LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Promex, société anonyme dont le siège social est ... (17e), agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, y domiciliés en cette qualité,
en cassation d'un arrêt rendu le 23 janvier 1991 par la cour d'appel de Versailles (chambres réunies), au profit de :
18/ Mme Louise X..., épouse Y..., demeurant ... (14e),
28/ La société civile immobilière Villiot, dont le siège social est ... (17e), prise en la personne de ses représentants légaux, y domiciliés en cette qualité,
38/ La société civile immobilière du ..., dont le siège social est ... (17e), prise en la personne de ses représentants légaux, y domiciliés en cette qualité,
48/ La société civile immobilière Raspail 226, dont le siège social est ... (17e), prise en la personne de ses représentants légaux, y domiciliés en cette qualité,
58/ La société civile immobilière Niepce 15, dont le siège social est ... (17e), prise en la personne de ses représentants légaux, y domiciliés en cette qualité,
défenderesses à la cassation ; Les sociétés civiles immobilières Villiot, ... 226 et Niepce 15 ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt ; Les demanderesses aux pourvois principal et incident invoquent, chacune à l'appui de leur recours, le moyen unique identique de cassation annexé au présent arrêt ; LA COUR, composée selon l'article
L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 20 janvier 1993, où étaient présents :
M. de Bouillane de Lacoste, président, Mme Delaroche, conseiller rapporteur, M. Viennois, conseiller, Mme Le Foyer de Costil, avocat général, Mlle Ydrac, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme le conseiller Delaroche, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Promex, de Me Luc-Thaler, avocat de Mme Y..., de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat des sociétés civiles immobilières Villiot, ... 226 et Niepce 15, les conclusions de Mme Le Foyer de Costil, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; ! Sur le moyen unique, pris en ses trois branches, du pourvoi principal de la société Promex et du pourvoi incident des SCI Villiot, ... 226 et Niepce 15, lesquels sont identiques :
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que Mme Y..., agissant comme mandataire de la société de promotion immobilière Promex, laquelle était
gérante des sociétés civiles immobilières (SCI) Villiot, ... 226 et Niepce 15, a été chargée d'obtenir, moyennant indemnisation, le départ des occupants des immeubles achetés par ces sociétés en vue d'une démolition et reconstruction ; que des fonds lui ont été remis pour l'accomplissement de sa mission et que, n'ayant pu justifier de leur destination, lors d'un contrôle fiscal, en raison du caractère occulte des indemnisations, elle a fait l'objet d'un redressement d'impôts assorti de pénalités ; qu'elle a assigné la société Promex et les sociétés civiles immobilières pour les faire déclarer responsables de l'assimilation des fonds, par l'Administration, à des bénéfices non déclarés et leur faire supporter, par application de l'article
2000 du Code civil, la charge de son préjudice ; que l'arrêt attaqué (Versailles, 23 janvier 1991), statuant sur renvoi après cassation, a dit que la société Promex et les SCI Villiot, ... 226 devront garantir Mme Y... du montant des redressements fiscaux dont elle a été l'objet, à concurrence de 979 917 francs ; Attendu que ces sociétés reprochent à la cour d'appel d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, d'une part, que les impositions sur les revenus du mandataire ne constituent pas des pertes subies à l'occasion de l'exécution du mandat ; qu'en affirmant le contraire, l'arrêt a violé l'article
2000 du Code civil ; alors, d'autre part, que l'indemnisation réclamée par Mme Y... supposait la preuve de ce que les sommes versées par les SCI et prises en compte par l'administration fiscale comme honoraires non déclarés avaient été effectivement engagées pour le compte des sociétés mandantes ; qu'en ne répondant pas au moyen de celle-ci, lequel faisait valoir qu'il résultait de l'information pénale qu'aucun des tiers interrogés n'avait reçu la moindre somme de la part de Mme Y..., la cour d'appel a violé l'article
455 du nouveau Code de procédure civile ; et alors, enfin, que l'indemnisation des pertes subies par le mandataire à l'occasion de sa gestion suppose l'absence d'imprudence de la part de celui-ci ; qu'en se bornant à énoncer que les sociétés mandantes ne rapportaient pas la preuve d'une imprudence imputable à Mme Y..., sans s'expliquer sur le point de savoir si l'imprudence de cette mandataire commerçante, ne tenant aucune
comptabilité, ne résultait pas de la procédure pénale faisant apparaître, non seulement que les prétendus versement de sommes occultes à des tiers n'ont jamais eu lieu, mais encore que les sommes retenues à titre d'honoraires n'ont été déclarées ni aux sociétés mandantes ni au fisc, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ; Mais attendu qu'après avoir constaté que les opérations de
relogement appelaient pour les occupants ou les gérants d'immeubles des compensations financières se traduisant, pour des raisons fiscales évidentes, par le versement occulte de sommes en espèces, les juges du second degré ont retenu que c'était en accord avec ses mandants, sociétés de promotion immobilière expertes dans ce type d'opération, que Mme Y... avait exercé son mandat dans les limites convenues entre les parties qui travaillaient de concert depuis de nombreuses années ; qu'ils en ont déduit à bon droit que les impositions en cause ont constitué des pertes essuyées à l'occasion de sa gestion ; que la cour d'appel, qui a rappelé que Mme Y... avait été relaxée du chef d'abus de confiance, au motif, notamment, qu'aucun élément de la procédure pénale n'établissait qu'elle se fût conduite en mandataire infidèle, n'avait pas à répondre à une argumentation que cette motivation rendait inopérante et a souverainement estimé que la preuve d'une imprudence n'était pas rapportée ; D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS
:
REJETTE le pourvoi ;