Sur le pourvoi formé par Monsieur René Y..., demeurant à Argentré du Plessis (Ille-et-Vilaine), l'Esnauderie,
en cassation d'un jugement rendu le 27 février 1985, par le conseil de prud'hommes de Vitré, au profit de la société anonyme PERRINEL, dont le siège est à Argentré du Plessis (Ille-et-Vilaine), route du Pertre,
défenderesse à la cassation ; LA COUR, en l'audience publique du 5 mai 1988, où étaient présents :
M. Le Gall, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, M. Bonnet, conseiller référendaire rapporteur, MM. Caillet, Valdès, Lecante, conseillers, M. X..., Mme Marie, conseillers référendaires, M. Gauthier, avocat général, M. Azas, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller référendaire Bonnet, les observations de la SCP Nicolas, Masse-Dessen et Georges, avocat de M. Y..., de la SCP Peignot et Garreau, avocat de la société anonyme Perrinel, les conclusions de M. Gauthier, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi
Sur le moyen
unique, pris de la violation des articles
L. 412-11,
L. 422-1,
L. 422-5,
L. 424-1 du Code du travail,
1315 du Code civil et
9 du nouveau Code de procédure civile :
Attendu que selon les énonciations du jugement attaqué (conseil de prud'hommes de Vitré, 27 février 1985), M. Y..., délégué du personnel et délégué syndical dans la société Périnel, s'est absenté de l'entreprise les 17 janvier, 27 février, 6 avril, 18 avril, 3 mai et 18 juin 1984 et a demandé le paiement des temps correspondants au titre des heures de délégation ; que l'employeur a contesté la régularité de cette utilisation devant le conseil de prud'hommes et demandé le remboursement des salaires afférents ; Attendu que M. Y... fait grief au jugement d'avoir accueilli cette demande, alors, d'une part, qu'en imputant la charge de la preuve au salarié, défendeur à l'action, et ce alors même que l'article
L. 424-1 du Code du travail dispose que le temps de délégation est "de plein droit" considéré comme temps de travail, le juge du fond a renversé la charge de la preuve ; alors, d'autre part, qu'en ne précisant pas l'objet des réunions intersyndicales reprochées, ni la nature des problèmes d'ordre général traités, ni en quoi consistait la "boutique de gestion" mentionnée et en ne recherchant pas si ces problèmes et la création de cette boutique pouvaient se rattacher à un problème particulier de l'entreprise, le juge du fond n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle et n'a pas légalement justifié sa décision ; alors, en outre, qu'en affirmant que l'objet du déplacement du délégué syndical doit être directement lié à un problème spécifique de l'entreprise à laquelle il appartient, le juge du fond a méconnu l'étendue des attributions des délégués syndicaux, et alors, enfin, que, s'agissant de la réunion du 3 mai 1984, dès lors qu'il était constaté que ce déplacement du salarié pouvait se rattacher à un
problème actuel de son entreprise, il n'appartenait pas au juge du fond d'en apprécier l'opportunité ;
Mais attendu
, d'une part, que le conseil de prud'hommes a exactement énoncé que si les articles
L. 412-20 et
L. 424-1 du Code du travail imposent à l'employeur l'obligation de payer à l'échéance normale le temps alloué pour l'exercice de leurs fonctions aux délégués syndicaux et aux délégués du personnel, temps considéré de plein droit comme temps de travail, ces textes ne dispensent pas les bénéficiaires de ce versement de justifier de l'utilisation faite du temps pour lequel ils ont été payés ; Attendu, d'autre part, que le conseil de prud'hommes a décidé à bon droit que le temps consacré tant par les délégués du personnel que les délégués syndicaux à leur information personnelle ne peut être inclus dans les heures de délégation que si l'information se rattache directement à une difficulté particulière à leur entreprise ; Attendu, enfin, qu'appréciant au regard de ces principes la valeur probante et la portée des éléments qui leur étaient soumis, et sans faire spécialement peser la charge de la preuve sur l'une des parties, les juges du fond ont constaté que les réunions litigieuses ne concernaient pas des problèmes spécifiques à l'entreprise ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS
:
REJETTE le pourvoi ;