aix-en-Provence. 7. Compte tenu de la gravité des faits commis par M. C et de leur caractère récent ainsi que du non-respect par celui-ci de la législation sur les armes en général et de l'injonction préfectorale du 5 juin 2018 en particulier, et malgré l'absence d'inscription des condamnations du 11 décembre 2018 et du 5 juillet 2021 au bulletin n° 2 de son casier judiciaire et de prononcé de peine complémentaire d'interdiction de détention et de ports d'armes par le juge pénal, c'est sans erreur d'appréciation que la préfète de police des Bouches-du-Rhône a considéré à la date de la décision attaquée que l'acquisition ou la détention d'armes par le requérant était toujours de nature à porter atteinte à l'ordre public ou à la sécurité des personnes et a décidé, par suite, de ne pas lever l'interdiction prononcée à son encontre et de ne pas procéder, dès lors, à l'effacement de son inscription du FINIADA. 8. Il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation de la décision implicite de rejet de la demande du 26 août 2020 adressée par M. C à la préfète de police des Bouches-du-Rhône tendant à l'effacement de son inscription du FINIADA doivent être rejetées. Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte : 9. Le présent jugement n'impliquant aucune mesure d'exécution, les conclusions présentées aux fins d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées. Sur les frais liés au litige : 10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. C demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. 11. La présente instance n'ayant occasionné aucun des frais prévus par les dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, les conclusions présentées par le requérant quant aux dépens doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C est rejetée. Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. A C et au préfet des Bouches-du-Rhône. Copie en sera adressée à la préfète de police des Bouches-du-Rhône. Délibéré après l'audience du 7 février 2023, à laquelle siégeaient : Mme Jorda-Lecroq, présidente, Mme Gaspard-Truc, première conseillère, Mme Balussou, première conseillère, Assistées par Mme Faure, greffière. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 mars 2023. La rapporteure, Signé E.-M. B La présidente, Signé K. Jorda-LecroqLa greffière, Signé N. Faure La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, Pour la greffière en chef, La greffière.