Cour d'appel d'Amiens, 29 septembre 2022, 20/06194

Synthèse

  • Juridiction : Cour d'appel d'Amiens
  • Numéro de pourvoi :
    20/06194
  • Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
  • Décision précédente :tribunal judiciaire d'Arras, 16 novembre 2020
  • Lien Judilibre :https://www.courdecassation.fr/decision/633fc2b5e633183e2ee177c2
  • Président : Madame Jocelyne RUBANTEL
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Chronologie de l'affaire

Cour d'appel d'Amiens
2022-09-29
tribunal judiciaire d'Arras
2020-11-16

Texte intégral

ARRET

N° 714 [Z] C/ CPAM DE L'ARTOIS COUR D'APPEL D'AMIENS 2EME PROTECTION SOCIALE ARRET DU 29 SEPTEMBRE 2022 ************************************************************* N° RG 20/06194 - N° Portalis DBV4-V-B7E-H6HI JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ARRAS EN DATE DU 16 novembre 2020 PARTIES EN CAUSE : APPELANT Monsieur [I] [Z] [Adresse 4] [Localité 3] Représenté et plaidant par Me Elodie HANNOIR, avocat au barreau de BETHUNE, vestiaire : 35 ET : INTIME CPAM DE L'ARTOIS agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège [Adresse 1] [Adresse 1] [Localité 2] Représentée et plaidant par Mme [L] [N] dûment mandatée DEBATS : A l'audience publique du 02 Décembre 2021 devant Mme Véronique CORNILLE, conseiller, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 07 février 2022. GREFFIER LORS DES DEBATS : Mme Marie-Estelle CHAPON COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE : Mme Véronique CORNILLE en a rendu compte à la Cour composée en outre de: Madame Jocelyne RUBANTEL, Président, Mme Chantal MANTION, Président, et Mme Véronique CORNILLE, Conseiller, qui en ont délibéré conformément à la loi. PRONONCE : Le 07 février 2022, le délibéré a été prorogé au 29 septembre 2022. Le 29 Septembre 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Madame Jocelyne RUBANTEL, Président a signé la minute avec Mme Blanche THARAUD, Greffier. * * * DECISION M. [I] [Z], né en 1950 ayant travaillé dans l'industrie automobile entre 1972 et 2008, a transmis une déclaration de maladie professionnelle à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois enregistrée le 11 avril 2017, sur la base d'un certificat médical établi le 22 mars 2016 par le docteur [R] mentionnant la 'découverte de formations papillomateuses intra-vésicales'. S'agissant d'une maladie professionnelle hors tableau avec un taux d'incapacité permanente partielle prévisible supérieur à 25%, après avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) de la région [Localité 7] Hauts-de-France, la CPAM de l'Artois a notifié à l'assuré le 20 décembre 2017, une décision de refus de prise en charge de la maladie au titre de la législation sur les risques professionnels. M. [I] [Z] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Arras d'un recours contre la décision du 17 janvier 2018 de la commission de recours amiable de la CPAM de l'Artois ayant rejeté sa contestation du refus de prise en charge. Par un jugement avant dire droit du 14 mars 2019, le tribunal des affaires de sécurité sociale devenu tribunal de grande instance d'Arras a ordonné la saisine du CRRMP de la région Rouen-Normandie, lequel a, par avis du 23 octobre 2019, confirmé l'absence de lien direct entre la pathologie et l'activité professionnelle. Par jugement du 16 novembre 2020, le tribunal judiciaire d'Arras, pôle social, a : - débouté M. [I] [Z] de son recours à l'encontre de la décision de la commission de recours amiable de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois rendue le 12 mai 2018, - dit que la pathologie déclarée par M. [I] [Z] le 11 avril 2017 ne peut être prise en charge au titre de la législation professionnelle, - rejeté la demande formée par M. [I] [Z] au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Par courrier recommandé réceptionné le 18 décembre 2020, M. [I] [Z] a interjeté appel du jugement qui lui avait été notifié le 26 novembre 2020. Les parties ont été convoquées à l'audience du 2 décembre 2021. Par conclusions communiquées au greffe le 1er septembre 2021 et soutenues oralement à l'audience, M. [I] [Z] demande à la cour de : - infirmer le jugement rendu le 16 novembre 2020 par le tribunal judiciaire d'Arras en toutes ses dispositions, - infirmer la décision de la commission de recours amiable de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois rendue le 12 mai 2018 refusant la prise en charge de sa maladie au titre de la législation professionnelle, - dire que la pathologie déclarée le 11 avril 2017 sera prise en charge au titre de la législation professionnelle, - condamner la CPAM de l'Artois au versement de la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, - la condamner aux dépens. Par observations oralement présentées à l'audience, la CPAM de l'Artois demande à la cour de confirmer le jugement dont appel et de débouter M. [I] [Z] de sa demande fondée sur l'article 700 du code procédure civile.

SUR CE LA COUR,

M. [I] [Z] soutient avoir été exposé durant l'intégralité de sa carrière professionnelle au trichloréthylène, au white spirit, aux gaz d'échappement, aux huiles de vidange, et au kérosène, substances cancérigènes à l'origine de sa maladie. A ce titre, il se prévaut de plusieurs témoignages d'anciens collègues de travail ainsi que de communications syndicales sur les conditions de travail qui étaient les siennes alors qu'il était employé par la société française de mécanique de [Localité 5] entre 1972 et 2008 et faisant état de la présence constante de vapeurs toxiques sur son lieu de travail. De même, invoquant plusieurs études issues de la littérature médicale, M. [I] [Z] affirme que les substances auxquelles il a été exposé, dont certaines relèvent de la catégorie des amines aromatiques et des hydrocarbures aromatiques polycycliques, sont la cause de l'essentiel des cancers de la vessie reconnus d'origine professionnelle. A ce titre, il conteste la position adoptée par les CRRMP des régions [Localité 7] Hauts-de-France et [Localité 6]-Normandie retenant une absence de lien direct et essentiel entre la pathologie déclarée et l'exposition professionnelle en raison d'un tabagisme actif pourtant modéré et sevré plus de vingt ans avant l'apparition de cette maladie. En réponse, la CPAM de l'Artois expose qu'en raison de facteurs extra-professionnels comme le tabagisme actif, il ne peut être établi un lien essentiel entre l'exposition professionnelle et la maladie déclarée par M. [I] [Z]. Elle ajoute que ce lien ne saurait davantage être établi en raison d'une durée d'exposition insuffisante. Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des prétentions et moyens. Sur le caractère professionnel de l'accident En application de l'article L.461-1 du code de la sécurité sociale, est présumée professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau. Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime. Peut être également reconnue d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu'elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d'un taux évalué dans les conditions mentionnées à l'article L. 434-2 et au moins égal à un pourcentage déterminé. Dans les cas mentionnés aux deux alinéas précédents, la caisse primaire reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. La composition, le fonctionnement et le ressort territorial de ce comité ainsi que les éléments du dossier au vu duquel il rend son avis sont fixés par décret. L'avis du comité s'impose à la caisse dans les mêmes conditions que celles fixées à l'article L. 315-1. En l'espèce, il y a lieu de relever que le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de la région Tourcoing Hauts-de-France a, aux termes de son avis du 13 décembre 2017, retenu que « M. [I] [Z], né en 1950, a travaillé dans l'industrie automobile de 1972 à 2007 successivement à différents postes, essentiellement comme technicien de fabrication et technicien de méthode. Le dossier nous est présenté au titre du 4ème alinéa pour une tumeur maligne de la vessie constatée le 1er janvier 2016. Après avoir étudié les pièces du dossier communiqué, le CRRMP constate que les nuisances rapportées dans le dossier comportent des solvants dont le trychlorétylène et des huiles de coupe. Les données scientifiques actuelles concernant le trychlorétylène sont insuffisantes pour estimer qu'il existe un lien avéré avec le cancer de vessie. Par ailleurs, l'exposition aux huiles de coupe qui ont pu contenir des hydrocarbures aromatiques polycycliques a été de courte durée et parait insuffisante pour avoir généré la pathologie présentée, qui peut par ailleurs être expliquée par les facteurs confondants extra professionnels. Pour toutes ces raisons, il ne peut être retenu de lien direct et essentiel entre l'affection présentée et l'exposition professionnelle ». De même, saisi par le tribunal des affaires de sécurité social d'Arras, le CRRMP de la région Rouen-Normandie, par avis défavorable du 23 octobre 2019, a retenu que « l'activité professionnelle de mécanicien exercée par M. [Z] de 1972 à 2007, l'a vraisemblablement exposé à des huiles de coupe ayant pu être chargées en hydrocarbures aromatiques polycycliques (à la fois par voie respiratoire et par voie cutanée). Cette exposition est connue comme pouvant être responsable de l'apparition de tumeur de la vessie. Cependant, il existe dans ce dossier un facteur de risque extra-professionnel majeur pour cette pathologie et le caractère essentiel du lien ne peut être retenu ». Si M. [I] [Z] présente des témoignages d'anciens collègues de travail et des communications syndicales faisant état d'un environnement de travail sujet à des émanations de vapeurs, la cour relève que ces éléments s'avèrent peu circonstanciés et précis tant sur leurs compositions que sur leur lien éventuel avec la maladie dont il est atteint. Or, s'agissant strictement des substances dont le lien avec l'apparition du cancer de la vessie est connu, le procès-verbal de constatation dressé par l'agent assermenté de la caisse relève l'existence d'une exposition avérée particulièrement courte aux huiles de coupe, aux fumées d'hydrocarbure et au trychlorétylène entre 1972 et 1974. Il est également établi que M. [I] [Z] présentait un tabagisme actif concomitamment à cette exposition et a minima jusqu'en 1996 qui, selon la même littérature médicale dont l'appelant se prévaut devant la cour, constitue un risque extra-professionnel majeur dans l'apparition du cancer de la vessie. En tout état de cause, s'il ne saurait être remis en cause l'existence d'une exposition professionnelle à certains hydrocarbures aromatiques polycycliques comme l'ont relevé les deux comités saisis, il est toutefois observé que cette exposition, avérée sur une période particulièrement courte, entre également en concurrence avec un risque extra-professionnel majeur dû à la consommation de tabac. Dans ces conditions, ne pouvant être établi l'existence d'un lien essentiel entre l'exposition professionnelle et la pathologie déclarée par M. [I] [Z], c'est à bon droit que les premiers juges l'ont débouté de sa demande tendant à la reconnaissance du caractère professionnel de sa maladie. Le jugement entrepris sera confirmé en toutes ses dispositions. Sur les frais irrépétibles M. [I] [Z], qui succombe en ses prétentions, sera débouté de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile. Sur les dépens Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. M. [I] [Z], qui succombe, est condamné aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ; Y ajoutant, Déboute M. [I] [Z] de sa demande tendant à la condamnation de la CPAM de l'Artois au titre des frais irrépétibles d'appel ; Condamne M. [I] [Z] aux dépens d'appel. Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. Le Greffier,Le Président,