Logo pappers Justice

Tribunal administratif de Grenoble, 2ème Chambre, 3 juillet 2023, 2007614

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal administratif de Grenoble
  • Numéro d'affaire :
    2007614
  • Type de recours : Excès de pouvoir
  • Dispositif : Rejet
  • Nature : Décision
  • Avocat(s) : SELARL HEINRICH AVOCATS
Voir plus

Chronologie de l'affaire

Tribunal administratif de Grenoble
3 juillet 2023

Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Par une requête et des mémoires enregistrés le 16 décembre 2020, le 11 février 2022 et le 29 septembre 2022, M. K S, Mme J S, Mme G A, M. L A, Mme E Q, M. D Q, Mme M I, M. P I, M. B I, M. H O, Mme R N, M. T N et M. L F, représentés par Me Heinrich, demandent au tribunal, dans le dernier état de leurs écritures : 1°) d'annuler la délibération du 25 février 2020 par laquelle le conseil communautaire de la communauté d'agglomération Thonon Agglomération a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal du Bas-Chablais, ensemble la décision de rejet de leur recours gracieux ; 2°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Thonon Agglomération une somme de 500 euros à verser à chacun des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - le classement des parcelles cadastrées section A n° 1708, 1709, 1711, 1745, 1746, 2823 et la création de l'OAP MAR 1 sont incompatibles avec les orientations du SCoT du Chablais dès lors que l'emplacement de cette zone et la densité prévus paraissent méconnaitre les orientations du SCoT ; - le classement des parcelles cadastrées section A n° 1708, 1709, 1711, 1745, 1746, 2823 en zone IAUH est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une erreur de droit ; - l'OAP MAR1 est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît l'article R. 151-8 du code de l'urbanisme. Par des mémoires en défense enregistrés le 15 juillet 2021, le 14 septembre 2022 et le 17 janvier 2023 (ce dernier non communiqué), la communauté d'agglomération Thonon Agglomération, représentée par Me Mollion, conclut au rejet de la requête, et à ce que soit mise à la charge des requérants une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que : - la requête est irrecevable dès lors que les requérants sont dépourvus d'intérêt à agir ; - les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier ; - le code de l'urbanisme ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Barriol ; - les conclusions de Mme Akoun ; - et les observations de Me Rochat, représentant les requérants et de Me Djeffal, représentant Thonon Agglomération.

Considérant ce qui suit

: 1. Par une délibération du 17 décembre 2015, le conseil communautaire de la communauté de communes du Bas-Chablais a prescrit l'élaboration du plan local d'urbanisme intercommunal. Le 16 juillet 2019, le bilan de la concertation a été tiré et le projet de plan local d'urbanisme intercommunal a été arrêté. Une enquête publique a été organisée du 4 novembre au 6 décembre 2019 à l'issue de laquelle la commission d'enquête a rendu un avis favorable le 17 janvier 2020. Par la délibération en litige du 25 février 2020, a été approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal du Bas-Chablais. M. et Mme S et les autres requérants demandent l'annulation de cette délibération ainsi que la décision de rejet de leur recours gracieux. Sur les conclusions à fin d'annulation : En ce qui concerne la compatibilité du PLUi avec le SCoT du Chablais : 2. Aux termes de l'article L. 131-4 du code de l'urbanisme : " Les plans locaux d'urbanisme et les documents en tenant lieu ainsi que les cartes communales sont compatibles avec : 1° Les schémas de cohérence territoriale () ". Aux termes de l'article L. 142-1 du même code : " Sont compatibles avec le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale : 1° Les plans locaux d'urbanisme () ". 3. Il résulte de ces dispositions que les plans locaux d'urbanisme sont soumis à une simple obligation de compatibilité avec ces orientations et objectifs. Si ces derniers peuvent être en partie exprimés sous forme quantitative, il appartient aux auteurs des plans locaux d'urbanisme, qui déterminent les partis d'aménagement à retenir en prenant en compte la situation existante et les perspectives d'avenir, d'assurer, ainsi qu'il a été dit, non leur conformité aux énonciations des schémas de cohérence territoriale, mais leur compatibilité avec les orientations générales et les objectifs qu'ils définissent. Pour apprécier la compatibilité d'un plan local d'urbanisme avec un schéma de cohérence territoriale, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle de l'ensemble du territoire couvert en prenant en compte l'ensemble des prescriptions du document supérieur, si le plan ne contrarie pas les objectifs qu'impose le schéma, compte tenu des orientations adoptées et de leur degré de précision, sans rechercher l'adéquation du plan à chaque disposition ou objectif particulier. 4. Le PLUi du Bas-Chablais classe les parcelles cadastrées section A n° 1708, 1709, 1711, 1745, 1746, 2823 en zone IAUh qui étaient précédemment classées en zone 1AUb du plan local d'urbanisme de la commune de Margencel. Ce tènement situé au hameau de Zusinges est grevé d'une OAP MAR1 dit " Champ de la Pierre " d'une superficie de 5 600 m2 prévoyant la création d'environ 45 logements pour une densité de 80 logements/hectares. Le rapport de présentation indique que la zone 1AUh représente des secteurs à densifier, en continuité de hameaux, présentant un enjeu d'intégration paysagère, qu'elles sont au nombre de trois et se situent sur les communes de Margencel et de Massongy, au sein de l'enveloppe urbaine, en extension, en renfoncement et en extension pure. Si la commune de Margencel fait partie dans le SCoT du Chablais des communes classées en " village " dans lesquels la densité moyenne minimale globale est fixée à 20 logements/ha, il ne s'agit que d'une moyenne minimale qui ne saurait faire obstacle à ce qu'une OAP prévoit une densité supérieure. La circonstance que la commission d'enquête publique a émis des observations sur l'OAP sectorielle MAR2 tendant à la réalisation de 73 logements sur un ténement de 15 000 m2 soit 50 logements/ha dans le hameau de Jouvernex est sans incidence sur la légalité de l'OAP litigieuse située dans le hameau de Zusinges et ce à supposer même que les deux hameaux auraient des caractéristiques similaires. Il en est de même de la circonstance que la comnune de Sciez faisant partie des " pôles structurants " du bassin aurait une OAP qui ne dépasse pas 30 logements/ha. Ainsi, la création de l'OAP MAR1 dit " Champ de la Pierre " située au hameau de Zusinges sur la commune de Margencel d'une superficie de 5 600 m2 qui prévoit la création de petits collectifs pour une densité de 80 logements/hectares et le classement de ces parcelles en zone IAUh est compatible avec les orientations du SCoT du Chablais. En ce qui concerne le classement des parcelles en zone IAUh grevées d'une OAP sectorielle : 5. D'une part, aux termes de l'article L. 151-6 du code de l'urbanisme : " Les orientations d'aménagement et de programmation comprennent, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, des dispositions portant sur l'aménagement, l'habitat, les transports, les déplacements et, en zone de montagne, sur les unités touristiques nouvelles. () ". 6. D'autre part, aux termes de l'article R. 151-20 du code de l'urbanisme : " Les zones à urbaniser sont dites " zones AU ". Peuvent être classés en zone à urbaniser les secteurs destinés à être ouverts à l'urbanisation. / Lorsque les voies publiques et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone, les orientations d'aménagement et de programmation et le règlement définissent les conditions d'aménagement et d'équipement de la zone. Les constructions y sont autorisées soit lors de la réalisation d'une opération d'aménagement d'ensemble, soit au fur et à mesure de la réalisation des équipements internes à la zone prévus par les orientations d'aménagement et de programmation et, le cas échéant, le règlement. / Lorsque les voies publiques et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU n'ont pas une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone, son ouverture à l'urbanisation est subordonnée à une modification ou à une révision du plan local d'urbanisme comportant notamment les orientations d'aménagements et de programmation de la zone ". 7. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par ce plan en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle est entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts. 8. Les élus communautaires ont choisi de maintenir l'ouverture à l'urbanisation du tènement constitué des parcelles cadastrées section A n° 1708, 1709, 1711, 1745, 1746, 2823 situé sur la commune de Margencel en le classant en zone IAUh et qui était précédemment classé en zone 1AUb du plan local d'urbanisme de cette commune. Le règlement de la zone 1 AUH prévoit que : " Les constructions et occupations autorisées dans la zone sont admises à condition de respecter les orientations d'aménagement et de programmation ". L'objectif n°13 du PADD prévoit de développer l'urbanisation de façon cohérente et raisonnée et d'encadrer le développement des tènements importants en superficie (de l'ordre de 2 500 m²), afin de favoriser une optimisation du foncier, une qualité urbaine et une bonne insertion dans le tissu urbain existant. Comprise dans l'OAP sectorielle MAR1 dit " Champ de la Pierre ", ce tènement de plus de 5 000 m2 s'insère au Sud du chef-lieu de la commune de Margencel au hameau de Zusinges. L'OAP se situe entre le hameau de Zusinges et un groupe de villas et est ceinturée au Sud par l'impasse du puit qui débouche sur la route Neuve. 9. S'agissant des conditions de desserte, l'OAP prévoit une desserte de la zone depuis la route de Zusinges à titre principal et précise que la voie de desserte interne, à double sens assurera un bouclage avec l'impasse du puits, et le PLUi prévoit également des emplacements réservés pour élargir la route neuve sur lequel débouche l'impasse du puits et la route de Zusinges. Eu égard au nombre de logements envisagés qui seront desservis par deux accès, ces aménagements ne paraissent pas manifestement insuffisants au stade de l'OAP pour assurer la desserte du projet alors même que la largeur des routes concernées serait actuellement comprise entre 3 et 4 mètres environ. A cet égard, rien ne s'oppose à ce que la desserte assurée par ces voies puisse être ultérieurement améliorée avant la délivrance des autorisations d'urbanisme requises sachant, d'une part, que les projets d'élargissement de voirie n'impliquent pas nécessairement de créer des emplacements réservés et, d'autre part, que des dispositifs de sécurisation pourront être installés. D'ailleurs, les requérants indiquent eux même qu'une réflexion de la commune est en cours sur l'aménagement du secteur. Si le département de la Haute-Savoie a donné un avis défavorable dans son avis du 29 août 2016 dans le cadre d'un permis de construire de 18 villas individuelles avec accès sur la voie communale dite " route de Zusinges " débouchant sur la RD 133 sur deux intersections distinctes compte tenu du manque de visibilité, il ne ressort pas des pièces du dossier que les accès prévus dans l'OAP seraient similaires, que les caractéristiques de ces voiries n'auraient pas évoluées depuis la délivrance de cet avis ou qu'elles n'évoluerons pas d'ici la délivrance des autorisations d'urbanisme et également que les élargissements prévus par les emplacement réservés ne permettront pas de pallier les éventuelles difficultés. Aussi, au stade de l'OAP, qui ne se confond pas avec le stade ultérieur des autorisations d'urbanisme qui devront respecter notamment les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette opération soit de nature à emporter des risques pour la sécurité publique. 10. Les requérants soutiennent que l'OAP portera gravement atteinte à la qualité de vie des habitants actuels ainsi qu'au patrimoine architectural du hameau historique. Toutefois, les requérants décrivent dans leurs écritures le hameau ancien de Zusinges comme composé essentiellement d'immeubles en R+1+C et d'une zone de villas. Or, l'OAP prévoit dans un chapitre II " Principes d'aménagement " que le gabarit des constructions est de type petits collectifs R+2+C/attique maximum et précise sur l'aspect architectural que le programme s'insère à proximité immédiate du hameau historique, et que les volumes, matériaux et couleurs devront s'inscrire dans le site et réinterpréter l'architecture locale. La proximité avec le hameau dont il ressort du plan de zonage qu'il est classé en secteur bâti à protéger au titre de l'article L. 151-19 du code de l'urbanisme ne saurait à ce stade faire obstacle au classement de ce tènement en zone IAUh et à l'OAP décrite précédemment. Enfin, l'OAP prévoit en partie Sud-Est un espace commun majoritairement végétalisé et prévoit également une trame végétale de type arbustif pour les espaces de voiries et de stationnements. Aussi, au stade de l'OAP, qui ne se confond pas avec le stade ultérieur des autorisations d'urbanisme qui devront respecter notamment les dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme et de l'article 1AUh.II.3 du règlement, il ne peut être utilement soutenu que cette opération serait de nature à porter atteinte au caractère et à l'intérêt des lieux avoisinants. 11. Par ailleurs, le site de l'OAP est affecté par un risque faible de glissement de terrains. Dès lors, compte tenu de cette intensité, ce risque ne fait pas obstacle à l'ouverture à l'urbanisation de ce tènement dans des conditions compatibles avec les orientations d'aménagement énoncées par cette OAP. 12. Enfin, les requérants ne sauraient utilement soutenir que d'autres communes couvertes par le PLUi, seraient plus favorables à l'implantation de cette OAP, dès lors qu'il n'appartient pas au juge de l'excès de pouvoir d'exercer un contrôle sur l'opportunité des choix d'urbanisation des auteurs du PLUi. Est également sans incidence sur la légalité de cette OAP la circonstance que d'autres OAP prévues sur d'autres communes auraient une densité moins forte sur des secteurs qualifiés de similaires par les requérants. 13. Il s'ensuit que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la création de l'OAP MAR1 dit " Champ de la Pierre " et le classement des parcelles en zone 1AUh sont entachés d'une erreur de droit, d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaissent l'article R. 151-8 du code de l'urbanisme. 14. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, que les conclusions à fin d'annulation de la délibération du 25 février 2020 et de la décision de rejet de leur recours gracieux doivent être rejetées. Sur les frais d'instance : 15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Thonon Agglomération, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par les requérants et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des requérants la somme que demande Thonon Agglomération au titre de ces mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme S et autres est rejetée. Article 2 : Les conclusions de la communauté d'agglomération Thonon Agglomération présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. K S en application des dispositions de l'article R. 751-3 du code de justice administrative et à la communauté d'agglomération Thonon Agglomération. Délibéré après l'audience du 19 juin 2023, à laquelle siégeaient : Mme Jourdan, présidente, M. Ban, premier conseiller, Mme Barriol, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 juillet 2023. La rapporteure, E. BARRIOL La présidente, D. JOURDAN La greffière, C. JASSERAND La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Savoie en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N°2007614