Cour d'appel de Rennes, 2ème Chambre, 28 octobre 2022, 19/05019

Mots clés Prêt - Demande en remboursement du prêt · reconnaissance · preuve · procédure civile · remise · réparation · société · dette · prêt · préjudice · débats · document · restituer · rennes · aide juridictionnelle · préjudice moral

Synthèse

Juridiction : Cour d'appel de Rennes
Numéro affaire : 19/05019
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Président : Monsieur David JOBARD

Texte

2ème Chambre

ARRÊT N°542

N° RG 19/05019

N° Portalis DBVL-V-B7D-P7IT

Mme [I] [P]

C/

M. [X] [W]

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me GOSSELIN

- Me DEMIDOFF

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 28 OCTOBRE 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,

Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Ludivine MARTIN, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 09 Septembre 2022

devant Monsieur David JOBARD, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 28 Octobre 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

Madame [I] [P]

née le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 5] (35)

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Bénédicte GOSSELIN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/007236 du 19/03/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de RENNES)

INTIMÉ :

Monsieur [X] [W]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représenté par Me Eric DEMIDOFF de la SCP GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, postulant, avocat au barreau de RENNES

Représenté par Me Pierre-Hector RUSTIQUE, plaidant, avocat au barreau de BREST

EXPOSE DU LITIGE

Suivant acte d'huissier en date du 15 mai 2018, M. [X] [W] a assigné Mme [I] [P] en paiement devant le tribunal de grande instance de Brest.

Suivant jugement en date du 15 mai 2019, le tribunal a :

Condamné Mme [I] [P] à payer à M. [X] [W] la somme de 5 000 € outre les intérêts au taux légal à compter du 15 mai 2018.

Condamné Mme [I] [P] à payer à M. [X] [W] la somme de 500 € en réparation de son préjudice moral.

Condamné Mme [I] [P] à payer à M. [X] [W] la somme de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Débouté les parties de leurs autres demandes.

Condamné Mme [I] [P] aux dépens avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit des avocats en ayant fait la demande.

Ordonné l'exécution provisoire du jugement.

Suivant déclaration en date du 25 juillet 2019, Mme [I] [P] a interjeté appel.

Suivant conclusions en date du 24 janvier 2020, M. [X] [W] a interjeté appel incident.

En ses dernières conclusions en date du 29 mars 2021, Mme [I] [P] demande à la cour de :

Vu les articles 1153, 1348 et 1892 du code civil,

La recevoir en son appel et le dire bien-fondé.

Infirmer le jugement déféré et débouter M. [X] [W] de ses demandes, fins et conclusions.

Le condamner à lui payer la somme de 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le condamner aux dépens.

En ses dernières conclusions en date du 24 janvier 2020, M. [X] [W] demande à la cour de :

Vu les articles 1153 alinéa 4, 1147 ancien, 1326, 1347, 1371 et 1892 du code civil,

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Infirmer partiellement le jugement déféré.

Condamner Mme [I] [P] à lui payer la somme de 15 080 € au titre du remboursement des prêts de l'année 2013 outre les intérêts au taux légal à compter de l'assignation.

La condamner à lui payer la somme de 3 000 € en réparation de son préjudice moral.

La condamner à lui payer la somme de 4 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La condamner aux dépens lesquels seront recouvrés par la société Gauvin & Demidoff conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions des parties.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 juin 2022.


MOTIFS DE LA DÉCISION :


M. [X] [W] fait valoir qu'il a rencontré Mme [I] [P] au mois de mai 2013 et que celle-ci lui ayant fait part de ses difficultés financières, il a accepté de lui prêter de l'argent. Il explique qu'il lui a remis des chèques, des espèces ou réalisé des paiements à son profit pour un montant total de 15 080 €. Il précise qu'elle a rédigé une reconnaissance de dette pour un montant de 5 000 €. Il soutient que la reconnaissance de dette est conforme aux dispositions de l'article 1326 du code civil. Pour le surplus, il soutient qu'il s'est trouvé, compte tenu de l'emprise exercée sur lui, dans l'impossibilité d'exiger une reconnaissance de dette. Il considère que l'obligation de rembourser ne fait pas difficulté et il invoque subsidiairement l'enrichissement sans cause.

Mme [I] [P] conteste l'existence d'un prêt. Elle soutient que la production aux débats de différents chèques est insuffisante à démontrer la remise de fonds ou l'obligation de restituer. Elle conteste la validité du document produit à titre de reconnaissance de dette. Elle relève que celui-ci est raturé, qu'il n'est pas intégralement rédigé de sa main et qu'il ne précise pas l'identité du prêteur. Elle ajoute que le document ne mentionne aucune obligation de restituer et qu'il ne précise pas les conditions et modalités du prêt. Elle indique enfin qu'il n'est pas justifié de l'existence d'autant d'originaux que de parties.

En vertu de l'article 1315 devenu 1353 du code civil, il appartient au prêteur de prouver l'existence du prêt. Il doit apporter une double preuve, celle de la remise de la somme d'argent et celle de l'intention de prêter. La preuve de la remise de fonds ne suffit pas à justifier l'obligation de les restituer.

En l'espèce, la remise de la somme d'argent ne fait pas difficulté du moins pour une partie du montant allégué. M. [X] [W] produit aux débats la copie de chèques d'un montant total de 12 000 € tirés au profit de Mme [I] [P] et il justifie du débit des sommes correspondantes sur son compte bancaire. Il est suffisamment établi que Mme [I] [P] a reçu cette somme. La preuve d'autres paiements à son profit n'est pas rapportée.

M. [X] [W] produit aux débats une reconnaissance de dette en date du 20 juin 2013 libellée en ces termes : « Par la présente, j'atteste avoir emprunté la somme de cinq mille euros, 5 000 €, à M. [X] [W] demeurant [Adresse 4]. Pour valoir ce que de droit [I] [P] ». Mme [I] [P] ne conteste pas que la signature qui lui est attribuée dans le document ou la mention de la somme prêtée en toutes lettres et en chiffres soient de sa main. La mention raturée relative à un intérêt de 10 % est indifférente puisqu'il n'est formulé aucune demande à ce titre. Le document vaut reconnaissance de dette au sens de l'article 1326 devenu 1376 du code civil.

Le moyen tiré du fait que le document n'a pas été établi en autant d'exemplaires que de parties est sans portée dès lors que son existence ou les mentions qui y sont portées ne sont pas contestées. En outre s'agissant d'un engagement unilatéral, il n'était pas nécessaire d'établir plusieurs originaux.

Pour les sommes remises au-delà de 5 000 €, M. [X] [W] invoque l'impossibilité morale d'établir un écrit. Il fait état d'une emprise exercée sur lui mais n'en justifie pas. L'existence d'une reconnaissance de dette pour une partie de la créance alléguée contredit la thèse d'une emprise exercée par l'emprunteur sur le prêteur.

L'obligation de restituer au-delà de la somme de 5 000 € n'est pas démontrée.

M. [X] [W] n'est pas fondé à invoquer l'enrichissement sans cause dès lors que l'appauvri n'a d'action sur ce fondement que dans l'hypothèse où aucune autre action ne lui serait ouverte. M. [X] [W] a fondé son action à titre principal sur l'existence d'un prêt. Il ne peut être admis à pallier sa carence dans l'administration de la preuve d'un prêt supérieur à 5 000 € par l'exercice d'une action fondée à titre subsidiaire sur l'enrichissement sans cause.

Le premier juge doit être approuvé en ce qu'il a condamné Mme [I] [P] à payer à M. [X] [W] la somme de 5 000 € outre les intérêts au taux légal à compter de l'assignation introductive d'instance en date du 15 mai 2018.

Il doit également être approuvé en ce qu'il a alloué la somme de 500 € à M. [X] [W] en réparation du préjudice moral occasionné par les tracas divers liés à la procédure et à la tentative de conciliation qui l'a précédée.

Le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions.

Il n'est pas inéquitable de condamner Mme [I] [P] à payer à M. [X] [W] la somme de 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en cause d'appel.

Mme [I] [P] sera condamnée aux dépens de l'instance d'appel et il sera fait application de l'article 699 au profit de la société Gauvin & Demidoff.

PAR CES MOTIFS

:

La cour,

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Brest en date du 15 mai 2019 en toutes ses dispositions.

Y ajoutant,

Condamne Mme [I] [P] à payer à M. [X] [W] la somme de 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en cause d'appel.

Condamne Mme [I] [P] aux dépens de la procédure d'appel et dit qu'il sera fait application de l'article 699 au profit de la société Gauvin & Demidoff.

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT