AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Monsieur Jean-Claude MARGOLINE, demeurant à Paris (16e), ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 4 mars 1987 par la cour d'appel de Versailles (1re chambre, 1re section), au profit de :
1°/ Monsieur X... DES SERVICES FISCAUX DES HAUTS-DE-SEINE NORD, dont le siège est à Nanterre (Hauts-de-Seine), ...,
2°/ Monsieur Y... PRINCIPAL DES IMPOTS DE GENNEVILLIERS, domicilié à Gennevilliers (Hauts-de-Seine), ...,
défendeurs à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article
L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 18 juillet 1989, où étaient présents : M. Defontaine, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Sablayrolles, rapporteur, M. Hatoux, conseiller, M. Curti, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Sablayrolles, les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Liard, avocat de M. Z..., de Me Foussard, avocat de M. Y... principal des impôts de Gennevilliers, les conclusions de M. Curti, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le premier moyen
:
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Versailles, 4 mars 1987), que le receveur principal des impôts de Gennevilliers ont engagé contre M. Margoline, président de la société anonyme Céro-France, mise en liquidation des biens, une action tendant à ce qu'il soit déclaré solidairement tenu, sur le fondement de l'article
L. 267 du livre des procédures fiscales, au paiement des sommes dues à l'Administration par la société qu'il dirigeait ;
Attendu que M. Margoline fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande de sursis à statuer jusqu'à l'aboutissement d'une procédure pénale diligentée contre lui pour fraude fiscale, alors que, selon le pourvoi, en vertu de la règle "le criminel tient le civil en l'état", le juge civil est tenu de surseoir à statuer chaque fois que la solution du procès pénal est susceptible d'avoir une influence sur le litige qui lui est soumis ; que tel était bien le cas en l'espèce, en dépit des différences -évidentes- de fondement des deux actions exercées, dès lors que des faits identiques avaient à être appréciés respectivement à la fois par le juge répressif et par le juge civil ; qu'en refusant néanmoins de surseoir à statuer, la cour d'appel a violé l'article
4 du Code de procédure pénale ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que l'action dont elle était saisie n'avait ni la même cause ni le même objet que celle mise en mouvement devant la juridiction pénale, l'arrêt a retenu qu'une - décision de non-lieu ou de relaxe dans l'instance pénale, ne prouverait pas que M. Margoline n'avait pas méconnu de façon répétée ses obligations fiscales, ce dont il a déduit que l'issue de la procédure pénale n'était pas susceptible d'influencer la décision à prendre dans le litige civil ; que, par cette seule considération, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen
:
Attendu que M. Margoline fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli la demande du receveur principal des impôts, alors que, selon le pourvoi, ainsi que le faisaient valoir ses conclusions d'appel, il est de règle en matière fiscale qu'une société, victime de factures impayées par ses clients, récupère la TVA initialement versée au Trésor au titre de ces mêmes factures ; qu'il en résultait en l'espèce, compte tenu de dix millions de francs d'impayés dont avait à pâtir la société Céro-France à l'époque considérée, que la dette réelle de la société vis-à-vis du Trésor était très inférieure aux chiffres en litige ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, la cour d'appel a privé sa décision de motifs et violé l'article
455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que, par motifs propres et adoptés, la cour d'appel a relevé qu'en ce qui concerne la TVA, le receveur des impôts s'est fondé sur les propres déclarations faites par M. Margoline, sans paiement correspondant, et a retenu que la créance a été authentifiée par divers avis de mise en recouvrement émis par le receveur des impôts suivis d'une mise en demeure et d'avis à tiers détenteur demeurés infructueux ; qu'elle a ainsi répondu aux conclusions invoquées ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS
:
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Margoline, envers M. X... des services fiscaux des Hauts-de-Seine Nord et M. Y... principal des impôts de Gennevilliers, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du vingt quatre octobre mil neuf cent quatre vingt neuf.