LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 mars 2015), que M. X..., engagé par la société Saunier Duval eau chaude chauffage le 1er mars 1978 en qualité de directeur export, a été licencié pour faute grave le 28 octobre 2011 ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire le licenciement fondé sur une faute grave, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il appartient à l'employeur de rapporter la preuve qu'il n'a eu connaissance des faits fautifs que dans les deux mois ayant précédé l'engagement de la procédure disciplinaire ; qu'il ne peut invoquer des faits qui ont eu lieu alors que le salarié se trouvait sous l'autorité d'un précédent supérieur hiérarchique que si le délai de deux mois n'est pas écoulé ; que la cour d'appel a rejeté le moyen tiré de la prescription tout en constatant que les contrats litigieux dataient de 1993 et les factures litigieuses de 2004, 2006 et 2010 alors que la procédure de licenciement a été engagée en octobre 2011 ; qu'en statuant comme elle l'a fait alors que les faits étaient antérieurs de plus de deux mois à l'engagement de la procédure de licenciement et que l'employeur ne démontrait pas n'en avoir eu connaissance qu'ultérieurement, indépendamment de la connaissance des faits par la direction précédente, la cour d'appel a violé l'article
L. 1332-4 du code du travail ;
2°/ que M. X... a expressément souligné que nombre de faits étaient antérieurs à l'avertissement prononcé le 15 février 2008 qui avait donné lieu à la signature d'une transaction, le 6 novembre 2008, aux termes de laquelle l'employeur renonçait à toute procédure pour des faits antérieurs à l'avertissement ; que la cour d'appel n'en a pas tenu compte ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher si, compte tenu de l'avertissement du 15 février 2008 et des termes de la transaction, l'employeur pouvait se prévaloir de faits antérieurs, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles
1134 du code civil et les articles L. 1331-1, L. 1232-1,
L. 1234-1,
L. 1234-5,
L. 1234-9,
L. 1235-1 et
L. 1235-3 du code du travail ;
3°/ que le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi et l'employeur ne peut sanctionner un salarié en se fondant sur des faits connus de longue date ; que la cour d'appel a considéré que le salarié s'était rendu coupable de « dissimulation intentionnelle » en ne répondant pas de façon satisfaisante aux interrogations de son nouveau supérieur hiérarchique en septembre 2011, alors que les faits, anciens, étaient connus de l'employeur de longue date ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles L. 1222-1, L. 1232-1,
L. 1234-1,
L. 1234-5,
L. 1234-9,
L. 1235-1 et
L. 1235-3 du code du travail ;
4°/ que le salarié a expressément indiqué qu'une même vente donnait lieu au paiement d'une commission aux époux Y... et au paiement d'un service de garantie à Mme Z... ; que la cour d'appel a retenu que le salarié ne donnait aucune explication au fait que les mêmes prestations donnaient lieu à une double facturation au nom de Mme Y... et au nom de Mme Z... ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article
4 du code de procédure civile ;
5°/ que la faute grave doit être appréciée in concreto en tenant compte de l'ancienneté du salarié ; que la cour d'appel a considéré que le licenciement du salarié pour faute grave était fondé aux motifs qu'il avait donné des réponses non satisfaisantes à des questions de son nouveau supérieur hiérarchique ; qu'en statuant comme elle l'a fait sans tenir compte de la grande ancienneté du salarié qui était entré dans l'entreprise en 1978, soit plus de 33 ans auparavant, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1,
L. 1234-1,
L. 1234-5,
L. 1234-9,
L. 1235-1 et
L. 1235-3 du code du travail.
Mais attendu qu'ayant retenu que le salarié n'avait pas été licencié pour avoir mis en place un système frauduleux d'agents commerciaux en 1993 dont les contrats avaient été signés par son supérieur hiérarchique, mais pour avoir dissimulé leur existence à son nouveau supérieur hiérarchique lors de ses réponses en septembre et octobre 2011, la cour d'appel en a exactement déduit, sans modifier l'objet du litige, que les faits fautifs invoqués par l'employeur n'étaient pas atteints par la prescription et a pu décider, que compte tenu de sa position hiérarchique, le comportement du salarié rendait impossible son maintien dans l'entreprise et constituait une faute grave ; que le moyen, inopérant dans sa deuxième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS
:
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article
700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze octobre deux mille seize.
MOYEN ANNEXE
au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. X...
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté les demandes de M. X... tendant à voir juger que son licenciement était dénué de cause réelle et sérieuse, obtenir le paiement d'une indemnité de préavis, d'une indemnité de congés payés sur préavis, du 13ème mois sur préavis, d'une indemnité pour privation du véhicule pendant le préavis, d'une indemnité de licenciement et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de l'avoir condamné en application de l'article
700 du code de procédure civile et aux dépens ;
AUX MOTIFS QUE les termes de la lettre de licenciement fixant les limites du litige, il convient de rappeler que M. X..., après avoir été convoqué le 11 octobre 2011 à un entretien préalable avec mise à pied conservatoire, a été licencié pour faute grave par lettre du 28 octobre 2011 aux motifs suivants : " (...) Notre société fait partie du groupe Vaillant, lequel a centralisé l'ensemble des activités " export " de ses filiales au printemps 2011 sous la responsabilité de M. Mathias A..., qui est ainsi devenu votre responsable hiérarchique. M. A... vous a sollicité plusieurs fois pour connaître les conditions commerciales applicables aux différents marchés dont vous avez la charge. Vous lui avez répercuté des informations inexactes sur des aspects essentiels. Les données que vous lui avez dissimulées font naître des doutes très sérieux sur la probité de l'activité dont vous êtes le directeur depuis plus de 10 ans et révèlent à tout le moins de très graves négligences au préjudice de notre société. a) La situation en Tunisie et en Algérie : Par mail du 12 septembre 2011, M. A... vous demandait de lui envoyer une synthèse de tous les paiements effectués par SDECC au bénéfice des clients, agents commerciaux ou autres intermédiaires. Dans un mail du 14 septembre 2011, en réponse à cette demande précise, vous avez listé les marchés donnant lieu au paiement de ces commissions :- Dans cette liste, vous omettez de faire mention de l'Algérie, et ce alors que sur les huit premiers mois de l'année, SDECC a versé près de 200 000 euros à Mme Anne Y..., laquelle serait agent commercial de SDECC pour l'Algérie. Cette omission est d'autant plus troublante que vous n'intervenez que sur sept marchés et que l'Algérie est le pays donnant lieu aux versements de commissions les plus importants. La question de M. A... portant sur les pays dans lesquels SDECC paye des commissions et votre réponse consistant à lui dresser la liste des pays dans lesquels sont effectivement versées des commissions, il est absolument anormal que vous ayez omis l'agent auquel SDECC a payé le plus de commissions sur l'exercice comptable en cours.- Concernant la Tunisie, vous indiquez simplement qu'une commission de 3 % est payée sur un compte ouvert au nom de notre distributeur. M. A... vous répond le 14 septembre 2011 qu'il est étonné du paiement de commissions en Tunisie et vous rappelle que lors de votre entretien quelques temps plus tôt à Bilbao en Espagne, vous lui aviez au contraire indiqué qu'en Tunisie, SDECC ne payait aucune commission. Vous répondez alors le 15 septembre 2011 que, sur ce point, il s'agissait d'une erreur de votre part et que SDECC payait en Tunisie une commission de 3 %. Ici encore, tout en reconnaissant une première inexactitude sur l'existence même de commissions payées par SDECC en Tunisie, votre nouvelle réponse ne correspond en rien à la réalité puisqu'après vérification, SDECC paye depuis des années des commissions sur la Tunisie à une certaine Mme Anne Y..., domiciliée à Paris. En 2011, celle-ci a bien reçu des commissions sur les ventes en Tunisie. Le 21 septembre 2011, suite à un appel téléphonique de M. A... qui s'interroge sur le fondement contractuel des relations avec les partenaires de SDECC sur ces différents marchés sur lesquels SDECC payerait des commissions à des intermédiaires bien qu'ayant sur place un distributeur exclusif, vous lui faîtes à nouveau une description inexacte :- Pour l'Algérie, vous écrivez expressément qu'il n'y aurait pas de commissions et que les prix seraient fixés pour une période d'un an. Pour la Tunisie, vous réitérez qu'il n'existerait pas d'autre commission qu'un paiement de 3 % sur un compte ouvert à Paris au nom du propriétaire du distributaire exclusif de SDECC. Une nouvelle fois, et il ne peut plus s'agir d'une erreur, vous omettez donc de mentionner que sur l'année en cours, vous avez personnellement approuvé le paiement de près de 200 000 euros de commissions à une Mme Anne Y..., laquelle reçoit des commissions aussi bien sur les ventes en Algérie qu'en Tunisie. Confronté à ces contradictions lors de votre entretien préalable, vous avez d'abord demandé à répondre plus tard par écrit. Nous vous avons prié de vous expliquer lors de l'entretien sur ces dissimulations répétées de la réalité des paiements de commissions effectués par SDECC. Vous nous avez alors expliqué que les 3 % correspondaient à des coûts destinés à couvrir les opérations de garantie, ce qui est en contradiction avec les factures d'agent commercial payées par SDECC encore en. 2011. Nous vous avons indiqué que si réellement SDECC recourait aux services de Mme Y... en qualité d'agent commercial sur ces deux territoires, il devait bien exister de la correspondance émanant de cet agent, des rapports de visite de clients, des transmissions de nouvelles commandes, etc.., attestant de la réalité des services pour lesquels celle-ci facture des commissions. Vous nous avez affirmé que ces pièces existaient et que vous les transmettriez plus tard, mais lorsque nous avons suggéré que nous n'aurions alors aucune difficulté à nous les procurer auprès de votre assistante, vous avez indiqué qu'elle ne disposait pas de ces éléments. S'agissant d'un agent ayant reçu depuis 1999 près de 1 400 000 euros de commissions, nous avons souligné notre vif étonnement.
Vous avez alors expliqué que Mme Y... était en réalité l'épouse de Philippe Y..., lequel a été longtemps l'agent commercial de SDECC sur ces territoires après avoir revendu sa société à SDECC dans les années 70 et avoir été son salarié pendant quelques années. Vous nous avez en outre expliqué ne pas avoir mentionné cet agent qui a reçu près de 200 000 euros en 2011 au prétexte que vous auriez résilié son contrat en 2011. Après vérification en interne, les services juridiques de SDECC n'a été saisi d'aucune résiliation de contrat d'agent commercial par vos soins en 2011. La seule résiliation de contrat d'agent sur laquelle notre service juridique a travaillé en 2011 à votre demande est le contrat concernant la Russie, ce territoire étant pris en charge par la filiale russe du groupe à partir de 2012. Enfin, si réellement un contrat d'agent vieux de plus de 20 ans avait été résilié en 2011, SDECC aurait dû passer une provision correspondant à l'indemnité de clientèle que la loi impose de verser à l'agent dans l'hypothèse d'une résiliation de contrat par son mandant. Aucune demande d'indemnisation n'a été enregistrée par SDECC en 2011 à ce titre. Nous avons alors attiré votre attention sur le fait que nous avions découvert que concernant la Tunisie, les même factures de SDECC donnaient lieu à une double facturation de commissions, l'une par une Mme Z..., agent pour la Tunisie, et l'autre par Mme Anne Y..., également agent pour la Tunisie. Nous avons également souligné que ce double commissionnement intervenait en général à plusieurs mois voire souvent à une année d'intervalle, ce qui le rendait difficile à identifier et encore plus suspect, ce d'autant plus que pendant des années, Mme Z... et Mme Y... percevaient toutes deux ces versements dans la même agence bancaire dans le 16ème arrondissement de Paris. L'ensemble de ces factures, aussi loin qu'ont remonté nos recherches, ont toutes été signées " bon à payer " par vous-même. Nos investigations ont également permis de découvrir que dans les DAS2 de la société, Mme Z...était domiciliée chez Philippe Y..., lui-même à la retraite depuis 1997. Nous allons bien évidemment poursuivre nos investigations sur ces faits particulièrement troublants, d'autant que plusieurs procédures pénales sont actuellement en cours pour d'importants détournements imputables à l'équipe dirigeante précédente, dont vous étiez très proche. Nous avons pris bonne note de votre email du 25 octobre 2011 par lequel vous reconnaissez vous-même qu'à la lecture des notes prises lors de l'entretien préalable de licenciement du 21 octobre 2011, vous vous rendez compte que vos réponses n'ont pas été convaincantes. Quoi qu'il en soit, sur une question claire sur le paiement de commission sur vos territoires, vous avez en près de 10 jours, envoyé plusieurs correspondances dont aucune ne reflète la réalité. Compte tenu de votre position hiérarchique, de votre rémunération, du nombre réduit de marchés sur lesquels vous intervenez, vos réponses sont nécessairement intentionnellement trompeuses et visent à dissimuler la réalité de la situation. A tout le moins, de telles erreurs graves et répétées sur la réalité économique de votre activité démontrent une négligence grossière inacceptable de la part d'un cadre de direction de votre niveau. Les explications confuses émises lors de votre entretien démontrent que la poursuite des relations est impossible, même pendant la durée d'un préavis, car vous n'êtes pas en mesure de donner loyalement une présentation fidèle de votre activité. D'ailleurs, la reconnaissance lors de l'entretien de ce que M. Philippe Y... serait le véritable agent commercial de SDECC révèle une faute extrêmement grave, puisque vous reconnaissez par-là que SDECC, au travers de vos agissements, aurait payé les factures d'une personne qui ne rend aucune prestation en contrepartie. En outre, l'ensemble des factures Anne Y... que vous avez ainsi approuvées au fil des années sont ainsi des faux, puisque cette personne n'est pas et n'a jamais été notre agent. (...)
b) La situation en Russie : Par un email du 13 septembre 2011, vous expliquiez que pour la Russie, il existerait un contrat avec un ancien salarié de SDECC, Alexis Bedel de Buzaringues, mais que comme ce dernier a un nom long et compliqué, il aurait été appelé Charles E...dans le contrat d'origine de 1998. Aucune trace de ce contrat n'étant trouvée dans les archives du service juridique de SDECC, vous nous avez fait parvenir ce contrat tel que signé à l'époque en nous précisant qu'il régissait la relation contractuelle. Interpellé par le caractère étrange de votre affirmation selon laquelle le nom long et compliqué de cet ancien salarié aurait amené SDECC à signer un contrat avec cette personne sous un autre nom, nous avons fait des recherches et découvert qu'entre 1991 et 2007, vous avez approuvé le paiement des factures de cet agent domicilié en France sur un compte à l'étranger, défiscalisant ainsi frauduleusement la rémunération versée à un résident français. (...) Par ailleurs, le contrat que vous nous avez vous-même transmis prévoit que cet agent devait prendre à sa charge l'intégralité des frais exposés dans le cadre de ses diligences. Pourtant, en violation de cette disposition contractuelle, vous avez continué à apposer votre " bon à payer " sur ses notes de débours et ce, pendant des années au préjudice de notre société. Vous avez reconnu ces faits. Enfin, le contrat prévoyait qu'une fois atteint un certain seuil de chiffre d'affaires, la commission passerait automatiquement à un taux de 5 %. Pourtant, cette disposition elle non plus n'a pas été respectée par vos soins, et ce à nouveau au détriment des intérêts de notre société. Votre explication trompeuse sur les véritables motifs de ce changement de nom, dans le but de les couvrir plutôt que de faire une présentation objective et conforme à la réalité, constitue une déloyauté inacceptable, et ce d'autant que ce contrat doit être rompu et que la connaissance de cet historique permet de fonder une rupture aux torts de l'agent. c) Les dépenses personnelles abusivement passées en frais : La charte " frais professionnels " interdit de faire passer des repas purement personnels en frais. Compte tenu des motifs évoqués ci-dessus, nous avons également tenu à vérifier ce point. Il apparaît dans vos frais de juin 2011 que vous avez, aux frais de SDECC, invité votre collègue à la retraite Serot ainsi que votre collaboratrice à déjeuner. Pour obtenir néanmoins la signature de M. A... pour l'approbation du remboursement de ces frais, vous avez présenté les choses comme si vous aviez invité deux personnes extérieures en frais de représentation professionnelle. L'examen de vos remboursements de frais montre que ces faits se sont reproduits à de nombreuses reprises au cours des trois dernières années. (...) " ;
Et AUX MOTIFS QU'en premier lieu qu'il convient de souligner que contrairement à ses assertions, il ressort de l'exposé de cette lettre de licenciement que M. X... n'a pas été licencié pour avoir mis en place un système frauduleux d'agents commerciaux anciens collaborateurs de Saunier Duval, les contrats signés en 1993 ne l'ayant pas été par lui mais par son supérieur, mais uniquement pour avoir dissimulé leur existence à son nouveau supérieur hiérarchique ; qu'il doit être précisé à cet égard qu'en 2001, le groupe allemand Vaillant a racheté le groupe Saunier Duval, spécialisé dans les chaudières, et notamment sa société mère SDECC ; qu'en 2008, la découverte de malversations a entraîné la révocation de son PDG et le licenciement de la plupart de ses dirigeants, auquel M. X... a finalement échappé ; qu'en 2011, un nouveau Directeur Export Groupe, en la personne de M. A..., a été nommé au sein de la maison mère en Allemagne et est devenu le supérieur hiérarchique de M. X... ; que c'est dans ces conditions que ce dernier s'est vu interrogé par son responsable sur le fonctionnement de la direction export de SDECC par un courriel du 12 septembre 2011, auquel il a répondu une première fois le 14 septembre suivant ; qu'il en résulte que ses réponses partielles constituant le point de départ et l'un des motifs de la lettre de licenciement, il n'est pas fondé à invoquer la prescription des faits reprochés sur le fondement de l'article
L. 1332-4 du code du travail ; en second lieu il ne ressort aucunement des échanges de courriels cités dans la lettre de licenciement et produits aux débats, contrairement à ce qu'affirme l'appelant, que les informations réclamées dans le courriel du 12 septembre 2011, dont l'objet est intitulé " documents ", l'aient été en prévision du budget de 2012, mais simplement dans le cadre d'une présentation générale (" overview ") de " tous les paiements aux clients, agents ou autres personnes impliquées, et le fondement des paiements (vous avez mentionné des paiements de commissions à la Grèce et l'Ouzbékistan) ", le nouveau Directeur Export Groupe souhaitant avoir " tous les documents et accords disponibles avec les clients liés à l'activité d'exportation de SD " ; que le courriel de réponse de M. X... du 14 septembre 2011 indique qu'" il semble que le service juridique n'ait plus ces vieux contrats " et ne fait état d'aucune commission versée pour l'Algérie, alors même que l'employeur produit des factures de commissions jusqu'en avril 2011 ; que pour la Tunisie, il mentionne que " 3 % de commissions sur les ventes de chaudières sont versés sur un compte non résident en France au nom de notre importateur " ; que sommé d'être un peu plus précis à la suite d'une conversation téléphonique et après d'autres échanges croisés de sa collaboratrice avec le contrôleur de gestion allemand, il confirme par courriel du 21 septembre 2011 qu'il n'y a pas de commissions versées en Algérie et qu'en Tunisie les coûts de garantie sont compensés par le paiement de 3 % de la valeur des chaudières " sur un compte à Paris au nom de Trabelsi, le fondateur et propriétaire unique de SET " ; que comme le relève la lettre de licenciement, il y a là omission pour l'Algérie des commissions qui ont été versées à Mme Y... et inexactitude pour la Tunisie, les commissions étant versées sur un compte non au nom de l'importateur qui est une société ni même de son dirigeant mais au nom de la femme de son gérant sur un compte en France ; que M. X... soutient qu'il n'avait pas à faire état de commissions qui avaient pris fin avec le départ à la retraite de l'agent commercial, Mme Y..., au 31 décembre 2010, ainsi qu'il résulterait de la lettre simple adressée par l'intéressée le 19 juin 2010 à Saunier Duval ; que cependant, d'une part il doit être relevé que ce départ à la retraite n'a pas été l'argument présenté par M. X... à son employeur lorsque celui-ci l'a interrogé sur l'existence de commissions versées à Mme Y... tant pour l'Algérie que pour la Tunisie, pays où la société avait pourtant des distributeurs exclusifs, ce qui est relevé sinon retenu dans la lettre de licenciement ; que d'autre part, l'importance des versements effectués encore en 2011 pour des factures de 2010 appelait à tout le moins de la part du directeur de l'export quelques mots d'information et d'explication à son nouveau supérieur hiérarchique ; qu'en tout état de cause, à supposer que le directeur ait entendu que le terme " paiements " signifiait non pas les paiements effectués en 2011 mais les provisions à prévoir pour 2012, il reste qu'il a " camouflé " l'identité exacte du bénéficiaire des commissions versées en Tunisie, non pas, selon les factures qu'il approuvait, au titre de garantie sur les chaudières vendues, mais bien à titre de commissions ; qu'enfin, il ne donne aujourd'hui encore aucune justification au fait que les mêmes prestations, donc, donnaient lieu à une double facturation au nom de Mme Y... et au nom de Mme Z..., sauf à soutenir que les faits sont prescrits, alors que l'employeur justifie les avoir découverts à la suite des recherches entreprises du fait des réponses imprécises et contradictoires de son directeur de l'export, dont les responsabilités et le statut le mettaient à l'abri de tout contrôle dès lors qu'il conservait les contrats et que les doubles factures étaient expressément indiquées comme devant être remises à l'encaissement plusieurs mois après leur date, ce qui ne facilitait pas les rapprochements par le service du contrôle de gestion ; qu'il ressort des pièces produites qu'il en est de même s'agissant de l'agent en Russie, au sujet duquel M. X...a donné des informations inexactes et incomplètes, le contrat d'agent qu'il avait, finalement, à sa disposition étant au nom de " la société Confort SRO en cours d'immatriculation en République tchèque représentée par M. Charles E...", et pour lequel il a validé des factures de frais de déplacement, produites aux débats, en 2004 et 2006, en violation des stipulations contractuelles qui l'excluaient, sans qu'il puisse opposer leur prescription, pour les motifs déjà énoncés ; il résulte de ces éléments et sans qu'il y ait besoin d'examiner le dernier motif que le grief de dissimulation intentionnelle est établi, et que, compte tenu de la position du salarié dans l'entreprise et de l'importance pour la maison mère allemande de pouvoir avoir un interlocuteur export en France fiable, il justifiait la rupture immédiate du contrat de travail sans attendre plus avant le résultat des investigations pénales ; qu'à cet égard, il convient d'ajouter que M. X... n'ayant pas été licencié pour malversations, il importe peu que la lettre de licenciement laisse entendre qu'il puisse y avoir un doute sur celles-ci, dès lors qu'elles ne sont évoquées que pour souligner l'importance des informations dissimulées ; que de la même façon, il est sans intérêt pour l'appelant d'invoquer la confusion que ferait la lettre de licenciement entre faute disciplinaire et insuffisance professionnelle, alors qu'elle précise bien qu'à supposer même que les manquements qui lui sont reprochés ne procéderaient d'aucune intention frauduleuse, ils révéleraient une négligence grossière inacceptable ne permettant pas plus longtemps la poursuite du contrat ; qu'enfin, le salarié ne peut invoquer la tolérance de son employeur pendant des années et la parfaite information de celui-ci du fait des déclarations des commissions dans les DAS2 annuelles dès lors que, sommé, postérieurement à la révocation de l'ancien PDG responsable de cette organisation, de donner des informations claires à son nouveau responsable, il n'a pas permis à celui-ci d'être pleinement informé de la situation exacte de son domaine d'activité et l'a obligé à effectuer des investigations, alors même qu'il avait lui-même une parfaite connaissance de la position actuelle de son nouvel employeur à l'égard des malversations pour avoir été sanctionné par un avertissement lors de l'éviction de l'ancienne équipe dirigeante en 2008 ; que le jugement sera donc confirmé qui a retenu l'existence d'une faute grave et a débouté M. X... de ses demandes au titre de la rupture ; Et attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la société SDECC ses frais de procédure ; qu'une somme de 4000 lui sera allouée à ce titre en application de l'article
700 du code de procédure civile ;
Et AUX MOTIFS partiellement adoptés QU'il est constant que le demandeur a été recruté par la société défenderesse le 1er mars 1978, étant précisé que le premier occupait en dernier lieu les fonctions de directeur export ; suivant un courrier en date du 28 octobre 2011, M. X... a été licencié au titre d'une faute grave en raison des griefs suivants : réponses délibérément inexactes et lacunaires aux demandes de renseignements formulées par son supérieur hiérarchique, M. A... relativement aux conditions commerciales concernant les marchés en Tunisie et en Algérie (et plus particulièrement les commissions versées à des intermédiaires, malgré l'existence dans ces pays de distributeurs exclusifs), ainsi que la situation en Russie où l'identité exacte de l'agent commercial a été dissimulée pour permettre des paiements effectués selon des modalités constitutives d'une défiscalisation frauduleuse au profit d'un résident français, ainsi qu'une tentative d'obtenir indûment le remboursement de frais prétendument professionnels (à savoir une note de restaurant se rapportant à des invitations adressées en réalité à des salariés de la société, et non à des personnes extérieures à celle-ci) ; en l'espèce, il convient de considérer que :- il se déduit effectivement des réponses faites par le demandeur (e-mails des 14 septembre et 21 septembre 2011) aux questions de son supérieur hiérarchique (en date du 12 septembre 2011), lequel sollicitait expressément " une présentation générale de tous les paiements faits aux clients, agents commerciaux et toute autre personne intervenant dans cette activité et le fondement, de ces paiements ", que M. X..., qui connaissait parfaitement la situation des marchés algériens et tunisiens, a omis de faire état de commissions versées à deux agents commerciaux, à savoir M. et Mme Anne Y... et Mme Z..., alors que l'employeur nourrissait à l'époque des soupçons sérieux sur l'utilité (compte tenu de l'existence de distributeurs exclusifs) et la régularité des prestations de ces intermédiaires, étant au surplus observé que la société défenderesse a ultérieurement déclenché des poursuites visant ceux-ci, et ce tant devant le juge civil que le juge répressif ;- cette abstention délibérée de M. X... de fournir à son employeur, des informations exactes et exhaustives relativement aux marchés algériens et tunisiens, a été en tout état de cause expressément relevée par le commissaire aux comptes de la société défenderesse, dans sa lettre de dénonciation (en date du 31 janvier 2012) adressée au procureur de la république de Paris, faisant état d'agissements susceptibles de caractériser des infractions aux articles
313-1,
441-1 du code pénal et au code monétaire et financier ;- contrairement à ce que prétend le demandeur, il ne résulte aucunement des éléments comptables et budgétaires dont disposait ses supérieurs hiérarchiques, que ceux-ci pouvaient aisément prendre connaissance, par leurs propres moyens, des informations dont s'agit, étant au surplus observé que l'identité des intermédiaires susmentionnés, que la défenderesse ne pouvait découvrir sans entreprendre des investigations particulièrement poussées, n'apparaît pas sur les documents dont fait état M. X... dans le cadre de la présente instance ; il s'en déduit que le demandeur a manqué à son obligation de loyauté envers son employeur, et ce sans même qu'il soit nécessaire de se pencher sur la matérialité et la pertinence des autres griefs invoqués dans la lettre de licenciement ; en conséquence, c'est à juste titre que la défenderesse s'est prévalue d'une faute grave pour rompre le contrat de travail de M. X... ; ce dernier sera dès lors débouté de l'intégralité de ses prétentions ; l'équité commande d'accorder à la défenderesse une indemnité de 1. 000 euros en vertu de l'article
700 du code de procédure civile ;
ALORS QU'il appartient à l'employeur de rapporter la preuve qu'il n'a eu connaissance des faits fautifs que dans les deux mois ayant précédé l'engagement de la procédure disciplinaire ; qu'il ne peut invoquer des faits qui ont eu lieu alors que le salarié se trouvait sous l'autorité d'un précédent supérieur hiérarchique que si le délai de deux mois n'est pas écoulé ; que la cour d'appel a rejeté le moyen tiré de la prescription tout en constatant que les contrats litigieux dataient de 1993 et les factures litigieuses de 2004, 2006 et 2010 alors que la procédure de licenciement a été engagée en octobre 2011 ; qu'en statuant comme elle l'a fait alors que les faits étaient antérieurs de plus de deux mois à l'engagement de la procédure de licenciement et que l'employeur ne démontrait pas n ‘ en avoir eu connaissance qu'ultérieurement, indépendamment de la connaissance des faits par la direction précédente, la cour d'appel a violé l'article
L 1332-4 du code du travail ;
Et ALORS QUE M. X... a expressément souligné que nombre de faits étaient antérieurs à l'avertissement prononcé le 15 février 2008 qui avait donné lieu à la signature d'une transaction, le 6 novembre 2008, aux termes de laquelle l'employeur renonçait à toute procédure pour des faits antérieurs à l'avertissement ; que la cour d'appel n'en a pas tenu compte ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher si, compte tenu de l'avertissement du 15 février 2008 et des termes de la transaction, l'employeur pouvait se prévaloir de faits antérieurs, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles
1134 du code civil et les articles L 1331-1, L 1232-1,
L 1234-1,
L 1234-5,
L 1234-9,
L 1235-1 et
L 1235-3 du code du travail ;
ALORS en outre QUE le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi et l'employeur ne peut sanctionner un salarié en se fondant sur des faits connus de longue date ; que la cour d'appel a considéré que le salarié s'était rendu coupable de « dissimulation intentionnelle » en ne répondant pas de façon satisfaisante aux interrogations de son nouveau supérieur hiérarchique en septembre 2011, alors que les faits, anciens, étaient connus de l'employeur de longue date ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles L 1222-1, L 1232-1,
L 1234-1,
L 1234-5,
L 1234-9,
L 1235-1 et
L 1235-3 du code du travail ;
ALORS par ailleurs QUE le salarié a expressément indiqué qu'une même vente donnait lieu au paiement d'une commission aux époux Y... et au paiement d'un service de garantie à Mme Z... ; que la cour d'appel a retenu que le salarié ne donnait aucune explication au fait que les mêmes prestations donnaient lieu à une double facturation au nom de Mme Y... et au nom de Mme Z... ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article
4 du code de procédure civile ;
Et ALORS enfin QUE la faute grave doit être appréciée in concreto en tenant compte de l'ancienneté du salarié ; que la cour d'appel a considéré que le licenciement du salarié pour faute grave était fondé aux motifs qu'il avait donné des réponses non satisfaisantes à des questions de son nouveau supérieur hiérarchique ; qu'en statuant comme elle l'a fait sans tenir compte de la grande ancienneté du salarié qui était entré dans l'entreprise en 1978, soit plus de 33 ans auparavant, la cour d'appel a violé les articles L 1232-1,
L 1234-1,
L 1234-5,
L 1234-9,
L 1235-1 et
L 1235-3 du code du travail.