Chronologie de l'affaire
Tribunal de Grande Instance de Paris 17 avril 2015
Cour d'appel de Paris 14 octobre 2016

Cour d'appel de Paris, 14 octobre 2016, 2015/10144

Mots clés société · produits · modèle · contrefaçon · préjudice · plateau · bol · concurrence déloyale · cocottes · procédure civile · numéro · commercialise · astreinte · nullité · preuve

Synthèse

Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro affaire : 2015/10144
Domaine de propriété intellectuelle : DESSIN ET MODELE
Classification pour les marques : CL07-01 ; CL07-02 ; CL07-06
Numéros d'enregistrement : 001754763-0002 ; 001057962-0003 ; 000480868-0005 ; 060468 ; 000859806-0001
Décision précédente : Tribunal de Grande Instance de Paris, 17 avril 2015, N° 2013/16114
Parties : SOLIA SA / FIRPLAST SAS
Président : Mme Colette PERRIN

Chronologie de l'affaire

Tribunal de Grande Instance de Paris 17 avril 2015
Cour d'appel de Paris 14 octobre 2016

Texte

COUR D'APPEL DE PARIS ARRET DU 14 octobre 2016

Pôle 5 - Chambre 2 (n°178, 13 pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 15/10144

Décision déférée à la Cour : jugement du 17 avril 2015 - Tribunal de grande instance de PARIS -3ème chambre 2ème section - RG n°13/16114

APPELANTE AU PRINCIPAL et INTIMEE INCIDENTE S.A. SOLIA, agissant en la personne de son directeur général domicilié en cette qualité au siège social situé [...] 66600 RIVESALTES Immatriculée au rcs de Perpignan sous le numéro 399 575 026 Représentée par Me Dominique OLIVIER de l'AARPI DOMINIQUE OLIVIER - SYLVIE K T, avocat au barreau de PARIS, toque L 0069 Assistée de Me Marianne G plaidant pour la SELAS CASALONGA, avocat au barreau de PARIS, toque K 177

INTIMEE AU PRINCIPAL et APPELANTE INCIDENTE S.A.S. FIRPLAST, prise en la personne de son président en exercice domicilié en cette qualité au siège social situé [...] 69800 SAINT PRIEST Immatriculée au rcs de Lyon sous le numéro 327 963 021 Représentée par Me Patricia HARDOUIN de la SELARL 2H AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque L 0056 Assistée de Me Sybille G plaidant pour le Cabinet ADAMAS, avocat au barreau de LYON, toque T 658

COMPOSITION DE LA COUR : Après rapport oral, l'affaire a été débattue le 1er septembre 2016, en audience publique, devant la Cour composée de : Mme Colette PERRIN, Présidente Mme Sylvie NEROT, Conseillère Mme Véronique RENARD, Conseillère qui en ont délibéré

Greffière lors des débats : Mme Carole T

ARRET : Contradictoire Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile Signé par Mme Colette PERRIN, Présidente, et par Mme Carole T, Greffière, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par la magistrate signataire.

FATTS ET DE LA PROCEDURE La société Solia est une société française qui crée, fabrique et commercialise depuis plus de 20 ans des produits ludiques, esthétiques et pratiques dans le domaine de la vaisselle jetable et du snacking.

Elle a procédé à des dépôts au titre des modèles communautaires pour les articles suivants :

- un bol déposé le 14/09/2010 sous le numéro 001754763-0002,

- une verrine déposée le 16/12/2008 sous le numéro 001057962-000,

-deux mini-cocottes déposées la première le 16/02/2006 sous le numéro 000480868-0005, la seconde le 16/03/2007 sous le numéro 060468-001, la première ayant aussi fait l'objet d'un dépôt français le 26 janvier 2006,

- un plateau-repas déposé le 17/01/2008 sous le numéro 000859806-0001. Elle a également développé des mini bocaux en plastique transparents

La société Firplast immatriculée en 1984 est spécialisée dans la création, la fabrication et la commercialisation de vaisselle traditionnelle, de vaisselle à usage unique et d'emballage alimentaire.

La société Solia prétend que la société Firplast présente et commercialise toute une gamme de produits reproduisant les caractéristiques des modèles et objets précités, à savoir :

- des mini-bols PS bicolore,

- des verrines boules,

- des mini-cocottes,

- des plateaux luxe PS injecté transparent 5 compartiments,

- des mini-bocaux transparents,

et, à l'appui de son affirmation, produit notamment un constat d'huissier réalisé le 22 novembre 2012 sur le stand de la société Firplast au salon Emballage Packaging Exhibition. Après lui avoir vainement adressé des mises en demeure, la société Solia a fait assigner la société Firplast devant le tribunal de grande instance de Paris.

Par jugement rendu le 17 avril 2015, le tribunal de grande instance de Paris a :

- déclaré nuls les modèles communautaires n°001754763-0002 (bol thaï), n°001057962-0003 (verrine « Sph'air »), n°000480868-0005 et 000690409-0001 (mini-cocottes) et n°000859806-0001 (plateau- repas),

- rejeté l'ensemble des demandes de la société Solia fondées sur la contrefaçon et la concurrence déloyale,

- condamné la société Solia à payer à la société Firplast la somme de 5.000 € au titre des frais irrépétibles et aux dépens.

Par acte du 26 mai 2015, la société Solia a interjeté appel de ce jugement.

La clôture de la procédure a été prononcée le 23 juin 2016

Par ses dernières conclusions signifiées le 22 juin 2016 la société Solia demande à la cour de :

infirmer le jugement entrepris en l'ensemble de ses dispositions, et statuant à nouveau et juger la société Firplast irrecevable et à tout le moins mal fondée en l'ensemble de ses demandes, et l'en débouter,

A titre principal,

juger que la fabrication, l'importation, la diffusion, la présentation, la commercialisation, et plus généralement l'exploitation sur le territoire de l'Union européenne, et en particulier en France, par la société Firplast de produits présentant une impression d'ensemble identique ou similaire aux modèles communautaires n° n°001754763-0002, 001057962-0003, 000480868-0005, 000690409-0001, 000859806- 0001 et du modèle français n°060468-001 dont la société Solia est titulaire constituent à son préjudice des actes de contrefaçon,

À titre subsidiaire,

juger que la fabrication, l'importation, la diffusion, la présentation, la commercialisation, et plus généralement l'exploitation par la société Firplast de produits constituant des copies serviles des modèles exploités par la société Solia caractérisent des actes de concurrence déloyale. En tout état de cause,

juger qu'en exploitant dans les mêmes couleurs, matériaux et tailles toute une gamme de produits imitant les produits développés et commercialisés par la société Solia, en utilisant les désignations Solia, « Sphère » et « O'Ronde », et en diffusant un catalogue imitant, la société Firplast a commis des actes de concurrence déloyale et de parasitisme distincts des actes de contrefaçon,

En conséquence,

interdire à la société Firplast de fabriquer, diffuser, importer, exporter, présenter, commercialiser ou faire commercialiser, et plus généralement d'exploiter ou d'utiliser sur le territoire de l'Union européenne, et en particulier en France, tout produit présentant une impression d'ensemble identique ou similaire aux modèles de la société Solia sous astreinte de 1.000 € par infraction constatée et par jour de retard, à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir.

ordonner destruction du stock de produits contrefaisants ainsi que des catalogues et supports promotionnels les présentant ou utilisant les dénominations « Sphère » ou « O'Ronde » sous contrôle d'un huissier au choix de la société Solia et aux frais de la société Firplast, et ce, sous astreinte de 1.000 € par jour de retard à l'expiration d'un délai de 10 jours à compter de la signification de l'arrêt à intervenir.

ordonner sous astreinte de 500 euros par infraction constatée et par jour de retard après la signification de l'arrêt à intervenir, à la société Firplast, la production, pour chacun des produits litigieux suivants, dans leurs différentes tailles, couleurs et références, d'un certain nombre de documents comptables

condamner la société Firplast à lui payer la somme de 50.000 €, sauf à parfaire, par modèle contrefait en réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon de modèles, ou à titre subsidiaire, par modèle imité en réparation du préjudice subi au titre de la concurrence déloyale,

condamner la société Firplast à lui payer la somme de 150.000 €, sauf à parfaire, en réparation du préjudice subi au titre des faits distincts de concurrence déloyale et de parasitisme,

ordonner la publication de l'arrêt à intervenir dans cinq revues ou journaux, français ou étrangers, au choix de la société Solia et aux frais avancés par la société Firplast, à concurrence de 4.500 € HT par insertion, et ce, au besoin, à titre de dommages et intérêts complémentaires. ordonner l'affichage du dispositif de l'arrêt à intervenir en page d'accueil du site Internet à l'adresse www.firplast.com de manière à ce qu'il soit immédiatement visible par l'internaute pendant une durée de trois mois astreinte de 1.000 € par jour de retard à l'expiration d'un délai de 10 jours à compter de la signification de l'arrêt à intervenir et dire que la Cour se réserve la compétence de prononcer la liquidation des dites astreintes en application des dispositions de l'article 35 de la loi du 9 juillet 1991.

condamner la société Firplast à lui payer la somme de 20.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, lesquels comprendront les frais de constat

Par dernières conclusions signifiées le 22 juin 2016 la société Firplast demande à la cour de :

confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la nullité des modèles communautaires n°001754763-0002 (bol thaï), n°001057962-0003 (verrine Sph'air), n°000480868-0005 (cocotte) et n°000859806-0001 (plateau-repas),

juger que le modèle de cocote 000690409-0001 est nul en application de l'article 7 du règlement CE n°6/2002,

confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté l'ensemble des demandes de la société Solia,

infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté sa demande de dommages et intérêts,

condamner la société Solia à lui payer la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, condamner la société Solia à lui payer la somme de 20 000 euros supplémentaire sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.


MOTIFS

Sur la demande en nullité des modèles communautaires n°001754763-0002 (bol thaï), n°001057962-0003 (verrine « Sph'air »), n°000480868-0005 (cocotte), n°000859806-0001 (plateau-repas), n°000690409-0001 (cocotte), Considérant que la société Solia soutient que c'est à tort que les premiers juges ont annulé les dépôts de modèles auxquels elle avait procédé pour défaut de nouveauté et de caractère individuel; que pour chacun des modèles elle conteste les antériorités produites par la société Firplast et expose les éléments caractérisant son caractère individuel.

Considérant que la société Firplast affirme que les modèles de la société Solia ne sont que la transposition dans la vaisselle jetable d'éléments connus de la vaisselle traditionnelle.

Considérant que la société Solia soutient que les produits en cause se caractérisent par leurs lignes, contours, formes et finitions et présentent une combinaison d'éléments purement ornementaux et esthétiques, ces choix ne relevant d'aucun impératif technique et leur combinaison leur conférant une apparence et une physionomie propres que l'utilisateur averti distingue ce qui justifie leur protection.

Considérant que l'article 5 du Règlement 6/2002 prévoit que « Un dessin ou modèle est considéré comme nouveau si aucun dessin ou modèle identique n'a été divulgué au public (') avant la date de dépôt de la demande d'enregistrement du dessin ou modèle pour lequel la protection est demandée ou, si une priorité est revendiquée, la date de priorité ».

Que l'article 6 paragraphe 1 du règlement 6/2002 précise qu' « un dessin ou modèle est considéré comme présentant un caractère individuel si l'impression globale qu'il produit sur l'utilisateur averti diffère de celle que produit sur un tel utilisateur tout dessin ou modèle qui a été divulgué au public (') avant la date de dépôt de la demande d'enregistrement du dessin ou modèle pour lequel la protection est demandée ou, si une priorité est revendiquée, la date de priorité ».

Considérant qu'en l'espèce, la liberté de création est limitée dès lors que l'objet répond à un but précis et qu'il relève des arts appliqués de sorte que chacun des éléments des modèles invoqués sera perçu avec attention par l'utilisateur averti qui les distinguera des autres objets pouvant exister sur le marché.

Sur le bol déposé le 14/09/2010 sous le numéro 001754763-0002

Considérant que la société Solia précise qu'ont été combinés les éléments suivants : - une forme générale arrondie aux lignes souples avec un bord droit qui s'arrondit au niveau du pied,

- une opposition de la couleur noire qui recouvre l'extérieur et se prolonge au-dessus du rebord à l'intérieur, et d'une autre couleur à l'intérieur. Considérant que, si ce modèle qui est en PVC, a été élaboré grâce à un processus particulier d'injection qui lui permet d'arborer deux teintes distinctes entre l'intérieur et l'extérieur, ni la matière, ni le procédé de fabrication ne sauraient être protégés.

Considérant que la société Firplast fait valoir que ce bol n'est que la copie des bols asiatiques utilisés selon leur taille pour présenter du riz, de la soupe ou des sauces et qui sont fabriqués soit en porcelaine, en poterie ou en bois laqué avec un rendu bicolore ; qu'elle produit des pièces reproduisant des bols fabriqués entre le 16ème et le 19ème siècle qui ont une forme similaire à celle du modèle revendiqué par la société Solia dont certains présentent une dualité de couleurs résultant de l'utilisation en Chine de la laque qui a permis de réaliser des bols laqués dont les plus connus sont noir et rouge.

Considérant que l'examen des bols présentés par la société Firplast démontre que la société Solia s'est inspirée de la vaisselle traditionnelle asiatique et d'une tendance du moment.

Considérant que, de plus, la société Firplast présente, d'une part, trois modèles français déposés en 1981, 1985 et 2007, d'autre part, un magazine datant de 2007 qui démontre qu'elle même commercialise depuis cette date des modèles quasiment identiques; que les différences sont infimes entre ces différents bols de sorte que l'observateur averti ne distinguera pas d'emblée ceux de la société Solia.

Considérant qu'il s'ensuit que le bol de la société Solia n'est pas nouveau et ne présente aucun caractère individuel lui permettant de prétendre à une protection par le droit des dessins et modèles ; que la cour confirmera le jugement en ce qu'il a prononcé la nullité du dépôt effectué le 14/09/2010 sous le numéro 001754763-0002.

Sur la verrine déposée le 16 décembre 2008 sous le n°001057962- 0003

Considérant que la société Solia affirme que, pour l'utilisateur averti, la forme de sa verrine Sph'air est particulière et reconnaissable en ce que jamais auparavant une sphère parfaitement ronde n'avait présenté une large découpe avec des bords francs, et ce, en raison des difficultés de réalisation que la société Solia a réussi à surmonter.

Considérant que la société Firplast soutient que la verrine de la société Solia n'est que la transposition dans la vaisselle de formes existant dans d'autres domaines notamment les aquariums, les vases et les photophores et que dans la vaisselle il existe des contenants de forme identique notamment des saladiers. Considérant que la société Solia fait observer que les pièces adverses sont peu lisibles et ne permettent pas de distinguer les objets dans leurs détails.

Considérant toutefois que celles-ci révèlent pour un certain nombre des caractéristiques différentes; qu'il apparaît que partie de ces objets ne sont pas transparents ou ne présentent pas une forme parfaitement sphérique ou n'ont pas de partie aplatie ou présentent des formes de découpes différentes, plus larges ou plus étroites avec pour certaines un logement pour bougie, des rebords ou une large épaisseur, une forme particulière de la partie basse et la présence de motifs.

Considérant que le tribunal a retenu deux antériorités, d'une part, un photophore en verre, déposé par la société Tung Design le 16 septembre 2008, d'autre part, un verre à boire déposé le 31 octobre 1990 par la société Rastal.

Considérant que, si le photophore présente une forme sphérique, il se distingue par une ouverture étroite en relation avec l'objet qu'il doit recevoir, fleur ou bougie.

Considérant que le verre ne présente pas une forme sphérique et constitue par sa partie haute une forme usuelle de verre à boire qui ne donne pas l'impression d'avoir été « décalotté »comme la verrine Solia.

Considérant que la société Firplast prétend avoir acquis une branche d'activité de la société e-Cho qui commercialisait une verrine identique à celle de la société Solia.

Considérant que toutefois cette cession est intervenue en 2012; que, s'agissant de cette verrine opposée, si la société Firplast produit un catalogue portant en couverture la référence « catlux03, il n'est pas démontré que la mention 03 corresponde à la date d'édition dès lors que tous les catalogues « catlux » portent une référence qui se termine par deux chiffres sans relation avec la date d'édition et quand bien même celui-ci contient une photographie qui a été présentée dans le magazine L'hôtellerie Restauration de 2007 .

Considérant de plus que la verrine opposée, fût-elle antérieure, se présente avec un couvercle, n'est pas sphérique et sa découpe supérieure n'est pas en forme de calotte de sorte qu'elle ne présente pas la même impression d’ensemble.

Considérant que la société Firplast ne démontre pas l'existence d'antériorités destructrices de la nouveauté et du caractère individuel de la verrine de la société Solia; Considérant qu'il résulte de ces éléments que la verrine de la société Solia présente un caractère nouveau et individuel; qu'il y a lieu de réformer le jugement entrepris en ce qu'il a fait droit à la demande de nullité du dépôt dont elle a fait l'objet.

Sur les cocottes déposées sous les n°000480868-0005 et 000690409- 0001 le 16 février 2006 et le 16 mars 2007

Considérant que la société Solia soutient avoir créé deux mini cocottes, l'une déposée le 16/02/2006 sous le numéro communautaire 000480868-0005, ayant aussi fait l'objet d'un dépôt français enregistré le 26/01/2006 sous le numéro 060468-001, l'autre déposée le 16/03/2007 sous le numéro communautaire000690409-0001.

Considérant qu'elle décrit la cocotte ayant donné lieu au premier dépôt comme étant caractérisée par la combinaison des éléments suivants :

- un contenant noir et mat d'aspect massif,

comportant des bords droits s'arrondissant au niveau de la base et un décrochement large et plat en partie supérieure, duquel partent des anses trouées formant un « V » aux lignes rondes,

- un couvercle rond et plat comportant un fin rebord sur tout le périmètre ainsi qu'un bouton au centre en forme de dé à coudre.

Considérant que la société Firplast fait valoir que les deux cocottes qui ont donné lieu à dépôts successifs sont identiques à l'exclusion de leurs anses, trouées, pour la première, pleines pour la seconde et de celle du bouton de préhension présent sur le couvercle, qui a soit la forme d'un dé à coudre, soit la forme d'une boule et que dès lors la cocotte déposée le 16 mars 2007 ne présente pas une impression globale distincte de celle déposée antérieurement et que le modèle communautaire déposé le 16 mars 20007 sous le n°000690409-0001 étant antériorisé par le modèle français encourt la nullité.

Considérant que le tribunal a omis de statuer sur cette demande qui fait l'objet d'une demande reconventionnelle de la société Firplast

Considérant que l'article 7 du Règlement CE dispose que :

1Aux fins de l'application des articles 5 et 6 un dessin ou modèle est réputé avoir été divulgué au public s'il a été publié à la suite de l'enregistrement ou autrement, ou exposé, utilisé dans le commerce ou rendu public de toute manière...

2 Aux fins des articles 5 et 6 il n'est pas tenu compte d'une divulgation d'un dessin ou modèle pour lequel la protection est revendiquée... a) '

b) pendant la période de douze mois précédant la date de dépôt de la demande d'enregistrement ou la date de priorité si une priorité est revendiquée ».

Considérant que cette disposition porte sur la période de divulgation utile , excluant à ce titre une période d'un an précédant la demande d'enregistrement ou la date de priorité ; qu'en l'espèce, il importe peu que la cocotte déposée le 16 mars 2007 enregistrée sous le numéro 000690409-0001, ait été divulguée pendant la période de douze mois précédant la date de priorité du modèle français dès lors que la divulgation du modèle communautaire au-delà de cette période de douze mois n'est pas alléguée.

Considérant que les deux éléments concernant les anses et le bouton du couvercle qui sont les seuls éléments qui différencient les deux cocottes ne créent pas une impression globale distincte entre elles.

Considérant, de plus, que chacune des deux cocottes constitue une variation miniaturisée des cocotes en fonte commercialisées depuis 1918 par les sociétés Le Creuset et Staub, ne comportant aucun élément nouveau ni dans le corps de la cocotte, ni dans son couvercle, la dimension ne pouvant constituer une caractéristique esthétique nouvelle ; qu'il y a lieu en conséquence de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a prononcé la nullité des dépôts enregistrés sous le numéro n°000480868-0005 et sous le numéro 060468-001.

Sur le plateau déposé le 17 janvier 2008, enregistré au titre de modèle communautaire sous le numéro n°000859806-0001

Considérant que la société Solia soutient que son plateau est notamment caractérisé par la combinaison des éléments suivants :

- une forme carrée et totalement transparente,

représentant 5 contenants dont quatre rectangulaires de même taille positionnés deux à deux et un rectangulaire plus allongé mais plus étroit,

- chaque contenant comporte des bords droits évasés reliés entre eux par leurs bords supérieurs.

Considérant que la société Firplast affirme que le plateau présente des caractéristiques fonctionnelles non protégeables, étant destiné à recevoir dans quatre compartiments identiques des éléments essentiels qui composent un repas et dans un compartiment plus long et étroit les couverts et qu'il n'est ni nouveau, ni doté d'un caractère individuel. Considérant que les pièces produites mettent en évidence des plateaux ayant les mêmes fonctions mais ayant des formes, des dispositions de compartiments et des lignes parfaitement distinctes ; qu'en conséquence la forme du modèle de la société Solia n'est pas dictée par sa seule fonction.

Considérant que la société Firplast oppose à titre d'antériorités les plateaux Quadra et Atlas de la société Comatec et produit trois catalogues dont le catalogue Chomette Favor 2005-2006 et le catalogue First de 1985 ; que les plateaux y figurant comportent quatre compartiments et un cinquième placé soit au milieu soit sur l'un des côtés et sont décrits par la société Comatec comme étant 'réalisée en plastique injecté ayant l'apparence du verre' ; que, pour autant, la société Solia expose, sans être contredite que ceux-ci présentent, pour l'un un « fond dépoli », pour l'autre un fond avec deux graphismes différents, et pour les deux, une « couleur vert d'eau » et des agencements, des proportions et des lignes différentes; que le fait que le plateau quadra a les mêmes dimensions que le plateau Solia ne démontre pas que celles-ci sont normalisées.

Considérant que le plateau de la société Solia a des bords évasés qui ne se retrouvent pas sur les plateaux opposés, caractéristique dont il n'est pas démontré qu'elle ne serait pas le résultat d'un choix mais qu'elle serait imputable au moulage du produit

Considérant qu'en tout état de cause aucun des plateaux invoqués ne reprend pas la combinaison des éléments du plateau Solia, à savoir une forme carrée et totalement transparente représentant 5 contenants dont quatre rectangulaires de même taille positionnés deux à deux et un rectangulaire plus allongé mais plus étroit, chaque contenant comportant des bords droits évasés reliés entre eux par leurs bords supérieurs. Que dès lors ces modèles ne constituent pas une antériorité détruisant la nouveauté du plateau Solia.

Considérant qu'il y a lieu de retenir la nouveauté et le caractère individuel du plateau de la société Solia et de réformer la décision entreprise.

Sur les actes de contrefaçon de modèles

Considérant que la contrefaçon ne peut être appréciée qu'au regard des produits dont le dépôt au titre des modèles n'a pas été annulé à savoir la verrine et le plateau.

Sur la verrine déposée le 16 décembre 2008 sous le n°n°001057962- 0003 Considérant que la verrine Firplast reprend exactement les caractéristiques de celle de la société Solia en ce qu'elle est totalement transparente, de forme parfaitement ronde, et repose sur un côté sur une partie un peu aplatie comme si la calotte supérieure en avait été retirée lui conférant la même impression d'ensemble.

Sur le plateau déposé le 17 janvier 2008, sous le n°000859806-0001

Considérant que le plateau Firplast reprend la combinaison des caractéristiques du modèle Solia, en ce qu'il est de forme carré et totalement transparent, comportant 5 contenants, dont quatre rectangulaires de même taille positionnés deux à deux, et un rectangulaire plus allongé mais plus étroit, chaque contenant présentant des bords droits évasés reliés entre eux par leurs bords supérieurs ; que ces caractéristiques confèrent aux articles en cause la même impression d'ensemble ;

Considérant qu'il résulte de ces éléments pour ces deux objets la société Firplast a réalisé une copie servile du produit de la société Solia ; qu'il y a lieu de retenir une contrefaçon et de réformer le jugement entrepris.

Sur la concurrence déloyale et parasitaire

Considérant que la société Solia affirme que la société Firplast a copié des gammes entières de petites verrines, copies serviles de ses produits phares, dans les mêmes tailles, les mêmes matériaux et les mêmes couleurs y compris en faisant figurer le « S » signant ses produits, et qu'elle a créé un risque de confusion et /ou d'association, se plaçant dans son sillage et faussant le jeu normal de la concurrence à son préjudice.

Considérant qu'elle fait état de recherches pour l'élaboration de ses produits et d'investissements importants, notamment pour créer des moules produisant une attestation de son commissaire aux comptes; que celui-ci mentionne toutefois des frais de moules seulement à partir de 2010; que ceux-ci ne peuvent donc concerner que les bols thaï et les bocaux ; qu'elle justifie de frais de publicités engagés chaque année depuis 2007 pour des montants de l'ordre de 180 000€ sans pour autant identifier des frais relatifs aux produits visés.

Considérant que la société Solia a développé chacun des produits visés en différentes formes et contenance, deux pour la cocotte, différentes couleurs pour les bols, différentes contenances pour les verrines et les bocaux affirmant avoir créé un effet de gamme générant une confusion qui, selon elle, a été repris par la société Firplast et faisant valoir que le tribunal n'a pas statué sur ce point. Considérant que la société Firplast qui commercialise 5000 références de produits ne conteste pas qu'elle propose ses produits par gamme c'est à dire sous plusieurs dimensions pour s'adapter aux besoins des clients, dont ceux visés par la société Solia ;

Considérant que les produits en cause sont destinés à un usage alimentaire sous forme de produits jetables ; qu'il est usuel pour ce type de produits d'être proposés dans des tailles différentes et selon des dimensions qui peuvent être normalisées en fonction de l'usage ou adapté au client.

Considérant que la société Solia ne saurait lui reprocher de commercialiser trois bocaux transparents en plastique PS de 4,5cl, 8cl et 30cl, ceux-ci reproduisant la forme des anciens bocaux de conserve Le Parfait qui se présentaient sous différentes tailles et dont elle ne saurait s'approprier la forme, à défaut de tout autre signe distinctif; que, de plus, la société Firplast commercialise ces mêmes bocaux non seulement en plastique mais aussi en verre et dans de nombreuses dimensions.

Considérant que s'agissant des mini cocottes, la société Firplast propose comme la société Solia deux modèles de cocottes en plastique noir, rondes dont la contenance et les dimensions ne sont que légèrement différentes ce qui correspond à une tendance du marché sur lequel se sont développés des cocottes traditionnelles de différentes tailles, la couleur noire étant la couleur traditionnelle.

Considérant que, s'agissant des mini bols thai bicolores la société Solia commercialise des mini bols de 3cl sous une seule dimension alors que la société Firplast offre pour une contenance identique deux dimensions.

Considérant que les couleurs des produits sont celles utilisées habituellement par les professionnels.

Considérant qu'il résulte de ces éléments que la société Solia ne rapporte pas la preuve de la reprise fautive d'un effet de gamme par la société Firplast.

Considérant que la société Solia expose que la société Firplast a enfin reproduit son signe S qui correspond à sa signature, faisant état de constatations effectuées sur deux produits, d'une part, un bol thaï, d'autre part, un plateau.

Considérant qu'elle produit un constat dressé le 22 novembre 2012 au salon de Villepinte en 2012, où la société Firplast exposait.

Considérant que dans son constat l'huissier n'a pas annexé de photographie du bol ; qu'il indique que « Monsieur C prend un bol sur le stand, me le présente ; en dessous je constate que figure la lettre S » ; que, si les constatations de l'huissier font preuve, force est de relever que le bol litigieux lui a été présenté par M. C, représentant de la société requérante quand bien même il précise que celui-ci a pris le bol en cause sur le stand, cette précision ne pouvant totalement exclure l'hypothèse avancée par la société Firplast d'un bol apporté par le requérant, s'agissant de bols miniatures.

Considérant que la société Solia affirme que les plateaux de la société Firplast reproduisent également ce S par surmoulage et produit un agrandissement photographique des mentions portées sur un plateau ; que la société Solia ne conteste pas que ce S n'est pas clairement visible ; que, si pour y pallier, elle produit un agrandissement, elle ne démontre pas que celui-ci correspond à un plateau commercialisé par la société Firpalasrt; qu'au demeurant ce point est sans conséquence pour le litige puisque la cour a retenu la contrefaçon du plateau.

Considérant qu'il résulte de ces éléments que la société Solia ne rapporte pas la preuve de l'utilisation de la lettre S par la société Firplast.

Considérant que la société Solia ajoute que la société Firplast a utilisé de façon injustifiée le mot clé « Solia » pour référencer son site internet en tête des résultats aux côtés du site « solia.fr » et qu'elle diffusé un catalogue 2014 intitulé « Tenue de Soirée » mettant en avant les produits contrefaisants des siens et imitant ses précédents catalogues par l'adoption d'une même structure et par l'adoption pour de dénominations proches.

Considérant que la société Firplast étant référencée sur le site Google, le fait que son nom apparaisse lorsque le mot « Solia »est mentionné sur le moteur de recherche ne constitue pas la démonstration qu'elle se serait réservé le nom Solia d'autant qu'il n'est produit qu'une capture d'écran qui montre qu'elle apparaît non pas dans la liste des résultats mais dans les annonces payantes ; qu'en conséquence, il n'est pas démontré de risque de confusion sur le site internet.

Considérant que les deux catalogues sont parfaitement identifiés par le nom de la société ; que leur rapprochement ne révèle pas de confusion entre l'un et l'autre, quand bien même ils ont pour objet de présenter le même type de vaisselle ; qu'ils sont différents dans les couleurs utilisés ; que le catalogue Solia comporte des onglets ce qui n'est pas le cas de celui de la société Firplast et n'a pas la même charte graphique ni la même organisation de sorte qu'ils ne pouvaient pas prêter à confusion entre les deux sociétés.

Considérant que la société Solia reproche à la société Firplast d'avoir dénommé ses verrines « Sphère » alors qu'elles étaient intitulées « verrine boules » ; que le terme sphère est un terme générique correspondant à la forme même de l'objet ; que le fait que les verrines figurent dans une collection dénommée « O'Ronde » soit une dénomination composée de deux termes comme « Sph'air » et que la lettre O est de nature à renvoyer à un élément, l'eau tout comme la dénomination « Sph'air » à l'air n'est pas davantage de nature à créer une confusion.

Considérant que ces éléments ne banalisent pas la dénomination « Sph'air » désignant le produit Solia en inscrivant celui-ci dans une collection intitulée « O'Ronde » qui présente une structure similaire autour d'un apostrophe.

Considérant que la société Solia et la société Firplast sont des sociétés concurrentes et sont amenées à proposer des produits correspondant à la tendance du marché ; que, si la cour a retenu des actes de contrefaçon pour deux produits de la société Solia , en revanche celle-ci ne rapporte pas la preuve de faits de concurrence déloyale et parasitaire distincts; qu'il y a lieu de confirmer le jugement entrepris sur ce point;

Sur le préjudice de la société Solia

Considérant que le préjudice de la société Solia sera évalué au regard des seuls faits de contrefaçon retenus, celui de la verrine et celui du plateau.

Considérant que l'article L 521-7 du code de la propriété intellectuelle prévoit que « Pour fixer les dommages et intérêts la juridiction prend en considération distinctement :

1 les conséquences économiques négatives de la contrefaçon dont le manque à gagner et la perte subie par la partie lésée

2 le préjudice moral causé à cette dernière

« les bénéfices réalisés par le contre facteur y compris les économies d'investissements intellectuels matériels et promotionnels que celui-ci a retirés de la contrefaçon ».

Considérant que, comme il a été vu ci-avant, la société Solia ne justifie pas des investissements réalisés pour le développement des modèles en cause.

Considérant que la société Solia invoque la progression exceptionnelle du chiffre d'affaires de la société Firplast en 2012.

Considérant que la société Firplast réplique que celui-ci a été en progression constante comprise entre 2 et 12% par an depuis 10 ans et qu'en 2012 celui-ci n'a augmenté que de 2% soit la plus faible des augmentations qu'elle a connues, avec au surplus un bénéfice qui n'a pas augmenté étant au niveau de celui atteint en 2010 alors qu'il avait connu une baisse en 2010 liée à l'effet conjugué de la baisse du taux de marge du fait de l'augmentation du coût des matières premières et d'une augmentation des charges externes dont le coût des transports.

Considérant que, si le chiffre d'affaires de la société Firplast n'a connu qu'une progression insignifiante en 2010 et une baisse importante en 2011 soit moins 23,52%, il a connu une hausse de plus de 33, 19%, dépassant largement la baisse enregistrée lors de l'exercice précédent sans pour autant démontrer que les facteurs de conjoncture aient disparu ; que l'augmentation d'environ 500 000€ de son résultat d'exploitation apparaît comme exceptionnel et peut dès lors s'expliquer au moins en partie par les agissements de contrefaçon retenus à son encontre ; que, si les chiffres de la société Solia montrent une augmentation constante de son chiffre d'affaires et de son bénéfice, cette circonstance est sans incidence sur le préjudice qu'elle a subi du fait du comportement de la société Firplast.

Considérant qu'au regard de ces éléments et sans qu'il y ait lieu à expertise, il y a lieu de fixer le préjudice de la société Solia à la somme de 15 000€ pour chacun des produits contrefaisant.

Sur la demande de publication de la société Solia

Considérant que les faits ne justifient pas de mesures de publication ou d'affichage.

Sur la demande reconventionnelle de la société Firplast

Considérant que la société Firplast demande à la cour de condamner la société Solia à des dommages intérêts pour procédure abusive.

Considérant que la cour fait droit en partie aux demandes de la société Solia; que dès lors il ya lieu de débouter la société Firplast de sa demande.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Considérant que la société Solia a dû engager des frais non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge, qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure qui sera précisée au dispositif .

PAR CES MOTIFS



Et, adoptant ceux non contraires des Premiers Juges, LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a :

déclaré nuls les modèles communautaires n°001754763-0002 (bol thaï), n°000480868-0005 et 000690409-0001 (mini-cocottes),

rejeté les demandes de la société Solia au titre de la concurrence déloyale,

REFORME pour le surplus,

Statuant à nouveau,

DIT que la fabrication, l'importation, la diffusion, la présentation, la commercialisation, et plus généralement l'exploitation sur le territoire de l'Union européenne, et en particulier en France, par la société Firplast de produits présentant une impression d'ensemble identique ou similaire aux modèles communautaires n°001057962-0003 et n°000859806-0001 et du modèle français n°060468-001 dont la société Solia est titulaire constituent à son préjudice des actes de contrefaçon,

CONDAMNE la société Firplast à payer à la société Solia la somme de 15.000 € par modèle contrefait en réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon de modèle soit une somme totale de 30 000€,

INTERDIT à la société Firplast la poursuite de ses agissements sous astreinte de 50 € par jour de retard, à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir,

CONDAMNE la société Firplast à payer à la société Solia la somme de 12 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

REJETTE toute autre demande plus ample ou contraire,

CONDAMNE la société Firplast aux entiers dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.