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CEDH, Cour (Troisième Section), AFFAIRE GIUSEPPE QUATTRONE c. ITALIE, 1 février 2011, 67785/01

Synthèse

  • Juridiction : CEDH
  • Numéro de pourvoi :
    67785/01
  • Dispositif : Violation de P1-1
  • Importance : Faible
  • État défendeur : Italie
  • Nature : Arrêt
  • Identifiant européen :
    ECLI:CE:ECHR:2011:0201JUD006778501
  • Lien HUDOC :https://hudoc.echr.coe.int/fre?i=001-103127
  • Avocat(s) : PANUCCIO A.
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Résumé

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Texte intégral

TROISIÈME SECTION AFFAIRE QUATTRONE c. ITALIE (Requête no 67785/01) ARRÊT (Satisfaction équitable) STRASBOURG 1er février 2011 DÉFINITIF 01/05/2011 Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l'article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme. En l'affaire Quattrone c. Italie, La Cour européenne des droits de l'homme (troisième section), siégeant une chambre composée de : Josep Casadevall, président, Corneliu Bîrsan, Boštjan M. Zupančič, Alvina Gyulumyan, Egbert Myjer, Ineta Ziemele, Guido Raimondi, juges, et de Marialena Tsirli, greffière adjointe de section, Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 11 janvier 2011, Rend l'arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1. A l'origine de l'affaire se trouve une requête (no 67785/01) dirigée contre la République italienne et dont un ressortissant de cet État, M. Giuseppe Quattrone (« le requérant »), a saisi la Cour le 13 mars 2001 en vertu de l'article 34 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales (« la Convention »). Le requérant est décédé le 4 août 2005. Par une lettre du 29 mai 2007, Francesca Panella, Angelo Quattrone, Francesco Quattrone et Carmela Quattrone, ont informé le greffe de ce qu'ils avaient hérité du requérant et qu'ils souhaitaient se constituer dans la procédure devant la Cour. 2. Par un arrêt du 11 janvier 2007 (« l'arrêt au principal »), la Cour a jugé que l'ingérence litigieuse n'était pas compatible avec le principe de légalité et qu'elle avait donc enfreint le droit au respect des biens du requérant (Quattrone c. Italie, no 67785/01, § 56, 11 janvier 2007). 3. En s'appuyant sur l'article 41 de la Convention, le requérant réclamait une satisfaction équitable de 1 770 711,60 EUR au titre de préjudice matériel. Il réclamait, en outre, une somme à titre d'indemnité pour dommage moral et le remboursement des frais encourus devant la Cour. 4. La question de l'application de l'article 41 de la Convention ne se trouvant pas en état, la Cour l'a réservée et a invité le Gouvernement et le requérant à lui soumettre par écrit, dans les trois mois, leurs observations sur ladite question et notamment à lui donner connaissance de tout accord auquel ils pourraient aboutir (ibidem, § 81 et point 5 du dispositif). 5. Le délai fixé pour permettre aux parties de parvenir à un accord amiable était venu à échéance sans que les parties n'aboutissent à un tel accord. 6. Les parties n'ont pas présenté d'observations.

EN DROIT

7. Aux termes de l'article 41 de la Convention, « Si la Cour déclare qu'il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d'effacer qu'imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s'il y a lieu, une satisfaction équitable. » A. Dommage matériel 8. A titre de préjudice matériel, compte tenu de l'impossibilité d'obtenir la restitution du terrain, les héritiers du requérant sollicitent le versement d'une somme de 1 770 711,60 EUR. 9. Le Gouvernement conteste les modalités de calcul du dommage matériel employées dans les arrêts sur la satisfaction équitable Belvedere Alberghiera S.r.l. c. Italie (no 31524/96, 30 octobre 2003) et Carbonara et Ventura c. Italie (no 24638/94, 11 décembre 2003) et estime qu'en tout état de cause la somme réclamée par les héritiers du requérant est excessive. 10. La Cour rappelle qu'un arrêt constatant une violation entraîne pour l'Etat défendeur l'obligation de mettre un terme à la violation et d'en effacer les conséquences de manière à rétablir autant que faire se peut la situation antérieure à celle-ci (Iatridis c. Grèce (satisfaction équitable) [GC], no 31107/96, § 32, CEDH 2000-XI). 11. Elle rappelle que dans l'affaire Guiso-Gallisay c. Italie ((satisfaction équitable) [GC], no 58858/00, 22 décembre 2009), la Grande Chambre a révisé la jurisprudence de la Cour concernant les critères d'indemnisation dans les affaires d'expropriation indirecte. En particulier, celle-ci a décidé d'écarter les prétentions des requérants dans la mesure où elles sont fondées sur la valeur des terrains à la date de l'arrêt de la Cour et de ne plus tenir compte, pour évaluer le dommage matériel, du coût de construction des immeubles bâtis par l'Etat sur les terrains. 12. Suivant les critères fixés par la Grande Chambre, l'indemnisation doit correspondre à la valeur pleine et entière du terrain au moment de la perte de la propriété, telle qu'établie par l'expertise ordonnée par la juridiction compétente au cours de la procédure interne. Ensuite, une fois que l'on aura déduit la somme éventuellement octroyée au niveau national, ce montant doit être actualisé pour compenser les effets de l'inflation. Il convient aussi de l'assortir d'intérêts susceptibles de compenser, au moins en partie, le long laps de temps qui s'est écoulé depuis la dépossession des terrains. Ces intérêts doivent correspondre à l'intérêt légal simple appliqué au capital progressivement réévalué. 13. En l'espèce, le requérant a perdu la propriété de son terrain en 1983. Telle qu'il ressort de l'expertise ordonnée par les juridictions internes au cours de la procédure nationale, la valeur du quota du terrain appartenant au requérant à cette date était de 30 000 ITL le mètre carré (paragraphe 11 de l'arrêt au principal) pour une superficie totale de 75 734 mètres carrés. 14. Compte tenu de ces éléments et statuant en équité, la Cour estime raisonnable d'accorder conjointement aux héritiers du requérant 1 300 000 EUR pour le préjudice matériel, plus tout montant pouvant être dû à titre d'impôt sur cette somme. 15. Reste à évaluer la perte de chances subie à la suite de l'expropriation litigieuse. Statuant en équité, la Cour alloue conjointement aux héritiers du requérant 66 000 EUR pour la perte de chances. B. Dommage moral 16. Les héritiers du requérant demandent la somme de 500 000 EUR. 17. Le Gouvernement fait valoir que le requérant avait déjà obtenu un dédommagement dans le cadre du remède « Pinto » et qu'en tout état de cause la somme réclamée est excessive. 18. La Cour estime que le sentiment d'impuissance et de frustration face à la dépossession illégale de leurs biens a causé aux héritiers du requérant un préjudice moral important, qu'il y a lieu de réparer de manière adéquate. 19. Statuant en équité, la Cour accorde conjointement aux héritiers du requérant 15 000 EUR, plus tout montant pouvant être dû à titre d'impôt, pour dommage moral. C. Frais et dépens 20. Justificatifs à l'appui, les héritiers du requérant demandent le remboursement des frais encourus dans la procédure devant la Cour, à concurrence de 38 027,84 EUR, taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et contributions à la caisse de prévoyance des avocats (CPA) incluses. 21. Le Gouvernement soutient que les héritiers du requérant n'ont pas étayé leur demande et qu'en tout état de cause la somme réclamée est excessive. 22. La Cour rappelle que l'allocation des frais et dépens au titre de l'article 41 présuppose que se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et, de plus, le caractère raisonnable de leur taux (Iatridis c. Grèce (satisfaction équitable) [GC], no 31107/96, § 54, CEDH 2000-XI). En outre, les frais de justice ne sont recouvrables que dans la mesure où ils se rapportent à la violation constatée (Van de Hurk c. Pays-Bas, arrêt du 19 avril 1994, série A no 288, § 66). 23. La Cour ne doute pas de la nécessité d'engager des frais, mais elle trouve excessifs les honoraires totaux revendiqués à ce titre. Elle considère dès lors qu'il y a lieu de les rembourser en partie seulement. Compte tenu des circonstances de la cause, la Cour juge raisonnable d'allouer conjointement aux héritiers du requérant 15 000 EUR pour l'ensemble des frais exposés. D. Intérêts moratoires 24. La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d'intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.

PAR CES MOTIFS

, LA COUR, À L'UNANIMITÉ, 1. Dit a) que l'Etat défendeur doit verser conjointement aux héritiers du requérant, dans les trois mois à compter du jour où l'arrêt sera devenu définitif conformément à l'article 44 § 2 de la Convention, les sommes suivantes : i. 1 366 000 EUR (un million trois cent soixante-six mille euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d'impôt, pour dommage matériel ; ii. 15 000 EUR (quinze mille euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d'impôt, pour dommage moral ; iii. 15 000 EUR (quinze mille euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d'impôt, pour frais et dépens ; b) qu'à compter de l'expiration dudit délai et jusqu'au versement, ces montants seront à majorer d'un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ; 2. Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus. Fait en français, puis communiqué par écrit le 1er février 2011, en application de l'article 77 §§ 2 et 3 du règlement. Marialena Tsirli Josep Casadevall Greffière adjointe Président

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