Cour de cassation, Deuxième chambre civile, 20 juin 2019, 18-13.992

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2019-06-20
Cour d'appel d'Aix-en-Provence
2018-01-26

Texte intégral

CIV. 2 CH.B COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 20 juin 2019 Cassation Mme FLISE, président Arrêt n° 860 F-D Pourvoi n° F 18-13.992 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

Statuant sur le pourvoi formé par

M. T... O..., domicilié [...] , contre l'arrêt rendu le 26 janvier 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (14e chambre), dans le litige l'opposant : 1°/ à la société GRDF, société anonyme, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société GDF, 2°/ à la Caisse nationale des industries électriques et gazières (CNIEG), dont le siège est [...] , 3°/ à la société ENEDIS, société anonyme, dont le siège est [...] , anciennement ERDF, 4°/ au ministre chargé de la sécurité sociale, domicilié [...] , [...], défendeurs à la cassation ; Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 22 mai 2019, où étaient présents : Mme Flise, président, Mme Coutou, conseiller rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, Mme Szirek, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme Coutou, conseiller, les observations de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de M. O..., de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat des sociétés GRDF et ENEDIS, l'avis de M. de Monteynard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen

unique, pris en sa première branche :

Vu

l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale et les articles 1315, devenu 1353 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué

, que M. O..., employé de la société EDF(devenue ENEDIS) et GDF, en qualité de technicien d'intervention clientèle, a été victime le 20 octobre 2004 d'un accident pris en charge au titre de la législation professionnelle ; qu'il a saisi le 28 janvier 2008 une juridiction de sécurité sociale d'une action en faute inexcusable de l'employeur ;

Attendu que pour déclarer son action irrecevable, comme prescrite, l'arrêt énonce

que M. O... ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, qu'il a agi dans le délai de deux ans ;

Qu'en statuant ainsi

, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS

, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 janvier 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ; Condamne les sociétés ENEDIS et GRDF aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande des sociétés ENEDIS et GRDF et les condamne à verser à M. O... la somme globale de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt juin deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE

au présent arrêt. Moyen produit par la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat aux Conseils, pour M. O.... Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré irrecevable l'action engagée par M. T... O... sur le fondement de la faute inexcusable de son employeur ; AUX MOTIFS QUE la cour rappelle que la prescription en matière de faute inexcusable est de deux ans, elle court : - soit de la cessation du travail (D. 461-5 du code de la sécurité sociale), - soit du jour de la clôture de l'enquête légale (L. 431-2 du code de la sécurité sociale), - soit du jour de la cessation du paiement des indemnités journalières (L. 431-2 du code de la sécurité sociale), - soit selon une jurisprudence constante du jour de la reconnaissance de l'origine professionnelle de l'accident ou de la maladie ; qu'en l'espèce, T... O... a été victime d'un accident du travail le 20 octobre 2004 ; que saisie d'une déclaration d'accident du travail, la CPAM a reconnu le caractère professionnel de l'accident ; que la nature professionnelle de l'accident n'a jamais été contestée et qui de ce fait n'a donné lieu à aucune enquête de l'organisme social ; que l'attribution ultérieure d'une rente par l'organisme social ne saurait donc constituer le point de départ de la prescription biennale dans la mesure où il ne s'agit pas de la reconnaissance de l'origine professionnelle de l'accident mais des conséquences d'une reconnaissance préalable et antérieure ; que dans la mesure où T... O... demande à ce qu'il soit reconnu qu'il a agi dans le délai de deux ans pour faire reconnaître la faute inexcusable, il lui appartient de justifier de la date du jour de la reconnaissance de l'origine professionnelle de l'accident ; qu'en conséquence, la cour constate que T... O... ne rapporte pas la preuve qui lui incombe qu'il a agi dans le délai de deux ans ; que le jugement déféré sera en conséquence infirmé en ce qu'il a reconnu recevable l'action de T... O... comme n'étant pas prescrite ; que la procédure devant les juridictions de la sécurité sociale est gratuite et sans frais conformément aux dispositions de l'article R. 144-6 du code de la sécurité sociale et qu'il n'y a donc pas lieu de statuer sur les dépens ; 1) ALORS QU'il appartient à celui qui invoque une fin de non-recevoir tirée de la prescription d'en rapporter la preuve ; qu'en considérant, au contraire, pour dire irrecevable l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de M. O..., qu'il lui appartenait de justifier du point de départ du délai de prescription de son action, la cour d'appel a violé l'article 1315 devenu 1353 du code civil, ensemble l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale ; 2) ALORS QUE les droits de la victime d'un accident du travail aux prestations et indemnités prévues par le livre IV du code du code de la sécurité sociale se prescrivent par deux ans à dater, soit du jour de l'accident, soit de la cessation du paiement de l'indemnité journalière, soit encore de la reconnaissance du caractère professionnel de l'accident ; qu'en déclarant irrecevable l'action de M. O... en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur sans fixer le point de départ du délai de prescription biennale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 431-2 et L. 452-4 du code de la sécurité sociale ; 3) ALORS QU'en déclarant irrecevable l'action de M. O... en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur, sans avoir au préalable fixé le point de départ du délai de prescription, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ; 4) ALORS QU'en toute hypothèse, le délai de prescription de l'action du salarié pour faute inexcusable de l'employeur ne peut commencer à courir qu'à compter de la notification d'une décision explicite de reconnaissance du caractère professionnel de l'accident ; qu'en considérant que la nature professionnelle de l'accident de M. O... n'ayant jamais été contestée et n'ayant donné ainsi lieu à aucune enquête de l'organisme social, l'attribution d'une rente ne pouvait constituer le point de départ de la prescription biennale dans la mesure où il ne s'agissait pas de la reconnaissance de l'origine professionnelle de l'accident mais des conséquences d'une reconnaissance préalable et antérieure, quand une telle reconnaissance ne pouvait faire courir le délai de prescription que si elle avait été notifiée à l'assuré, la cour d'appel a violé l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale ; 5) ALORS QU'en toute hypothèse, en considérant, en substance, que la reconnaissance du caractère professionnel de l'accident de M. O... lui avait nécessairement été notifiée avant la notification de sa rente, la cour d'appel a statué par des motifs hypothétiques et méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ; 6) ALORS QU'en toute hypothèse, la saisine de la Commission nationale des accidents du travail chargée, pour le personnel des industries électriques et gazières, d'émettre des avis en matière d'accidents du travail et particulièrement sur l'existence d'une faute inexcusable de l'employeur interrompt le délai de la prescription biennale ; qu'un nouveau délai court à compter de la notification du procès-verbal de l'avis de cette commission ; qu'en déclarant prescrite l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur de M. O... sans rechercher, comme l'y invitaient pourtant ses conclusions d'appel (page 6), si le procès-verbal de la commission nationale des accidents du travail ayant statué sur la faute inexcusable de l'employeur invoquée par M. O... ne datait pas seulement du 13 septembre 2007 de sorte que l'action introduite le 28 janvier 2008 devant le tribunal des affaires de sécurité sociale par l'assuré était nécessairement recevable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale, ensemble les articles 1 et 2 de l'arrêté du 30 juillet 1991 portant institution de la commission nationale chargée d'émettre des avis en matière d'accidents du travail et de maladies professionnelles survenus aux agents soumis au statut national du personnel des industries électriques et gazières.