R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
OPP 21-021320/08/2021
DECISION
STATUANT SUR UNE OPPOSITION
LE DIRECTEUR GENERAL DE L'INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIETE INDUSTRIELLE ;
Vu le
code de la propriété intellectuelle et notamment ses articles L 411-4, L 411-5, L 712-3 à L712-5-1, L 712-7, L-713-2, L 713-3, R 411-17, R 712-13 à R 712-19, R 712-21, R 712-26 et R 718-2 à
R 718-5 ;
Vu l’arrêté du 24 avril 2008 modifié, relatif aux redevances de procédure perçues par l'Institutnational de la propriété industrielle ;
Vu la décision modifiée n° 2014-142 bis du Directeur Général de l'Institut National de la Propriété Industrielle relative aux conditions de présentation et au contenu du dossier des demandes
d'enregistrement de marques ;
Vu la décision n° 2019-158 du Directeur Général de l'Institut National de la Propriété Industriellerelative aux modalités de la procédure d’opposition à enregistrement d’une marque.
I.- FAITS ET PROCEDURE
La société INGENIORA (société par actions simplifiée) a déposé le 26 octobre 2020, lademande d’enregistrement n°4 695 134 portant sur le signe verbal INGENIORA.
Le 19 janvier 2021, la société JAGUAR LAND ROVER LIMITED (société de droit britannique)a formé opposition à l’enregistrement de cette marque sur la base de la marque verbale INGENIUM
déposée le 28 avril 2016 et enregistrée sous le n°4 268 437, sur le fondement du risque de confusion.
Siège
15 rue des Minimes - CS 50001
92677 COURBEVOIE Cedex
Téléphone : +33 (0)1 56 65 89 98
Télécopie : +33 (0)1 56 65 86 00
www.inpi.fr –
[email protected]
Établissement public national
créé par la loi n° 51-444 du 19 avril 1951
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L'opposition a été notifiée au titulaire de la demande d’enregistrement. Cette notification l’invitait à présenter des observations en réponse à l'opposition dans un délai de deux mois.
Au cours de la phase d’instruction, le déposant a présenté des observations en réponse à l’opposition.
A l’issue des échanges, la phase d’instruction a pris fin, ce dont les parties ont été informées.
II.- DECISION
Le risque de confusion s'entend du risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement ; Le risque de confusion comprend le risque d’association.
L’existence d’un risque de confusion doit être appréciée globalement en tenant compte de nombreux facteurs qui incluent la similitude des signes, la similitude des produits et services, le caractère distinctif de la marque antérieure, les éléments distinctifs et dominants des signes en litige et le public pertinent.
Sur la comparaison des produits et services
Pour apprécier la similitude entre les produits et services, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre ces produits et services. Les facteurs pertinents concernant la comparaison des produits ou services incluent, en particulier, leur nature, leur fonction, leur destination ainsi que leur caractère complémentaire.
L'opposition est formée contre les produits et services suivants : « appareils et instruments photographiques ; appareils cinématographiques ; instruments et appareils de mesure ; appareils et instruments de signalisation ; appareils et instruments de vérification (contrôle) ; appareils pour l'enregistrement du son ; appareils pour la transmission du son ; appareils pour la reproduction du son ; appareils d'enregistrement d'images ; appareils de transmission d'images ; appareils de reproduction d'images ; équipements de traitement de données ; ordinateurs ; tablettes électroniques ; ordiphones [smartphones] ; liseuses électroniques ; logiciels de jeux ; logiciels (programmes enregistrés) ; périphériques d'ordinateurs ; détecteurs ; fils électriques ; relais électriques ; cartes à mémoire ou à microprocesseur ; montres intelligentes ; batteries électriques ; bornes de recharge pour véhicules électriques ; appareils pour le diagnostic non à usage médical ; ; conception d'ordinateurs pour des tiers ; développement d'ordinateurs ; conception de logiciels ; développement de logiciels ; élaboration (conception) de logiciels ; installation de logiciels ; maintenance de logiciels ; mise à jour de logiciels ; location de logiciels ; programmation pour ordinateurs ; analyse de systèmes informatiques ; conception de systèmes informatiques ; services de conseillers en matière de conception et de développement de matériel informatique ; logiciel-service (SaaS) ; informatique en nuage ; conseils en technologie de l'information ; contrôle technique de véhicules automobiles ».
La marque antérieure a été enregistrée notamment pour les produits suivants : « Matériel informatique et logiciels, à l'exception de ceux destinés à l'administration de polices d'assurance ; appareils de télémétrie pour applications de véhicules automobiles et moteurs ; applications mobiles téléchargeables ; tableaux de commande électriques ; batteries pour véhicules ; caméras pour véhicules ; instruments de mesure automobile ; connexions électriques ; appareils pour l'enregistrement, la transmission, la reproduction du son ou des images ; voyants lumineux d'urgence ; systèmes d'avertissement d'urgence ; contrôleurs sans fil pour surveiller et contrôler à distance le fonctionnement et l'état d'autres systèmes de signalisation électriques et électroniques et dispositifs mécaniques pour véhicules et moteurs de véhicules ; appareils électriques, à savoir, stations de recharge pour véhicules électriques ; matériel informatique et logiciels pour surveiller le comportement du conducteur ; capteurs, ordinateurs et émetteurs-récepteurs sans fil assurant la connectivité au sein du véhicule, entre véhicules, avec des téléphones portables et des centres de données ; matériel
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informatique, logiciels et appareils électriques fournissant des interfaces tactiles, audio et visuelles permettant d'interagir avec les occupants d'un véhicule ; équipements de transmission et réception sans fil destinés à être utilisés avec des ordinateurs distants pour suivre, surveiller et diagnostiquer les paramètres d'entretien d'un véhicule et fournir des informations aux conducteurs ; logiciels d'applications informatiques utilisés par les conducteurs et les passagers de véhicules pour accéder à des informations et des divertissements, les visualiser et les télécharger, et interagir avec ceux-ci».
La société opposante soutient que les produits et services de la demande d'enregistrement contestée sont identiques ou similaires aux produits de la marque antérieure invoquée.
A titre liminaire, il convient de rappeler qu’est extérieur à la présente procédure, l’argument de la société déposante selon lequel « L’opposant est de droit britannique et utilise la marque « INGENIUM » pour identifier des moteurs de voitures (son coeur de métier) et qui correspond plus aux classes de marques 7 et 12 » ou que la demande d’enregistrement contestée « n’est pas qu’une série de produits mais l’identité même de notre société d’ingénierie en informatique …»utilisée « [...]dans tous nos supports de communication (factures, réseaux sociaux, prospectus, cartes de visites). En effet, d’une part, la classification internationale des produits et services, n'ayant qu'une valeur administrative sans portée juridique, est sans incidence sur l'appréciation de la similarité des produits en cause, d’autre part, dans le cadre de la procédure d’opposition, la comparaison des produits et des services doit s’effectuer uniquement entre les produits et services tels que désignés dans les libellés des marques en présence, indépendamment de leurs conditions effectives d’exploitation ou de l’activité réelle ou supposée des parties.
Les produits et services suivants : « instruments et appareils de mesure ; appareils et instruments de signalisation ; appareils et instruments de vérification (contrôle) ; appareils pour l'enregistrement du son ; appareils pour la transmission du son ; appareils pour la reproduction du son ; appareils d'enregistrement d'images ; appareils de transmission d'images ; appareils de reproduction d'images ; Équipements de traitement de données ; ordinateurs ; tablettes électroniques ; ordiphones [smartphones] ; liseuses électroniques ; logiciels de jeux ; logiciels (programmes enregistrés) ; périphériques d'ordinateurs ; fils électriques ; relais électriques ; cartes à mémoire ou à microprocesseur ; montres intelligentes ; batteries électriques ; bornes de recharge pour véhicules électriques ; appareils pour le diagnostic non à usage médical ; conception d'ordinateurs pour des tiers ; développement d'ordinateurs ; conception de logiciels ; développement de logiciels ; élaboration (conception) de logiciels ; installation de logiciels ; maintenance de logiciels ; mise à jour de logiciels ; location de logiciels ; programmation pour ordinateurs ; analyse de systèmes informatiques ; conception de systèmes informatiques ; services de conseillers en matière de conception et de développement de matériel informatique ; logiciel-service (SaaS) » de la demande d’enregistrement contestée apparaissent identiques ou similaires aux produits invoqués de la marque antérieure.
En revanche, les « appareils et instruments photographiques ; appareils cinématographiques » de la demande d’enregistrement contestée qui s’entendent de dispositifs destinés à la photographie et à la prise de vues de cinéma ne constituent pas des catégories générales auxquels appartiennent les « caméras pour véhicules » de la marque antérieure qui s’entendent d’appareils spécialement conçus et utilisés pour être intégrés à des véhicules.
Répondant à des besoins différents, ces produits ne sont pas proposés par les mêmes entreprises.
Il ne s’agit donc pas de produits identiques.
Les services d’ « informatique en nuage ; conseils en technologie de l'information » de la demande d’enregistrement contestée ne présentent pas de lien étroit et obligatoires avec les « Matériel informatique et logiciels, à l'exception de ceux destinés à l'administration de polices d'assurance ; matériel informatique et logiciels pour surveiller le comportement du conducteur ; capteurs, ordinateurs et émetteurs-récepteurs sans fil assurant la connectivité au sein du véhicule, entre véhicules, avec des téléphones portables et des centres de données ; matériel informatique, logiciels et appareils électriques fournissant des interfaces tactiles, audio et visuelles permettant d'interagir avec les occupants d'un véhicule ; logiciels d'applications informatiques utilisés par les conducteurs et les passagers de véhicules pour accéder à des informations et des divertissements, les visualiser et les
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télécharger, et interagir avec ceux-ci » de la marque antérieure invoquée, les premiers n’ayant pas nécessairement recours aux seconds, qui sont utilisés dans de nombreuses circonstances sans rapport avec les premiers.
Il ne saurait suffire pour établir un lien de complémentarité entre les services et produits précités, contrairement à ce que soutient la société opposante, que « les premiers [soient] la résultante de l’usage ou de l’existence des seconds » et que « Tous ces produits et services [soient] liés au matériel informatique, aux ordinateurs, et aux logiciels ainsi qu’à leur conception, installation, mise à jour etc », ces circonstances étant trop générales compte tenu de la généralisation de l’outil informatique dans tous les domaines de l’activité économique.
Il ne s’agit donc pas de services et produits complémentaires ni, dès lors, similaires, le public n’étant pas fondé à leur attribuer une origine commune.
Les services de « contrôle technique de véhicules automobiles » de la demande d’enregistrement contestée ne présentent pas de lien étroit et obligatoire avec les « équipements de transmission et réception sans fil destinés à être utilisés avec des ordinateurs distants pour suivre, surveiller et diagnostiquer les paramètres d'entretien d'un véhicule et fournir des informations aux conducteurs » de la marque antérieure en ce que les seconds ne sont pas nécessairement utilisés pour la réalisation des premiers.
Ces services ne sont donc pas complémentaires ni, dès lors similaires, le public n’étant pas fondé à leur attribuer une origine commune.
En conséquence, les produits et services de la demande d’enregistrement contestée, apparaissent pour partie, identiques et similaires aux produits invoqués de la marque antérieure.
Sur la comparaison des signes
La demande d’enregistrement porte sur le signe verbal INGENIORA, ci-dessous reproduit :
La marque antérieure porte sur le signe verbal INGENIUM, ci-dessous reproduit :
La société opposante soutient que les signes en cause sont similaires.
L'appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, auditive ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l'impression d'ensemble produite par les marques, en tenant compte notamment de leurs éléments distinctifs et dominants.
Il convient également de tenir compte du fait que le consommateur moyen des produits ou services en cause n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doit se fier à l’image imparfaite qu’il a gardée en mémoire.
Il résulte d’une comparaison globale et objective des signes en cause qu’ils sont tous deux composés d’un élément verbal unique.
Les signes ont en commun la séquence INGENI-.
Toutefois, la prise en compte des éléments distinctifs et dominants conduit à minimiser ces ressemblances.
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En effet, la séquence INGENI, commune aux deux signes renvoie directement, comme le relève la société déposante, à la nature ou la destination des produits et services visés à savoir des produits et services destinés ou créés par des ingénieurs ou liés à l’ingénierie, de sorte que cette séquence apparaît faiblement distinctive au regard des produits et services visés.
Il s’ensuit que l’attention du consommateur portera davantage sur les différences existant entre les signes et notamment sur leur séquence finale.
Visuellement, les éléments verbaux INGENIORA et INGENIUM se distinguent par leur séquence finale (-ORA dans le signe contesté, UM dans la marque antérieure), ce qui leur confère une physionomie nettement différente.
En outre, phonétiquement, ces dénominations se distinguent par leurs sonorités finales ([ora] dans le signe contesté, [ume] dans la marque antérieure) et par leur prononciation en quatre temps pour le signe contesté et en trois temps pour la marque antérieure.
Enfin, s’il est vrai, comme le relève la société opposante, que ces deux signes sont susceptibles de faire référence aux « mots ingénieur, ingénieux, ingénierie » en raison de leur préfixe INGENI-, cette évocation commune, dépourvue de caractère distinctif au regard des produits et services visés, ne peut pas constituer un facteur de similitude déterminant.
Ainsi, compte tenu du caractère peu distinctif de leur élément commun et de leurs différences visuelles et phonétiques, les signes en présence ne peuvent générer de risque de confusion ni d’association dans l’esprit des consommateurs concernés.
En particulier, et contrairement à ce qu’invoque la société opposante, le signe contesté ne risque pas d’être perçu comme une déclinaison de la marque antérieure.
Le signe verbal contesté INGENIORA n’est donc pas similaire à la marque verbale antérieure INGENIUM.
Sur l'appréciation globale du risque de confusion
L'appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et notamment la similitude des marques et celle des produits ou des services désignés ; Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits et services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement.
Toutefois, si un faible degré de similitude entre les signes peut être compensé par un degré élevé de similarité entre les produits et/ou services, encore faut-il qu’il existe un risque de confusion entre les signes, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.
A cet égard, la société opposante invoque l’interdépendance des critères d’appréciation du risque de confusion et la proximité des produits et services de la marque antérieure.
Toutefois, la proximité des produits et services en cause ne permet pas de compenser l’absence de similarité entre les signes en cause, telle qu’exposée ci-dessus.
En l’espèce, en raison de l’absence de similarité entre les signes, il n’existe pas globalement de risque de confusion dans l'esprit du public, et ce malgré l’identité et la similarité d’une partie des produits et services en cause.
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CONCLUSION
En conséquence, le signe verbal contesté INGENIORA peut être adopté comme marque pour désigner des produits ou services identiques et similaires, sans porter atteinte au droit antérieur de la société opposante.
PAR CES MOTIFS
DECIDE
Article unique : L'opposition est rejetée.
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