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Tribunal administratif de Melun, 25 octobre 2024, 2207587

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal administratif de Melun
  • Numéro d'affaire :
    2207587
  • Nature : Décision
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Résumé

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Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Par une requête enregistrée le 30 juillet 2022 et des mémoires enregistrés les 12 décembre 2023 et 29 janvier 2024, Mme C B, représentée par Me Dokhan, demande au juge des référés, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : 1°) de condamner solidairement la commune de Dammartin-en-Goële, la communauté de communes Plaines et Monts de France (CCPMF), la communauté d'agglomération Roissy Pays de France (CARPF) et la société française de distribution d'eau (SFDE) à lui verser à titre de provision la somme de 214 504,53 euros, indexée sur l'indice BT 01 et à compter du 2 novembre 2018, au titre de la reconstruction de son pavillon, et la somme de 39 200 euros au titre de la perte de jouissance du même pavillon, à parfaire au jour de l'ordonnance ; 2°) d'assortir ces sommes des intérêts moratoires à compter de la date de la réclamation préalable ; 3°) de capitaliser ces mêmes intérêts ; 4°) de mettre solidairement à la charge de la commune de Dammartin-en-Goële, de la communauté de communes Plaines et Monts de France, de la communauté d'agglomération Roissy Pays de France et de la société française de distribution d'eau la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la requête est recevable dès lors que le contentieux est lié à l'égard de tous les défendeurs, qu'elle apporte la preuve de son droit de propriété sur le bien endommagé et que la prescription quadriennale était toujours en cours à la date d'introduction de sa requête ; - l'obligation de réparation présente un caractère non sérieusement contestable dès lors que le rapport de l'expert désigné par le tribunal de grande instance de Paris le 26 juin 2019 a constaté que son immeuble présente des fissures murales et un tassement du sol d'assise des fondations et a attribué ces désordres à l'écoulement des eaux pluviales de la toiture du pavillon non raccordées au réseau public, à la fuite sur le branchement d'alimentation en eau potable de leur voisin et aux eaux de ruissellement du trottoir s'engouffrant dans la cavité sous la dalle du garage qui n'a été remblayée qu'en 2018. Par des mémoires en défense, enregistrés les 9 et 29 septembre 2022, la communauté d'agglomération Roissy Pays de France, représentée par Me Phelip, conclut au rejet de la requête ou, à titre subsidiaire, à ce que la SFDE et la société mutuelle d'assurance des collectivités locales (SMACL) soient condamnées solidairement à la garantir de toute éventuelle condamnation, et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme B ou de toute autre partie perdante sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la requête est irrecevable en raison du défaut de demande indemnitaire préalable liant le contentieux à son égard ; - la demande de provision se heurte à une contestation sérieuse dès lors que le lien de causalité entre le fonctionnement de l'ouvrage public en cause et les dommages affectant son immeuble n'est pas établi ; - les sommes demandées ont été surévaluées en ce qui concerne la perte de valeur du bien immobilier de la requérante et ne sont pas justifiées en ce qui concerne le surplus ; - elle ne saurait être tenue pour responsable dans la mesure où il résulte des stipulations du contrat de délégation de service public de gestion et d'exploitation de l'eau potable conclu entre la CCPMF et la SFDE que cette dernière seule doit supporter les conséquences dommageables résultant d'une rupture de canalisation d'eau potable ayant causé des dommages à un tiers. Par un mémoire en défense enregistré le 7 octobre 2022, la communauté de communes Plaines et Monts de France, représentée par Me Dumas, conclut à ce que le tribunal rejette la requête et mette à la charge de Mme B la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la requête est irrecevable car, d'une part, la requérante ne justifie pas être la propriétaire du bien endommagé et, d'autre part, le contentieux n'est pas lié à son égard ; - la demande de provision se heurte à une contestation sérieuse dès lors que le lien de causalité entre le préjudice et le fait dommageable n'est pas démontré avec certitude ; - elle ne saurait voir sa responsabilité engagée, en tout état de cause pour les dommages résultant du réseau d'eau potable, dans la mesure où, à compter du 1er janvier 2016, la commune de Dammartin-en-Goële s'est retirée de la CCPMF et a rejoint la CARPF. Par un mémoire en défense enregistré le 21 octobre 2022, la commune de Dammartin-en-Goële, représentée par Me Alonso Garcia, conclut à ce que le tribunal rejette la requête ou, à titre subsidiaire, à ce qu'il condamne la SFDE à la garantir de toute éventuelle condamnation, et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme B au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la demande de provision se heurte à une contestation sérieuse dès lors que la compétence et la responsabilité en matière d'alimentation en eau ont été transférées aux communautés de communes ou aux communautés d'agglomération, qu'en tant que personne publique délégante elle ne saurait être tenue pour responsable, que le lien de causalité n'est pas suffisamment direct et certain et qu'une faute de la victime est à l'origine des désordres de l'immeuble ; - les sommes demandées par Mme B ont été surévaluées en ce qui concerne la perte de valeur du bien et ne sont pas justifiées en ce qui concerne le surplus. Par des mémoires en défense enregistrés les 27 septembre 2022, 7 novembre 2022 et 30 novembre 2023, la société française de distribution d'eau, représentée par Me Delavanne, doit être regardée comme concluant au rejet de la requête ou, à défaut, à ce que le tribunal limite la condamnation à une somme inférieure à celle demandée, à ce que la CARPF et la commune de Dammartin-en-Goële soient déboutées de leur appel en garantie et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme B ou de toute autre partie perdante sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la requête est irrecevable en raison du défaut de demande indemnitaire préalable à son égard ; - la demande de provision se heurte à une contestation sérieuse dès lors que la requérante ne produit pas son titre de propriété concernant l'immeuble endommagé, que l'action de celle-ci est prescrite, que le lien entre les dommages et la fuite sur le branchement au réseau d'eau potable n'est pas établi de manière suffisamment directe et certaine, que les dommages subis par Mme B sont dus à une faute de la victime ; - l'indemnisation éventuellement accordée doit être limitée en raison de l'état de dégradation avancé du bien à la date de l'acquisition de celui-ci par Mme B et du bénéfice qu'elle va tirer de la réalisation des travaux quant à la valeur de l'immeuble ; - elle ne saurait être tenue pour responsable dans la mesure où il résulte des stipulations du contrat de délégation de service public de gestion et d'exploitation de l'eau potable qu'elle a conclue qu'elle ne doit pas supporter les conséquences dommageables résultant d'une rupture de canalisation d'eau potable ayant causé des dommages à un tiers.

Vu :

- le rapport d'expertise de M. A du 26 juin 2019 ; - les autres pièces du dossier. Vu le code de justice administrative. La présidente du tribunal a désigné M. Lalande, vice-président, pour statuer en tant que juge des référés en application de l'article L. 511-2 du code de justice administrative.

Considérant ce qui suit

: 1. Au cours du mois de décembre 2015, d'importantes fissures ont été observées sur les façades du pavillon sis 4 rue des vieilles boucheries à Dammartin-en-Goële (Seine-et-Marne). Ces désordres ont été constatés par un expert, désigné par le tribunal de grande instance de Paris le 6 décembre 2017 sur demande initiale de M. D et de Mme F, voisins de la requérante. Le rapport de l'expert a été rendu le 26 juin 2019 et conclut, en ce qui concerne le pavillon de Mme B, que les désordres sont dus à différents facteurs. Mme B demande, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, de condamner solidairement la commune de Dammartin-en-Goële, la communauté de communes Plaines et Monts de France (CCPMF), la communauté d'agglomération Roissy Pays de France (CARPF) et la société française de distribution d'eau (SFDE) à lui verser à titre de provision la somme de 214 504,53 euros, au titre de la reconstruction de son pavillon, et la somme de 39 200 euros au titre de la perte de jouissance du même pavillon. Sur la demande de provision : 2. Aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie. ". Il résulte de ces dispositions qu'il appartient au juge des référés, dans le cadre de cette procédure qu'elles instituent, de rechercher si, en l'état du dossier qui lui est soumis, l'obligation du débiteur éventuel de la provision est ou n'est pas sérieusement contestable sans avoir à trancher ni de questions de droit se rapportant au bien-fondé de cette obligation ni de questions de fait soulevant des difficultés sérieuses et qui ne pourraient être tranchées que par le juge du fond éventuellement saisi. 3. D'une part, il résulte de l'instruction, et notamment des termes du rapport d'expertise du 26 juin 2019 de M. A, expert près la cour d'appel de Paris, que les désordres trouvent pour cause, " la présence d'eau dans le sol d'assise composé de sables et de graves très silteux " qui " lessive ces matériaux et provoque ainsi des cavités dans le sol d'assise et un tassement de celui-ci ". Cette présence d'eau proviendrait, selon le même rapport, premièrement, " des eaux pluviales de la toiture du garage qui n'étaient pas raccordées au réseau public au moins jusqu'en septembre 2016 et de celles du trottoir situé en amont de celui-ci ruisselant le long du mur de façade " qui " s'infiltraient entre le mur de façade et le trottoir ", deuxièmement, " [d]e la fuite sur le branchement d'alimentation en eau potable du pavillon de M. E, passant sous la dalle du garage " qui " certainement antérieure à janvier 2016, se situait au droit de la soudure de 2 tronçons de la canalisation " et, troisièmement, " [d]es eaux de ruissellement du trottoir s'engouffrant dans la cavité sous la dalle du garage qui n'a pas été remblayée au moment de la mise en place de la canalisation aérienne provisoire en janvier 2016 ". En outre, le rapport ajoute que " les désordres sont antérieurs à la rupture de canalisation en janvier 2016 ", qu'" en 2013, des fissures affectaient déjà le pavillon " et que le réseau de canalisations du réseau de distribution d'eau se situant en partie sur les terrains de Mme B, de M. E, de M. D et de Mme F est vétuste. 4. D'autre part, il résulte également de l'instruction que si la CCPMF a conclu un contrat de délégation de service public de gestion et d'exploitation d'eau potable avec la SFDE en 2013, pour une entrée en vigueur au 1er janvier 2014, une partie des dommages et des faits générateurs datent d'au moins 2013, soit antérieurement à l'entrée en vigueur de cette délégation. Par ailleurs, en ce qui concerne la période postérieure au 1er janvier 2014, les stipulations de l'article 1.5 prévoient plusieurs cas susceptibles d'engager la responsabilité du délégataire ou de la collectivité en charge de la distribution d'eau, qui soulèvent une question de droit sérieuse qui excède l'office du juge saisi sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative. Enfin, ni Mme B ni son père, précédent propriétaire du pavillon, ne contestent qu'ils n'ont pas cherché à raccorder l'évacuation des eaux pluviales au réseau public d'évacuation des eaux alors que l'écoulement des eaux pluviales est à l'origine d'une partie des désordres constatés. 5. Eu égard aux constatations faites aux points précédents, le présent litige soulève au moins deux questions de droit se rapportant au bien-fondé de l'obligation invoquée par Mme B, ainsi que plusieurs questions de fait soulevant des difficultés sérieuses, qui ne pourraient être tranchées que par le juge du fond éventuellement saisi, notamment quant à l'ampleur des faits générateurs, la part du préjudice qu'ils ont chacun causé et leur caractère déterminant dans la nécessité pour Mme B de reconstruire le pavillon. 6. Il résulte de tout ce qui précède que, en l'état de l'instruction, l'existence de l'obligation doit être regardée comme sérieusement contestable. Dès lors, les conditions fixées à l'article L. 541-1 du code de justice administrative n'étant pas remplies, Mme B n'est pas fondée obtenir la provision demandée au titre de la reconstruction de son pavillon. Sur le surplus des conclusions des parties : 7. Les conclusions aux fins de provision de Mme B ayant été rejetées, les demandes d'appel en garantie présentées par la CARPF et la commune de Dammartin-en-Goële doivent également être rejetées. 8. Pour les mêmes motifs, les conclusions de Mme B présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. En revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B les sommes demandées par les défendeurs au titre des frais de l'instance non compris dans les dépens.

O R D O N N E :

Article 1er : La requête de Mme B est rejetée. Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme C B, à la commune de Dammartin-en-Goële, à la communauté de communes Plaines et Monts de France, à la communauté d'agglomération Roissy Pays de France et à la société française de distribution d'eau. Le juge des référés, D. LALANDE La République mande et ordonne au préfet de Seine-et-Marne en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance. Pour expédition conforme, La greffière,

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