AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu selon les jugements attaqués (tribunal d'instance de Périgueux, 1er décembre 2004 et 21 avril 2004) que la Fédération des commerces et du service UNSA a saisi le tribunal d'instance d'une requête aux fins d'annulation des élections des délégués du personnel ayant eu lieu le 5 avril 2004 au sein de la société Péri Diffusion, au motif notamment que la catégorie des vendeurs à domicile "indépendante" n'avait pas été inscrite sur la liste électorale ;
Sur le premier moyen
:
Attendu qu'il est fait grief au jugement attaqué d'avoir rejeté la demande d'annulation du rapport d'expertise établi par M. X... et d'avoir partiellement homologué celui-ci alors, selon le moyen, que l'expert ne doit jamais porter d'appréciations d'ordre juridique ; qu'un rapport d'expertise prenant parti sur des points de droit implique une rupture de l'égalité des armes ; qu'en relevant que l'expert avait consacré sa troisième partie à une analyse juridique, tout en refusant d'annuler le rapport, le tribunal a violé l'article
238 du nouveau Code de procédure civile, ensemble l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu que le juge du fond a écarté les appréciations d'ordre juridique de l'expert et s'est borné à retenir les constatations de fait du rapport ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le second moyen
:
Attendu qu'il est reproché au jugement attaqué d'avoir dit que les démonstrateurs étaient liés à la société Péri Diffusion par un contrat de travail, qu'ils devaient figurer sur la liste électorale élaborée pour l'élection des délégués du personnel et annulé en conséquence l'élection des délégués du personnel du 5 avril 2004, alors, selon le moyen :
1 / que le lien de subordination suppose que l'une des parties a non seulement le pouvoir de donner des directives, mais aussi d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que le tribunal, qui a relevé que les démonstrations devaient respecter les normes commerciales de l'entreprise et rendre compte de leur activité, sans rechercher cependant si la société Péri Diffusion avait le pouvoir de sanctionner ces directives, a privé sa décision de base légale au regard des articles
1984 du Code civil et
L. 423-7 du Code du travail ;
2 / que l'imposition d'un horaire et d'un lieu de travail par l'employeur suppose que ceux-ci soient déterminés pour l'exécution du travail lui-même, à l'exclusion d'activités annexes, et sanctionnés ; que la constatation selon laquelle les démonstrateurs sont fréquemment convoqués à des réunions de formation sans caractère obligatoire, mais nécessaires à la bonne exécution de leurs tâches, est donc inopérante pour caractériser la fixation d'un horaire et d'un lieu de travail révélant l'existence d'un service organisé ; que le tribunal, qui s'est borné à une telle constatation, a privé sa décision de base légale au regard des articles
1984 du Code civil et
L. 423-7 du Code du travail ;
3 / que la fourniture de matériel n'est pas un critère de distinction entre le mandat et le contrat de travail, mais seulement entre le contrat d'entreprise et le contrat de travail ; que la fourniture, par le mandant, de matériel promotionnel et des produits dont la vente fait l'objet du mandat est inopérante à caractériser un lien de subordination ; qu'en jugeant le contraire, le tribunal a violé les articles
1984 du Code civil et
L. 423-7 du Code du travail ;
4 / qu'enfin que la dépendance qui caractérise le lien de subordination est une dépendance juridique et non pas économique ;
qu'en retenant, pour considérer qu'il existait un lien de subordination, une situation de dépendance économique, le tribunal a derechef violé les articles
1184 du Code civil et
L. 423-7 du Code du travail ;
Mais attendu que le tribunal d'instance, qui a constaté que les intéressés vendeurs à domicile travaillaient pour le compte de la société Péri Diffusion au sein d'un service organisé, selon des directives impératives portant sur les méthodes et les tarifs de vente, définies par la société concessionnaire en fonction d'objectifs propres, et à laquelle ils devaient rendre compte, a pu en déduire sans encourir les griefs du moyen l'existence d'un lien de subordination caractérisant le contrat de travail ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS
:
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit septembre deux mille cinq.