N° RG 22/01418 - N° Portalis DBVM-V-B7G-LJ5P
C3
N° Minute :
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
la SELARL GALLIZIA DUMOULIN ALVINERIE
la SCP JOSEPH MANDROYAN
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT
DU MARDI 12 DECEMBRE 2023
Appel d'une décision (N° RG 20/03327)
rendue par le Tribunal judiciaire de Grenoble
en date du 07 mars 2022
suivant déclaration d'appel du 08 avril 2022
APPELANT :
M. [P] [C]
né le [Date naissance 2] 1949 à [Localité 5] (Italie)
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 3]
représenté par Me Delphine DUMOULIN de la SELARL GALLIZIA DUMOULIN ALVINERIE, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIMEE :
L'Association ST CHRISTOPHE DE [Localité 6] prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 4]
[Localité 6]
représentée par Me Jean-Pierre JOSEPH de la SCP JOSEPH MANDROYAN, avocat au barreau de GRENOBLE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Catherine Clerc, président de chambre,
Mme Joëlle Blatry, conseiller,
Mme Véronique Lamoine, conseiller
DÉBATS :
A l'audience publique du 17 octobre 2023, Mme Clerc président de chambre chargé du rapport, assistée de M. Frédéric Sticker, greffier, a entendu les avocats en leurs observations, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles
805 et
907 du code de procédure civile.
Elle en a rendu compte à la cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu ce jour.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
L'association paroissiale d'éducation populaire de [Localité 6], nouvellement dénommée à compter du 21 novembre 1970 Union paroissiale de [Localité 6], a été constituée le 18 juillet 1926.
L'association, dont le ou les prêtres de la paroisse étaient membres de droit, est propriétaire d'un terrain situé à [Localité 6], sur lequel est édifiée une salle polyvalente, et avait pour objet social l'organisation financière et matérielle des activités de la paroisse de cette commune.
Le compte rendu de la réunion du conseil d'administration, qui s'est tenue le 26 novembre 2015, mentionne qu'une proposition de changement de nom de l'association avec modification des statuts sera proposée à une prochaine assemblée extraordinaire, le père [C], prêtre de la commune de [Localité 7], expliquant que la commune de [Localité 6] n'étant plus une paroisse, mais un «'clocher'» de la paroisse de [Localité 7], l'association Union paroissiale de [Localité 6] ne pouvait plus exister en tant que telle.
L'assemblée générale extraordinaire du 23 décembre 2015 a décidé à la majorité de 47 voix contre 11 et 2 bulletins blancs que l'association serait désormais dénommée association Saint-Christophe de [Localité 6] et que les statuts seraient modifiés, en ce sens notamment qu'elle ne conserverait comme but que l'initiative et l'organisation de toutes 'uvres culturelles et parascolaires et de tout service d'entraide, que les prêtres responsables de la paroisse n'en seraient plus membres de droit et que son siège social serait transféré à la salle Abbé [B] place de la mairie à [Localité 6].
Le père [P] [C], estimant avoir été irrégulièrement évincé, a contesté les délibérations adoptées le 23 décembre 2015.
À défaut d'accord amiable il a fait assigner, par acte d'huissier du 13 juillet 2020', l'association Saint-Christophe de [Localité 6] devant le tribunal judiciaire de Grenoble aux fins d'entendre':
prononcer la nullité de l'assemblée générale extraordinaire du 23 décembre 2015 pour violation des articles 1, 8,11 et 12 des statuts, ainsi que pour abus de majorité,
prononcer l'annulation de l'admission des nouveaux membres de l'association visés dans la feuille de présence,
ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,
condamner l'association Saint-Christophe de [Localité 6] à lui payer une indemnité de 3.000€ en application de l'article
700 du code de procédure civile.
L'association Saint-Christophe de [Localité 6] s'est opposée à l'ensemble de ces demandes en faisant valoir que l'action était irrecevable à défaut pour M. [C] de justifier d'un intérêt à agir et subsidiairement infondée.
Elle a sollicité la condamnation du demandeur au paiement d'une indemnité de procédure de 3.000€.
Par jugement en date du 7 mars 2022, le tribunal judiciaire de Grenoble a déclaré M. [C] recevable en son action mais l'a débouté de toutes ses demandes et l'a condamné aux dépens.
Le tribunal a considéré en substance que M. [C] avait intérêt à agir en qualité de membre de droit du conseil d'administration de l'association, mais qu'aucune des dispositions invoquées des statuts n'était sanctionnée par une nullité, tandis qu'il n'était pas démontré que les irrégularités alléguées avaient eu une incidence sur le déroulement et la sincérité de la délibération prise le 23 décembre 2015.
M. [C] a relevé appel de cette décision selon déclaration reçue le 8 avril 2022 aux termes de laquelle il critique le jugement en ce qu'il l'a débouté de ses demandes d'annulation de l'assemblée générale extraordinaire du 23 décembre 2015 et de l'admission des nouveaux membres de l'association, en ce qu'il l'a condamné aux dépens et en ce qu'il a rejeté sa demande fondée sur l'article
700 du code de procédure civile.
Par conclusions récapitulatives déposées le 15 septembre 2023, M. [C] demande à la cour, par voie de réformation du jugement':
de juger recevable et bien fondée son action,
de prononcer la nullité de l'assemblée générale extraordinaire du 23 décembre 2015,
de prononcer l'annulation de l'admission des nouveaux membres de l'association tels que visés dans la feuille de présence annexée au compte rendu de l'assemblée générale extraordinaire du 23 décembre 2015,
de condamner l'association Saint-Christophe de [Localité 6] à lui payer la somme de 3.000€ sur le fondement des dispositions de l'article
700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Il fait valoir :
qu'il est recevable à exercer la présente action en nullité en sa qualité de curé de la paroisse de la commune de Saint [P] de la Marche membre de droit de l'association,
qu'il appartient à la juridiction de rechercher si les irrégularités constatées sont expressément sanctionnées de nullité par les statuts ou si elles ont eu une incidence sur le déroulement et la sincérité des délibérations,
que contrairement aux dispositions de leur article 12 les statuts de l'association n'ont pas été modifiés sur proposition et à l'initiative du conseil d'administration, mais uniquement à la demande de 5 membres et du bureau comportant 4 personnes, sans que le conseil n'ait été préalablement convoqué,
qu'aucune preuve n'est apportée de ce que le conseil d'administration a valablement délibéré, en présence de son membre de droit, préalablement à l'assemblée générale sur la question de la modification des statuts, en violation de l'article 8 prévoyant que le conseil ne peut prendre de décision qu'à la moitié au moins de ses membres, la voix du président étant prépondérante,
qu'il n'est pas justifié de la convocation de tous les membres de l'association à l'assemblée générale extraordinaire, tandis que la convocation adressée à certains membres se borne à faire état d'une modification des statuts sans plus de précisions sur les articles objet du projet de modification en méconnaissance de l'article 12,
que contrairement aux prescriptions de l'article 10 des statuts la convocation à l'assemblée générale, dont il est justifié, émane du président et non pas du secrétaire de l'association, seul habilité à y procéder,
qu'en violation de l'article 11 des statuts de nombreuses personnes n'ayant pas acquitté leur cotisation annuelle, et ne pouvant donc être considérées comme ayant la qualité de membre de l'association, ont pris part au vote, ce qui est expressément acté au compte-rendu de l'assemblée générale qui mentionne que «'l'association n'ayant jamais encaissé de cotisations et n'ayant donc aucune liste d'adhérents toutes les personnes présentes peuvent voter'»,
que la procédure d'intégration des nouveaux adhérents sur parrainage de deux membres en exercice n'a pas été respectée en violation de l'article 4 des statuts, puisque 60 personnes ont voté le 23 décembre 2015 alors que l'association ne comportait antérieurement que 17 membres,
que dans le silence des statuts toute modification de nature à bouleverser le fonctionnement de l'association, à changer son objet ou à en altérer le but ne peut être décidée qu'à l'unanimité en raison d'une atteinte profonde au pacte social, de sorte que la délibération litigieuse, qui était destinée à écarter le membre de droit, à se défaire de tout lien avec la paroisse , à s'affranchir de tout but religieux et à s'approprier la parcelle immobilière pour un autre usage que celui des 'uvres paroissiales, ne pouvait être adoptée qu'à l'unanimité,
que la délibération est en outre annulable pour abus de majorité alors qu'elle consacre une prise de pouvoir destinée à donner à l'association une orientation laïque, ce qui est contraire à l'intérêt social, puisque selon ses statuts l'union paroissiale de [Localité 6] a pour but l'organisation financière et matérielle des activités et des 'uvres paroissiales.
Par conclusions déposées le 6 septembre 2022, l'association Saint-Christophe de [Localité 6] sollicite la confirmation du jugement entrepris, le rejet de la demande formée par l'appelant au titre de l'article
700 du code de procédure civile et la condamnation de ce dernier à lui payer sur ce fondement une indemnité de 3.000€, outre condamnation aux dépens.
Elle fait valoir :
Sur la violation des articles 8 et 12 des statuts
qu'après une première réunion du conseil d'administration qui s'est tenue le 26 novembre 2015, au cours de laquelle le père [C] a annoncé que l'association devait être dissoute et que ses biens devaient être transmis à une autre association poursuivant le même but, une nouvelle réunion a été organisée en urgence le 3 décembre 2015 afin de rédiger les nouveaux statuts et de déterminer le nom de la nouvelle structure,
que 13 membres sur 17 attestent avoir participé à cette réunion, même s'il n'a pas été rédigé de compte-rendu, ce qui constitue une majorité suffisante et ce qui établit que le conseil d'administration a bien été à l'initiative de l'assemblée générale extraordinaire du 23 décembre 2015,
que contrairement à ce qui est affirmé tous les membres de l'association ont été convoqués à l'assemblée générale par le président, ainsi que cela résulte de la feuille de présence, tandis que par courrier du 15 décembre 2015 les administrateurs ont reçu une copie des nouveaux statuts, ce qui leur a permis de se prononcer en toute connaissance de cause,
Sur la violation de l'article 10 des statuts
que si aux termes des statuts les convocations sont envoyées par le secrétaire, le fait que le président ait signé les convocations n'a causé aucun grief aux membres de l'association,
Sur la violation de l'article 11 des statuts
que les comptes de résultat des années 2011 à 2015 établissent que les membres de l'association n'ont jamais réglé de cotisations conformément à un usage constant, de sorte que la règle statutaire n'ayant jamais été appliquée l'irrégularité ne peut être sanctionnée par une nullité, qui n'est au demeurant pas prévue par l'article 11,
que l'irrégularité n'a pas eu en outre d'incidence sur le déroulement et la sincérité des délibérations, puisqu'à l'exception d'une personne tous les administrateurs étaient présents à l'assemblée générale extraordinaire et ont voté à une majorité de 13 voix sur 17 en faveur de la modification des statuts,
Sur la violation de l'article 4 des statuts
qu'aucun motif de nullité ne saurait résulter du fait que des membres ayant participé à l'assemblée générale extraordinaire du 23 décembre 2015 n'avaient pas été parrainés, alors que tous les membres du conseil d'administration connaissaient les personnes présentes et que les assemblées générales précédentes qui s'étaient tenues dans les mêmes conditions ont toutes été validées,
Sur la violation de la règle de l'unanimité
que la modification statutaire contestée, qui n'a pas eu pour effet d'augmenter l'engagement des associés, ne nécessitait pas un vote unanime,
Sur l'abus de majorité
que si le diocèse a pu décider du regroupement des paroisses en application du droit canon, il n'a pas pu enjoindre aux associations civiles de droit privé soumises à la loi de 1901 de se dissoudre afin de ne conserver qu'une seule association à l'échelle de la paroisse de Saint [P] de la marche, à laquelle le bien immobilier ne pourrait en toute hypothèse être transmis,
que la dissolution de l'association ne pouvait être décidée que par l'assemblée générale, tandis que ses biens ne pouvaient être transmis qu'à une association poursuivant un but analogue,
que la majorité qui s'est dégagée lors de l'assemblée générale extraordinaire n'a donc pas agi à l'encontre de l'intérêt collectif des associés, alors que la salle polyvalente est mise à la disposition des habitants de la commune de [Localité 6], mais aussi des communes voisines, pour des fêtes familiales, qu'elle est aussi utilisée pour des 'uvres humanitaires, des collectes de sang et des activités sportives, ce qui correspond à sa vocation première, que l'association, qui ne s'est pas donné une orientation laïque poursuit toujours des activités et 'uvres paroissiales, en finançant des travaux de rénovation de l'église, en inscrivant dans son nom celui du saint patron de l'église de la commune et en baptisant la salle paroissiale du nom de l'abbé [B].
L'instruction a été clôturée par ordonnance rendue le 25 septembre 2023.
MOTIFS
Le jugement qui n'est pas critiqué sur ce point sera confirmé en ce qu'il a déclaré l'action recevable comme étant introduite par un membre de droit de l'association.
Il est constant que les statuts de l'association ne sanctionnent pas par une nullité expresse les irrégularités affectant la procédure de prise des décisions collectives.
Il est admis de part et d'autre que selon une jurisprudence établie, en l'absence de nullité expresse prévue par les statuts, les irrégularités constatées ne peuvent conduire à l'annulation d'une délibération que si elles ont eu une incidence sur le déroulement et la sincérité de celle-ci.
L'article 12 prévoit que toute modification des statuts ne peut intervenir que sur l'initiative du conseil d'administration par une assemblée générale convoquée 15 jours au moins à l'avance sur un ordre du jour annonçant le projet de modification, tandis que selon l'article 8 les décisions du conseil d'administration, autres que celles de simple administration, ne peuvent être prises qu'à la majorité de ses membres, la voix du président étant prépondérante en cas de partage.
Il est versé au dossier le compte rendu de la réunion du conseil d'administration du 26 novembre 2015 à laquelle ont participé 21 personnes. Il y est mentionné notamment que « le président fait part à l'assemblée qu'une proposition de changement du nom de l'association avec changement des statuts sera proposée en assemblée générale extraordinaire'», que le père [C] a rappelé qu'il ne pouvait y avoir qu'une seule association par paroisse et que « une discussion s'engage, mais qui n'aboutit à rien de concret, chacun (restant) sur ses positions'».
Il est dès lors certain qu'à ce stade aucun vote n'est intervenu au sein du conseil d'administration en vue de soumettre à une assemblée générale extraordinaire un projet de modification des statuts, dont le contenu n'est pas précisé.
Selon l'association un second conseil d'administration s'est tenu en urgence le 3 décembre 2015 en vue de la rédaction des modifications statutaires et de la fixation du nouveau nom de l'association, mais n'a pas donné lieu à la rédaction d'un compte rendu.
13 membres sur 17 du conseil d'administration attestent de la réalité de cette réunion et disent y avoir participé en vue de la rédaction des nouveaux statuts et du choix de la nouvelle dénomination de l'association, ces deux modifications étant à inscrire à l'ordre du jour de la prochaine assemblée générale extraordinaire. Aucun de ces témoins ne fait cependant état de l'organisation d'un vote formel, ni ne déclare avoir été régulièrement convoqué à cette seconde réunion.
Le procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire du 23 décembre 2015 mentionne curieusement que c'est à la demande des membres du bureau, qui est composé de quatre personnes, et de cinq membres du conseil d'administration que les modifications statutaires sont soumises à l'approbation des adhérents, ce qui fait douter du nombre exact de participants à la réunion du 3 décembre 2015 ayant effectivement approuvé la transmission à l'assemblée générale extraordinaire du projet de modification des statuts.
Aucun élément du dossier ne vient en outre établir que le conseil d'administration du 3 décembre 2015 a été réuni sur convocation régulière de ses membres, tandis qu'il ne résulte nullement du compte rendu de la réunion préparatoire du 26 novembre 2015 que la date du 3 décembre 2015 a été arrêtée d'un commun accord avec dispense de convocation écrite.
Cinq membres attestent, en effet, régulièrement en la forme qu'ils n'ont pas été convoqués au conseil d'administration ayant préparé l'assemblée générale extraordinaire du 23 décembre 2015.
La preuve n'est donc pas rapportée de la réunion régulière du conseil d'administration chargé de proposer à l'assemblée générale une modification statutaire complètement finalisée, laquelle impliquait a minima que tous les dirigeants fussent convoqués afin de permettre à chacun d'exposer son point de vue et de se déterminer en toute connaissance de cause.
Il n'est ainsi pas démontré que c'est sur l'initiative d'un conseil d'administration régulièrement réuni que les modifications statutaires litigieuses ont été approuvées par l'assemblée générale extraordinaire du 23 décembre 2015.
Compte tenu de l'importance de la délibération critiquée la violation des articles 8 et 12 des statuts est par conséquent caractérisée.
Il n'est pas davantage justifié de la convocation de tous les membres de l'association à l'assemblée générale extraordinaire en violation de l'article 12, le témoignage de la secrétaire de l'association ne constituant pas une preuve suffisante de l'accomplissement de cette formalité impérative en l'absence aux débats de tout bordereau ou registre d'envoi désignant les destinataires, ou de toute copie de convocation nominative.
La convocation à l'assemblée générale extraordinaire du 23 décembre 2015 datée du 5 décembre 2015, qui est versée au dossier et que certains attestent avoir reçue, se borne, en outre, à faire état d'une modification des statuts sans préciser les articles devant faire l'objet de cette modification.
Il s'agit là encore d'une violation de l'article 12 des statuts qui impose que la convocation indique sur quel article porte le projet de modification, et ce n'est pas la remise des nouveaux statuts aux seuls membres du conseil d'administration, dont il est justifié, qui a pu réaliser l'information préalable impérativement due à l'ensemble des adhérents appelés à se prononcer.
L'article 11 des statuts énonce que les décisions de l'assemblée générale sont prises par tous les membres de l'association « à condition d'avoir acquitté la cotisation annuelle'», tandis que l'article 4 prévoit que la qualité de membre de l'association s'acquiert par le paiement d'une cotisation annuelle minimum.
Le procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire du 23 décembre 2015 mentionne expressément que « l'association n'ayant jamais encaissé de cotisations et n'ayant donc aucune liste d'adhérents toutes les personnes présentes peuvent voter'».
L'appelant produit aux débats une liste nominative des adhérents de l'association au titre de l'année 2015 comportant une vingtaine de noms, dont la sincérité n'est pas contestée.
Or, selon la feuille de présence à l'assemblée générale extraordinaire du 23 décembre 2015, 64 personnes ont participé à la délibération litigieuse ayant conduit à l'adoption de la modification statutaire à la majorité de 47 voix contre 11 et 2 bulletins blancs.
Le vote favorable a ainsi été obtenu avec la participation de personnes n'ayant acquitté aucune cotisation, dont il n'est pas établi qu'elles seraient régulièrement devenues membres de l'association avec l'agrément exprès de la majorité des membres du conseil d'administration conformément à l'article 4 des statuts, ni même qu'elles auraient bénéficié d'un agrément tacite justifié par leur participation antérieure à la vie collective.
Il est dès lors certain que de nombreuses personnes, dont la qualité de membres de l'association en 2015 ne peut être justifiée, ont pris part et voté à l'assemblée générale contestée, ce que le compte rendu de la délibération reconnaît implicitement en rappelant que' «'l'association n'ayant jamais encaissé de cotisations toutes les personnes présentes peuvent voter'».
Il s'agit d'une irrégularité particulièrement grave de nature à altérer la sincérité du vote, dès lors que l'usage invoqué d'accepter toute adhésion spontanée, non parrainée et non accompagnée du règlement d'une cotisation, crée un risque évident de manipulation, surtout au moment de décider d'une modification statutaire particulièrement importante touchant aux membres de droit et au but même de l'association, dont l'activité est devenue plus sociale que strictement paroissiale.
L'accumulation de ces irrégularités affecte substantiellement la procédure de décision collective, puisque le conseil d'administration, organe exécutif de l'association, n'a pas valablement pris l'initiative de la modification, que la preuve n'est pas rapportée de la convocation régulière de l'ensemble des membres de l'association, qui n'ont, en outre, pas reçu une information préalable suffisante leur permettant de se déterminer en toute connaissance de cause, et, surtout, que la délibération modifiant les statuts a été décidée dans des conditions ne permettant pas de vérifier qu'aucune personne étrangère à l'association n'a pu prendre part au vote.
Bien que la sanction de nullité ne soit pas expressément prévue par les statuts, la cour estime par conséquent qu'il a été gravement porté atteinte au déroulement et à la sincérité de la délibération du 23 décembre 2015, dont l'annulation sera par conséquent prononcée par voie de réformation du jugement, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres moyens de nullité tirés de l'absence de vote unanime ou d'un abus de majorité.
En revanche sans les nommer, ni même fixer leur nombre, l'appelant n'est pas fondé à solliciter l'annulation de l'admission des nouveaux membres, dont l'adhésion à l'association ne résulterait que de leur participation à l'assemblée générale extraordinaire du 23 décembre 2015.
Surtout cette demande, qui tend en fait à l'exclusion de certains membres sans respect de la procédure contradictoire statutaire prévue à l'article 6, ne peut être examinée en l'absence des intéressés.
Le jugement sera par conséquent confirmé, mais pour d'autres motifs, en ce qu'il a débouté M. [C] de sa demande d'annulation de l'admission des nouveaux membres de l'association.
Sur les mesures accessoires
Les dépens de première instance et d'appel sont à la charge de l'association Saint Christophe de [Localité 6], anciennement dénommée Union paroissiale de [Localité 6].
L'équité commande enfin de faire application de l'article
700 du code de procédure civile au profit de l'appelant.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a déclaré M. [P] [C] recevable en son action et en ce qu'il a rejeté sa demande d'annulation de l'admission des nouveaux membres de l'association Saint Christophe de [Localité 6], anciennement dénommée Union paroissiale de [Localité 6],
Infirme pour le surplus le jugement déféré et statuant à nouveau':
prononce l'annulation de l'assemblée générale extraordinaire du 23 décembre 2015 ayant adopté la modification des statuts de l'association et le changement de nom de celle-ci,
Condamne l'association Saint Christophe de [Localité 6], anciennement dénommée Union paroissiale de [Localité 6], à payer à M. [P] [C] une indemnité de 1.500 € au titre de l'article
700 du code de procédure civile,
Condamne l'association Saint Christophe de [Localité 6], anciennement dénommée Union paroissiale de [Localité 6], aux entiers dépens dont distraction pour ceux d'appel au profit de la SELARL d'avocats GALLIZIA',DUMOULIN ALIVINERIE.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article
450 du code de procédure civile,
Signé par madame Clerc, président, et par madame Burel, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT