Cour de cassation, Chambre criminelle, 19 mars 2014, 12-86.916

Synthèse

  • Juridiction : Cour de cassation
  • Numéro de pourvoi :
    12-86.916
  • Dispositif : Cassation partielle
  • Publication : Inédit au recueil Lebon
  • Décision précédente :Cour d'appel de Bourges, 27 septembre 2012
  • Identifiant européen :
    ECLI:FR:CCASS:2014:CR00907
  • Lien Légifrance :https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000028758540
  • Rapporteur : M. Soulard
  • Président : M. Louvel (président)
  • Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Boré et Salve de Bruneton
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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2014-03-19
Cour d'appel de Bourges
2012-09-27

Texte intégral

Statuant sur le pourvoi formé par

: - L'administration des douanes, partie poursuivante, contre l'arrêt de la cour d'appel de BOURGES, chambre correctionnelle, en date du 27 septembre 2012, qui l'a déboutée d'une partie de ses demandes après relaxe partielle de M. Pascal X... du chef d'importation sans déclaration de marchandises prohibées ; La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 5 février 2014 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel, président, M. Soulard, conseiller rapporteur, Mme Nocquet, conseiller de la chambre ; Greffier de chambre : M. Bétron ; Sur le rapport de M. le conseiller SOULARD, les observations de la société civile professionnelle BORÉ et SALVE de BRUNETON, et de Me LE PRADO, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GAUTHIER ; Vu les mémoires produits en demande et en défense;

Sur le moyen

unique de cassation, pris de la violation des articles 6 et 7 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, des articles L. 2331-1, L. 2335-1, L. 2336-1 et L. 2337-3 du code de la défense, de l'article 2 du décret n° 95-589 du 6 mai 1995, des articles 38, 215, 215 bis, 392, 414, 417, 419, 437 et 439 du code des douanes, des articles 591 et 593 du code de procédure pénale ; "en ce que l'arrêt, reformant partiellement le jugement sur l'action douanière, a condamné M. X... à payer à l'administration des douanes la somme de 9 900 euros correspondant à trente-trois amendes de 300 euros ; "aux motifs que l'administration des douanes n'exerce plus de poursuites pour les infractions listées paragraphes 1, 4, 6, 7 et 55 du tableau inclus dans ses conclusions d'appel ; que, par ailleurs, les contestations formulées par M. X... concernant les saisies suivantes seront admises : * paragraphe 5 : carabine de chasse type Mauser avec lunette ; qu'elle fait l'objet d'une facture de vente contestée par l'administration mais bénéficiant d'une autorisation préfectorale ; qu'en tout état de cause, il s'agit d'une arme de 5ème catégorie, * paragraphe 11 : carabine de chasse modèle 98 calibre 7mm Remington magnum restituée à son détenteur ; que M. X... en affirmant qu'il s'agit d'un cadeau de son père ; qu'il n'a pas, à défaut de preuve contraire, à apporter la preuve impossible qu'il s'agit d'un don manuel ; * paragraphe 12 : il en est de même d'un pistolet automatique 7,65 mm et de 3 chargeurs qu'il a découverts chez sa grand-mère, * paragraphe 19 : la détention de quatre chargeurs pour mitraillette anglaise calibre 9 mm est licite en application de l'article 2 du décret 95-589 ; que cette disposition réglementaire fait obstacle aux arrêtés invoqués par les douanes, * paragraphe 20 : les mêmes motifs s'appliquent à la détention de ces chargeurs, * paragraphe 28 : s'agissant d'un chargeur non démilitarisé métallique pour fusil d'assaut de type Kalachnikov dont l'expert M. Y... dit qu'elle est exclue (sic) de l'article 215 du code des douanes, ce poste ne sera pas retenu, * paragraphe 29 : il en est de même de ce chef pour les mêmes motifs, * paragraphe 31 : il en est de même de ce chef pour les mêmes motifs, * paragraphe 32 relatif à un ensemble bloc culasse et levier de type Mauser : l'expert M. Z... précise qu'il s'agit de pièces d'armes de chasse non concernées par l'article 215 du code des douanes, * paragraphe 34 : 3 canons de type indéterminé : l'expert M. Z... précise qu'il s'agit de pièces non classées non concernées par l'article 215 du code des douanes, *paragraphe 35 : s'agissant de huit chargeurs pour pistolet automatique dont l'expert M. Y... dit qu'ils sont exclus de l'article 215 du code des douanes, ce poste ne sera pas retenu, * paragraphe 40 : s'agissant d'éléments d'armes qualifiés comme inclassables par l'expert M. Y..., ce poste ne sera pas retenu ; * paragraphe 41 : s'agissant d'une pièce d'arme ne relevant pas de l'article 215 du code des douanes selon l'expert M. Y..., ce poste ne sera pas retenu ; * paragraphe 42 : s'agissant de pièces d'arme non classées dans la loi 95-589 (rapport Y...), elles ne relèvent pas de l'article 215 du code des douanes, ce poste ne sera pas retenu, *paragraphe 43 : s'agissant de pièces d'arme de chasse non classées dans la loi 95-589 (rapport Y...), elles ne relèvent pas de l'article 215 du code des douanes, ce poste ne sera pas retenu, * paragraphe 45 : il s'agit d'une baïonnette classée en 6ème catégorie par l'expert Z..., dont la cession est prévue sans formalité ; elle ne relève pas de l'article 215 du code des douanes, ce poste ne sera pas retenu ; * paragraphe 46 : s'agissant d'une baïonnette française répondant aux mêmes critères qu'à l'article précédent, elle ne relève pas de l'article 215 du code des douanes, ce poste ne sera pas retenu ; * paragraphe 48 : ce chargeur non classé dans la loi 95-589 (rapport Y...) ne relève pas de l'article 215 du code des douanes, ce poste ne sera pas retenu ; que le surplus des contestations élevées par M. X... afférentes aux autres paragraphes, les unes pour évaluation arbitraire de leur valeur par les douanes, les autres pour défaut de fondement des poursuites, doivent être rejetées, les premières relevant des dispositions des articles 369, alinéa 1-d, du code des douanes et 437 du même code et les secondes ne faisant pas l'objet d'une démonstration réelle de leur origine au regard des articles 215 et suivants du code des douanes ; qu'il sera fait observer à cet égard que les pièces d'armes sont assimilées à des armes au regard de la réglementation douanière ; qu'aux termes des articles 414 et 369 du code des douanes, jugés conformes à l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, le tribunal de peut prononcer d'amendes et de pénalités inférieures au tiers de la valeur des marchandises ; que, toutefois, l'article 369 permettant au juge d'opérer cette réduction la limite, par application de l'article 437 du même code qui dispose que le « montant des amendes multiples de droits ou de la valeur ne peut être inférieur à 150 euros ou 300 euros selon qu'elles seront définies en fonction des droits ou de la valeur » ; qu'en l'espèce, la référence ne peut qu'être la valeur des objets confisqués ramenée à ce montant minimum, de sorte que le total des amendes douanières s'élèvera à la somme de trente-trois amendes (paragraphes 2, 3, 8, 9, 10, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 30, 33, 36, 37, 38, 39, 44, 47, 49, 50, 51, 53, 54, 55 et 56 du tableau présenté par les douanes dans ses conclusions) à 300 euros chacune, soit la somme totale de 9 900 euros ; "1°) alors que les marchandises visées à l'article 215 bis du code des douanes sont réputées avoir été importées en contrebande à défaut de justification d'origine ou de présentation de l'un des documents prévus par cet article ; que l'administration des douanes faisait valoir, dans ses conclusions d'appel, à propos de la carabine de chasse type Mauser avec lunette, que la facture produite était une facture de complaisance et que la vente par l'armurerie ne concernait que la lunette ; qu'en relaxant le prévenu au motif que la carabine de chasse type Mauser avec lunette faisait l'objet d'une facture de vente contestée par l'administration des douanes mais bénéficiait d'une autorisation préfectorale et qu'en tout état de cause, il s'agissait d'une arme de cinquième catégorie sans se prononcer sur l'authenticité de la facture alors que cette arme de chasse de 5ème catégorie était soumise à l'obligation de justification d'origine édictée par l'article 215 bis du code des douanes et que l'autorisation préfectorale délivrée sur la foi d'une facture de complaisance ne pouvait constituer ce justificatif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ; "2°) alors que les marchandises visées à l'article 215 bis du code des douanes sont réputées avoir été importées en contrebande à défaut de justification d'origine ou de présentation de l'un des documents prévus par cet article ; qu'en relaxant le prévenu pour la détention d'une carabine de chasse modèle 98 calibre 7 mm Remington au motif inopérant qu'il s'agissait d'un cadeau de son père alors que la circonstance que cette arme lui ait été offerte ne le dispensait pas de produire, à première réquisition, soit un document attestant que cette arme avait été introduite sur le territoire douanier en conformité avec les dispositions portant prohibition d'importation, soit toute justification d'origine émanant de personnes ou sociétés régulièrement établies à l'intérieur du territoire douanier, la cour d'appel a privé sa décision de motifs en violation des textes susvisés ; "3°) alors que, selon l'article L. 2335-1 du code de la défense, sauf dérogation, l'importation des matériels des 1ère, 2ème, 3ème, 4ème 5ème et 6ème catégorie est prohibée ; que, selon l'article 2 du décret n° 95-589 du 6 mai 1995, constituent des armes de 1ère catégorie, les pistolets automatiques de tous calibres et leurs chargeurs ; qu'aux termes de l'article L. 2337-3 du code de la défense, les armes et les munitions de la 1ère ou de la 4ème catégorie ne peuvent être transférées d'un particulier à un autre que dans les cas où celui à qui l'arme est transférée est autorisé à la détenir ; qu'aux termes de l'article L. 2336-1 du même code, quiconque devient propriétaire par voie successorale ou testamentaire d'une arme ou de munitions de la 1ère ou de 4ème catégorie, sans être autorisé à les détenir, doit s'en défaire dans un délai de trois mois à compter de la mise en possession ; qu'en entrant en voie de relaxe pour la détention d'un pistolet automatique 7,65 mm et de ses trois chargeurs au motif que le prévenu les avait découverts chez sa grand-mère sans rechercher si M. X... avait produit, pour cette arme de 1ère catégorie et ses chargeurs, soit un document attestant que ces marchandises avaient été introduites sur le territoire douanier en conformité avec les dispositions portant prohibition d'importation, soit toute justification d'origine émanant de personnes ou sociétés régulièrement établies à l'intérieur du territoire douanier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ; "4°) alors que selon l'article L. 2335-1 du code de la défense nationale, sauf dérogation, l'importation des matériels des 1ère, 2ème, 3ème, 4ème 5ème et 6ème catégorie est prohibée ; que selon l'article 2 du décret n° 95-589 du 6 mai 1995 constituent des armes de 1ère catégorie, les chargeurs et éléments des armes de 1ère catégorie ; qu'en renvoyant M. X... des fins de la poursuite pour la détention de chargeurs et d'éléments d'armes de 1ère catégorie au motif que cette marchandise ne relevait pas de l'article 215 du code des douanes alors que ces chargeurs et éléments d'armes de 1ère catégorie, dont l'importation est prohibée, relevaient de la catégorie des marchandises soumises à l'obligation de justificatif d'origine, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; "5°) alors que selon l'article L. 2335-1 du code de la défense, sauf dérogation, l'importation des matériels des 1ère, 2ème, 3ème, 4ème 5ème et 6ème catégorie est prohibée ; que, selon l'article 2 du décret n° 95-589 du 6 mai 1995, les baïonnettes constituent des armes de 6ème catégorie ; qu'en renvoyant le prévenu des fins de la poursuite pour les faits de détention de baïonnettes alors que ces armes classées par l'expert comme armes de 6ème catégorie étaient comme telles soumises à l'obligation de justificatif d'origine, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;

Vu

l'article 593 du code de procédure pénale, ensemble l'article 215 bis du code des douanes ; Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que M. X... est poursuivi pour avoir détenu, sans justification d'origine, un certain nombre d'armes des 1ère, 4ème, 5ème et 6ème catégories ainsi que des chargeurs et des munitions correspondant à ces armes ; Attendu que, pour le relaxer d'une partie de ces faits et débouter l'administration des douanes de certaines de ses demandes, l'arrêt prononce par les motifs reproduits au moyen ;

Mais attendu

qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ; Qu'il résulte en effet de ses énonciations que M. X... n'a pas produit les documents mentionnés à l'article 215 bis du code des douanes pour la carabine de chasse Remington modèle 98, le pistolet automatique 7,65 mm, ses trois chargeurs, les baïonnettes, constituant des armes de cinquième et sixième catégories, et les chargeurs d'armes de première catégorie, qui entrent dans les prévisions de l'article précité en application des dispositions du décret-loi du 18 avril1939 reprises aux articles L. 2331-1 et L. 2335-1 du code de la défense, auxquelles renvoie indirectement le paragraphe 4 de l'article 38 du code des douanes ; Qu'en outre, les juges n'ont pas répondu aux conclusions de l'administration des douanes faisant valoir que la facture produite pour justifier la détention de la carabine de chasse type Mauser ne concernait qu'une lunette et n'ont pas recherché si les pièces d'armes de chasse visées aux paragraphes 32 et 43 ne pouvaient pas s'adapter indifféremment sur des armes de première ou de cinquième catégorie ; D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs

: CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Bourges, en date du 27 septembre 2012, mais en ses seules dispositions relatives aux armes visées sous les paragraphes 5, 11, 12, 19, 20, 28, 29, 31, 32, 35, 43, 45 et 46, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ; Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée, RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Orléans, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Bourges et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-neuf mars deux mille quatorze ; En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;