Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème Chambre, 6 mars 2018, 15BX02828

Synthèse

  • Juridiction : Cour administrative d'appel de Bordeaux
  • Numéro d'affaire :
    15BX02828
  • Type de recours : Plein contentieux
  • Décision précédente :tribunal administratif de Pau, 29 juin 2015
  • Lien Légifrance :https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/CETATEXT000036682722
  • Rapporteur : M. Pierre BENTOLILA
  • Rapporteur public :
    Mme MADELAIGUE
  • Président : Mme JAYAT
  • Avocat(s) : BRUNNER
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Chronologie de l'affaire

Cour administrative d'appel de Bordeaux
2018-03-06
tribunal administratif de Pau
2015-06-29

Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Procédure contentieuse antérieure : M. et Mme B...A...ont demandé au tribunal administratif de Pau, la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2007 pour un montant de 53 894 euros en droits, 5 389 euros pour les intérêts de retard et 5 389 euros pour la majoration, et au titre de l'année 2008, pour un montant en droits de 374 euros et au titre des prélèvements sociaux, pour l'année 2007, pour des montants de 29 488 euros en droits et 2949 euros au titre des intérêts de retard. Par un jugement n° 1400183 du 29 juin 2015, le tribunal administratif de Pau a rejeté la requête de M. et MmeA.... Procédure devant la cour : Par une requête du 14 août 2015, M. et MmeA..., représentés par MeC..., demandent à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 29 juin 2015 du tribunal administratif de Pau ; 2°) de les décharger des droits et pénalités en litige ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat, la somme de 3 000 euros, sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - à défaut d'enregistrement en qualité de SCI, la société " Les fils de Joseph A... " est devenue une société civile en participation à compter du 1er novembre 2002 ainsi qu'en attestent les statuts établis lors de la création de la SCCV Boucau promotion le 25 mars 2005, l'acte de cession des parts sociales du 26 juin 2006 et le protocole d'accord du 31 mai 2006 ; la société en participation est une véritable société devant être traitée fiscalement comme une entité distincte de la personne de ses membres, qui doit produire une déclaration de résultats et dont les opérations sont passibles de TVA imposée au nom de la société ; en vertu de l'article L 53 du livre des procédures fiscales, le seul interlocuteur de l'administration ne peut être que la société en participation ; - la proposition de rectification aurait dû être adressée à la société civile en participation " Les fils de JosephA... ", et dès lors la rectification est entachée de nullité ; - des réserves sont émises quant à la manière dont la vérificatrice a pu se procurer différents documents dont notamment une copie de cession de parts non signée et non enregistrée et différents mails ; - même si son objet social ne le prévoit pas, la SCI Bayonnaise de participation exerce des activités commerciales de prestations de service qui la rendent de plein droit imposable à l'impôt sur les sociétés, et la font relever de la taxe sur la valeur ajoutée ; la SCI Bayonnaise de participation n'a acquis et ne donne en location aucun immeuble et ne perçoit pas de revenus fonciers, ses fonctions étant d'assurer la promotion immobilière et de commercialisation du projet immobilier de la SCCV Boucau promotion ; alors même que le mandat donné à la SCI Bayonnaise de participation est un mandat civil, la SCI exerce de fait une activité de commercialisation et de promotion, et la jurisprudence du Conseil d'Etat (2 février 1996, n° 145845) s'attache à la réalité de l'activité, et non à celle qui est visée par l'objet social ; contrairement à ce qu'a retenu le tribunal administratif, les statuts ne fixent pas la rémunération de la SCI Bayonnaise de participation société à zéro ; il est par ailleurs indiqué à l'article 21 des statuts signés le 21 mars 2005, que la rémunération du gérant est fixée par décision collective ordinaire ; si la mention de l'absence de rémunération figure dans le protocole du 31 mai 2006, ce protocole n'a pas de valeur juridique faute d'avoir été retranscrit au registre du commerce et des sociétés et dès lors MM. A...n'étaient pas habilités à signer au nom de la société SCCV ; - la provision pour charges à payer qui a été comptabilisée pour l'année 2007 remplit toutes les conditions imposées par la doctrine et la jurisprudence pour être déductible et donc déduite ; la provision correspond à la rémunération envisageable de la société bayonnaise de participation, et elle a été comptabilisée le 31 décembre 2007 soit bien avant la dernière vente de l'appartement intervenue fin 2009 ; - si l'administration se fonde pour rejeter la déduction au titre des charges, de la provision relative aux charges à payer à la SCI la Bayonnaise, sur le fait que le protocole d'accord prévoit que la SCI avait droit à une proportion de 297/600 ème du résultat net comptable constaté au bilan de l'opération à l'issue de la cession de la totalité des appartements hors logements sociaux, cette circonstance n'est intervenue que le 31 juillet 2009, alors que la provision a été constituée au cours de l'exercice 2009, soit deux ans avant la vente du dernier appartement ; - dans le cadre de son activité, la SCI la Bayonnaise a assuré la construction complète, les démarches bancaires et la signature avec le conseil général, de 12 logements sociaux, pour un montant de 1 063 694 euros, ainsi que l'assistance des clients potentiels auprès des banques et des notaires. Par un mémoire en défense, enregistré le 24 février 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête de M. et MmeA.... Il soutient que : - en ce qui concerne les documents qui ont été emportés par la vérificatrice, la jurisprudence du conseil d'Etat (7 novembre 2012, Société France Immobilière Group, n° 328670) considère sur le fondement de l'article L 13 du livre des procédures fiscales, que le juge administratif n'est pas tenu de vérifier l'origine de photocopies dès lors qu'il n'est pas soutenu que ces photocopies n'ont pu être réalisées que par l'emport irrégulier de documents originaux ; - en l'espèce lors de la vérification de comptabilité de la SCCV Boucau promotion, qui s'est déroulée à la demande de la société, dans les locaux de son cabinet comptable, ont été remis à la vérificatrice, différents mails ainsi qu'un protocole d'accord, du 31 mai 2006, de cession des parts sociales, lequel protocole contrairement à ce que soutiennent les requérants, était signé par les parties ; - la SCCV Boucau promotion relève des dispositions combinées des articles 8-1° et 239 ter I du code général des impôts, dès lors que les conditions posées par ce dernier article sont réunies dans la mesure où la société n'est pas constituée sous forme commerciale, elle a pour objet la construction-vente, et les associés sont indéfiniment responsables ; la proposition de rectification devait être adressée à la SCCV Boucau et adressée à chacun des associés, sur le fondement de l'article L 53 du livre des procédures fiscales , pour tirer les conséquences de la vérification de la comptabilité de la société ; - contrairement à ce que soutient le requérant, la SCI " Les fils de JosephA... ", qui est devenue en 2002, une société en participation n'ayant pas la personnalité morale, n'était pas tenue de déposer une déclaration de résultats n° 2031 en bénéfices industriels et commerciaux dès lors qu'elle n'exerce aucune activité industrielle, commerciale ou artisanale et dès lors la notification devait être adressée aux associés ; - si la SCI Bayonnaise de participation a effectué des prestations pour le compte de la SCCV Boucau promotion, ces prestations ne correspondent pas à celles pour lesquelles les provisions ont été constituées, alors que le protocole du 31 mai 2006 indique que les missions de gérance accomplies par la SCI Bayonnaise de participation au profit de la SCCV Boucau promotion ne sont pas rémunérées ; - le tableau des appartements dont la SCI aurait assuré la commercialisation, ne mentionne ni la réalité des prestations de commercialisation, ni la réalité des commissions sur ventes, ni leur montant ; - les sommes comptabilisées au titre de provisions, comme des commissions sur ventes, ne sont pas déductibles, dès lors qu'elles ne correspondent pas à des charges effectives, et ne sont pas justifiées contrairement à ce qu'impose l'article 39 du code général des impôts ; - le montant des commissions sur ventes, de 404 203 euros, qui ne correspondent pas à des charges justifiées, est égal en réalité au montant du bénéfice déclaré au titre de l'exercice 2007. Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques ; - le code de justice administrative. Par décision du 18 janvier 2018, le président de la cour a désigné Mme Florence Madelaigue pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Pierre Bentolila, - et les conclusions de Mme Florence Madelaigue, rapporteur public.

Considérant ce qui suit

: 1. A la suite de la vérification de comptabilité de la société civile de construction vente (SCCV) Boucau promotion ayant porté sur les exercices clos en 2007 et 2008, l'administration fiscale a réintégré dans les résultats imposables de cette société les sommes de 404 203 euros en 2007 et 3 733 euros en 2008 comptabilisées en provisions pour charges à payer à la société Bayonnaise de participation, et considérées par l'administration comme constituant en réalité des distributions de bénéfices. M. et MmeA... ont été en conséquence assujettis à des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2007 et 2008 à hauteur de la quote-part d'actionnaire de M. A...dans la société civile de construction vente (SCCV) Boucau promotion. 2. M. et Mme A...relèvent appel du jugement du 29 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2007 pour un montant de 53 894 euros en droits, 5 389 euros pour les intérêts de retard et 5 389 euros pour la majoration, et au titre de l'année 2008, pour un montant en droits de 374 euros et au titre des prélèvements sociaux, pour l'année 2007, pour des montants de 29 488euros en droits et 2 949 euros au titre des intérêts de retard. Sur la régularité de la procédure d'imposition : 3. En premier lieu, aux termes de l'article 8 du code général des impôts : " Sous réserve des dispositions de l'article 6, les associés des sociétés en nom collectif et les commandités des sociétés en commandite simple sont, lorsque ces sociétés n'ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société. (...) Il en est de même, sous les mêmes conditions : 1° Des membres des sociétés civiles qui ne revêtent pas, en droit ou en fait, l'une des formes de sociétés visées au 1 de l'article 206 et qui, sous réserve des exceptions prévues à l'article 239 ter, ne se livrent pas à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35 ; 2° Des membres des sociétés en participation - y compris les syndicats financiers - qui sont indéfiniment responsables et dont les noms et adresses ont été indiqués à l'administration. ". 4. Ainsi que l'a relevé à bon droit le tribunal administratif, la SCI " Les fils de Joseph A...", constituée le 7 juillet 1972 entre MM.B..., D...et E...A...et actionnaire de la société civile de construction vente SCCV Boucau promotion, qui s'est abstenue de procéder à son immatriculation au registre du commerce et des sociétés avant le 1er novembre 2002 a, par suite, perdu sa personnalité morale à compter de cette même date, en application de l'article 44 de la loi susvisée du 15 mai 2001 selon lequel les sociétés civiles constituées avant le 1er juillet 1978, doivent, pour conserver leur personnalité juridique, procéder à leur immatriculation au registre du commerce et des sociétés avant le 1er novembre 2002. Par l'effet de l'article 44 de la loi du 15 mai 2001, MM.B..., D...et E...A...par ailleurs acquéreurs par acte de cession du 31 mai 2006, auprès de la SCI Bayonnaise de participation des 297 parts restantes de la SCCV, sont ainsi devenus propriétaires indivis de l'ensemble des parts de la SCCV Boucau promotion, et doivent, en conséquence, être regardés comme ayant été directement seuls détenteurs de ces parts sociales et, par suite, uniques associés de la SCCV, laquelle n'a pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux. Dans ces conditions, contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'administration a pu notifier directement à M. et Mme A...les propositions de rectification litigieuses en matière d'impôt sur le revenu, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, et le moyen invoqué par les requérants tiré de l'irrégularité de la notification de la proposition de rectification en litige au motif qu'elle n'aurait pas été adressée à la SCI " Les fils de Joseph A..." ne peut, dès lors, qu'être écarté. 5. En second lieu, si les requérants émettent des doutes sur les conditions d'obtention par le vérificateur de différents documents constitués par une copie de cession de parts non signée et non enregistrée et différents mails, il ne résulte pas de l'instruction et il n'est d'ailleurs pas soutenu que les photocopies de ces différents documents détenus par l'administration, n'auraient pu être réalisées que par un emport irrégulier de documents originaux, alors qu'au demeurant l'administration, fait valoir en défense sans être contredite, que lors de la vérification de comptabilité de la SCCV Boucau promotion, qui s'est déroulée à la demande de la société, dans les locaux de son cabinet comptable, ont été remis à la vérificatrice, différents mails ainsi qu'une copie du protocole d'accord, du 31 mai 2006, de cession des parts sociales, lequel protocole contrairement à ce que soutiennent les requérants, était signé par les parties. Les moyens tirés de l'irrégularité de la procédure d'imposition doivent donc être écartés. Sur le bien-fondé des impositions : 6. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : (...) 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice. ". En vertu de ces dispositions, seules peuvent être admises en charges déductibles à titre de provisions, les sommes correspondant à des pertes ou charges qui ne seront supportées qu'ultérieurement, à la condition, notamment, que ces pertes ou charges soient nettement précisées quant à leur nature, qu'elles soient susceptibles d'être évaluées avec une approximation suffisante et qu'elles apparaissent comme probables eu égard aux circonstances constatées à la date de clôture de l'exercice. 7. Il résulte de l'instruction que la SCCV Boucau promotion a déduit de ses résultats les sommes de 404 203 euros, pour l'exercice 2007, et de 3 733 euros, pour l'exercice 2008, au titre de provisions pour charges à payer à la SCI Bayonnaise de participation. Les requérants soutiennent que les sommes en cause correspondent à des commissions devant être versées par la SCCV à la SCI Bayonnaise de Participation pour des activités de gérance et de commercialisation de vingt et un appartements. Toutefois, les requérants ne justifient pas de la réalité d'une activité de gérance immobilière de la SCI Bayonnaise de Participation et n'apportent pas de précisions permettant de considérer qu'aux dates auxquelles ces provisions ont été constituées, des charges se rapportant à ces provisions apparaissaient comme probables eu égard aux circonstances constatées à la date de clôture de l'exercice. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a regardé les sommes de 404 203 euros, pour l'exercice 2007, et de 3 733 euros, pour l'exercice 2008, comme ne constituant pas des provisions déductibles au titre des charges à payer à la SCI Bayonnaise de participation. 8. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A...ne sont pas fondés à demander l'annulation du jugement du 29 juin 2015 du tribunal administratif de Pau et la décharge des impositions supplémentaires mises à leur charge au titre de l'impôt sur le revenu pour les années 2007 et 2008. Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 9. En vertu de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées à ce titre par M.et Mme B...A...doivent, dès lors, être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A...est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B...A...et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie en sera transmise à la direction spécialisée de contrôle fiscal Sud-Ouest. Délibéré après l'audience du 6 février 2018 à laquelle siégeaient : Mme Elisabeth Jayat, président, M. Pierre Bentolila, président-assesseur, M. Frédéric Faïck, premier conseiller, Lu en audience publique, le 6 mars 2018. Le rapporteur, B...Bentolila Le président, Elisabeth Jayat Le greffier, Florence Deligey La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics, en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N° 15BX02828