Vu, enregistrée le 28 mars 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, la requête présentée pour la SOCIETE AXA ASSURANCES IARD MUTUELLE, venant aux droits et obligations de la société AXA courtage assurances mutuelle, dont le siège est 26 rue Drouot à Paris (75009), par Me Lenczner ; La SOCIETE AXA ASSURANCES IARD MUTUELLE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0812947 du 25 janvier 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge partielle des cotisations minimales supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2001 et 2002 ;
2°) de prononcer ladite décharge ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que le contenu des produits et frais financiers visés au 4 du paragraphe II de l'article 1647 B sexies du code général des impôts a évolué en 1995 du seul fait du changement du plan comptable ; que ce changement, qui a modifié l'assiette de l'impôt, n'a pas été validé par un texte législatif et est, en conséquence, contraire à l'article 34 de la Constitution ; que la doctrine administrative 6 E 4334 § 4 du 1er juin 1995 précise que le changement de plan comptable ne peut avoir aucun effet sur l'assiette de la valeur ajoutée ; que les plus-values sur titres de participation, exceptionnelles et non récurrentes, ne proviennent pas de la valeur créée par l'entreprise et ne font pas partie de la valeur ajoutée ; que ces plus-values sont exceptionnelles puisqu'elles portent sur des titres de participation dont la possession est d'assurer le contrôle ou d'influer sur la gestion de la société émettrice ; que la position exprimée par la direction des grandes entreprises le 7 novembre 2003 pour AXA France Collectives, qui est une confirmation de la doctrine générale sur la valeur ajoutée, est opposable à l'administration en application des articles
L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution ;
Vu le code des assurances ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu les décrets n° 94-481 et n° 94-482 du 8 juin 1994 et n° 95-153 du 7 février 1995 modifiant le plan comptable particulier à l'assurance et à la capitalisation ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 décembre 2012 :
- le rapport de Mme Besson-Ledey, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Garrec, rapporteur public ;
Considérant qu'
à l'issue d'une vérification de comptabilité, la société AXA Courtage Assurance Mutuelle, aux droits de laquelle vient la SOCIETE AXA ASSURANCES IARD MUTUELLE, a été assujettie à des suppléments de cotisation minimale de taxe professionnelle au titre des années 2001 et 2002 sur le fondement du 4 du II de l'article 1647 B sexies du code général des impôts auquel renvoie l'article 1647 E du même code, après que le service eut intégré les plus-values de cession de titres de placement réalisées par elle dans le calcul de la valeur ajoutée selon laquelle est évaluée cette cotisation ; que la SOCIETE AXA ASSURANCES IARD MUTUELLE relève appel du jugement du 25 janvier 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge partielle de ces suppléments d'impositions ;
Sur l'application de la loi fiscale :
Considérant qu'aux termes de l'article 1647 E du code général des impôts, alors en vigueur : " I. - La cotisation de taxe professionnelle des entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 50 millions de francs (7 600 000 euros) est au moins égale à 1,5 % de la valeur ajoutée produite par l'entreprise, telle que définie au II de l'article 1647 B sexies. Le chiffre d'affaires et la valeur ajoutée à prendre en compte sont ceux de l'exercice de douze mois clos pendant l'année d'imposition ou, à défaut d'un tel exercice, ceux de l'année d'imposition (...) " ; qu'aux termes du II de l'article 1647 B sexies dans sa rédaction alors en vigueur: " 1. La valeur ajoutée mentionnée au I est égale à l'excédent hors taxe de la production sur les consommations de biens et services en provenance de tiers constaté pour la période définie au I. (...) / 4. En ce qui concerne les entreprises d'assurance, de capitalisation et de réassurance de toute nature, la production est égale à la différence entre : / D'une part, les primes ou cotisations ; les produits financiers ; les produits accessoires ; les subventions d'exploitation ; les ristournes, rabais et remises obtenus ; les commissions et participations reçues des réassureurs ; les travaux faits par l'entreprise pour elle-même ; les provisions techniques au début de l'exercice ; / Et, d'autre part, les prestations ; les réductions et ristournes de primes ; les frais financiers ; les provisions techniques à la fin de l'exercice (...) " ; que ces dispositions fixent la liste limitative des catégories d'éléments comptables qui doivent être pris en compte dans le calcul de la valeur ajoutée en fonction de laquelle est évaluée la cotisation minimale de taxe professionnelle ; que, pour déterminer si une charge ou un produit se rattache à l'une de ces catégories, il y a lieu de se reporter aux normes comptables dans leur rédaction en vigueur lors de l'année d'imposition concernée ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article
L. 310-1 du code des assurances : "Le contrôle de l'Etat s'exerce dans l'intérêt des assurés, souscripteurs et bénéficiaires de contrats d'assurance et de capitalisation. Sont soumises à ce contrôle : / 1° les entreprises qui sous forme d'assurance directe contractent des engagements dont l'exécution dépend de la durée de la vie humaine, s'engagent à verser un capital en cas de mariage ou de naissance d'enfants, ou font appel à l'épargne en vue de la capitalisation et contractent à cet effet des engagements déterminés ; / 2° les entreprises qui sous forme d'assurance directe couvrent les risques de dommages corporels liés aux accidents et à la maladie ; / 3° les entreprises qui sous forme d'assurance directe couvrent d'autres risques y compris ceux liés à une activité d'assistance (...)" ; qu'aux termes de l'article
R. 331-1 du même code, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : "Les engagements réglementés dont les entreprises mentionnées à l'article
L. 310-1 doivent, à toute époque, être en mesure de justifier l'évaluation sont les suivants : / 1° Les provisions techniques suffisantes pour le règlement intégral de leurs engagements vis-à-vis des assurés ou bénéficiaires de contrats ; / 2° Les postes du passif correspondant aux autres créances privilégiées ; / 3° Les dépôts de garantie des agents, des assurés et des tiers, s'il y a lieu ; / 4° Une réserve d'amortissement des emprunts ; / 5° Une provision de prévoyance en faveur des employés et agents destinée à faire face aux engagements pris par l'entreprise envers son personnel et ses collaborateurs (...)" ; que selon l'article R. 332-1 du même code : "1. Les engagements réglementés mentionnés à l'article
R. 331-1 doivent, à toute époque, être représentés par des actifs équivalents (...)" ; que les entreprises d'assurance mentionnées à l'article
L. 310-1 représentent leurs engagements réglementés mentionnés à l'article
R. 331-1 au moyen de valeurs mobilières et titres assimilés, actifs immobiliers, prêts et dépôts dont la liste est mentionnée à l'article R. 332-2 du même code et comprend notamment, aux termes des 4° à 6° de cet article, les actions et autres valeurs mobilières, négociées sur un marché reconnu, les actions des entreprises d'assurance, de réassurance, de capitalisation, les actions, parts et droits émis par des sociétés commerciales et obligations, titres participatifs et titres subordonnés émis par les sociétés d'assurance mutuelles, les mutuelles, unions et fédérations régies par le code de la mutualité et les institutions de prévoyance régies par le titre III du livre IX du code de la sécurité sociale ; qu'il résulte de la combinaison de ces textes que la gestion des actifs mentionnés par ces dispositions procède de l'essence même de l'activité d'assurance, les placements dont il s'agit ayant pour objet de garantir le règlement intégral des engagements pris envers les assurés ; que si, antérieurement à sa modification entrée en vigueur le 1er janvier 1995, le plan comptable particulier à l'assurance et à la capitalisation classait les moins et plus-values sur cession d'éléments d'actif dans le compte 84 "pertes et profits exceptionnels" et comportait un compte 77 "produits financiers", le même plan, modifié à compter du 1er janvier 1995 par les décrets susvisés des 8 juin 1994 et 7 février 1995, classe les pertes sur réalisation et réévaluation de placements dans le compte 66 "charges des placements" et les profits provenant de la réalisation ou de la réévaluation des placements dans le compte 76 "produits des placements" et comporte les sous-comptes 760 et 764 intitulés respectivement "revenus des placements" et "profits provenant de la réalisation ou la réévaluation des placements" au sein duquel sont comptabilisés non seulement les produits tirés de la cession des titres de placement, mais également les plus-values constatées lors de la vente de parts du capital social d'entreprises d'assurance et de réassurance liées ou de titres de participation représentant au moins 10 % du capital d'entreprises tierces ; que les moins-values constatées lors de la cession de tels titres doivent, quant à elles, être reportées au sous-compte 664 "pertes provenant de la réalisation ou la réévaluation des placements" ;
Considérant que la société AXA Courtage Assurance Mutuelle était en sa qualité de société d'assurance mutuelle régie par le code des assurances, soumise aux obligations prudentielles décrites ci-dessus ; que, par suite, à supposer qu'une partie des plus-values de cession de titres réalisées par cette dernière prise en compte par le service dans le calcul de la valeur ajoutée aurait constitué des cessions de titres de participation est sans incidence sur les impositions en litige, dès lors que la société requérante n'établit pas que ces cessions ne relevaient pas de son activité habituelle et qu'au regard des règles spécifiques au plan comptable applicable aux entreprises d'assurance, de telles cessions ne sont pas exclues des produits financiers ; qu'il suit de là que les plus ou moins-values de cession de valeurs mobilières et immobilières de placement réalisées par la société d'assurance requérante pour les besoins de son activité d'assurances doivent être regardées, ainsi que l'a fait l'administration, comme des produits et frais financiers devant être inclus dans la production, telle qu'elle est définie par les dispositions précitées du 4 du II de l'article 1647 B sexies du code général des impôts ;
Considérant, en second lieu, que les décrets susvisés des 8 juin 1994 et 7 février 1995 portant approbation du nouveau plan comptable du secteur des assurances et de la capitalisation, qui ne comportent aucune disposition de nature fiscale, ne peuvent être regardés, contrairement à ce que soutient la société requérante, comme instituant des règles d'assiette de l'impôt relevant de la compétence du législateur en vertu des dispositions de l'article 34 de la Constitution ;
Sur le bénéfice de la doctrine administrative :
Considérant, en premier lieu, que si la société requérante invoque, sur le fondement de l'article
L. 80 A du livre des procédures fiscales, les termes de la documentation administrative 6 E 4334 paragraphe 4 du 1er juin 1995 selon laquelle l'adoption du plan comptable général révisé est sans incidence sur la définition de la valeur ajoutée prévue par l'article 1647 B sexies du code général des impôts, celle-ci ne comporte aucune interprétation contraire à celle exposée ci-dessus ;
Considérant, en second lieu, qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, d'écarter le moyen, déjà présenté en première instance et repris en appel, tiré de ce que la notification de redressement du 7 novembre 2003 adressée à la société AXA France collectivités, selon laquelle les plus ou moins-values de cession de titres de participation sont exclues du calcul de la valeur ajoutée, constituerait une prise de position de l'administration fiscale qui lui serait opposable ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE AXA ASSURANCES IARD MUTUELLE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; que les conclusions qu'elle présente sur le fondement de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la SOCIETE AXA ASSURANCES IARD MUTUELLE est rejetée.
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N° 11VE011112