Vu la procédure suivante
:
Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un autre mémoire, enregistrés les 29 novembre et 18 décembre 2017 et le 11 juin 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C...A...demande au Conseil d'Etat d'annuler le décret n° 2017-1412 du 27 septembre 2017 portant création de la métropole dénommée " Metz Métropole " et l'arrêté du préfet de la Moselle n° 2001-DRCL/1-042 du 31 octobre 2001 fixant la liste des communes incluses dans le périmètre du district de l'agglomération messine lors de sa transformation en communauté d'agglomération.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- la loi n° 2017-257 du 28 février 2017, en particulier son article 70 ;
- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Christian Fournier, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Laurent Cytermann, rapporteur public ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 12 juillet 2019, présentée par M. A... ;
Considérant ce qui suit
:
1. Au regard du dernier état de ses écritures, M. A... doit être regardé comme demandant l'annulation pour excès de pouvoir, d'une part, du décret du 27 septembre 2017 portant création de la métropole dénommée " Metz Métropole " et, d'autre part, des arrêtés du préfet de la Moselle du 31 octobre 2001 fixant la liste des communes incluses dans le périmètre du district de l'agglomération messine lors de sa transformation en communauté d'agglomération, du 10 décembre 2001 portant extension du périmètre du district de l'agglomération messine et autorisant sa transformation en communauté d'agglomération Metz Métropole (CA2M) et du 11 mars 2019 portant adoption des statuts de la métropole dénommée " Metz Métropole ".
Sur les conclusions tendant à l'annulation des arrêtés du 31 octobre 2001 et du 10 décembre 2001 :
2. Aux termes de l'article
R. 311-1 du code de justice administrative : " Le Conseil d'Etat est compétent pour connaître en premier et dernier ressort : / (...) / 2° Des recours dirigés contre les actes réglementaires des ministres et des autorités à compétence nationale et contre leurs circulaires et instructions de portée générale ; / (...) ". Aux termes de l'article
R. 351-4 du même code : " Lorsque tout ou partie des conclusions dont est saisi (...) le Conseil d'Etat relève de la compétence d'une (...) [juridiction administrative], (...) le Conseil d'Etat (...) est compétent, nonobstant les règles de répartition des compétences entre juridictions administratives, pour rejeter les conclusions entachées d'une irrecevabilité manifeste insusceptible d'être couverte en cours d'instance (...) ". Aux termes de l'article
R. 312-15 du même code : " Sous réserve de l'application des articles R. 312-6 à R. 312-14, les litiges relatifs à l'organisation ou au fonctionnement de toute collectivité publique autre que l'Etat et de tout organisme public ou privé, notamment en matière de contrôle administratif ou de tutelle, relèvent de la compétence du tribunal administratif dans le ressort duquel a son siège la collectivité ou l'organisme objet des décisions attaquées ".
3. Il résulte des dispositions précitées de l'article
R. 311-1 du code de justice administrative que le Conseil d'Etat est en principe incompétent pour se prononcer sur les conclusions de M. A... dirigées contre les arrêtés du 31 octobre 2001 et du 10 décembre 2001, pris par le préfet de la Moselle, sauf à constater leur irrecevabilité manifeste sur le fondement de l'article
R. 341-4 du même code. Si le ministre de l'intérieur invite le Conseil d'Etat à constater une telle irrecevabilité, en soutenant que ces conclusions, présentées dans un mémoire complémentaire après l'expiration du délai de recours contentieux contre le décret du 27 septembre 2017, sont tardives, d'une part les conclusions dirigées contre l'arrêté du 31 octobre 2001 figuraient déjà dans la requête introductive d'instance de M. A..., d'autre part il ne ressort pas des pièces du dossier que les arrêtés du 31 octobre 2001 et du 10 décembre 2001 auraient été publiés dans des conditions faisant courir le délai de recours. Dans ces conditions, il y a lieu de transmettre au tribunal administratif de Nancy les conclusions de M. A... dirigées contre les arrêtés du 31 octobre 2001 et du 10 décembre 2001.
Sur les conclusions tendant à l'annulation du décret du 27 septembre 2017 et, par voie de conséquence, de l'arrêté du 11 mars 2019 :
4. En vertu de l'article
L. 5217-1 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction issue de l'article 70 de la loi du 28 février 2017 relative au statut de Paris et à l'aménagement métropolitain : " La métropole est un établissement public de coopération intercommunal à fiscalité propre regroupant plusieurs communes d'un seul tenant et sans enclave au sein d'un espace de solidarité pour élaborer et conduire ensemble un projet d'aménagement et de développement économique, écologique, éducatif, culturel et social de leur territoire afin d'en améliorer la cohésion et la compétitivité et de concourir à un développement durable et solidaire du territoire régional. Elle valorise les fonctions économiques métropolitaines, ses réseaux de transport et ses ressources universitaires, de recherche et d'innovation, dans un esprit de coopération régionale et interrégionale et avec le souci d'un développement territorial équilibré. / (...) / Sous réserve d'un accord exprimé par deux tiers au moins des conseillers municipaux des communes intéressées représentant plus de la moitié de la population totale de celles-ci ou par la moitié au moins des conseils municipaux des communes représentant les deux tiers de la population, peuvent obtenir par décret le statut de métropole, à leur demande : / (...) 4° Les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de plus de 250 000 habitants ou comprenant dans leur périmètre, au 31 décembre 2015, le chef-lieu de région, centres d'une zone d'emplois de plus de 500 000 habitants, au sens de l'Institut national de la statistique et des études économiques. / (...) / La création de la métropole est prononcée par décret. Ce décret fixe le nom de la métropole, son périmètre, l'adresse de son siège, ses compétences à la date de sa création ainsi que la date de prise d'effet de cette création. Il désigne le comptable public de la métropole. La métropole est créée sans limitation de durée. / (...) ".
5. Il ressort des pièces du dossier que la communauté d'agglomération de Metz Métropole, établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre créé par l'arrêté du préfet de la Moselle du 26 mars 2013, entré en vigueur le 1er janvier 2014, a demandé, avec l'accord de plus de la moitié des conseils municipaux des communes intéressées représentant plus des deux tiers de la population totale de celles-ci, sa transformation en métropole. Estimant que les conditions mentionnées au 4° de l'article
L. 5217-1 du code général des collectivités territoriales étaient satisfaites, le Premier ministre a pris le décret du 27 septembre 2017, entré en vigueur le 1er janvier 2018, dont les articles 1er et 2 créent la métropole de Metz Métropole, par transformation de la communauté d'agglomération de Metz Métropole.
6. En premier lieu, aux termes de l'article
R. 432-4 du code de justice administrative : " (...) / Les recours et les mémoires, lorsqu'ils ne sont pas présentés par le ministère d'un avocat au Conseil d'Etat, doivent être signés par le ministre intéressé ou par le fonctionnaire ayant reçu délégation à cet effet ". Aux termes de l'article 1er du décret du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement : " A compter du jour suivant la publication au Journal officiel de la République française de l'acte les nommant dans leurs fonctions ou à compter du jour où cet acte prend effet, si ce jour est postérieur, peuvent signer, au nom du ministre ou du secrétaire d'Etat et par délégation, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité : / (...) / 2° Les chefs de service, (...) / (...) ". D'une part, le décret du 24 septembre 2017 ayant été pris sur le rapport du ministre de l'intérieur et celui-ci étant chargé de l'exécution de ce décret en vertu de son article 8, ce ministre a la qualité de ministre intéressé au sens des dispositions précitées de l'article
R. 432-4 du code de justice administrative. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que Mme B...a été régulièrement nommée dans ses fonctions de cheffe de service, adjointe au directeur des libertés publiques et des affaires juridiques, au ministère de l'intérieur, en dernier lieu par un arrêté du Premier ministre, du ministre de l'intérieur et de la ministre des outre-mer du 25 janvier 2017. En vertu de l'article 1er du décret du 27 juillet 2005, elle avait donc qualité pour signer, au nom du ministre de l'intérieur et par délégation, l'ensemble des actes entrant dans les attributions de la direction des libertés publiques et des affaires juridiques. Par suite, la fin de non-recevoir de M. A... tirée de ce que Mme B...n'avait pas qualité pour signer le mémoire en défense présenté par le ministre de l'intérieur doit être écartée.
7. En deuxième lieu, en vertu de l'article 1er de l'arrêté du préfet de la Moselle du 26 mars 2013 : " Il est créé, à compter du 1er janvier 2014, un nouvel établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre issu de la fusion de la communauté d'agglomération de Metz Métropole et de la communauté de communes du Val Saint-Pierre. / Ce nouvel établissement public est distinct des personnes morales fusionnées. Il appartient à la catégorie des communautés d'agglomération. / Il prend le nom de 'Metz Métropole' ". En vertu de l'article 4 du même arrêté : " Conformément aux dispositions de l'article
L. 5211-41-3 du code général des collectivités territoriales, la communauté d'agglomération exerce l'intégralité des compétences obligatoires, optionnelles et facultatives de la communauté d'agglomération de Metz Métropole et de la communauté de communes du Val Saint-Pierre, telles qu'elles figurent en annexe 1 ". Il ressort des pièces du dossier que cet arrêté, portant création de la nouvelle communauté d'agglomération de Metz Métropole, a été publié au recueil des actes administratifs du département de la Moselle le 2 avril 2013 et qu'il est devenu définitif. Par suite, le conseil communautaire a pu régulièrement délibérer, le 3 avril 2017, dans la composition résultant de cette création, sur la transformation de la communauté d'agglomération en métropole. Dans ces conditions, le moyen de M. A... tiré de ce qu'en l'absence de publication des arrêtés du préfet de la Moselle des 31 octobre 2001 et 10 décembre 2001, le conseil de communauté de la communauté d'agglomération de Metz Métropole ne pouvait être regardé comme ayant valablement siégé pour adopter la délibération du 3 avril 2017 par laquelle il autorisait son président à solliciter du préfet de la Moselle la transformation de cette communauté d'agglomération en métropole et que le décret attaqué est, à défaut de demande régulièrement formée en ce sens, entaché d'irrégularité, doit être écarté.
8. En troisième lieu, si M. A... soutient que le décret du 27 septembre 2017 est illégal dans la mesure où il n'indique pas les conseillers municipaux des communes intéressées qui ont voté en faveur ou en défaveur du projet de transformation de la communauté d'agglomération en métropole, ce moyen ne peut qu'être écarté, en tout état de cause, dès lors que les erreurs ou les omissions dans les visas d'un acte administratif ne sont pas de nature à en affecter la légalité.
9. En quatrième lieu, la notice explicative ayant pour objet de faciliter la compréhension du texte à l'occasion de sa publication au Journal officiel, un moyen tiré de ce qu'une notice explicative accompagnant un décret est entachée d'inexactitude ne peut être utilement soulevé à l'appui d'une demande d'annulation de ce décret. Par suite, le moyen tiré par M. A... de ce que le décret du 27 septembre 2017 serait entaché d'une erreur de fait en ce qu'il mentionne, dans sa notice, que la communauté d'agglomération de Metz Métropole a été créée par un arrêté du préfet de la Moselle du 1er janvier 2014, alors qu'elle l'a été par un arrêté de ce préfet du 26 mars 2013 prenant effet au 1er janvier 2014, doit être écarté.
10. En cinquième lieu, l'illégalité d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, ne peut être utilement invoquée par voie d'exception à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative que si cette dernière a été prise pour son application ou s'il en constitue la base légale. S'agissant d'un acte réglementaire, une telle exception peut être formée à toute époque, même après l'expiration du délai du recours contentieux contre cet acte. S'agissant d'un acte non réglementaire, l'exception n'est, en revanche, recevable que si l'acte n'est pas devenu définitif à la date à laquelle elle est invoquée, sauf dans le cas où l'acte et la décision ultérieure constituant les éléments d'une même opération complexe, l'illégalité dont l'acte serait entachée peut être invoquée en dépit du caractère définitif de cet acte.
11. Les actes relatifs à l'institution des structures des organismes de coopération entre collectivités territoriales et à la répartition des compétences entre ces organismes et les collectivités qui en sont membres ne revêtent pas le caractère d'actes réglementaires. Il en résulte que les arrêtés du préfet de la Moselle des 31 octobre 2001, 10 décembre 2001, 9 décembre 2004 et 26 mars 2013 ne revêtent pas un tel caractère.
12. Le décret attaqué, qui a été adopté sur le fondement de l'article
L. 5217-1 du code général des collectivités territoriales, n'a pas été pris sur la base ou pour l'application de ces arrêtés, qui ne forment pas avec le décret attaqué une opération complexe. Par suite, et en tout état de cause, l'exception d'illégalité soulevée par M. A... à leur encontre n'est pas recevable.
13. En sixième lieu, en vertu du I de l'article
L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales : " Dans chaque département, il est établi, au vu d'une évaluation de la cohérence des périmètres et d'un état des lieux de la répartition des compétences des groupements existants et de leur exercice, un schéma départemental de la coopération intercommunale prévoyant une couverture intégrale du territoire par des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre et la suppression des enclaves et discontinuités territoriales ".
14. Le schéma départemental de la coopération intercommunale constitue un document de référence de la coopération intercommunale dans le département. Toutefois, les dispositions de l'article
L. 5217-1 du code général des collectivités territoriales, qui régissent la transformation des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre en métropole, ne subordonnent pas cette transformation à la vérification de sa compatibilité avec les orientations du schéma départemental de coopération intercommunale. Par suite, le moyen de M. A... tiré de ce que le décret du 27 septembre 2017 est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'il méconnaît les orientations des schémas départementaux de coopération intercommunale des 23 décembre 2011 et 23 mars 2016 ne peut qu'être écarté.
15. En dernier lieu, si M. A... soutient que la communauté d'agglomération de Metz Métropole ne pouvait être transformée en métropole dès lors qu'elle compte moins de 500 000 habitants, ce moyen ne peut être qu'écarté dès lors que, d'une part, les dispositions du 4° de l'article
L. 5217-1 du code général des collectivités territoriales, dont il a été fait application en l'espèce, exigent seulement que l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre comprenant dans son périmètre le chef-lieu de région, comme c'était le cas pour la communauté d'agglomération de Metz Métropole, qui comprenait dans son périmètre la commune de Metz, chef-lieu de la région Lorraine au 31 décembre 2015, soit le centre d'une zone d'emplois de plus de 500 000 habitants, au sens de l'Institut national de la statistique et des études économiques, et que, d'autre part, M. A...ne conteste pas sérieusement que cette condition était remplie.
16. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation du décret du 27 septembre 2017. Dès lors, ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 mars 2019 par voie de conséquence de l'annulation du décret du 27 septembre 2017 ne peuvent qu'être également rejetées.
D E C I D E :
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Article 1er : Les conclusions de la requête de M. A... dirigées contre les arrêtés du préfet de la Moselle n° 2001-DRCL/1-042 du 31 octobre 2001 fixant la liste des communes incluses dans le périmètre du district de l'agglomération messine lors de sa transformation en communauté d'agglomération et n° 2001-DRCL/1-054 du 10 décembre 2001 portant extension du périmètre du district de l'agglomération messine et autorisant sa transformation en communauté d'agglomération Metz Métropole (CA2M) sont transmises au tribunal administratif de Nancy.
Article 2 : Les conclusions de la requête de M. A... dirigées contre le décret n° 2017-1412 du 27 septembre 2017 portant création de la métropole dénommée " Metz Métropole " et l'arrêté n° 2019-DCL/1-006 du 11 mars 2019 portant adoption des statuts de la métropole dénommée " Metz Métropole " sont rejetées.
Article3 : La présente décision sera notifiée à M. C...A..., au Premier ministre, au ministre de l'intérieur et au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.