CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 9 décembre 2021
Rejet non spécialement motivé
Mme TAILLANDIER-THOMAS, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10645 F
Pourvoi n° X 20-18.316
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 9 DÉCEMBRE 2021
Mme [S] [U], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° X 20-18.316 contre l'arrêt rendu le 2 juillet 2020 par la cour d'appel de Versailles (5e chambre), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société [4], société anonyme, dont le siège est [Adresse 1],
2°/ à la caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines, dont le siège est [Adresse 3],
défenderesses à la cassation.
La caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Coutou, conseiller, les observations écrites de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme [U], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines, de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de la société [4], et l'avis de M. Halem, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 21 octobre 2021 où étaient présentes Mme Taillandier-Thomas, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Coutou, conseiller rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller, et Mme Aubagna, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Le moyen de cassation du pourvoi principal et celui du pourvoi incident, annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces pourvois.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE les pourvois ;
Condamne Mme [U] aux dépens ;
En application de l'article
700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf décembre deux mille vingt et un.
MOYENS ANNEXES
à la présente décision
Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour Mme [U]
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir décidé que l'action en reconnaissance de la maladie professionnelle déclarée par une salariée (Mme [U], l'exposante) était prescrite au moment où elle avait été formée, le 12 juin 2013, et débouté en conséquence la victime de sa demande en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur (la société [4]), quant à la pathologie ainsi déclarée ;
AUX MOTIFS QUE, dès le 29 novembre 2007, le docteur [G] avait certifié que Mme [U] « présent(ait) un état anxio dépressif en relation avec des conflits au travail » ; que c'était donc au plus tard à cette date que Mme [U] avait été clairement informée du lien entre le travail et une éventuelle maladie professionnelle, au sens de l'article
L 461-1 du code de la sécurité sociale ; que bien plus, le 11 avril 2011, Mme [U] avait été placée en arrêt de travail pour dépression ; qu'elle n'avait pas repris le travail ; que les éléments dont elle faisait elle-même état attestaient d'une situation particulièrement grave puisqu'elle se serait trouvée confrontée à une volonté de se suicider (rapport d'enquête du CHSCT, lequel faisait au demeurant remonter la dégradation des conditions de travail à 2005) ; que, pourtant, ce n'était que le 12 juin 2013 que la salariée avait présenté une demande de reconnaissance de maladie professionnelle au titre d'une « dépression sévère » ; que la pathologie pour laquelle elle sollicitait cette reconnaissance puis était venue invoquer la faute inexcusable de l'employeur était la même que celle ayant fait l'objet du certificat médical du 29 novembre 2007, la même que celle pour laquelle elle avait été placée en arrêt de travail le 11 avril 2011 ; que la caisse primaire avait pour le moins manqué de vigilance dès lors qu'il résultait de ses propres constatations que Mme [U] était affectée d'une dépression depuis près de 20 ans au moment où elle avait formulé sa demande ; que, contrairement à ce que soutenait Mme [U], l'employeur était fondé à contester le caractère professionnel d'une pathologie, y compris dans le cadre d'une procédure en reconnaissance de sa faute inexcusable ; que l'indépendance des rapports entre la caisse et la salariée d'un côté, la caisse et l'employeur, de l'autre, ne faisait que renforcer cette possibilité, dès lors que la décision de la caisse restait définitivement acquise à la salariée, quand bien même elle ne serait pas opposable à l'entreprise ; que c'était donc à juste titre que celle-ci faisait valoir que, la demande en reconnaissance de maladie professionnelle étant prescrite, la décision de la caisse de prendre en charge la « dépression » dont souffrait Mme [U] au titre de la législation professionnelle était inopposable à l'employeur ; qu'en l'absence de maladie professionnelle avérée (à l'égard de l'employeur), la faute inexcusable de la société ne pouvait être invoquée ; que, dès lors, si l'action en reconnaissance de cette faute n'était pas en elle-même prescrite, Mme [U] ne pouvait qu'en être déboutée (arrêt attaqué, p. 8, 7ème et 8ème al., et p. 9, 1er à 7ème al.) ;
ALORS QUE, après obtention d'une décision admettant le caractère professionnel de sa maladie, un salarié peut exercer une action en reconnaissance de la faute inexcusable de son l'employeur, qui ne peut y faire échec en invoquant l'inopposabilité de cette décision à son égard au prétexte d'une éventuelle prescription de la demande en reconnaissance de la maladie professionnelle, distincte de l'action en reconnaissance de sa faute inexcusable ; qu'en déclarant le contraire, la cour d'appel a violé les articles
L 431-2,
L 452-1,
L 461-1 et
L 461-5 du code de la sécurité sociale. Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la caisse primaire d'assurance maladie (cpam) des Yvelines
La Caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir décidé que l'action en reconnaissance de la maladie professionnelle déclarée par Mme [S] [U] était prescrite au moment où elle a été formée, le 12 juin 2013, et d'en avoir déduit que la décision de reconnaissance de la maladie professionnelle était inopposable à la société [4],
1°) ALORS QUE le caractère tardif de la demande de reconnaissance de maladie professionnelle ne rend pas cette décision inopposable à l'employeur, qui conserve la possibilité d'en contester tant le bien-fondé que les modalités de mise en oeuvre au regard des obligations d'information et de motivation incombant à l'organisme social ; qu'en retenant que la société [4] était en droit de faire valoir que la demande de Mme [U] de reconnaissance de la maladie professionnelle était prescrite et qu'en conséquence la décision de prise en charge de la cpam lui était inopposable, la cour d'appel a violé les articles
L.431-2,
L.452-1,
L.461-1 et
L.461-5 du code de la sécurité sociale ;
2°) ALORS subsidiairement QUE l'employeur ne peut invoquer le caractère tardif de la demande de reconnaissance de la maladie professionnelle de son salarié s'il ne l'a pas fait auparavant au cours de la procédure contradictoire d'instruction à laquelle il a été régulièrement associé ; qu'en l'espèce, la cpam des Yvelines rappelait que le premier juge avait retenu à juste titre que la société [4] n'avait pas invoqué la prescription lorsqu'elle a été invitée à consulter le dossier avant sa transmission au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, de sorte qu'elle ne pouvait plus le faire à l'appui de sa demande d'inopposabilité ; qu'en omettant de se prononcer sur ce moyen, la cour d'appel a privé sa décision au regard des articles
L.431-2,
L.452-1,
L.461-1 et
L.461-5 du code de la sécurité sociale.