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Cour de cassation, Chambre sociale, 22 juin 2016, 15-16.994, Publié au bulletin

Portée majeure

Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
22 juin 2016
Cour d'appel de Grenoble
24 février 2015

Synthèse

  • Juridiction : Cour de cassation
  • Numéro de pourvoi :
    15-16.994
  • Dispositif : Rejet
  • Publication : Publié au bulletin
  • Textes appliqués :
    • article L. 1237-14 du code du travail ; principe "fraus omnia corrumpit"
  • Décision précédente :Cour d'appel de Grenoble, 24 février 2015
  • Identifiant européen :
    ECLI:FR:CCASS:2016:SO01259
  • Identifiant Légifrance :JURITEXT000032777071
  • Identifiant Judilibre :5fd92cfa4c187d0c33a67a27
  • Commentaires :
  • Président : M. Chollet (conseiller doyen faisant fonction de président)
  • Avocat général : Mme Robert
  • Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray
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Résumé

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Texte intégral

SOC. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 22 juin 2016 Rejet M. CHOLLET, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 1259 FS-P+B Pourvoi n° H 15-16.994 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ Statuant sur le pourvoi formé par : 1°/ M. X... R..., domicilié [...] , 2°/ le syndicat CFTC du groupe Norbert Dentressangle, dont le siège est [...] , contre l'arrêt rendu le 24 février 2015 par la cour d'appel de Grenoble (chambre sociale, section A), dans le litige les opposant à la société Norbert Dentressangle Silo, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation ; Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 24 mai 2016, où étaient présents : M. Chollet, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ducloz, conseiller référendaire rapporteur, MM. Ludet, Mallard, Mmes Goasguen, Vallée, Guyot, Aubert-Monpeyssen, Schmeitzky-Lhuillery, MM. Rinuy, Schamber, Ricour, conseillers, MM. Alt, Flores, Mme Brinet, MM. David, Silhol, Belfanti, conseillers référendaires, Mme Robert, avocat général, Mme Piquot, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme Ducloz, conseiller référendaire, les observations de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat de M. R... et du syndicat CFTC du groupe Norbert Dentressangle, de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la société Norbert Dentressangle Silo, l'avis de Mme Robert, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué

(Grenoble, 24 février 2015), que M. R... a été engagé par la société Norbert Dentressangle Silo, laquelle appartient à l'unité économique et sociale (UES) Norbert Dentressangle Vrac, en qualité de conducteur routier ; qu'il a, le 11 février 2009, signé une convention de rupture homologuée par l'administration le 23 mars 2009 ; que, dans le cadre d'une procédure diligentée par le comité central d'entreprise de l'UES Norbert Dentressangle Vrac et les syndicats CFTC et CFDT, la cour d'appel de Lyon a, par arrêt du 2 décembre 2011 rendu sur renvoi après cassation (Soc., 9 mars 2011, pourvoi n° 10-11.581, Bull. 2011, V n° 70), condamné les employeurs composant l'UES Norbert Dentressangle Vrac à des dommages-intérêts pour violation des dispositions applicables en matière d'information et de consultation sur les licenciements économiques ; que le salarié a, le 28 décembre 2011, saisi la juridiction prud'homale d'une demande en annulation de la convention de rupture ;

Sur le moyen

unique, pris en sa première branche :

Attendu que le salarié fait grief à

l'arrêt de dire cette demande irrecevable alors, selon le moyen, que la fraude corrompt tout, de sorte que la prescription d'un an des recours juridictionnels ouverts à l'encontre de la convention de rupture conventionnelle n'est pas applicable en cas de fraude de l'employeur ; qu'en rejetant pourtant l'exception de fraude, sans examiner, comme elle y était pourtant invitée, si ses éléments constitutifs de la fraude n'étaient pas en l'espèce réunis, la cour d'appel a violé le principe « fraus omnia corrumpit », ensemble les articles L. 1233-3, alinéa 2 et L. 1237-14 du code du travail ;

Mais attendu

que si la fraude peut conduire à écarter la prescription annale prévue à l'article L. 1237-14 du code du travail, c'est à la condition que celle-ci ait eu pour finalité de permettre l'accomplissement de la prescription ; Et attendu que la cour d'appel ayant relevé que le salarié avait invoqué le fait pour l'employeur d'avoir recouru à une rupture conventionnelle afin de se soustraire à la mise en place d'un plan de sauvegarde de l'emploi, ce dont il résultait que la fraude alléguée n'avait pas eu pour finalité de permettre l'accomplissement de la prescription, le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le moyen

unique, pris en ses deuxième et troisième branches :

Attendu que le salarié fait grief à

l'arrêt de dire la demande en annulation de la rupture conventionnelle irrecevable alors, selon le moyen : 1°/ que si le délai de prescription d'un an des recours juridictionnels à l'encontre de la convention de rupture conventionnelle court à compter de l'homologation de la convention, le point de départ du délai est reporté au jour où le salarié acquiert une connaissance complète et exacte de l'ensemble des données du litige, de ses droits et de leur étendue ; qu'en l'espèce, la fraude de l'employeur aux dispositions régissant les licenciements pour motif économique, consistant à ne pas intégrer les ruptures conventionnelles en cause au processus de réduction des effectifs, n'a été établie que par l'arrêt de la Cour de cassation en date du 9 mars 2011 ; qu'en jugeant néanmoins que toutes les données du litige étaient connues au plus tard le 16 juillet 2009, date à laquelle le tribunal de grande instance de Valence s'est prononcé sur la validité du plan de sauvegarde de l'emploi soumis au comité central d'entreprise de l'UES ND Vrac, quand cette décision n'était pas passée en force de chose jugée, la cour d'appel a violé le principe « fraus omnia corrumpit », ensemble l'article L. 1237-14, alinéa 4, du code du travail ; 2°/ que la fraude n'a été reconnue pour la première fois que par la décision de la Cour de cassation et celle de la juridiction de renvoi, le jugement du tribunal de grande instance de Valence et l'arrêt de la cour de Grenoble en ayant au contraire écarté le principe ; qu'en faisant partir le délai de prescription du jugement du tribunal au motif qu'à la date de ce jugement, le salarié avait connaissance de toutes les données du litige, la cour d'appel a dénaturé ledit jugement et violé l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu

que si une fraude dans le recours à la rupture conventionnelle a pour effet de reporter le point de départ du délai de prescription prévu à l'article L. 1237-14 du code du travail au jour où celui qui l'invoque en a eu connaissance, la cour d'appel qui a, sans dénaturer le jugement, constaté que la fraude que le salarié prêtait à son employeur était connue au plus tard le 16 juillet 2009, en a exactement déduit que l'action en nullité, introduite le 28 décembre 2011 alors que la convention de rupture avait été homologuée le 23 mars 2009, était prescrite ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS

: REJETTE le pourvoi ; Condamne les demandeurs aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux juin deux mille seize.

MOYEN ANNEXE

au présent arrêt Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. R... et le syndicat CFTC du groupe Norbert Dentressangle. Le moyen fait grief aux arrêts infirmatifs attaqué d'AVOIR déclaré irrecevables les demandes des salariés et du syndicat CFTC tendant à l'annulation de la rupture conventionnelle de leur contrat de travail, et de les avoir déboutés de leur demande de dommages et intérêts et d'indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, et de les avoir condamnés aux dépens AUX MOTIFS QUE Attendu, sans doute, qu'il résulte de l'arrêt rendu le 9 mars 2011 par la Cour de cassation et de celui rendu le 2 décembre 2011, sur renvoi, par la cour d'appel de Lyon que le comité central d'entreprise de l'UES ND Vrac n'avait pas été utilement informé et consulté sur l'ampleur réelle de la réorganisation et des suppressions d'emplois projetées dès lors que les ruptures conventionnelles intervenues au sein des sociétés ND Silo, ND Bennes et ND Inter-Pulve au cours du premier semestre 2009 auraient dû être prises en compte pour déterminer la procédure d'information et de consultation des représentants du personnel applicable ainsi que les obligations de l'employeur en matière de plan de sauvegarde de l'emploi, puisqu'elles avaient une cause économique et s'inscrivaient dans un processus de réduction des effectifs dont elles constituaient la ou l'une des modalités ; mais que la circonstance que la rupture conventionnelle conclue par Messieurs R... et U..., qui contribuaient à la réorganisation de l'UES, auraient dû être intégrées au plan de sauvegarde de l'emploi de l'UES et portées à la connaissance des représentants du personnel, n'a pas, en tant que telle, affecté la validité de cette rupture, ni modifié son régime juridique propre ; que l'article L 1237-14 du code du travail dispose notamment : « Tout litige concernant la convention, l'homologation ou le refus d'homologation relève de la compétence du conseil des prud'hommes, à l'exclusion de tout autre recours contentieux ou administratif. Le recours juridictionnel doit être formé, à peine d'irrecevabilité, avant l'expiration d'un délai de douze mois à compter de la date d'homologation de la convention. » ; qu'en vertu de ce texte, Monsieur R... aurait dû introduire son action en nullité de la rupture conventionnelle au plus tard le 23 mars 2010 puisque le directeur départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle avait indiqué, dans un courrier du 6 mars 2009, que la demande d'homologation serait « réputée acquise le 23 mars 2009 à minuit » ; que Monsieur U... aurait dû introduire son action en nullité de la rupture conventionnelle au plus tard le XXX puisque le directeur départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle avait indiqué, dans un courrier du XXX, que la demande d'homologation serait « réputée acquise le XXX à minuit » ; que M. R... et U... ne peuvent sérieusement soutenir que la fraude qu'il prête à son employeur et qui justifierait le report du point de départ de la prescription au 9 mars 2011, n'a été découverte qu'à la date de l'arrêt de la Cour de cassation ayant consacré l'obligation qu'avait l'employeur d'intégrer les ruptures conventionnelles résultant d'une cause économique au processus de réduction des effectifs, qu'en effet, le tribunal de grande instance de Valence s'est prononcée sur la validité du FSE soumis au comité central d'entreprise de l'UES ND Vrac dès le 16 juillet 2009, soit moins de trois mois après l'homologation de la rupture conventionnelle ; qu'en d'autres termes, toutes les données du litige étaient connues au plus tard le 16 juillet 2009 ; que, dans ces conditions, il convient d'accueillir la fin de non-recevoir soulevée par la société [...] . ALORS QUE la fraude corrompt tout, de sorte que la prescription d'un an des recours juridictionnels ouverts à l'encontre de la convention de rupture conventionnelle n'est pas applicable en cas de fraude de l'employeur ; qu'en rejetant pourtant l'exception de fraude, sans examiner, comme elle y était pourtant invitée, si ses éléments constitutifs de la fraude n'étaient pas en l'espèce réunis, la Cour d'appel a violé le principe « fraus omnia corrumpit », ensemble les articles L.1233-3 alinéa 2 et L. 1237-14 du Code du travail. ALORS en tout état de cause QUE si le délai de prescription d'un an des recours juridictionnels à l'encontre de la convention de rupture conventionnelle court à compter de l'homologation de la convention, le point de départ du délai est reporté au jour où le salarié acquiert une connaissance complète et exacte de l'ensemble des données du litige, de ses droits et de leur étendue ; qu'en l'espèce, la fraude de l'employeur aux dispositions régissant les licenciements pour motif économique, consistant à ne pas intégrer les ruptures conventionnelles en cause au processus de réduction des effectifs, n'a été établie que par l'arrêt de la Cour de cassation en date du 9 mars 2011 ; qu'en jugeant néanmoins que toutes les données du litige étaient connues au plus tard le 16 juillet 2009, date à laquelle le Tribunal de grande instance de VALENCE s'est prononcé sur la validité du plan de sauvegarde de l'emploi soumis au comité central d'entreprise de l'UES ND VRAC, quand cette décision n'était pas passée en force de chose jugée, la Cour d'appel a violé le principe « fraus omnia corrumpit », ensemble l'article L. 1237-14, alinéa 4, du cCode du travail. ALORS surtout QUE la fraude n'a été reconnue pour la première fois que par la décision de la Cour de cassation et celle de la juridiction de renvoi, le jugement du tribunal de grande instance de VALENCE et l'arrêt de la Cour de Grenoble en ayant au contraire écarté le principe ; qu'en faisant partir le délai de prescription du jugement du tribunal au motif qu'à la date de ce jugement, le salarié avait connaissance de toutes les données du litige, la cour d'appel a dénaturé ledit jugement et violé l'article 1134 du code civil.

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