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Tribunal judiciaire de Rennes, 26 septembre 2024, 22/00208

Mots clés
société • statuer • recours • témoin • ressort • preuve • reconnaissance • salaire • pouvoir • règlement • rejet • requis • terme

Synthèse

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Résumé

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Partie défenderesse
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE D'ILLE ET VILAINE

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Texte intégral

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE RENNES PÔLE SOCIAL MINUTE N° AUDIENCE DU 26 Septembre 2024 AFFAIRE N° RG 22/00208 - N° Portalis DBYC-W-B7G-JWEY 89E JUGEMENT AFFAIRE : Société [5] C/ CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE D'ILLE ET VILAINE Pièces délivrées : CCCFE le : CCC le : PARTIE DEMANDERESSE : Société [5] [Adresse 6] [Adresse 4] [Localité 2] Représentée par Maître Emmanuelle DUGUE-CHAUVIN, avocate au barreau de ROUEN, substituée à l'audience par Maître Anne-Marie QUESNEL, avocate au barreau de RENNES PARTIE DEFENDERESSE : CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE D'ILLE ET VILAINE [Adresse 3] [Localité 1] Représentée par Monsieur [E] [U], muni d'un pouvoir COMPOSITION DU TRIBUNAL : Présidente : Madame Magalie LE BIHAN Assesseur : Madame Isabelle POILANE, assesseur du pôle social du tribunal judiciaire de Rennes Assesseur : Madame Pia LE MINOUX, assesseur du pôle social du tribunal judiciaire de Rennes Greffière : Madame Rozenn LE CHAMPION DEBATS : Après avoir entendu les parties en leurs explications à l'audience du 05 Avril 2024, l'affaire a été mise en délibéré pour être rendu par mise à disposition au greffe au 05 Juillet 2024, prorogé au 26 Septembre 2024. JUGEMENT : contradictoire et en premier ressort ******** EXPOSE DU LITIGE : Monsieur [J] [Z], salarié de la société [5] depuis le 04/01/2016 en qualité de conducteur poids lourds, a déclaré avoir été victime d'un accident de travail survenu le 10/06/2021, dans des circonstances ainsi décrites aux termes de la déclaration complétée par l'employeur le 14/06/2021 : "Activité de la victime lors de l'accident : chargement Nature de l'accident : échauffement au niveau du bras" L'employeur a formulé des réserves motivées. Le certificat médical initial, établi le 10/06/2021, fait état d'une « rupture du tendon du long biceps droit ». La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) d'Ille-et-Vilaine a procédé par voie de questionnaires, l'employeur ayant complété le sien le 09/07/2021 et l'assuré le 16/07/2021. Par courrier du 08/09/2021, la CPAM d'Ille-et-Vilaine a notifié à la société [5] sa décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'accident dont a été victime M. [Z] le 06/02/2020. Par courrier daté du 05/11/2021, la société [5] a saisi la commission de recours amiable de la CPAM d'une contestation. Par lettre recommandée avec accusé de réception expédiée le 09/03/2022, la société [5] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Rennes d'un recours contre la décision implicite de rejet de la commission. En sa séance du 29/11/2022, la commission de recours amiable a finalement rejeté la contestation de la société [5]. L'affaire a été évoquée à l'audience du 05/04/2023. La société [5], dûment représentée, se référant expressément à ses dernières conclusions, demande au tribunal de : Ordonner l'inopposabilité à la société [5] de la décision de prise en charge du 08/09/2021 au titre de la législation professionnelle de l'accident survenu à M. [Z] en date du 10/06/2021 ;Condamner la CPAM d'Ille-et-Vilaine à payer à la société [5] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir en substance que la caisse a rendu sa décision tardivement puisqu'elle aurait dû intervenir au plus tard le 13/09/2021. Elle en déduit que les délais mentionnés dans les courriers de la CPAM sont erronés. La société indique en outre que le dossier mis à sa disposition n'était pas complet, dans la mesure où les certificats médicaux de prolongation n'y figuraient pas. Sur le fond, la société [5] estime que la chronologie de l'accident doit être prise en compte, M. [Z] se trouvant depuis plusieurs mois en conflit avec son employeur au sujet de l'application de la garantie de maintien de salaire en cas d'arrêt de travail. Elle expose que ce contexte conflictuel a notamment donné lieu à un entretien téléphonique houleux avec M. [Z] qui se serait montré particulièrement agacé par le refus de la société de faire droit à sa demande, et que les échanges houleux ont perduré après l'accident. Sur la matérialité de l'accident, la société [5] affirme que, selon un salarié de l'entreprise expéditrice qu'elle a contacté et qui a participé au chargement au cours duquel l'accident serait survenu, M. [Z] a lui-même pris l'initiative de procéder au chargement, en méconnaissance des règles applicables, lesquelles prévoient que le chargement de marchandises de plus de 3 tonnes est exécuté par l'expéditeur sous sa responsabilité. Elle ajoute que M. [Z] aurait signalé une prétendue douleur au cours du chargement mais qu'il a tout de même achevé la manœuvre avant d'être transporté aux urgences, dont il est ressorti le jour même. Elle soutient enfin que le témoin déclaré par le salarié a indiqué ne pas avoir vu l'accident. En réplique, la CPAM d'Ille-et-Vilaine, dûment représentée, se référant expressément à ses conclusions du 19/12/2023, prie le tribunal de bien vouloir : Confirmer la décision de prise en charge de l'accident de M. [Z] survenu le 10/06/2021 au titre de la législation professionnelle par la CPAM d'Ille-et-Vilaine ;Déclarer opposable à la société [5] la décision de prise en charge de l'accident du travail du 10/06/2021 de M. [Z] par la CPAM d'Ille-et-Vilaine ;Débouter la société [5] de toutes ses demandes ;Condamner la société [5] au paiement de la somme de 1.500 euros à la CPAM d'Ille-et-Vilaine sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;Condamner la société [5] aux dépens de l'instance.A l'appui de ses demandes, la caisse fait essentiellement valoir que l'accident est survenu à 10h sur le lieu de travail occasionnel de la victime, que l'employeur a été prévenu 45 minutes plus tard, que le certificat médical initial dressé le jour même fait état de lésions concordantes avec le processus accidentel décrit à la caisse et que la première personne avisée a confirmé que M. [Z] était atteint au biceps en revenant au dépôt. Elle ajoute que si l'employeur estime que l'accident n'aurait jamais dû se produire, il ne démontre pas que les lésions présentées par son salarié n'ont aucun lien avec l'accident survenu le 10/06/2021 aux temps et lieu de travail de la victime et n'apporte aucun élément permettant de renverser la présomption d'imputabilité. Sur le principe du contradictoire, la caisse affirme que le point de départ du délai pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident a commencé à courir non à compter de la date à laquelle la déclaration a été élaborée mais à compter de la date à laquelle l'organisme a effectivement disposé de ladite déclaration et du certificat médical initial, soit en l'occurrence le 17/06/2021, de sorte que sa décision devait intervenir au plus tard le 16/09/2021. Elle estime qu'elle n'avait aucune obligation de mettre les certificats médicaux de prolongation à disposition de l'employeur. Sur la faute inexcusable, la caisse affirme que M. [Z] a exécuté la mission qui lui était demandée après s'être informé de la nature du chargement et en étant muni de tous les équipements de protection individuelle requis, de sorte que l'accident n'est que la conséquence d'une incompréhension du salarié des ordres donnés par son employeur et qu'il n'est pas démontré qu'il résulte d'une faute inexcusable du salarié. Pour un plus ample exposé des moyens des parties, il convient de se référer à leurs conclusions sus-citées, et ce en application de l'article 455 du Code de procédure civile. A l'issue des débats, la décision a été mise en délibéré au 05/07/2024 puis prorogée au 26/09/2024 et rendue à cette date par mise à disposition au greffe conformément aux dispositions de l'article 450 du Code de procédure civile. ***

MOTIFS

: Sur le principe du contradictoire : Aux termes de l'article R. 441-8 du Code de la sécurité sociale, la caisse dispose d'un délai de trente jours francs à compter de la date à laquelle elle dispose de la déclaration d'accident et du certificat médical initial prévu à l'article L. 441-6 pour soit statuer sur le caractère professionnel de l'accident, soit engager des investigations lorsqu'elle l'estime nécessaire ou lorsqu'elle a reçu des réserves motivées émises par l'employeur. Selon l'article R. 441-8 du même code, lorsque la caisse engage des investigations, elle dispose d'un délai de quatre-vingt-dix jours francs à compter de la date à laquelle elle dispose de la déclaration d'accident et du certificat médical initial pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident. Dans ce cas, la caisse adresse un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident à l'employeur ainsi qu'à la victime ou ses représentants, dans le délai de trente jours francs mentionné à l'article R. 441-7 et par tout moyen conférant date certaine à sa réception. Ce questionnaire est retourné dans un délai de vingt jours francs à compter de sa date de réception. La caisse peut en outre recourir à une enquête complémentaire. En cas de décès de la victime, la caisse procède obligatoirement à une enquête, sans adresser de questionnaire préalable. La caisse informe la victime ou ses représentants ainsi que l'employeur de la date d'expiration du délai prévu au premier alinéa lors de l'envoi du questionnaire ou, le cas échéant, lors de l'ouverture de l'enquête. A l'issue de ses investigations et au plus tard soixante-dix jours francs à compter de la date à laquelle elle dispose de la déclaration d'accident et du certificat médical initial, la caisse met le dossier mentionné à l'article R. 441-14 à la disposition de la victime ou de ses représentants ainsi qu'à celle de l'employeur. Ceux-ci disposent d'un délai de dix jours francs pour le consulter et faire connaître leurs observations, qui sont annexées au dossier. Au terme de ce délai, la victime ou ses représentants et l'employeur peuvent consulter le dossier sans formuler d'observations. La caisse informe la victime ou ses représentants et l'employeur des dates d'ouverture et de clôture de la période au cours de laquelle ils peuvent consulter le dossier ainsi que de celle au cours de laquelle ils peuvent formuler des observations, par tout moyen conférant date certaine à la réception de cette information et au plus tard dix jours francs avant le début de la période de consultation. Il est constant que le dépassement du délai dont la caisse dispose pour statuer sur le caractère professionnel d'un accident ne rend pas par lui-même cette décision inopposable à l'employeur (Civ. 2e, 31 mai 2018, n° 17-18.607). Afin d'assurer une complète information de l'employeur, dans le respect du secret médical dû à la victime, le dossier présenté par la caisse à la consultation de celui-ci doit contenir les éléments recueillis, susceptibles de lui faire grief, sur la base desquels se prononce la caisse pour la reconnaissance du caractère professionnel d'une maladie ou d'un accident. Ne figurent pas parmi ces éléments les certificats ou les avis de prolongation de soins ou arrêts de travail, délivrés après le certificat médical initial, qui ne portent pas sur le lien entre l'affection, ou la lésion, et l'activité professionnelle (Civ. 2e, 16 mai 2024, n° 22-22.413 et n° 22-15.499). Au cas d'espèce, il est constant que la déclaration d'accident du travail de M. [Z] a été établie par la société [5] le 14/06/2021 et que le certificat médical initial afférent est daté du 10/06/2021. Ces documents ont été réceptionnés par la caisse le 17/06/2021 selon courrier du 30/06/2021 dont l'employeur ne conteste pas avoir été destinataire. La société [5] ne démontre pas que la déclaration et le certificat ont été reçus antérieurement par l'organisme de prise en charge, de sorte que le délai dont ce dernier disposait pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident courrait nécessairement à compter de cette date et qu'il s'achevait, compte tenu des investigations menées, le 16/09/2021 à minuit. La décision de prise en charge, rendue par la caisse le 08/09/2021, n'est pas tardive. A supposer même que, comme l'affirme la société [5], le délai dont la caisse disposait pour rendre sa décision ait pris fin le 13/09/2021, la décision de prise en charge du 08/09/2021 ne pourrait davantage être considérée comme tardive. En tout état de cause, il sera rappelé que le fait que la décision de la caisse ait été rendue après l'expiration du délai qui lui était imparti pour statuer n'est pas de nature à entraîner son inopposabilité à l'employeur. S'agissant du contenu du dossier mis à la disposition de l'employeur, il sera simplement renvoyé à la jurisprudence suscitée, aux termes de laquelle le dossier présenté par la caisse à la consultation de l'employeur n'a pas à contenir les certificats ou les avis de prolongation de soins ou arrêts de travail, délivrés après le certificat médical initial. En effet, si l'article R441-14 du Code de la sécurité sociale ne distingue pas entre les différents types de certificats médicaux devant figurer au dossier, seul le certificat médical initial peut participer à l'objectivation de l'accident, les certificats médicaux de prolongation n'étant pas de nature à influer sur la caractérisation de la survenance de l'accident, mais sur les conséquences de celui-ci. L'absence des certificats médicaux de prolongation ne fait donc pas grief à l'employeur quant à la prise en charge ou au refus de prise en charge de l'accident déclaré. Dans ces conditions, le moyen d'inopposabilité tiré de la méconnaissance par la caisse du principe du contradictoire sera rejeté. Sur le caractère professionnel de l'accident : Aux termes de l'article L. 411-1 du Code de la sécurité sociale, est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise. L'accident du travail est donc un événement, survenu aux temps et lieu du travail, certain, identifié dans le temps, ou résultant d'une série d'événements survenus à des dates certaines, générateur d'une lésion physique ou psychologique qui s'est manifestée immédiatement ou dans un temps voisin de l'accident et médicalement constatée. Est présumée imputable au travail toute lésion survenue au temps et au lieu du travail. Un accident étant caractérisé par une lésion soudaine, il importe peu qu'il ne soit pas possible de déterminer un fait accidentel précis à l'origine de celle-ci (Civ. 2e, 9 juillet 2020, n° 19-13.852), que la cause de la lésion demeure inconnue (Civ. 2e, 24 novembre 2016, n° 15-29.365 et 15-27.215) ou encore que la cause de la lésion soudaine soit la conséquence de mouvements répétitifs (Civ. 2e, 8 novembre 2018, n° 17-26.842). La présomption d'imputabilité s'applique aux lésions initiales, ainsi qu'à leurs complications et à l'état pathologique antérieur aggravé par l'accident, mais aussi aux lésions nouvelles apparues dans les suites de l'accident dès lors qu'il existe une continuité de soins et de symptômes. Pour renverser la présomption, l'employeur doit démontrer l'existence d'une cause totalement étrangère à laquelle se rattacherait exclusivement la survenance de l'accident. La cause étrangère peut notamment résulter d'un état pathologique préexistant évoluant pour son propre compte sans lien avec la maladie ou l'accident ou d'un acte de nature à établir que le salarié s'est soustrait à l'autorité de son employeur. En revanche, la faute disciplinaire du salarié ne saurait constituer une cause totalement étrangère au travail (Civ. 2e, 11 juin 2009, n° 08-11.029), dès lors, à tout le moins, qu'elle est commise dans l'exercice de ses fonctions. Ainsi, par exemple le chauffeur routier, victime d'un accident de la circulation alors qu'il conduisait son camion en état d'ivresse, ne perd pas le bénéfice de la présomption d'imputabilité (Soc., 11 mars 2003, n° 00-21.385). Au cas d'espèce, il ressort de la déclaration d'accident du travail élaborée par l'employeur le 14/06/2021 que, le 10/06/2021, alors qu'il procédait au chargement de son véhicule chez un client, M. [Z] a ressenti un « échauffement au niveau du bras » droit. Il résulte en outre des termes de cette déclaration que l'accident est survenu sur le lieu de travail occasionnel de la victime, à 10h, et que les horaires de travail du salarié le jour des faits étaient les suivants : 7h10 - 12h17. La déclaration indique enfin que la société a eu connaissance de l'accident de M. [Z] le jour même, à 10h45, soit immédiatement après sa survenance. Elle mentionne Monsieur [H] [O] en qualité de première personne avisée. Le certificat médical initial, établi le 10/06/2021, mentionne une « rupture du tendon du long biceps droit ». Dans son questionnaire employeur, la société [5], qui ne conteste pas que M. [Z] se trouvait bien au travail le jour de l'accident, se prévaut essentiellement du non-respect des règles de chargement des marchandises de plus de 3 tonnes par son salarié. Or, il convient de rappeler que la faute de la victime ne fait pas obstacle à la reconnaissance du caractère professionnel de l'accident, en particulier lorsque, comme en l'espèce, la faute du salarié est commise dans le cadre de l'exercice de ses fonctions. La société [5] affirme encore que le témoin mentionné sur la déclaration d'accident de travail l'a contactée et l'a informée ne pas avoir vu l'accident. Aux termes son questionnaire témoin, M. [O], précisant qu'il n'avait pas été témoin direct de l'accident, a indiqué que « M. [Z] a voulu aider le chargeur malgré son interdiction de le faire. En revenant au dépôt son biceps était très atteint ». L'employeur ne conteste pas sérieusement la matérialité de l'accident. S'il fait mention d'un différend l'opposant à M. [Z] concernant le droit à un complément de salaire de ce dernier, la seule existence de ce différend n'est pas de nature à entacher de mauvaise foi toute déclaration d'accident du travail postérieure, ni à empêcher la survenance d'un accident aux temps et lieu de travail. En l'occurrence, le fait que M. [Z] ait téléphoné à son employeur pour lui faire part de son agacement, outre le fait que la preuve de la réalité de cet appel et des propos qui y ont été tenus n'est pas rapportée, est sans incidence sur le présent litige. Il est ainsi établi que, le 10/06/2021, M. [Z], agissant dans le cadre de l'ordre de mission qui lui a été donné par son employeur, a procédé au chargement de marchandises dans son camion et qu'au cours de ce chargement, il a soudainement ressenti une vive douleur au biceps droit, ce dont il a immédiatement averti son employeur et un de ses collègues, M. [O], lequel a constaté les lésions visibles de la victime dès le retour de celle-ci au dépôt, c'est-à-dire peu de temps après la survenance de l'accident. Le jour même, M. [Z] a été transporté à la clinique mutualiste de la sagesse afin qu'il soit procédé à la constatation médicale de ses lésions, en l'occurrence une rupture du tendon du long biceps droit. Le certificat médical initial lui a prescrit un arrêt de travail jusqu'au 19/06/2021. La survenance d'un fait soudain aux temps et lieu du travail générateur d'une lésion physique qui s'est manifestée immédiatement et a été médicalement constatée est donc établie, de sorte que la présomption d'imputabilité trouve à s'appliquer. Il appartient ainsi à l'employeur, pour renverser cette présomption, de démontrer que l'accident est dû à une cause totalement étrangère au travail. Il convient à ce titre d'observer que la discussion des parties relative à l'existence d'une faute du salarié tenant au non-respect des règles applicables au chargement des marchandises de plus de 3 tonnes est impropre à écarter la présomption d'imputabilité, dans la mesure où la faute, à la supposer caractérisée, est manifestement en lien étroit avec l'exercice des fonctions de la victime. A tort, la société [5] affirme que la faute de M. [Z] est « volontaire » et qu'ayant été commise malgré l'interdiction de faire qui lui était imposée par le règlement et dans un contexte conflictuel avec son employeur, elle est dénuée de tout lien avec le travail. Néanmoins, de telles allégations ne sont étayées par aucun élément de preuve objectif, la seule existence d'un litige entre la société et M. [Z] - qu'au demeurant ce dernier conteste - étant insuffisante à établir le caractère intentionnel / dolosif de la faute commise par le salarié. Ainsi, la société [5], qui ne démontre pas que l'accident litigieux est dû à une cause totalement étrangère au travail, échoue à renverser la présomption d'imputabilité. Dans ces conditions, c'est à bon droit que la caisse a décidé que l'accident dont a été victime M. [Z] le 10/06/2021 avait un caractère professionnel. La société [5] sera déboutée de son recours. Sur les demandes accessoires : Partie perdante, la société [5] sera condamnée aux dépens de l'instance, conformément aux dispositions de l'article 696 du Code de procédure civile. L'équité commande en outre que la société [5] soit condamnée à verser à la CPAM d'Ille-et-Vilaine la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du même code.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant après débats en audience publique, par jugement contradictoire, rendu en premier ressort et par mise à disposition au greffe de la juridiction, DEBOUTE la société [5] de son recours, CONDAMNE la société [5] aux dépens ; CONDAMNE la société [5] à verser à la caisse primaire d'assurance maladie d'Ille-et-Vilaine la somme de 1.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile. Ainsi jugé, mis à disposition au greffe du tribunal judiciaire de Rennes, et signé par Mme Magalie LE BIHAN, vice-présidente au pôle social, assistée de Mme Rozenn LE CHAMPION, greffière, lors du délibéré. La Greffière La Présidente

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