Cour de cassation, Troisième chambre civile, 3 avril 2012, 11-10.492

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2012-04-03
Cour d'appel de Reims
2010-10-18

Texte intégral

Attendu selon l'arrêt attaqué

(Reims, 18 octobre 2010) que la société civile immobilière Saint loup (la SCI) propriétaire d'un local commercial donné à bail aux époux X..., a adressé à ces derniers une sommation leur enjoignant d'effectuer divers travaux et mettre fin à certaines de leurs activités puis, le 30 janvier 2008, un congé avec refus de renouvellement ; que les preneurs ont assigné la société bailleresse en contestation de la sommation ; qu'à titre reconventionnel, la SCI a demandé la résiliation du bail et l'expulsion des locataires ;

Sur le premier moyen

:

Vu

l'article 954, alinéa 2, du code de procédure civile, ensemble l'article 455, alinéa 1er, du même code ; Attendu que, s'il n'expose pas succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens, le juge, qui ne peut statuer que sur les dernières conclusions déposées, doit viser celles-ci avec l'indication de leur date ; Attendu que, pour déclarer de nul effet la sommation visant la clause résolutoire du bail commercial liant les parties, débouter la SCI de sa demande de résiliation du bail commercial et dire que le congé délivré par la SCI aux époux X... le 30 janvier 2008 ne pouvait prendre effet qu'au 30 septembre 2015, la cour d'appel s'est prononcée au visa des conclusions déposées par la SCI le 19 août 2010 ;

Qu'en statuant ainsi

, alors que la SCI Saint Loup avait déposé postérieurement des conclusions complétant son argumentation, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS

, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 octobre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Reims, autrement composée ; Condamne les époux X... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande des époux X... ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois avril deux mille douze

MOYENS ANNEXES

au présent arrêt Moyens produits par la SCP Bénabent, avocat aux Conseils pour la société Saint-Loup PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir déclaré de nul effet la sommation visant la clause résolutoire du bail commercial liant les parties, débouté la SCI SAINT LOUP de sa demande tendant à prononcer la résiliation du bail commercial, et d'avoir dit que le congé délivré par la SCI SAINT LOUP aux époux X... le 30 janvier 2008 ne pourra prendre effet qu'au 30 septembre 2015, le bail se poursuivant jusqu'à cette date aux conditions antérieures ; AUX MOTIFS QUE « la SCI SAINT LOUP a relevé appel de cette décision par déclaration du 13 juillet 2009 ; l'affaire a été radiée par ordonnance du 17 novembre 2009, elle a été réinscrite au rôle de la Cour par conclusions d'appel non soutenu notifiées le 26 mars 2010 par les époux X... et la SCI appelante a finalement pris des écritures au soutien de son recours ; qu'aux termes de ses dernières conclusions, notifiées le 19 août 2010, auxquelles il sera renvoyé pour un exposé complet de ses prétentions et moyens, par application de l'article 455 du Code de procédure civile, elle poursuit l'infirmation du jugement entrepris et demande à la Cour, statuant à nouveau, de : - constater l'acquisition de la clause résolutoire par l'effet de la sommation demeurée infructueuse du 5 décembre 2007, et ce, à compter du 5 janvier 2008, - subsidiairement, prononcer la résiliation du bail pour inexécution contractuelle et les condamner (lire : les époux X...) à verser une indemnité d'occupation de 1500 euros par mois à compter du 5 janvier 2009 (lire : 2008), date d'acquisition de la clause résolutoire ou à défaut de la décision à intervenir, - très subsidiairement, dire et juger que le congé avec refus de renouvellement en date du 30 janvier 2008 est valable et a pris son plein et entier effet à la date du 1er août 2008, et dire que la SCI SAINT LOUP n'est pas redevable d'une indemnité d'éviction ; - en tout état de cause, ordonner l'expulsion des preneurs et de tous occupants de leur chef, avec au besoin l'assistance d'un huissier et de la force publique ; - condamner les époux X... aux travaux de remise en état des locaux et désigner tel expert qu'il plaira afin de chiffrer le coût desdits travaux ; - débouter les époux X... de toutes leurs demandes, fins et conclusions,- les condamner au paiement d'une indemnité de procédure de 4. 000 euros ainsi qu'aux entiers dépens avec pour ceux d'appel, droit de recouvrement direct accordé à Maître Estelle Y..., avoué » (…) ; ALORS QUE le juge ne peut statuer que sur les dernières conclusions déposées par les parties ; que pour confirmer le jugement et débouter la SCI SAINT LOUP de ses demandes, la Cour d'appel a statué au visa de conclusions déposées par celle-ci le 19 août 2010 ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'elle avait déposé ses dernières conclusions d'appel le 10 septembre 2010, la Cour d'appel a violé l'article 954, alinéa 2, du Code de procédure civile ; SECOND MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir dit que le congé délivré par la SCI SAINT LOUP aux époux X... le 30 janvier 2008 ne pourra prendre effet qu'au 30 septembre 2015 et que le bail se poursuivra jusqu'à cette date aux conditions antérieures et dit n'y avoir lieu à ce stade à statuer sur les effets du congé et en particulier sur le droit des époux X... à une indemnité d'éviction ; AUX MOTIFS QUE « Sur la validité du congé avec refus de renouvellement délivré le 30 janvier 2008 par la SCI SAINT LOUP ; qu'en premier lieu les époux X... concluent à l'irrecevabilité de la demande nouvelle en cause d'appel tendant à voir valider le congé délivré le 30 janvier 2008 ; que l'article 564 du Code de procédure civile dispose que les parties ne peuvent soumettre à la Cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer la compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ; que l'article 565 ajoute que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent ; qu'en l'espèce, la demande de validation de congé sans indemnité d'éviction tend à voir interdire aux époux X... la poursuite de leur activité dans les lieux loués au motif des fautes qu'ils auraient commises, et à avoir mettre fin au lien contractuel existant entre les parties au seul tort des locataires ; qu'elle vise par suite pour l'essentiel un objet similaire à celui résultant de la demande de résiliation judiciaire du bail et doit être déclarée recevable au visa des dispositions précitées ; qu'ensuite les époux X... concluent à la nullité du congé, faute d'avoir été signifié à chacun d'eux distinctement ; mais qu'il appert des pièces produites par la SCI SAINT LOUP que celle-ci a bien fait signifier par Me Z..., huissier de justice associé à TROYES, le 30 janvier 2008, le congé avec refus de renouvellement litigieux, distinctement à chacun des époux, la signification étant faite à sa personne en ce qui concerne Madame X..., à domicile avec remise de l'acte à l'époux en ce qui concerne Monsieur X... ; qu'aucune irrégularité de forme n'entache par suite la délivrance dudit congé ; que sur le fond, il n'est pas contesté que les preneurs ont fait signifier au bailleur, par exploit d'huissier du 11 avril 2006, une demande de renouvellement du bail commercial originellement consenti par la SA Yves DAMONTE aux époux A..., renouvelé le 16 janvier 1998 par la SCI COKI, auteur immédiat de la SCI SAINT LOUP, aux époux B... qui l'ont cédé aux époux X... ; qu'en l'absence de réponse de la SCI SAINT LOUP dans les trois mois de la signification, conformément à l'article L 145-10 du Code de commerce, le bail s'est poursuivi par tacite reconduction pour une durée de 9 ans ; que vainement la SCI SAINT LOUP soutient que si aux termes de cet article, le défaut de réponse du bailleur implique acceptation de principe du renouvellement, il lui laisserait un droit d'option en cas de désaccord sur le montant du loyer du bail renouvelé, ; qu'en effet, l'article L 145-11 du Code précité prévoit que si le bailleur, sans être opposé au principe du renouvellement, désire obtenir une modification du prix du bail, il doit, dans le congé prévu à l'article L 145-9 ou dans la réponse à la demande de renouvellement prévue à l'article L 145-10, faire connaitre le loyer qu'il propose ; qu'en l'espèce, aucune demande de modification du loyer n'a été formée à l'occasion de la demande de renouvellement du congé, de sorte que l'acquiescement vaut pour le tout ; qu'il convient dès lors de dire que si le congé n'est pas nul en ce sens qu'il est délivré dans les formes prescrites par l'article L 145-9 du Code de commerce, il ne saurait en tout état de cause prendre effet avant le 30 septembre 2015, date à laquelle il conviendra le cas échéant de se prononcer sur l'octroi éventuel d'une indemnité d'éviction, l'examen de cette question étant à ce jour prématuré » ; ALORS QUE le bailleur a la faculté de refuser à tout moment le renouvellement du bail, même après une acceptation de principe, en exerçant son droit d'option ; que l'acceptation de principe du renouvellement du bail résultant de l'absence de réponse du bailleur à une demande de renouvellement formée par son locataire ne présente qu'un caractère provisoire et ne fait pas obstacle à l'exercice ultérieur, par le bailleur, de son droit d'option, qui peut être mis en oeuvre tant que les parties ne sont pas parvenues à un accord sur les conditions du bail renouvelé, et notamment sur son prix, pour autant que cet exercice intervienne dans le délai de prescription biennale ; qu'en l'espèce, si la SCI SAINT LOUP a tacitement accepté le principe du renouvellement du bail en s'abstenant de répondre à la demande de renouvellement formée par les époux X... le 11 avril 2006 à effet au 1er octobre 2006, cette acceptation ne présentait qu'un caractère provisoire en l'absence d'accord entre les parties sur les conditions de ce renouvellement et notamment sur son prix, et ne lui interdisait aucunement de faire jouer son droit d'option pour s'opposer postérieurement, dans le délai de prescription biennale (c'est-à-dire avant le 1er octobre 2008), au renouvellement du bail pour motif grave et légitime, ce qu'elle a fait en délivrant un congé avec refus de renouvellement aux époux X... le 30 janvier 2008 ; qu'en relevant cependant, pour dénier tout effet à ce congé valablement délivré par la SCI SAINT LOUP le 30 janvier 2008, que celle-ci ne disposait plus d'un droit d'option faute d'avoir formé une demande de modification du loyer à l'occasion de la demande de renouvellement du bail, la Cour d'appel a violé les articles L 145-10, L 145-11 et L 145-57 du Code de commerce.