AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Joël X..., demeurant ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 17 décembre 1993 par la cour d'appel de Versailles (chambres sociales réunies), au profit de l'Electricité de France (EDF), dont le siège est ...,
défenderesse à la cassation ;
LA COUR, composée selon l'article
L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 6 novembre 1996, où étaient présents : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Monboisse, conseiller rapporteur, M. Ferrieu, conseiller, MM. Richard de La Tour, Soury, conseillers référendaires, M. Lyon-Caen, avocat général, Mlle Barault, greffier de chambre;
Sur le rapport de M. Monboisse, conseiller, les observations de la SCP Lesourd et Baudin, avocat de M. X..., de la SCP Defrenois et Levis, avocat de l'Electricité de France (EDF), les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi;
Sur le moyen unique :
Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 17 décembre 1993), rendu sur renvoi de cassation, M. X... avait demandé que sa réintégration dans tous ses droits à EDF soit ordonnée à compter du 1er décembre 1972 et que sa retraite soit calculée comme si sa réintégration avait eu lieu à cette date; qu'invoquant que la cour d'appel, dans son arrêt du 9 décembre 1987 n'aurait pas statué sur ce dernier chef, il a demandé à la cour d'appel, en application de l'article
463 du nouveau Code de procédure civile, de réparer cette omission de statuer; que, par arrêt du 19 janvier 1989, la cour d'appel a dit n'y avoir lieu à compléter la décision du 9 décembre 1987; que cet arrêt a été cassé par l'arrêt de la Chambre sociale de la Cour de Cassation du 7 janvier 1992 qui a relevé que la demande relative à la fixation des droits à la retraite de M. X... constituait un chef distinct de ses conclusions, sur lequel il n'avait pas été statué; que, par l'arrêt attaqué, la cour d'appel a déclaré M. X... bien fondé dans sa requête en omission de statuer, et précisé qu'il devait être ajouté dans l'arrêt du 9 décembre 1987 que la cour d'appel déboutait M. X... de sa demande tendant à voir calculer sa retraite comme si sa réintégration avait eu lieu le 1er décembre 1972;
Attendu que M. X... fait grief à la cour d'appel d'avoir statué comme elle l'a fait, alors, selon le moyen, d'une part, que la cour d'appel ne pouvait pas, sans se contredire et violer l'article
455 du nouveau Code de procédure civile, reconnaître dans un premier temps que l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 9 décembre 1987 avait omis de statuer sur la demande de M. X... tendant à ce que sa retraite soit calculée comme si sa réintégration avait eu lieu le 1er décembre 1972 et affirmer, dans un second temps, que ce même arrêt (du 9 décembre 1987) avait indemnisé M. X... de l'intégralité de son préjudice et avait donc implicitement mais nécessairement rejeté cette même demande, de sorte qu'il suffisait de le préciser explicitement; alors, d'autre part, qu'ayant constaté que l'indemnité allouée par l'arrêt du 9 décembre 1987 n'avait pour objet que d'indemniser M. X... du préjudice par lui subi du fait de sa non-réintégration jusqu'au jour où cette décision avait été rendue, la cour d'appel ne pouvait, sans se contredire une nouvelle fois, en violation de l'article
455 du nouveau Code de procédure civile, affirmer qu'en accordant cette indemnité, l'arrêt du 9 décembre 1987 avait aussi nécessairement statué sur la demande distincte de réparation du préjudice futur résultant de la diminution du montant de la retraite due à M. X... par son employeur; alors qu'enfin, outre l'indemnisation du préjudice qu'il avait d'ores et déjà subi et que la cour d'appel de Versailles avait entendu indemniser par son arrêt du 9 décembre 1987 par l'octroi d'une indemnité de 300 000 francs, M. X... avait fait valoir qu'il subirait, du fait de son éviction illégale, un préjudice dans l'avenir, par diminution de sa pension après qu'il aurait atteint l'âge de la retraite; qu'en considérant que la somme de 300 000 francs allouée par l'arrêt susvisé constituait une indemnisation intégrale du dommage subi par M. X..., l'arrêt a violé l'article
1382 du Code civil, l'indemnisation du préjudice subi à la date de l'arrêt ne pouvant se confondre avec une demande tendant à l'indemnisation d'un préjudice futur mais certain dans son principe et évaluable dans son montant;
Mais attendu qu'ayant constaté que les motifs qui l'avaient amené à rejeter le paiement de l'intégralité des salaires depuis le 1er décembre 1972 et à allouer uniquement des dommages-intérêts recouvrant l'intégralité du préjudice, conduisaient à rejeter la demande de calcul de la retraite sur la base d'une réintégration à compter du 1er décembre 1972, la cour d'appel sans se contredire a justifié légalement sa décision; que le moyen n'est pas fondé;
PAR CES MOTIFS
:
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article
700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande d'Electricité de France (EDF);
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit décembre mil neuf cent quatre-vingt-seize.