Vu la procédure suivante
:
A une requête, enregistrée le 23 juillet 2019 au greffe du tribunal des pensions militaires d'invalidité et transférée au greffe du tribunal administratif de Pau, et un mémoire enregistré le 14 avril 2021, M. C F, représenté A Me Tandonnet, demande au tribunal, dans le dernier état de ses écritures :
1°) de fixer le taux d'invalidité à 15% pour l'infirmité nouvelle liée aux séquelles de traumatisme cervical sur antécédent de hernie discale C5-C6 et d'arthrose cervicale avec raideur cervicale, contracture des deux trapèzes et de paresthésies des deux membres supérieurs ;
2°) à titre subsidiaire, d'ordonner, avant dire droit, une expertise médicale aux fins de déterminer si l'infirmité dont il souffre est en lien direct, certain et déterminant avec l'accident de service survenu le 19 octobre 2015 et, dans l'affirmative, d'en fixer le taux d'invalidité ;
3°) de statuer ce que de droit sur les dépens.
A deux mémoires en défense, enregistrés les 20 mai 2020 et 19 avril 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête.
A un jugement n° 1902546 en date du 16 février 2022, le tribunal administratif de Pau a, avant-dire droit, ordonné une expertise médicale aux fins de fixation du taux d'invalidité concernant l'infirmité " séquelles de traumatisme cervical ".
A un mémoire en défense, enregistré le 18 mai 2022, la ministre des armées demande au tribunal d'attribuer une pension militaire d'invalidité à M. F pour l'infirmité litigieuse au taux de 10%.
Elle soutient qu'au regard de l'expertise diligentée A le docteur B, l'infirmité de M. F doit être évaluée à 20 % dont 10 % non imputable au service.
L'expert a déposé son rapport au greffe du tribunal administratif de Pau le 7 juin 2022.
A deux mémoires, enregistrés le 20 juin 2022 et le 29 septembre 2022, M. F, représenté A Me Tandonnet, demande au tribunal dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler la décision du 11 avril 2019 de la ministre des armées en tant qu'elle ne fait pas droit à sa demande de pension d'invalidité pour séquelles de traumatisme cervical sur antécédent de hernie discale C5-C6 et d'arthrose cervicale avec raideur cervicale, contracture des deux trapèzes et de paresthésies des deux membres supérieurs ;
2°) d'homologuer le rapport d'expertise ;
3°) de juger qu'il doit bénéficier d'une pension pour cette infirmité aux taux de 10% à compter de sa demande du 2 novembre 2016.
Il soutient que :
- au regard de l'expertise diligentée A le docteur B, son infirmité doit être évaluée à 10 % ;
- la commission consultative médicale saisie A la ministre des armées a émis le 5 mai 2022 un avis A lequel elle a adopté les conclusions de l'expert.
Vu :
- le jugement n°1902546 du 16 février 2022 du tribunal administratif de Pau ;
- le rapport d'expertise ;
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Quéméner, présidente-rapporteure,
- et les conclusions de Mme Michaud, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit
:
1. M. F, militaire occupant le grade de sergent dans l'armée de terre, s'est vu concéder, A un arrêté ministériel du 10 août 2015, une pension militaire d'invalidité au titre de trois infirmités liées à un état de stress post-traumatique, des séquelles de fractures de L1 à L4 lombro-cruralgie gauche et des séquelles de traumatisme maxillo-facial et dentaire au taux global de 70%. Il a sollicité le 2 novembre 2016, la révision de sa pension pour prendre en compte une infirmité nouvelle " séquelles traumatisme cervical ". A une décision du 11 avril 2019, la ministre des armées a rejeté sa demande. A sa requête, enregistrée le 23 juillet 2019 au greffe du tribunal des pensions militaires d'invalidité et transférée au greffe du tribunal administratif de Pau, M. F demandait au tribunal de fixer à 15 % le taux d'invalidité imputable à son infirmité " séquelles traumatisme cervical " et d'ordonner une expertise médicale. A un jugement du 16 février 2022, le tribunal administratif de Pau a ordonné, avant dire droit, qu'il soit procédé à une expertise médicale en vue de se prononcer sur cette infirmité. L'expert a déposé son rapport le 7 juin 2022. Dans le dernier état de ses écritures, M. F demande au tribunal, outre l'annulation de la décision du 11 avril 2019, que le tribunal fixe à 10 % son droit à pension au titre de cette infirmité à compter du 2 novembre 2016.
Sur l'infirmité " séquelles traumatisme cervical " :
2. Aux termes de l'article L. 6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre applicable en l'espèce : " La pension militaire d'invalidité prévue A le présent code est attribuée sur demande de l'intéressé après examen, à son initiative, A une commission de réforme selon des modalités fixées A décret en Conseil d'Etat. L'entrée en jouissance est fixée à la date du dépôt de la demande () ". Et aux termes de l'article L. 29 du même code, alors en vigueur : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. / Cette demande est recevable sans condition de délai. / La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le degré d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 % au moins du pourcentage antérieur. / Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. / La pension définitive révisée est concédée à titre définitif. " Il résulte de ces dispositions que l'administration doit se placer à la date de la demande de l'intéressé pour évaluer ses droits à révision de sa pension militaire d'invalidité pour apparition d'une infirmité nouvelle, et notamment le taux d'invalidité résultant de l'infirmité au titre de laquelle cette révision est sollicitée, à savoir le 2 novembre 2016.
3. Aux termes de l'article L. 4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, applicable en l'espèce : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. / Il est concédé une pension : 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; () / En cas d'aggravation A le fait ou à l'occasion du service d'une infirmité étrangère à celui-ci, cette aggravation seule est prise en considération, dans les conditions définies aux alinéas précédents. () ". Et aux termes de l'article L. 9 du même code : " () Le taux de la pension définitive ou temporaire est fixé, dans chaque grade, A référence au degré d'invalidité apprécié de 5 en 5 jusqu'à 100 %. / () Pour l'application du présent article, un décret (), détermine les règles et barèmes pour la classification des infirmités d'après leur gravité. ".
4. Enfin, lorsqu'il statue sur un recours dirigé contre une décision A laquelle l'administration détermine les droits d'une personne en matière de pension militaire d'invalidité, il appartient au juge administratif, eu égard tant à la finalité de son intervention qu'à sa qualité de juge de plein contentieux, non de se prononcer sur les éventuels vices propres de la décision attaquée, mais d'examiner les droits de l'intéressé, en tenant compte de l'ensemble des circonstances de fait qui résultent de l'instruction. Au vu de ces éléments, il lui appartient d'annuler ou de réformer, s'il y a lieu, cette décision, en fixant alors lui-même tout ou partie des droits de l'intéressé et en le renvoyant, au besoin, devant l'administration afin qu'elle procède à cette fixation pour le surplus, sur la base des motifs de son jugement.
5. M. F a été victime d'un traumatisme cervical au cours d'un accident de service le 19 octobre 2015. Il résulte du rapport de l'expertise confiée au docteur B A le tribunal administratif de Pau, déposé au greffe le 7 juin 2022, que l'infirmité de M. F doit être évaluée au taux d'invalidité de 20 %, dont 10 % non imputable au service. La ministre des armées, qui a saisi la commission consultative médicale laquelle a émis le 5 mai 2022 un avis A lequel elle a adopté les conclusions de l'expert, admet dans le dernier état de ses écritures en défense qu'il convient de retenir ce taux. Dans ces conditions, et ainsi que le demande M. F dans le dernier état de ses conclusions, il y a lieu en l'espèce d'annuler la décision du 11 avril 2019 et de fixer ses droits à pension au titre de l'infirmité séquelles de traumatisme cervical sur antécédent de hernie discale C5-C6 et d'arthrose cervicale avec raideur cervicale, contracture des deux trapèzes et de paresthésies des deux membres supérieurs, à 10 % à compter du 2 novembre 2016.
Sur les frais d'expertise :
6. Aux termes de l'article
R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'État. / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. / L'État peut être condamné aux dépens. ".
7. Il y a lieu de mettre à la charge définitive de l'Etat le montant des frais et honoraires d'expertise, liquidés et taxés à la somme 1 000 euros A une ordonnance du président du tribunal administratif du 7 juin 2022.
D E C I D E :
Article 1er : Les droits à pension militaire d'invalidité de l'intéressé au titre de l'infirmité " séquelles traumatisme cervical " sont ouverts au taux d'invalidité fixé à 10 %, à compter du 2 novembre 2016.
Article 2 : Les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 1 000 (mille) euros A l'ordonnance du président du tribunal en date du 7 juin 2022 sont mis à la charge de l'Etat.
Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. C F et au ministre des armées.
Délibéré après l'audience du 15 décembre 2022, à laquelle siégeaient :
Mme Quéméner, présidente,
Mme Duchesne conseillère,
M. Diard, conseiller,
Lu en audience publique, le 29 décembre 2022.
La présidente-rapporteure,
Signé : V. QUEMENERL'assesseur la plus ancienne,
Signé : M. G
La greffière,
Signé : M. D
La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent jugement.
Pour expédition,
La greffière,
N°1902546