Chronologie de l'affaire
Cour d'appel de Grenoble (1re chambre civile) 28 mars 1994
Cour de cassation 25 juin 1996

Cour de cassation, Chambre commerciale, 25 juin 1996, 94-15322

Mots clés société · contrat · prêt · pourvoi · nantissement · procédure civile · approvisionnement · désigné · boissons · liquidation judiciaire · brasserie · stipulé · fournir · cautionnement · fonds de commerce

Synthèse

Juridiction : Cour de cassation
Numéro affaire : 94-15322
Dispositif : Rejet
Décision précédente : Cour d'appel de Grenoble (1re chambre civile), 28 mars 1994
Président : Président : M. BEZARD
Rapporteur : M. Grimaldi
Avocat général : Mme Piniot

Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Grenoble (1re chambre civile) 28 mars 1994
Cour de cassation 25 juin 1996

Texte

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Interbrew France, société anonyme, dont le siège est ..., 59426 Armentières Cedex,

en cassation d'un arrêt rendu le 28 mars 1994 par la cour d'appel de Grenoble (1re chambre civile), au profit :

1°/ de M. Carmel Z...,

2°/ de Mme Monique A..., épouse Z..., demeurant ensemble ...,

défendeurs à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt;

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 14 mai 1996, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Grimaldi, conseiller rapporteur, Mme Pasturel, conseiller, Mme Piniot, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre;

Sur le rapport de M. le conseiller Grimaldi, les observations de la SCP Ryziger et Bouzidi, avocat de la société Interbrew France, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat des époux Z..., les conclusions de Mme Piniot, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi;

Attendu, selon l'arrêt déféré (Grenoble, 28 mars 1994), que M. et Mme Z... ont conclu, le 10 janvier 1985 et pour une durée de neuf années, un contrat d'approvisionnement exclusif avec la brasserie Sébastien X... qui, en contrepartie, leur a fait consentir un prêt bancaire qu'elle a cautionné; que, le 20 juillet 1989, ils ont cédé leur fonds de commerce, en omettant d'imposer au cessionnaire le maintien du contrat d'exclusivité, et remboursé le prêt; que la société Interbrew France (société Interbrew), venant aux droits de la brasserie Sébastien X..., a formé opposition sur le prix de vente du fonds pour avoir paiement de l'indemnité de rupture de contrat qu'elle prétendait lui être due et qui était garantie par un nantissement pris sur le fonds;

Sur les premier et deuxième moyen

, ce dernier pris en ses deux branches, réunis :

Attendu que la société Interbrew reproche à l'arrêt d'avoir ordonné la mainlevée de l'opposition et de l'inscription du nantissement alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'il résulte des stipulations contractuelles que l'engagement d'approvisionnement exclusif pris par les époux Z... avait pour cause l'octroi d'un prêt par le Crédit lyonnais, prêt qui a été consenti, la société Interbrew s'étant portée caution des époux Z...; qu'ayant constaté que la contrepartie du contrat d'exclusivité résidait dans les avantages financiers obtenus par le client, en l'espèce, l'octroi d'un prêt du Crédit lyonnais, la cour d'appel qui, en l'état de ces constatations, décide que, dans la mesure où le prêt était remboursé par anticipation, il est certain que la contrepartie acceptée par les emprunteurs n'avait plus de cause, les époux Z... par l'effet de l'extinction de la dette et du cautionnement étant déchargés à l'égard de la société Interbrew de leur engagement d'approvisionnement exclusif, n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, d'où il résultait que la société Interbrew avait exécuté son engagement et que le contrat était donc causé, et par là même a violé les articles 1131 et suivants du Code civil; alors, d'autre part, qu'il résulte de la convention que "le client se fournira soit auprès de la brasserie, soit auprès de tel entrepositaire qui lui sera désigné"; que la société Interbrew faisait valoir que les époux Z..., suite à la liquidation judiciaire de la société Chabeuil Boissons, n'avaient jamais fait part de leurs difficultés d'approvisionnement cependant qu'aux termes du contrat il était stipulé une option laissant le choix aux époux Y... de se fournir auprès de la société Interbrew ou de la société Chabeuil Boissons, distributeur désigné au contrat; qu'en considérant qu'il résultait du contrat que la fourniture devait s'effectuer auprès du dépositaire désigné par la société Sébastien X..., celle-ci, après que la société Chabeuil Boissons ait cessé ses livraisons en raison de la procédure collective dont elle faisait l'objet n'ayant pas désigné d'autre dépositaire aux époux Z..., contrairement à la convention ci-dessus, la cour d'appel, qui n'a pas pris en considération le fait que les époux Z... pouvaient s'approvisionner auprès de la société Interbrew comme stipulé au contrat, a violé l'article 1134 du Code civil; et alors, enfin, qu'il résulte de la convention que le client se fournira aurpès de la société Interbrew soit auprès de tel entrepositaire qui lui sera désigné; que la société Interbrew faisait valoir que les époux Z... suite à la liquidation judiciaire de la société Chabeuil Boissons n'avaient jamais fait part de leurs difficultés d'approvisionnement, cependant qu'aux termes du contrat il était stipulé une option laissant le choix aux époux Z... de se fournir auprès de la société Interbrew ou de la société Chabeuil Boissons, distributeur désigné au contrat; qu'en ne recherchant pas si les époux Z... avaient sollicité la société Interbrew afin d'être approvisionnés conformément au

contrat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil;

Mais attendu qu'après avoir stipulé une option pour M. et Mme Z... à s'approvisionner "soit auprès de la brasserie, soit auprès de tel entrepositaire" qui leur sera désigné, le contrat ajoute que la brasserie désigne "pour l'exécution du présent contrat" la société Chabeuil Boissons ;

qu'en l'état de l'ambiguïté créée par le rapprochement de ces termes, la cour d'appel a souverainement estimé que M. et Mme Z... devaient s'approvisionner auprès de la seule société Chabeuil Boissons; qu'ainsi, abstraction faite des motifs erronés mais surabondants critiqués par la première branche, la cour d'appel a légalement justifié sa décision; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ces trois branches;

Et

sur le troisième moyen

:

Attendu que la société Interbrew reproche encore à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à M. et Mme Z... la somme de 10 000 francs à titre de dommages-intérêts alors, selon le pourvoi, que ces derniers, comme le constate l'arrêt, sollicitaient l'allocation de la somme de 5 000 francs à titre de dommages-intérêts; qu'en condamnant cependant la société Interbrew à payer la somme de 10 000 francs à M. et Mme Z... pour avoir maintenu abusivement le nantissement et l'opposition formée entre les mains du notaire, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé les articles 4 et 5 du nouveau Code de procédure civile;

Mais attendu, dès lors que la société Interbrew reproche à l'arrêt d'avoir accordé à M. et Mme Z... plus qu'il n'a été demandé, il lui appartenait de présenter requête à la juridiction qui a statué, dans les conditions prévues aux articles 463 et 464 du nouveau Code de procédure civile; que le moyen est donc irrecevable;

PAR CES MOTIFS

:

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Interbrew France, envers les époux Z..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Interbrew à payer à M. et Mme Z... la somme de 10 000 francs;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du vingt-cinq juin mil neuf cent quatre-vingt-seize.