Sur le premier moyen
: attendu que, selon les enonciations de l'arret infirmatif attaque (colmar, 11 octobre 1974), la societe sofasic s'adressait habituellement a la societe d'exploitation des transports gerard jung afin de pourvoir, en qualite de commissionnaire, au transport des meubles de sa fabrication pour en assurer la livraison a la clientele ;
Que la sofasic fut placee en etat de reglement judiciaire alors que, pour transports anterieurs, elle restait devoir une somme de 10 421,01 francs a la societe jung, et qu'elle venait de confier a celle-ci, pour les expedier, un certain nombre de sieges ;
Que la societe jung se prevalant du privilege institue par l'article
95 du code de commerce, demanda a justice que ces meubles lui fussent attribues a dire d'expert en reglement de sa creance, a due concurrence ;
Attendu qu'il est fait grief a
la cour d'appel d'avoir fait droit a cette demande, alors, selon le pourvoi, que le decret n° 61-679 du 30 juin 1961 interdit a toute personne physique ou morale d'exercer l'activite de commissionnaire de transport si elle n'est pas munie d'une licence speciale, et alors que la societe jung, des lors qu'elle n'etait pas titulaire de cette licence, exercait irregulierement l'activite de commissionnaire de transport et ne pouvait, des lors, reclamer en justice le benefice des droits et des prerogatives attaches a cette profession, ce qui lui interdisait d'invoquer le privilege de l'article
95 du code de commerce ;
Mais attendu
que la reglementation administrative a laquelle se refere le moyen n'edicte et n'implique en aucune facon la nullite des contrats passes par des professionnels se trouvant en situation irreguliere ;
Qu'ainsi la cour d'appel a decide, a bon droit, que l'irregularite invoquee n'a entraine la nullite d'aucun des contrats de commission de transport passes entre la societe jung et la sofasic ;
Que le moyen est mal fonde ;
Sur le deuxieme moyen
, pris en ses deux branches : attendu qu'il est encore reproche a la cour d'appel d'avoir statue comme elle l'a fait, alors, selon le pourvoi, d'une part, que, comme l'avaient declare les premiers juges, l'article
95 du code de commerce confere aux commissionnaires un simple privilege sur la valeur des marchandises, qui lui ouvre seulement le droit de faire vendre aux encheres lesdites marchandises, selon la procedure de l'article
93 du code de commerce sans que les regles applicables en matiere de gage conventionnel et, en particulier, celles edictees par l'article
2078 du code civil, puissent etre etendues a ce privilege, d'autre part, que la loi du 23 mars 1863 a soumis le gage commercial a un regime propre, independant du regime concernant le gage civil ;
Que les dispositions de cette loi excluent l'application de celles du code civil relatives au gage et, plus specialement, l'article
2078 de ce code ;
Que, des lors, en admettant que le privilege du commissionnaire puisse etre assimile a un gage commercial, la societe jung ne pouvait, pour autant, se reclamer de ce texte pour demander de se faire attribuer les marchandises litigieuses en toute propriete ;
Mais attendu
que, contrairement a ce que soutient le pourvoi, le creancier gagiste -meme dans le cas d'une creance commerciale, et du privilege dont beneficie le commissionnaire de transport- trouve dans les dispositions combinees des articles
93 et
95 du code de commerce, tel que le texte en a ete modifie par la loi du 23 mai 1863, la faculte de se faire attribuer le gage par le juge a dire d'expert, comme il est prevu a l'article
2078 du code civil ;
Que le moyen, en ses deux branches, est mal fonde ;
Sur le troisieme moyen
, pris en ses deux branches : attendu que l'arret est encore critique en ce qu'il a admis que la creance entiere de la societe jung se trouvait garantie par le privilege de l'article
95 du code de commerce, alors, selon le pourvoi, d'une part, que les dispositions dudit article 95, qui sont d'interpretation stricte, ne conferent au commissionnaire un privilege sur les marchandises qui sont en sa possession que pour garantir les debours par lui faits a l'occasion d'operations de transport relatives a ces marchandises, d'autre part, que le commissionnaire de transport, lorsqu'il n'a plus en sa possession que le commissionnaire de transport, lorsqu'il n'a plus en sa possession les marchandises faisant lobjet d'une operation de transport determinee, perd necessairement le benefice de son privilege en ce qui concerne les debours par lui faits a l'occasion de cette operation et alors que ce privilege, qui s'est trouve definitivement eteint, ne saurait valablement etre reporte sur d'autres marchandises que le commissionnaire pourrait avoir ulterieurement en sa possession, a l'occasion de nouvelles operations de transport ;
Mais attendu
que, en vertu de l'article
95 du code de commerce, les nouvelles marchandises confiees au commissionnaire de transport servent aussi de gage, comme la cour d'appel l'a decide a bon droit, aux anciennes creances appartenant au meme creancier contre le meme debiteur ;
Que le moyen, en ses deux branches, est mal fonde ;
Par ces motifs
: rejette le pourvoi forme contre l'arret rendu le 11 octobre 1974 par la cour d'appel de colmar.